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Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Emirats arabes unis (Ratification: 1982)

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Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. 1. Cadre législatif concernant les travailleurs migrants. Dans ses commentaires précédents, la commission s’est référée au rapport adopté en mars 2016 par le comité tripartite chargé d’examiner la réclamation présentée par la Confédération syndicale internationale (CSI) alléguant l’inexécution par les Émirats arabes unis de la convention n° 29. La commission a noté que, afin de s’assurer que les travailleurs migrants ne soient pas confrontés à des situations qui les rendent plus vulnérables aux pratiques de travail forcé, le gouvernement avait adopté un certain nombre de mesures législatives, notamment le décret ministériel n° 764 de 2015 sur le contrat de travail type, et le décret ministériel n° 766 de 2015 relatif aux règles régissant la délivrance d’un nouveau permis de travail après la cessation de la relation de travail.
À ce sujet, la commission a prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de la nouvelle législation, en particulier sur les points suivants: a) frais de recrutement, substitution de contrat et questions concernant la confiscation du passeport; b) système de parrainage; c) travailleurs domestiques migrants; d) inspection du travail et sanctions effectives; et e) accès à la justice et protection des victimes.
a) Frais de recrutement, substitution de contrat et confiscation du passeport. La commission prend note de l’indication du gouvernement dans son rapport selon laquelle, suite à l’adoption du décret ministériel n° 764 de 2015 sur le contrat de travail type, les employeurs sont tenus d’adresser la lettre d’offre d’emploi, qui est une copie du contrat de travail original, au travailleur dans le pays où est adressée l’offre d’emploi, avant le départ du travailleur. La lettre d’offre doit indiquer toutes les conditions du contrat, y compris le salaire. Une fois que le contrat de travail est signé et enregistré dans la base de données du ministère des Ressources humaines et de l’Émiratisation (MOHRE), le visa d’entrée dans le pays est accordé au travailleur. Tout travailleur peut avoir accès électroniquement à une copie du contrat de travail sur le site Internet du ministère. À l’arrivée du travailleur, l’employeur et le travailleur sont invités à se rendre dans l’un des centres d’orientation que le MOHRE a mis en place, en partenariat avec le secteur privé. Ces centres ont pour but d’assurer un programme d’initiation aux travailleurs concernant le Code du travail et la législation relative à la résidence dans le pays. De plus, les deux parties peuvent signer le contrat dans ces centres.
En ce qui concerne le plan d’action concernant les travailleurs migrants, le gouvernement mentionne plusieurs mesures législatives qui ont été adoptées depuis 2015, notamment: i) l’adoption du décret ministériel n° 765 de 2015 relatif aux règles et conditions régissant la cessation de la relation de travail; ii) la signature de plusieurs protocoles d’accord avec un certain nombre de pays pour garantir que les agences de recrutement agréées des deux pays ne facturent pas de frais aux travailleurs; et iii) la fourniture d’un logement adéquat répondant à des normes strictes de sécurité et de santé au travail, suite à l’adoption du décret ministériel n° 212 de 2014. En ce qui concerne la question de la confiscation du passeport, la commission note que le gouvernement indique que le contrat de travail type pour les travailleurs du secteur privé consacre le droit des travailleurs de conserver leurs pièces d’identité. De même, en ce qui concerne les travailleurs domestiques, l’article 15, paragraphe 9, de la loi n° 10 de 2017 sur les travailleurs domestiques prévoit l’obligation de l’employeur de garantir le droit des travailleurs de conserver leurs pièces d’identité. Le gouvernement indique également que, dans les procédures intentées par des travailleurs contre des employeurs au motif de la rétention de leur passeport, la justice se prononce toujours en faveur des travailleurs, et les employeurs sont tenus de restituer leur passeport. À cet égard, le gouvernement mentionne plusieurs arrêts, dont celui rendu par la Cour de Cassation en septembre 2012, dans lequel la cour a considéré que la liberté de déplacement et de circulation constitue un droit garanti par la Constitution. Tenant compte des mesures positives susmentionnées, la commission prie le gouvernement de poursuivre ses efforts pour assurer la protection des travailleurs migrants contre les pratiques abusives liées à la substitution de contrat, à l’imposition de frais de recrutement et à la confiscation du passeport. Elle prie également le gouvernement de fournir des informations sur les résultats obtenus dans ce sens, y compris des données statistiques.
