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Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Bélarus (Ratification: 1956)

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La commission prend note des observations du Congrès des syndicats démocratiques du Bélarus (BKDP), reçues le 31 août 2017.
La commission prend note de la discussion détaillée qui a eu lieu au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en mai-juin 2016, concernant l’application de la convention par le Bélarus. Dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement d’accepter l’assistance technique du BIT et de collaborer de manière constructive avec le Bureau aux plus hauts niveaux pour résoudre les questions soulevées avant la prochaine session. La commission prend également note du rapport de la mission consultative technique du BIT au Bélarus qui s’est déroulée du 19 au 23 juin 2017.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention. Travail obligatoire imposé par la législation nationale à certaines catégories de travailleurs et de personnes. La commission avait noté antérieurement avec regret l’adoption de plusieurs dispositions législatives nationales dont l’application pourrait conduire à des situations relevant du travail forcé, et qui étaient, par conséquent, incompatibles avec l’obligation de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, tel que prévu par la convention. En particulier, la commission avait attiré l’attention du gouvernement sur les nouvelles dispositions législatives nationales suivantes.
1. Travail obligatoire imposé aux travailleurs dans le secteur de la transformation du bois. La commission avait pris note de l’adoption du décret présidentiel no 9 du 7 décembre 2012 sur des mesures complémentaires en faveur du développement de l’industrie du bois, et plus particulièrement l’article 1.2, qui prévoit qu’un salarié ne peut mettre fin à son contrat qu’avec le consentement de l’employeur.
La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a pris note avec intérêt de l’explication du gouvernement relative aux mesures prises pour abroger le décret no 9 par la publication du décret présidentiel no 182.
La commission note avec satisfaction l’information du gouvernement dans son rapport selon laquelle le décret no 9 a été abrogé par le décret no 182 du 27 mai 2016, dont une copie est jointe au rapport.
2. Travail obligatoire imposé à des personnes ayant travaillé moins de 183 jours l’année écoulée. La commission avait pris note de l’adoption du décret présidentiel no 3 du 2 avril 2015 sur la prévention de la dépendance à l’aide sociale, qui prévoit que les citoyens du Bélarus, les ressortissants étrangers et les apatrides résidents permanents du Bélarus n’ayant pas travaillé au moins 183 jours l’année écoulée, et n’ayant par conséquent pas payé d’impôts sur les revenus de leur travail pour la même période, sont tenus de verser un impôt spécial pour le financement des dépenses publiques. Les personnes qui ne payeraient pas cet impôt ou qui n’en payeraient qu’une partie sont passibles d’une sanction administrative sous la forme d’une amende ou d’une détention administrative assortie de travaux d’intérêt général obligatoires (art. 1, 4 et 14 du décret). La commission avait noté que, dans ses observations sur l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, reçues le 31 août 2015, le BKDP avait fait part de sa préoccupation au sujet du recours aux travaux d’intérêt général obligatoires à cet égard.
La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement de fournir de plus amples informations sur la mise en œuvre, en droit et dans la pratique, du décret no 3 et de veiller à ce qu’il soit en totale conformité avec la convention.
La commission prend note que, dans ses observations, le BKDP indique que le décret présidentiel no 1 de 2017 porte modification du décret no 3. Néanmoins, les modifications apportées, telles que la prolongation du délai octroyé pour la participation au financement des dépenses publiques, ne change pas le caractère discriminatoire du décret no 3. Le BKDP indique en outre que le décret no 3 a été suspendu à titre officieux par le gouvernement à la suite de l’intervention de diverses parties prenantes qui réclamaient son abolition, mais qu’il n’a pas été abrogé. Par ailleurs, le gouvernement envisage toujours d’appliquer le principe selon lequel «qui ne travaille pas doit payer pour l’obtention de services» dans la nouvelle version du décret qu’il soumettra.
La commission prend dûment note que le gouvernement indique dans son rapport et à la mission que le décret no 3 est suspendu sur instruction du Président. En 2015, 62 700 personnes ont payé des impôts sur les revenus de leur travail, mais en 2017 les autorités fiscales ont cessé d’envoyer des avis de paiement des impôts. En outre, les dispositions prévoyant des mesures administratives pour non-paiement des impôts n’ont pas été appliquées, et aucune sanction n’a été infligée à ce titre dans les faits. Le gouvernement indique par ailleurs qu’un nouveau cadre conceptuel est en cours d’élaboration en vue de modifier le décret no 3, l’objectif étant de déplacer l’importance accordée aux mesures fiscales pour la reporter sur la stimulation et la promotion de l’emploi et la réduction de l’emploi illégal. Un projet de texte législatif en la matière devrait être finalisé pour le 1er octobre 2017.
