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Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Venezuela (République bolivarienne du) (Ratification: 1971)

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La commission prend note des observations de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV), de l’Union nationale des travailleurs du Venezuela (UNETE), de la Confédération générale du travail (CGT) et de la Confédération des syndicats autonomes (CODESA), reçues en 2015, 2016 et 2017, qui ont trait, comme précédemment, à des allégations de discrimination fondée sur l’opinion politique. La commission prend note des observations de la Centrale des travailleurs Alliance syndicale indépendante (CTASI), reçues le 31 août 2017. La commission prend également note de la réponse du gouvernement à ces observations.

Suivi des décisions du Conseil d’administration (plainte en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT)

La commission rappelle qu’elle avait pris note dans ses commentaires précédents de la plainte déposée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT par plusieurs délégués des travailleurs à la Conférence internationale du Travail de 2016, relative au non-respect par la République bolivarienne du Venezuela de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, de la convention (no 95) sur la protection du salaire, 1949, et de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, plainte qui a été déclarée recevable par le Conseil d’administration à sa 328e session (octobre-novembre 2016). En ce qui concerne la convention no 111, les allégations portent sur des actes de discrimination fondée sur l’opinion politique, tels que l’élaboration de listes d’opposants, comme la «liste Tascón», sur laquelle figuraient les noms des personnes ayant signé l’appel de 2004 à un référendum visant à révoquer le mandat du Président de la République de l’époque. Ces allégations portent aussi sur les déclarations faites plus récemment à propos des personnes ayant soutenu l’appel de 2016 à un référendum visant à révoquer le mandat de l’actuel Président de la République et sur la politisation et l’idéologisation des postes et du climat dans la fonction publique. Dans diverses communications, le gouvernement a contesté la recevabilité de la plainte et, en ce qui concerne la convention no 111, il a déclaré que, dans le pays, le principe de non-discrimination est promu sous toutes ses formes et reconnu par l’ordre juridique national, et qu’aucun travailleur ne peut être licencié sans juste cause, pour des motifs politiques. En outre, il a rejeté avec force les accusations de supposées politisation et idéologisation des postes et du climat dans la fonction publique. A sa 329e session (mars 2017), le Conseil d’administration a décidé: a) de soumettre l’ensemble des allégations figurant dans la plainte concernant la convention no 87 à l’examen du Comité de la liberté syndicale; b) de soumettre ces allégations à la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR), dans la mesure où celle-ci n’a pas examiné récemment tous les aspects de la plainte relative aux conventions nos 95 et 111, en vue d’un examen complet; et c) de ne pas renvoyer la plainte à une commission d’enquête et, par conséquent, de clore la procédure engagée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT.
Article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Discrimination fondée sur l’opinion politique. Depuis de nombreuses années (depuis 2007), la commission se réfère aux actes de discrimination fondée sur des motifs politiques contre des employés de l’administration publique centrale ou décentralisée et des entreprises d’Etat, et enfin contre des membres des forces armées, actes qui revêtent la forme de menaces, de harcèlement, de mutations, d’une détérioration des conditions de travail et de licenciements massifs. La commission avait pris note de plaintes alléguant des licenciements massifs de personnes qui n’appartenaient pas au parti au pouvoir, qui ne participaient pas aux manifestations en soutien au gouvernement ou qui s’exprimaient contre celui-ci, et d’une discrimination persistante à l’égard de travailleurs figurant sur la «liste Tascón». Il était question notamment du licenciement de 124 travailleurs de la Banque bicentenaire, de 40 travailleurs de la «Fundación Nacional del Niño Simón» et de quatre travailleurs du Service national intégré de l’administration douanière et des accises (SENIAT), parce qu’ils s’étaient prononcés en faveur de la consultation populaire visant à la tenue d’un référendum en vue de révoquer le mandat du Président de la République. La commission note que, dans leurs récentes communications, la CTV, l’UNETE, la CGT, la CTASI et la CODESA allèguent que la discrimination pour motifs politiques, loin de s’atténuer, va s’aggravant, et elles dénoncent des intimidations et des sanctions frappant des travailleurs qui ont participé ou se sont prononcés en faveur de la consultation populaire visant à la tenue d’un référendum en vue de révoquer le mandat du Président de la République en 2016. La commission note également que ces allégations, en particulier celles qui ont trait à des menaces proférées par de hauts fonctionnaires du gouvernement et des dirigeants du parti officiel contre les personnes qui ont voté pour les candidats de l’opposition aux élections parlementaires de décembre 2015 et en faveur du référendum en vue de révoquer le mandat du Président de la République de 2016, ont été évoquées dans le cadre de la plainte déposée par des délégués des travailleurs à la Conférence internationale du Travail en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. La commission note également que, dans ses observations de 2017, la CTASI allègue que, depuis les événements de 2002, toute expression de dissidence politique quelle qu’elle soit est stigmatisée. La commission observe de même que la CTV, la CGT, l’UNETE et la CODESA allèguent que les fonctionnaires et les travailleurs sont soumis à des mobilisations obligatoires pour des rassemblements et des cortèges de soutien au gouvernement.