b) Système de parrainage. Se référant au décret ministériel n° 765 de 2015 sur les règles et conditions régissant la cessation de la relation de travail, la commission note que, selon le gouvernement, dans le cas d’un contrat à durée déterminée de deux ans, l’une ou l’autre partie peut mettre fin au contrat, soit d’un commun accord pendant la durée du contrat, soit unilatéralement, à condition que la partie qui met fin au contrat respecte les procédures prévues par la loi, notamment l’observation d’un délai maximum de préavis de trois mois et l’indemnisation de l’autre partie, en application du contrat, au titre des arriérés de salaire de trois mois au maximum. D’après le gouvernement, 2 932 062 contrats de travail ont été résiliés conformément au décret ministériel n° 765, au cours de la période comprise entre janvier 2016 et décembre 2018. Le gouvernement indique également que, suite à l’adoption du décret n° 766 de 2015 relatif aux règles régissant la délivrance d’un nouveau permis de travail après la cessation de la relation de travail, les anciens employeurs ne sont plus en position de menacer d’expulsion le travailleur ou de le soumettre à d’autres pratiques négatives. Pendant la période 2016-2018, le nombre de cas de transfert à un autre employeur s’est élevé à 229 971. La commission prie le gouvernement de continuer à communiquer des informations sur le nombre de cas de transferts d’emploi récents, ventilé par sexe, type de travail et type de contrat.
c) Travailleurs domestiques migrants. La commission a précédemment prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que les travailleurs domestiques migrants soient pleinement protégés contre les pratiques abusives et les conditions relevant du travail forcé, et pour s’assurer que le projet de loi réglementant les conditions de travail des travailleurs domestiques migrants serait adopté dans un proche avenir.
La commission note avec satisfaction l’adoption de la loi n° 10 de 2017 sur les travailleurs domestiques ainsi que du contrat type de travail domestique et ses annexes. Elle note que le contrat de travail énonce les droits et les obligations du travailleur et de l’employeur, y compris le montant du salaire de base, les conditions de logement et les périodes de repos journalier et hebdomadaire (articles 15 à 18). En ce qui concerne la résiliation du contrat de travail, l’article 23 de la loi n° 10 prévoit la possibilité pour l’employeur et le travailleur de résilier unilatéralement le contrat si l’une des parties ne remplit pas ses obligations envers l’autre. Dans tous les cas de résiliation du contrat, le MOHRE décide d’accorder ou non un nouveau permis de travail au travailleur, conformément à la réglementation en vigueur aux Émirats arabes unis (article 23, paragraphe 4). Par ailleurs, le nouvel employeur est tenu de payer les frais de transfert du parrainage (Kafala) et du nouveau permis de séjour au travailleur. L’employeur doit aussi informer le MOHRE si le travailleur n’accomplit pas ses tâches ou s’absente sans raison valable. De même, le travailleur doit notifier le MOHRE lorsqu’il quitte le lieu de travail sans en avertir l’employeur. En ce qui concerne la résolution des différends, l’article 21 de la loi dispose qu’en cas de différend entre l’employeur et le travailleur, le MOHRE statue sur le différend. Les travailleurs domestiques migrants peuvent également s’adresser aux centres Tad beer (services de soutien créés à la suite de l’adoption du décret ministériel n° 819 de 2017) pour obtenir une aide juridique. Ces centres ont pour vocation de fournir tous les services concernant les travailleurs domestiques migrants à leur arrivée dans le pays, tels que par exemple les examens médicaux, l’assurance maladie, les pièces d’identité et la validation du visa de séjour. Le gouvernement indique aussi que le MOHRE a récemment émis la carte bancaire Ghanayem pour les travailleurs domestiques. Il s’agit d’une carte à puce d’identité bancaire polyvalente, qui sert notamment de porte-monnaie électronique. Elle permet aussi d’accéder à un nouveau système automatisé de contrôle des transactions de transfert, afin de garantir la protection des salaires des travailleurs domestiques et de virer rapidement les salaires tout en assurant la confidentialité des données du client et de celles du MOHRE. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application dans la pratique de la loi n° 10 de 2017 sur les travailleurs domestiques, y compris des statistiques sur le nombre de transferts d’emploi de travailleurs domestiques migrants qui ont eu lieu depuis l’entrée en vigueur de la loi.