La commission note, d’après le rapport de mission, que le gouvernement a assuré à la mission que des consultations publiques, y compris avec les partenaires sociaux, seraient engagées au cours de l’élaboration de la version modifiée du décret no 3. La commission prie par conséquent le gouvernement de poursuivre ses efforts en vue de la modification prochaine du décret no 3, après consultation de toutes les parties prenantes intéressées, en particulier les partenaires sociaux. Elle le prie également de fournir des informations sur toute avancée en la matière.
3. Personnes internées dans des «centres de santé et travail». La commission avait pris note de l’adoption de la loi no 104-3 du 4 janvier 2010 sur les procédures et modalités de transfert de citoyens dans les centres de santé et travail et les conditions de leur séjour dans ces centres, qui prévoit que les citoyens souffrant d’alcoolisme chronique, de toxicomanie ou de consommation abusive de substances et ayant fait l’objet de procédures administratives à la suite d’infractions commises sous l’influence de l’alcool, de stupéfiants ou de substances psychotropes, toxiques ou autres substances enivrantes peuvent être envoyés dans des centres de santé et travail à la suite d’une demande déposée auprès d’un tribunal par le chef des affaires internes (art. 4 à 7 de la loi). Ces personnes sont internées dans des centres de santé et travail pendant une période pouvant aller de douze à dix-huit mois et sont soumises à une obligation de travailler.
La commission note que, dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement de fournir des informations complémentaires sur le fonctionnement, en droit et dans la pratique, de la loi no 104-3 et de veiller à ce qu’elle soit en totale conformité avec la convention.
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son rapport et à la mission selon lesquelles les personnes qui souffrent de ces problèmes ne sont pas toutes envoyées dans les centres en question; ne sont concernées que celles qui, à de multiples reprises (soit trois fois au moins en un an), ont troublé l’ordre public ou été trouvées en état d’ébriété ou sous l’emprise de stupéfiants ou d’autres substances enivrantes. Les personnes concernées doivent par ailleurs avoir fait l’objet d’une mise en garde, après avoir commis ces délits, quant à la possibilité d’être envoyées dans de tels centres, mais se sont néanmoins livrées à d’autres délits administratifs pour des infractions similaires dans l’année qui a suivi la mise en garde. Le gouvernement souligne que, eu égard à la situation particulière de ces personnes, il est impossible, dans la pratique, d’entreprendre un programme de réadaptation médicale et sociale sans prendre de telles mesures restrictives. Selon le ministère de l’Intérieur, 8 081 personnes ont été envoyées dans des centres de santé et travail depuis 2016, dont 4 388 au premier semestre de 2017. Seules 52 personnes ont refusé de travailler.
La commission prend également note de l’indication du gouvernement dans son rapport et à la mission selon laquelle les personnes envoyées dans des centres de santé et travail doivent se soumettre à un examen médical, lequel permet de déterminer leur degré de dépendance, puis bénéficient des services médicaux et de réadaptation sociale, notamment d’un traitement médical et psychologique, d’activités de développement personnel et d’autoéducation, ainsi que d’une aide pour recréer la relation familiale et la maintenir. En outre, l’emploi est considéré comme l’un des outils les plus importants pour réussir la réinsertion sociale. A cette fin, les centres de santé et travail offrent des services d’orientation, de formation et de reconversion professionnelles, ainsi que de développement des compétences. Le gouvernement indique par ailleurs que les personnes concernées sont placées en tenant compte de leur âge, de leur aptitude à travailler, de leur état de santé, de leurs compétences et de leurs qualifications. Elles sont en outre rémunérées et bénéficient des congés annuels et autres prévus par la législation du travail. En 2014 et 2015, 870 personnes ont suivi des programmes officiels de formation technique professionnelle et, en 2015, 387 personnes ont bénéficié d’une formation professionnelle en cours d’emploi sur leur lieu de travail. De plus, en juin 2017, 5 647 personnes avaient un emploi rémunéré dans des centres de santé et travail. Les types de travaux exécutés par ces personnes sont notamment la transformation du bois, les travaux agricoles et le nettoyage des espaces publics. La commission prie donc le gouvernement de continuer de fournir des informations sur l’application de la loi no 104-3 dans la pratique, notamment le nombre de personnes placées dans les centres de santé et travail, en précisant si leur placement est la conséquence d’une décision de justice ou d’une décision administrative.
