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Demande directe (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Portugal (Ratification: 1956)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Portugal (Ratification: 2020)

Autre commentaire sur C029

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Suivi des recommandations du comité tripartite (réclamation présentée en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT)

Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. Incidence du refus de participer à un travail socialement nécessaire sur le droit à des prestations de chômage. La commission prend note de l’adoption par le Conseil d’administration à sa 327e session (juin 2016) des recommandations formulées par le comité tripartite établi pour examiner la réclamation présentée par la Fédération nationale des syndicats de travailleurs de la fonction publique et sociale (FNSTFPS) contre le Portugal, alléguant l’inexécution de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et de la convention (nº 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958. La commission observe que la réclamation se réfère à l’obligation des chômeurs de réaliser un travail socialement nécessaire, dans le cadre d’un contrat d’emploi-insertion, sous peine de perdre leur droit aux prestations de chômage. Le travail socialement nécessaire consiste en la réalisation par les chômeurs d’activités visant à satisfaire des nécessités sociales ou collectives temporaires (obligation prévue par le décret-loi no 220/2006 qui fixe le cadre juridique du régime d’indemnisation du chômage pour les travailleurs dépendants et par le décret no 128/2009). La commission note que le comité tripartite a souligné, s’agissant de l’objectif poursuivi par les contrats emploi-insertion et la réalisation du travail socialement utile, qu’il s’agit d’une mesure d’inclusion sociale dont le but est avant tout de maintenir ou développer les capacités au travail des chômeurs et, le moment venu, les aider à trouver un travail productif et librement choisi dans le marché du travail. Le comité a observé qu’il existe une contrainte légale pour les chômeurs d’accepter le travail socialement nécessaire, mais que la législation prévoit la possibilité, dans certaines situations limitées, de refuser un tel travail (incompatibilité avec les capacités physiques, les compétences ou l’expérience professionnelle, ou durée du trajet supérieure à une certaine durée). Le comité a également constaté que la législation place sur un même niveau l’obligation, pour le bénéficiaire des prestations de chômage, d’accepter un emploi convenable et l’obligation d’accepter un travail socialement nécessaire. En effet, le refus injustifié d’accepter un travail socialement nécessaire entraîne la même conséquence que le refus injustifié d’accepter un emploi convenable, à savoir la radiation de l’inscription auprès du Centre de l’emploi et, par là même, la cessation du droit aux prestations de chômage. Le comité tripartite a par conséquent invité le gouvernement à entamer des consultations tripartites avec les partenaires sociaux concernés aux fins d’évaluer l’ensemble des conditions et modalités de mise en œuvre des contrats emploi-insertion, leur efficacité et leur impact.
La commission note que le gouvernement indique dans son rapport qu’il a pris note de cette recommandation sans toutefois fournir de plus amples informations à cet égard. La commission note que, dans ses observations jointes au rapport du gouvernement, la Confédération générale des travailleurs portugais - Intersyndicale nationale (CGTP-IN) se réfère une nouvelle fois aux pressions exercées sur les chômeurs pour qu’ils acceptent le travail socialement nécessaire. L’Union générale des travailleurs (UGT) considère fondamental que la question du travail socialement nécessaire imposé aux chômeurs soit rapidement analysée et que les consultations avec les partenaires sociaux aient lieu afin de pouvoir évaluer et éventuellement reconfigurer cette mesure active d’emploi. La commission rappelle, comme l’a observé le comité tripartite, que l’objectif des régimes d’indemnisation du chômage est de procurer aux personnes ayant perdu leur emploi un revenu de remplacement pendant une certaine période en vue de leur permettre de rechercher un emploi convenable et de le choisir librement. Le droit à un revenu de remplacement découle du travail précédemment réalisé et des cotisations au régime d’assurance chômage y afférentes. Dans ces circonstances, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les consultations tripartites entamées avec les partenaires sociaux sur les conditions et modalités de mise en œuvre des contrats emploi-insertion, tel que suggéré par le comité tripartite. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur les modalités de mise en œuvre des contrats emploi-insertion en précisant le nombre de chômeurs bénéficiant des prestations de chômage à qui il a été demandé de réaliser des travaux socialement utiles, le nombre de ceux qui ont refusé, en indiquant les raisons du refus, et le nombre de ceux qui ont vu leur droit aux prestations de chômage suspendu. Prière également de fournir des informations sur le moment à partir duquel les contrats emploi-insertion sont proposés aux chômeurs bénéficiant de prestations de chômage, afin que la commission puisse évaluer si l’obligation d’accomplir le travail socialement nécessaire est réservée aux chômeurs ayant épuisé leur droit aux prestations de chômage ou à ceux en fin de droits. Prière d’indiquer également si les personnes qui viennent de perdre leur emploi disposent d’une période raisonnable pour rechercher à plein temps et choisir librement un emploi convenable, sans crainte de perdre leur droit aux prestations de chômage.
Article 1, paragraphe 1, article 2, paragraphe 1, et article 25. Traite des personnes. Dans ses précédents commentaires, la commission a salué les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre la traite des personnes, qui témoignent de son engagement et de sa volonté d’adapter le cadre institutionnel et législatif à la complexité de ce phénomène. Elle a demandé au gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre des cinq domaines stratégiques du troisième Plan national contre la traite des êtres humains (III PNPCTSH) et sur le renforcement des moyens et des capacités d’investigation des organes chargés de faire appliquer la loi afin que les sanctions prévues au titre de l’article 160 du Code pénal, qui incrimine la traite des personnes, puissent être effectivement appliquées aux auteurs de ce délit.
