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Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - République de Corée (Ratification: 1998)

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Article 1 de la convention. Discrimination fondée sur l’opinion politique et conditions requises pour obtenir un emploi déterminé. Enseignants. La commission rappelle ses précédents commentaires dans lesquels elle a noté avec préoccupation l’interdiction faite aux enseignants d’écoles maternelles, primaires et secondaires d’exercer des activités politiques. Elle rappelle également que, en juin 2015, la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail a prié instamment le gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur la question d’une éventuelle discrimination à l’égard des enseignants fondée sur leur opinion politique, de manière à permettre une évaluation fiable de la conformité de la législation et de la pratique avec la convention.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement rappelle l’exigence constitutionnelle de neutralité politique de l’éducation et déclare que toutes les activités des enseignants des écoles primaires et secondaires, qu’elles se déroulent sur le lieu de travail ou non, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’école, font potentiellement partie de l’éducation, dans la mesure où les enseignants ont une influence importante sur le développement du caractère et des habitudes fondamentales des élèves des écoles primaires et secondaires, ces derniers étant réceptifs à ce qu’ils apprennent. Selon le gouvernement, il n’est donc pas approprié de séparer «les activités en dehors de la classe et de l’école et n’ayant pas de lien avec l’enseignement des autres activités des enseignants» et rappelle que cette position a été confirmée par la Cour constitutionnelle coréenne dans son arrêt du 25 mars 2004. Le gouvernement en conclut donc que la loi actuelle n’impose pas de restrictions excessives aux enseignants, puisqu’ils peuvent néanmoins: i) exprimer leur opinion politique, si celle-ci ne reflète pas l’opinion politique de syndicats et d’autres groupes auxquels appartiennent les enseignants, mais reflète une opinion «personnelle»; et ii) exercer des activités entrant dans le cadre de leurs activités «personnelles», pour autant que celles-ci n’entrent pas dans le champ des activités interdites par la loi sur les fonctionnaires d’Etat. La commission observe à cet égard que l’article 65 de la loi sur les fonctionnaires d’Etat ne permet pas à ces fonctionnaires de «participer à l’organisation de tout parti politique ou autre organisation politique ou de s’y affilier» ni de «se livrer aux activités suivantes pour soutenir un parti politique ou une personne donnée lors d’une élection: solliciter une personne pour qu’elle vote ou non, tenter d’initier, superviser ou réclamer une campagne de signatures; déposer ou faire en sorte qu’une autre personne dépose des documents ou des livres dans des lieux publics, etc.; recueillir ou faire en sorte qu’une autre personne recueille des contributions; utiliser ou faire en sorte qu’une autre personne utilise des fonds public; demander à une autre personne d’adhérer ou de ne pas adhérer à un parti politique ou à toute autre organisation politique». En outre, «aucun fonctionnaire ne peut demander à un autre de se livrer à des activités qui iraient à l’encontre des paragraphes (1) et (2) [de l’article 65] ni lui promettre tout avantage ou désavantage en guise de récompense ou de représailles pour toute activité politique (art. 65(3))».
La commission souhaiterait rappeler que la protection contre la discrimination fondée sur l’opinion politique suppose une protection à l’égard d’activités consistant à exprimer ou manifester une opposition aux principes et aux opinions politiques établis. Elle englobe également la discrimination fondée sur l’affiliation à un parti politique (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 805). La commission rappelle également que, bien que, dans certaines circonstances, les restrictions relatives à l’opinion politique peuvent constituer une condition exigée de bonne foi pour certains postes («une condition exigée pour l’emploi»), il est essentiel que ces restrictions ne dépassent pas certaines limites, au risque d’enfreindre les dispositions de la convention qui préconisent la mise en œuvre d’une politique tendant à éliminer la discrimination fondée sur l’opinion politique, notamment en ce qui concerne l’emploi dans le secteur public (voir étude d’ensemble de 2012, paragr. 831). Par conséquent, la condition exigée pour occuper un emploi déterminé doit être interprétée de manière restrictive afin d’éviter de limiter indûment la protection que la convention vise à assurer. Dans le présent cas, la commission ne peut que réitérer que, dans la mesure où les activités politiques se déroulent en dehors de l’établissement scolaire et n’ont pas de lien avec l’enseignement, une interdiction générale de toutes activités politiques ne constitue pas une condition exigée au sens de l’article 1, paragraphe 2, de la convention. Les mesures disciplinaires prises à l’encontre des enseignants qui se livrent à de telles activités constituent donc une discrimination fondée sur l’opinion politique, en violation de la convention. La commission prie donc instamment une fois encore le gouvernement de prendre des mesures immédiates pour assurer que les enseignants d’écoles maternelles, primaires et secondaires jouissent, comme le prévoit la convention, d’une protection contre la discrimination fondée sur l’opinion politique en ce qui concerne les activités qu’ils mènent en dehors de la classe et de l’école et n’ayant pas de lien avec l’enseignement, ainsi que des mesures permettant de s’assurer que les enseignants ne font pas l’objet de mesures disciplinaires pour de tels motifs.
Article 1, paragraphe 2. Exigences inhérentes à l’emploi. Opinion politique et fonctionnaires. La commission rappelle qu’elle a demandé au gouvernement d’indiquer les raisons pour lesquelles l’interdiction faite aux fonctionnaires de s’affilier à un parti politique et de participer à des activités politiques (art. 65(1)) de la loi sur les fonctionnaires d’Etat) est liée aux conditions exigées pour l’emploi. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle cette interdiction vise à garantir la neutralité des fonctionnaires, à les protéger contre toute intervention déloyale des pouvoirs politiques et à contribuer à renforcer l’intérêt public, grâce à la cohérence et à la permanence de l’administration. Outre les commentaires susmentionnés, la commission tient à souligner que l’opinion politique ne peut être une condition préalable justifiée par une exigence inhérente à un emploi déterminé que si cette restriction s’applique à un éventail restreint d’emploi et non à l’ensemble du secteur public. La commission rappelle aussi que la notion d’«emploi déterminé» désigne un emploi, une fonction ou une tâche spécifique et définissable; toute restriction imposée dans le contexte de cette exception doit être justifiée par les caractéristiques de l’emploi concerné et proportionnelle à ses conditions exigées, et doit être interprétée de manière restrictive. La commission considère que, en aucun cas, un même critère ne doit être exigé pour l’ensemble d’un secteur d’activité ou d’une profession, en particulier dans la fonction publique (voir étude d’ensemble de 2012, paragr. 828). Par conséquent, la commission demande au gouvernement d’envisager de limiter l’interdiction des activités politiques à certains postes et, par conséquent, d’envisager la possibilité d’adopter une liste d’emplois de la fonction publique pour lesquels l’opinion politique constituera une exigence inhérente à ces emplois. Dans l’intervalle, elle demande au gouvernement de fournir des informations sur l’application de l’article 65(1) de la loi sur les fonctionnaires d’Etat dans la pratique, suite à la décision de la Cour constitutionnelle, y compris sur toute mesure disciplinaire qui aurait été prise.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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