4. Parents privés de la garde de leurs enfants. La commission avait noté antérieurement que le décret présidentiel no 18 du 24 novembre 2006 sur les mesures complémentaires relatives à la protection par l’Etat des enfants de «familles dysfonctionnelles» autorise le retrait de la garde d’enfants aux parents ayant «un mode de vie immoral», sont des alcooliques chroniques ou toxicomanes ou sont, d’une façon ou d’une autre, incapables d’élever et de prendre soin de leurs enfants conformément à leurs obligations. Les parents dans cette situation, qui sont sans emploi ou qui travaillent et ne sont pas en mesure de rembourser intégralement à l’Etat les sommes engagées pour la prise en charge de leurs enfants dans des établissements publics, font l’objet d’une décision de justice en matière d’emploi assortie d’une obligation de travailler (art. 9.27 du Code des infractions administratives et art. 18.8 du Code de procédure relatif aux infractions administratives). Cette décision est un motif de licenciement de la personne concernée (art. 44(5) du Code du travail). La responsabilité pénale des parents qui ne se soumettent pas à l’obligation de travailler peut être engagée, conformément à l’article 174(2) et (3) du Code pénal, et ceux-ci sont passibles d’une peine de travail d’intérêt général ou de redressement par le travail pendant une période pouvant aller jusqu’à deux ans, d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans, ainsi que de restrictions ou de privations de liberté; toutes ces peines étant assorties de travail obligatoire.
La commission note que la Commission de la Conférence, dans ses conclusions, a invité instamment le gouvernement à fournir des informations complémentaires sur la mise en œuvre, en droit et dans la pratique, du décret présidentiel no 18 et à s’assurer qu’il soit en totale conformité avec la convention.
La commission prend note de l’indication du gouvernement dans son rapport et à la mission que le décret no 18 vise essentiellement à améliorer la situation des «familles dysfonctionnelles» de sorte que les enfants puissent retourner vivre auprès de leurs parents en toute sécurité. Si l’on veut créer des circonstances permettant aux parents concernés de renoncer à leurs styles de vie antisociaux, souvent immoraux, il importe qu’ils aient un emploi. Or nombre de ces parents sont sans emploi et ont perdu leurs compétences professionnelles depuis longtemps; il leur est par conséquent difficile de trouver un emploi par eux-mêmes dans la mesure où les employeurs ne souhaitent pas embaucher de telles personnes. A cet égard, le décret no 18 institue un mécanisme en vertu duquel un tribunal peut ordonner aux parents concernés de reprendre un emploi. Des dispositions sont prises en matière de placement dans des lieux de travail définis en coordination avec les autorités locales, comme les agences d’emploi et les centres de protection sociale, qui ont une liste de plus de 6 770 entreprises offrant un lieu de travail sûr pour de telles personnes. En outre, une des conditions préalables au choix du poste de travail est que le niveau de rémunération soit suffisamment élevé pour permettre aux parents de faire face aux dépenses liées à la garde de leurs enfants.
La commission note par ailleurs l’information fournie par le gouvernement à cet égard dans son rapport, selon laquelle des ordonnances judiciaires ont été envoyées à 1 833 personnes en 2014, 2 317 en 2015, 2 289 en 2016 et 1 128 au cours du premier semestre de 2017. Au 31 mars 2017, 8 371 placements avaient été effectués par les autorités publiques chargées de l’emploi. En outre, en 2016, 1 200 personnes ont fait l’objet de poursuites au titre de l’article 174 du Code pénal; elles étaient au nombre de 496 au premier semestre 2017. Par ailleurs, de 2007 à 2016, 33 832 enfants au total ont été reconnus comme nécessitant une assistance de l’Etat, dont 21 021 (plus de 58 pour cent) sont retournés vivre dans leur famille et auprès de leurs parents. Toutefois, la commission prend note des informations du BKDP fournies à la mission selon lesquelles, dans un cas, des enfants adoptés avaient été retirés à leur famille en raison des opinions politiques des parents, en dépit du fait que la situation économique et sociale de la famille était saine. Tout en prenant dûment note de l’objectif de réadaptation poursuivi par le décret no 18 et du taux élevé d’enfants retournant vivre auprès de leur parents, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que, dans la pratique, la mise en application du décret ne va pas au delà de son objectif de réadaptation de familles dysfonctionnelles, et surtout ne soit pas utilisée à des fins politiques. La commission encourage par ailleurs le gouvernement à envisager de réviser les dispositions concernant les déductions salariales directes imposées à certaines personnes pour couvrir les dépenses afférentes à la garde de leurs enfants dans des établissements publics.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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