d) Inspection du travail et sanctions effectives. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle l’inspection du travail a constaté 1 146 infractions, dont 1 144 cas de retard de paiement des salaires qui touchaient 80 633 travailleurs migrants. Les deux cas restants portaient sur des retenues salariales illicites et sur l’absence de calcul de la rémunération des heures supplémentaires. Dans tous ces cas, la justice a imposé des amendes. La commission prend note des décisions de justice n° 1 de 2016, n° 45 de 2017 et n° 49 de 2017 jointes au rapport du gouvernement qui témoignent de la lourdeur des amendes imposées. La commission note en outre que les articles 19 et 20 de la loi n° 10 de 2017 sur les travailleurs domestiques permettent aux inspecteurs du travail de se rendre sur le lieu de résidence du travailleur domestique, en cas de plainte de ce dernier ou en présence d’indices crédibles de violation des dispositions de la loi. La commission prie le gouvernement d’indiquer si des inspections ont été effectuées en vertu des articles 19 et 20 de la loi n° 10 sur les travailleurs domestiques, et d’indiquer aussi les cas de violations qui ont été constatés et enregistrés lors des inspections du travail, et le cas échéant les sanctions.
e) Accès à la justice et protection des victimes. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le MOHRE a institué en 2018 les centres de réconciliation Tawa-Fouq pour résoudre les différends du travail qui concernent des travailleurs migrants. Ces centres jouent un rôle préliminaire de médiation pour résoudre les différends à l’amiable. Ils formulent des recommandations qu’ils soumettent au MOHRE. Ce dernier est autorisé à prendre la décision finale, c’est-à-dire demander un règlement du différend à l’amiable ou saisir l’autorité judiciaire. À cet égard, les services de la justice ont établi un formulaire type sur les modalités selon lesquelles les travailleurs peuvent saisir la justice, notamment au moyen d’un «dossier intégré». Ce dossier est soumis par voie électronique aux services de la justice. Le gouvernement se réfère également au décret ministériel n° 749 de 2018 sur le règlement des différends collectifs du travail lorsque plus de 100 travailleurs sont parties au différend. Un comité de conciliation doit régler le différend à l’amiable dans un délai de dix jours. Si le différend ne peut pas être réglé, il est porté devant la commission d’arbitrage qui doit examiner le différend dans un délai de 30 jours.
En ce qui concerne la protection et l’assistance fournies aux travailleurs migrants, la commission prend note des informations du gouvernement sur les mesures prises pour protéger les victimes de la traite des personnes, mesures qui s’appliquent aussi aux travailleurs migrants. La commission prie le gouvernement de continuer à prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs migrants puissent s’adresser aux autorités compétentes et accéder aux mécanismes judiciaires, sans crainte de représailles. Elle le prie aussi de communiquer des statistiques sur le nombre de travailleurs migrants, y compris les travailleurs domestiques migrants, qui ont eu recours à l’assistance juridique des centres de réconciliation Tawa-Fouq, et d’indiquer quelle a été l’issue de ces différends. La commission prie le gouvernement d’indiquer si l’assistance juridique fournie dans les centres de réconciliation est disponible dans la langue parlée par le travailleur migrant. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les procédures judiciaires engagées et sur le nombre de jugements rendus à ce sujet.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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