La commission note que, dans ses réponses aux observations de l’UNETE, de la CTV, de la CGT et de la CODESA, le gouvernement déclare que la stabilité dans l’emploi est reconnue par la loi organique du travail, des travailleurs et des travailleuses (LOTTT) et par la Constitution nationale, même si la règle connaît des exceptions, notamment en ce qui concerne le personnel de direction. Il ajoute que l’inamovibilité des travailleurs, prévue par le décret no 2.158 du 28 décembre 2015 ayant rang, valeur et force de loi, a été prorogée pour trois ans, et il rappelle que les travailleurs protégés par ledit décret ne peuvent être licenciés, rétrogradés ou mutés. La commission note que le gouvernement réitère, dans son rapport de 2017, que toute discrimination à l’égard des travailleurs et des travailleuses fondée sur l’opinion politique est contraire aux principes établis dans l’ordre juridique national, et il déclare en outre qu’en 2005 le Président de la République de l’époque a ordonné que la «liste Tascón» soit mise de côté. Le gouvernement se réfère aux réponses faites précédemment, rejette ce qui est allégué à propos de la «liste Tascón» et réfute les arguments avancés au sujet des élections parlementaires de 2015. De plus, il déclare que: 1) s’agissant des allégations de «situation grave» qui régnerait dans le pays à la suite des «licenciements massifs pour des motifs politiques», elles n’ont qu’un caractère général et ne précisent pas si des plaintes ont été déposées auprès des différentes instances officielles qui offrent des voies de recours institutionnelles aux victimes de violations des droits individuels ou collectifs ou de délits, ou auprès des juridictions administratives relevant du ministère du Pouvoir populaire pour le processus social du travail, en cas de licenciement d’un travailleur protégé par l’inamovibilité; 2) s’agissant des menaces de licenciement qu’auraient reçues ceux qui auraient voté pour l’opposition, la participation des citoyens à des activités politiques n’est pas subordonnée au statut de fonctionnaire ou de travailleur d’une entreprise publique ou privée; la participation du peuple à la vie politique va de soi et quiconque est libre de participer ou de ne pas participer, comme il le souhaite, aux activités politiques qui sont organisées; et 3) quant aux allégations de menaces de sanctions et de licenciements pour avoir soutenu le référendum visant à révoquer le mandat du Président de la République, le gouvernement demande plus de détails car il n’a pas eu connaissance de plaintes à cet égard dont les juridictions administratives ou judiciaires auraient été saisies.
La commission prend note avec préoccupation des nouvelles allégations de discrimination dans l’emploi fondée sur des motifs politiques. Tout en prenant note des dispositions constitutionnelles et légales qui, selon le gouvernement, protègent contre la discrimination dans l’emploi, la commission rappelle que des mesures d’ordre législatif sont importantes pour faire porter effet aux principes de la convention, mais qu’elles ne sont pas suffisantes pour que l’objectif de la convention soit atteint. De plus, l’existence de dispositions juridiques pertinentes n’implique pas l’absence de discrimination dans la pratique. La commission réaffirme que la protection contre la discrimination fondée sur l’opinion politique suppose la protection des activités consistant à exprimer ou manifester une opposition aux opinions politiques et principes établis. De même, l’obligation générale de se conformer à une idéologie établie est discriminatoire (voir étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 805, 850 et 856). Dans ces circonstances, la commission demande une fois de plus au gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour assurer le plein respect et la pleine application de la convention et assurer que ni les travailleurs du secteur public ni ceux du secteur privé ne peuvent faire l’objet d’une discrimination en raison de leur opinion politique. De plus, vu le nombre particulièrement élevé des allégations présentées et, selon le gouvernement, leur caractère général, la commission demande instamment au gouvernement de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour constituer un groupe de travail comprenant toutes les organisations syndicales concernées, qui examinera et traitera toutes les plaintes et qui mènera aussi une réflexion sur la mise en place d’un système de prévention de la discrimination et de mécanismes ou d’institutions chargés de traiter de manière indépendante les plaintes pour discrimination dans l’emploi et la profession fondée sur tous les motifs énumérés dans la convention, en particulier la discrimination fondée sur l’opinion politique, et de proposer des réparations adéquates. Enfin, la commission rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du BIT.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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