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Demande directe (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Italie (Ratification: 1934)

Autre commentaire sur C029

Observation
  1. 2023

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Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25 de la convention. Traite des personnes. 1. Cadre juridique et sanctions. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que le décret-loi no 24 de mars 2014 visant à prévenir et combattre la traite des êtres humains et à protéger les victimes a modifié les articles 600 (asservissement) et 601 (traite des personnes) du Code pénal, renforcé le dispositif répressif afin que les auteurs de la traite des personnes sous toutes ses formes fassent l’objet de poursuites pénales, et a inclus une définition des actes d’asservissement et de traite qui correspondait à celle de la directive 2011/36/EU. La nouvelle disposition de l’article 601 porte sur le recrutement, le transport, le transfert et l’accueil de personnes pour induire ou forcer ces personnes à effectuer un travail, à fournir des services sexuels et à mendier, ou à réaliser des activités illicites comportant une exploitation, ainsi que sur l’attribution à ces fins d’une autorité à une autre personne.
La commission prend note des statistiques fournies par le gouvernement dans son rapport sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées du Code pénal. A cet égard, elle note que, selon les données de la Direction nationale antimafia, au cours de la période allant de juillet 2016 à juin 2017, 238 affaires ont fait l’objet d’enquêtes en vertu de l’article 600 du Code pénal, concernant 164 victimes, et 266 affaires ont fait l’objet d’enquêtes en vertu de l’article 601, concernant 294 victimes. La commission note en outre que, selon des données de 2017 émanant du ministère de la Justice, 171 affaires ont été enregistrées en vertu de l’article 600 du Code pénal contre 412 personnes, dont 120 ont été poursuivies. En vertu de l’article 601, 168 affaires ont été enregistrées qui impliquaient 482 personnes, dont 73 ont été poursuivies. En 2017, les juridictions ont condamné 13 personnes en vertu de l’article 600 et 8 en vertu de l’article 601. A cet égard, la commission note que, dans ses observations finales du 24 juillet 2017, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes s’est déclaré préoccupé par le faible taux de poursuites et de condamnations pour des faits de traite (CEDAW/C/ITA/CO/7, paragr. 29 b)). La commission prie par conséquent le gouvernement de redoubler d’efforts pour s’assurer que toutes les personnes impliquées dans la traite de personnes font l’objet d’enquêtes et de poursuites, et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives sont appliquées dans la pratique. Elle le prie également de continuer à fournir des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susmentionnées du Code pénal, tel que modifié, en particulier le nombre de poursuites engagées, de condamnations prononcées et de sanctions spécifiques imposées.
2. Programme d’action. La commission prend note des informations du gouvernement selon lesquelles il a adopté un Plan d’action national contre la traite et l’exploitation grave des personnes 2016-2018. Le plan d’action fixe pour objectifs l’établissement de stratégies pluriannuelles et l’engagement d’activités pour: i) adopter des mesures préventives, accroître la connaissance du phénomène par des initiatives ciblées dans les pays d’origine et le lancement de campagnes de communication et de sensibilisation; ii) améliorer les mesures de régularisation et assurer une réaction efficace et coordonnée; iii) élaborer des mécanismes appropriés d’identification rapide des victimes de la traite, en élaborant des directives spécifiques; iv) mettre sur pied un mécanisme national d’orientation; v) actualiser et améliorer les systèmes existants; vi) offrir une formation multi-agences; et vii) adopter des directives spécifiques pour informer les victimes quant à la possibilité qu’elles ont de demander gratuitement un titre de séjour et une aide judiciaire et de bénéficier gratuitement de soins médicaux et d’une protection des témoins. Le plan d’action prévoit également des initiatives de coopération internationale pour renforcer et promouvoir la collaboration de l’Italie avec les organisations internationales qui s’occupent de la lutte contre la traite des personnes, ainsi qu’avec les pays européens et non européens concernés. En outre, une unité de contrôle, composée de représentants des ministères concernés et de la Direction nationale antimafia, de la Police nationale et des autorités régionales et locales, a été créée. Cette unité fait office d’organe de coordination en ce qui concerne la planification, la mise en œuvre et les priorités de financement des initiatives de lutte contre la traite et l’exploitation des personnes, ainsi que la coordination des groupes de travail interinstitutionnels chargés de l’application et du suivi du plan. La commission note en outre que le plan d’action prévoit également un programme unifié de régularisation, d’assistance et d’insertion sociale des victimes de la traite, assorti de dispositions concernant l’accès à un logement, à de la nourriture et à des soins de santé appropriés ainsi qu’une aide à la réinsertion. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre du plan d’action, ainsi que sur les résultats obtenus.
