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Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Ethiopie (Ratification: 1999)

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Article 1 a) de la convention. Sanctions pénales impliquant un travail obligatoire en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont exprimé certaines opinions politiques ou une opposition idéologique. Depuis plusieurs années, la commission se réfère aux articles suivants du Code pénal en vertu desquels des sanctions pénales impliquant une obligation de travail pénitentiaire peuvent être imposées, en application de l’article 111(1) du code, dans des circonstances relevant de l’article 1 a) de la convention:
  • -articles 482(2) et 484(2): punition des meneurs, organisateurs ou instigateurs de sociétés, réunions et assemblées interdites;
  • -article 486(a): incitation du public à adopter certains comportements en raison de fausses rumeurs;
  • -article 487(a): faire, prononcer, diffuser ou proférer des remarques séditieuses ou menaçantes ou exposer des images de nature séditieuse ou menaçante dans tout lieu de réunion public (manifestations séditieuses).
La commission s’est également référée à la définition du terrorisme figurant dans la proclamation no 652/2009 contre le terrorisme dont l’article 6 dispose que quiconque publie ou organise la publication d’une déclaration susceptible d’être comprise par tout ou partie du public auquel elle s’adresse comme une incitation directe ou indirecte à commettre ou à préparer un acte de terrorisme encourt une peine de réclusion criminelle de dix à vingt ans. A cet égard, la commission a noté que, en 2010, le Groupe de travail des Nations Unies sur l’examen périodique universel s’est déclaré préoccupé par la proclamation contre le terrorisme qui, compte tenu de sa définition particulièrement large du terrorisme, a entraîné des restrictions abusives aux droits de la presse. La commission a également noté que des journalistes et des personnalités politiques de l’opposition ont été condamnés à des peines comprises entre onze années d’emprisonnement et l’emprisonnement à vie, sur la base de cette proclamation, et que des charges similaires ont été retenues contre d’autres personnes devant comparaître devant les tribunaux. La commission a donc instamment prié le gouvernement de prendre des mesures pour limiter le champ d’application de cette proclamation et les dispositions précitées du Code pénal afin de garantir qu’aucune sanction comportant un travail obligatoire ne puisse être imposée à des personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi.
La commission note que, dans son rapport, le gouvernement affirme de nouveau que l’expression pacifique d’opinions ou d’une opposition à l’ordre politique, social ou économique établi est un droit consacré par la Constitution et que nul n’est contraint d’effectuer un travail forcé ou obligatoire en raison de tels actes. Elle note également qu’une mission du Bureau international du Travail s’est rendue en Ethiopie en septembre 2016 dans le cadre de la suite donnée à la mission de mars 2015 relative aux lacunes de la mise en œuvre des conventions relatives au travail forcé. D’après le rapport de la mission, des discussions ont eu lieu avec les parties prenantes concernées sur certaines dispositions du Code pénal qui prévoient un travail pénitentiaire obligatoire, en vue d’en garantir la conformité avec la convention.
La commission note en outre que, dans un communiqué de presse de 2016, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a observé avec une profonde préoccupation la détérioration de la situation des droits de l’homme en Ethiopie, en particulier lors des récents troubles et violence dans la région d’Oromia. La commission a également observé que la Commission africaine a adopté une résolution dans laquelle elle s’est déclarée préoccupée par l’utilisation d’une force excessive et disproportionnée pour disperser les manifestants, force qui a entraîné de nombreux morts et blessés parmi les manifestants, ainsi que l’arrestation arbitraire et le placement en détention de bon nombre d’autres personnes. Suite aux manifestations qui ont débuté en novembre 2015, la Commission africaine s’est également déclarée préoccupée par les allégations relatives à l’arrestation arbitraire et au placement en détention de membres de partis de l’opposition et de défenseurs des droits de l’homme (ACHPR/Res.356(LIX) 2016). De plus, la commission observe que la Commission africaine est préoccupée par les restrictions relatives à la liberté de mouvement et de réunion, à l’accès aux médias et au réseau Internet, ainsi que par l’arrestation et la détention arbitraire de plusieurs personnes suite à la déclaration de l’état d’urgence.
La commission ne peut qu’exprimer sa profonde préoccupation au sujet de la détention de membres de partis de l’opposition et de défenseurs des droits de l’homme, ainsi que des poursuites engagées à leur encontre, et rappelle que la restriction imposée aux libertés et droits fondamentaux, dont la liberté d’expression, peut avoir une incidence sur l’application de la convention si elle est assortie de sanctions comportant un travail obligatoire. A cet égard, se référant à son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, la commission souligne que, parmi les activités qui ne doivent pas faire l’objet d’une sanction comportant du travail obligatoire, conformément à l’article 1 a) de la convention, figurent celles qui s’exercent dans le cadre de la liberté d’exprimer des opinions politiques ou idéologiques (oralement, par voie de presse ou par d’autres moyens de communication), ainsi que de divers autres droits généralement reconnus, tels que les droits d’association et de réunion, droits par lesquels les citoyens cherchent à faire connaître et accepter leurs opinions, et qui peuvent se trouver affectés par des mesures de coercition politique (paragr. 302). La commission prie donc de nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de garantir qu’aucune sanction comportant du travail obligatoire ne puisse être imposée à ceux qui expriment pacifiquement une opinion politique contraire à l’ordre politique, social ou économique établi, par exemple en limitant clairement l’application de la proclamation sur la lutte contre le terrorisme et des articles 482(2), 484(2), 486(a) et 487(a) du Code pénal aux situations liées à l’utilisation de la violence ou à l’incitation à la violence, ou en abrogeant les sanctions comportant du travail obligatoire. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard et sur l’application, dans la pratique, des articles précités du Code pénal et de la proclamation contre le terrorisme, et notamment de transmettre copie de toute décision de justice précisant les peines imposées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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