3. Protection, assistance et réinsertion des victimes de la traite des personnes. Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement sur les mesures prises pour protéger et aider les victimes de la traite. A cet égard, elle note que:
  • -Une ligne téléphonique gratuite d’assistance contre la traite a été mise en place; elle est accessible 24 heures sur 24 et met à la disposition des victimes de la traite et de l’exploitation un personnel multilingue spécialisé et des informations sur la législation et les services dont elles peuvent bénéficier. Sur demande, elle les oriente vers les services d’aide sociale. En 2017, cette hotline a reçu un total de 4 033 appels, soit une augmentation de 35 pour cent par rapport aux appels reçus en 2016.
  • -La Direction nationale antimafia et antiterrorisme (DNA), qui joue un rôle de premier plan dans la lutte contre la traite des personnes en établissant une collaboration avec les autorités internationales impliquées dans la lutte contre la criminalité transfrontalière, a signé en 2016 trois accords bilatéraux avec le gouvernement du Nigéria sur l’extradition, l’assistance juridique et le transfert de détenus; en 2017, un accord de coopération judiciaire avec le Royaume-Uni et le Nigéria; et en 2018 un accord avec l’ambassade des Etats Unis sur des méthodes novatrices visant à intensifier les poursuites en matière de traite des personnes.
  • -Avec l’aide de la Commission nationale pour le droit d’asile et du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, la DNA a établi les principes directeurs pour l’identification des victimes de la traite parmi les personnes en quête de protection internationale.
  • -Des centres d’accueil, d’assistance et d’identification ont été créés dans un certain nombre de lieux stratégiques sur le territoire national, dans ce qu’il est convenu d’appeler les «points chauds» (actuellement, quatre endroits sont identifiés comme des points chauds: Lampedusa, Trapani, Pozzallo et Taranto), et ces centres d’accueil appliquent les procédures opérationnelles permanentes du ministère de l’Intérieur, qui garantissent aux victimes de la traite le meilleur niveau de soins et d’assistance.
  • -Un projet intitulé «Lutte contre la traite des êtres humains le long des routes migratoires – Simulation et formation multi-agences pour le contexte italien» a été élaboré à l’intention des enquêteurs de la police d’Etat de diverses régions afin de promouvoir un modèle préventif fondé sur une approche multi-agences visant à préserver les normes internationales en matière de droits humains.
La commission prend note en outre de l’indication du gouvernement selon laquelle il a doublé le financement consacré à la lutte contre la traite des personnes, avec un montant total de 22,5 millions d’euros alloué en 2017 à 21 projets. Le gouvernement indique en outre qu’à ce jour 25 000 victimes de la traite ont été libérées. De plus, selon le Système de collecte d’informations sur la traite des personnes (SIRIT), en 2017, 1 865 victimes de la traite, dont 1 587 femmes, 262 hommes et 16 transgenres, ont reçu une aide et une assistance dans le cadre de divers projets. Prenant dûment note des mesures prises par le gouvernement, la commission l’encourage à poursuivre ses efforts pour fournir protection et assistance aux victimes de la traite. Elle le prie de continuer à fournir des informations sur les mesures prises à cet égard, notamment sur le nombre de personnes bénéficiant de ces services.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1. Exploitation des travailleurs étrangers en situation irrégulière. Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission prend note des informations du gouvernement selon lesquelles il a adopté la loi no 199 du 29 octobre 2017 sur les dispositions visant à lutter contre le travail non déclaré, l’exploitation au travail dans l’agriculture et le réalignement des salaires dans le secteur agricole, qui vise à renforcer les procédures de lutte contre le phénomène des chefs de bandes dit Caporalato (emploi illégal des travailleurs agricoles à bas salaires). Le gouvernement indique que les modifications et dispositions suivantes ont été introduites par la loi no 199: i) modification de l’article 603bis du Code pénal en alourdissant la peine prévue pour l’infraction d’intermédiation illicite et d’exploitation au travail; ii) élargissement du champ subjectif de la conduite pouvant être passible de sanctions en incluant l’intermédiaire aussi bien que l’employeur; iii) prise en considération en tant que circonstances aggravantes du fait de recourir à la violence ou à la menace pour des infractions d’intermédiation illicite et d’exploitation au travail; iv) introduction d’une peine obligatoire de confiscation des objets servant ou destinés à servir à la perpétration du délit ou des objets constituant son prix, produit ou profit.
La commission note également les informations du gouvernement selon lesquelles des inspections efficaces, ciblant les infractions susmentionnées, sont effectuées sur la base du document de planification des activités d’inspection de 2017, qui prévoit des inspections spécifiques dans le secteur agricole par des équipes spéciales interprovinciales dans des zones présélectionnées où le travail saisonnier est prédominant. Le gouvernement déclare que les activités d’inspection sont planifiées et exécutées de manière à mettre en œuvre deux protocoles d’accord: le Protocole expérimental contre les chefs de bandes et l’exploitation du travail dans l’agriculture «Respecter la légalité – S’échapper du ghetto», signé en mai 2016 entre le ministère du Travail et de la Politique sociale, le ministère de l’Intérieur et le ministère des Politiques agricoles, alimentaires et forestières, et certaines régions du sud, divers ministères, des organisations syndicales et patronales agricoles et des organisations bénévoles pour créer des unités permanentes de coordination destinées à renforcer les inspections; et le Protocole de coopération en matière de lutte contre les chefs de bandes et le travail non déclaré et illicite dans l’agriculture, signé en juillet 2016 par le ministère du Travail et de la Politique sociale, le ministère des Politiques agricoles, alimentaires et forestières et l’Inspection nationale du travail pour mettre au point des méthodes d’inspection et des activités communes afin de lutter efficacement contre le phénomène des chefs de bandes et l’exploitation du travail dans l’agriculture. La commission prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle ces activités d’inspection ont donné d’importants résultats, ainsi que des statistiques fournies par le gouvernement à cet égard. En 2017, 7 265 inspections ont été menées dans l’agriculture et au total 5 222 travailleurs irréguliers ont été identifiés, dont 3 549 non déclarés et 203 ressortissants de pays tiers sans permis de séjour. Dans 306 cas, une suspension d’activité a été imposée. En outre, en 2017, à la suite d’opérations de la police, 94 personnes impliquées dans des délits de chefs de bandes en vertu de l’article 603bis du Code pénal ont été déférées aux autorités judiciaires, dont 31 ont été arrêtées; en 2018, les chiffres correspondants ont été de 59 personnes et 9 arrestations. Le rapport du gouvernement contient en outre des informations détaillées sur les activités d’inspection spécifiques axées sur le travail non déclaré et illicite menées par l’Inspection nationale du travail. Au total, en 2017, 1 227 immigrants en situation irrégulière de pays tiers ont été découverts principalement dans les secteurs industriel, manufacturier, agricole et de la construction; ces inspections ont entraîné la suspension de 6 939 activités.
Enfin, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement sur les divers projets et initiatives lancés et mis en œuvre pour lutter contre les chefs de bandes et l’exploitation au travail des migrants dans l’agriculture. La commission note toutefois que, dans ses observations finales de mai 2017, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies s’est déclaré préoccupé par l’exploitation des travailleurs migrants, en particulier ceux en situation irrégulière et dans le secteur agricole, par le non-respect systématique des règles de sécurité au travail, par des conditions de vie minimales et par le manque d’inspections du travail efficaces (CCPR/C/ITA/CO/6, paragr. 28c)). Tout en reconnaissant la situation difficile dans laquelle se trouve le pays à la suite de l’entrée d’un grand nombre de migrants, la commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour empêcher que les migrants étrangers ne soient victimes de situations d’exploitation relevant du travail forcé, quel que soit leur statut juridique, et pour s’assurer qu’ils peuvent faire valoir leurs droits, notamment en se mettant en rapport avec les autorités compétentes. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’application pratique de l’article 603bis du Code pénal et sur les mesures prises pour offrir une assistance aux victimes d’exploitation en vertu de cette disposition.
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