Mise en œuvre du Plan national contre la traite des êtres humains. La commission prend note des informations très détaillées communiquées par le gouvernement sur les nombreuses actions entreprises pour mettre en œuvre les 53 mesures prévues dans le cadre des cinq volets du III PNPCTSH pour la période 2014-2017. Elle note que le gouvernement a continué à mener des activités de sensibilisation (campagne nationale organisée annuellement en octobre pour la journée européenne de lutte contre la traite des personnes, diffusion de matériel informatif à travers différents supports, publication d’études universitaires, échange d’informations et participation à des événements régionaux et internationaux destinés à mieux comprendre le phénomène et à partager des bonnes pratiques) ainsi que des activités de renforcement des capacités et de la formation initiale et continue des magistrats, des forces de l’ordre (y compris l’unité antitraite des personnes du Service des étrangers et des frontières) et de l’inspection du travail. Il a également intensifié les mesures destinées à mieux accompagner et protéger les victimes (création d’un centre d’accueil pour les hommes en 2013 et d’un centre pour les femmes en 2014; mise en place, à côté du Réseau d’appui et de protection des victimes de traite (RAPVT), de cinq équipes multidisciplinaires spécialisées (EME) qui coordonnent l’assistance prodiguée aux victimes à travers le pays). La commission relève également le rôle stratégique joué par la Commission pour la citoyenneté et l’égalité (CIG) qui, en tant qu’entité coordinatrice de l’action contre la traite des personnes, adopte annuellement le plan d’activités pour la mise en œuvre du III PNPCTSH, accompagne les entités responsables de sa mise en œuvre et élabore les rapports périodiques d’exécution. Il en est de même de l’Observatoire de la traite des êtres humains (OTSH) qui a pour mission de produire, traiter et disséminer les informations sur la traite des personnes pour parvenir à une meilleure compréhension de ce phénomène par le public et les autorités compétentes.
La commission salue une nouvelle fois les activités entreprises par le gouvernement pour mettre en œuvre les cinq volets du III PNPCTSH (prévention, formation, protection, investigation et coopération) et prie le gouvernement de continuer à indiquer les mesures prises pour poursuivre la lutte contre la traite des personnes tant à des fins d’exploitation sexuelle que d’exploitation au travail. Prière de fournir des informations sur le rapport final d’exécution du III PNPCTSH qui doit être élaboré par la CIG en février 2018, en précisant les domaines dans lesquels des obstacles ont été constatés et les mesures prévues pour les surmonter.
Identification des victimes et sanction des auteurs. La commission prend note des informations concernant les visites préventives, d’inspection ou d’investigation menées par les différentes autorités compétentes – de manière individuelle ou conjointe – pour détecter les cas de traite des personnes. Elle note en particulier les statistiques concernant les opérations de contrôle menées par les forces de l’ordre (gendarmerie, police nationale et service des étrangers et des frontières) sur les sites à risque, comme les établissements de loisirs nocturnes et les établissements agricoles, ainsi que les visites d’inspection menées par l’Autorité pour les conditions de travail (ACT), notamment dans le cadre de la lutte contre le travail non déclaré. Le gouvernement souligne le rôle que joue l’ACT dans la détection de situations pouvant relever de la traite des personnes à des fins d’exploitation au travail et dans la collecte des indices pouvant permettre de qualifier les faits d’infraction pénale et, de ce fait, de renvoyer les cas au ministère public ou aux officiers de police criminelle (OPC). La commission relève que, d’après le rapport de 2015 sur la traite des êtres humains publié par l’OTSH en avril 2016, le nombre de signalements de victimes présumées pour 2015 s’élevait à 193 (contre 197 en 2014) avec 135 signalements sur le territoire portugais et 58 signalements pour des citoyens portugais à l’étranger. Soixante et un pour cent de ces signalements concernaient la traite des personnes à des fins d’exploitation au travail. De ces signalements, 53 ont été considérés comme «cas confirmés» par les organes de police judiciaire suite à une enquête criminelle (contre 48 en 2014). La commission note également que le gouvernement indique que, en 2013, 29 personnes étaient inculpées dans le cadre d’une procédure judicaire et que neuf personnes ont été condamnées pour traite des personnes. A cet égard, la commission note que la loi no 72/2015 du 20 juillet, qui définit les objectifs, priorités et orientations de la politique criminelle, considère la traite des personnes comme un crime devant être prévenu et investigué de manière prioritaire, compte tenu notamment de la nécessité de protéger les victimes.
La commission salue le fait que les efforts déployés pour renforcer les moyens et les capacités d’investigation des organes chargés de faire appliquer la loi ont pu se traduire par la poursuite judiciaire et la condamnation de certains auteurs du crime de traite des personnes, conformément à l’article 160 du Code pénal. La commission note cependant que le gouvernement indique, se basant notamment sur les conclusions du rapport de l’OTSH d’avril 2016, que tant l’identification des victimes que l’investigation des faits se heurtent à des difficultés. Parmi celles-ci, le gouvernement évoque le fait que les victimes ne se reconnaissent pas comme telles, ignorent leurs droits ou ont peur des représailles. En outre, les autorités sont confrontées au crime organisé, à l’utilisation de nouvelles technologies, au déplacement rapide des victimes (à travers les frontières ou à l’intérieur du pays) et à la capacité d’adaptation des auteurs. Dans ces circonstances, la commission encourage le gouvernement à continuer de renforcer les moyens d’action des autorités compétentes (Autorité pour les conditions de travail, forces de l’ordre, ministère public et justice) pour favoriser une action rapide, agile et efficace contre la traite des personnes, quelles que soient ses modalités. Prière en particulier d’indiquer les mesures prises pour favoriser la coopération et l’échange d’informations entre ces différentes autorités. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les procédures judiciaires en cours au titre de l’article 160 du Code pénal et sur la nature des condamnations prononcées. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur la protection et l’assistance accordées aux victimes de traite par les cinq équipes multidisciplinaires spécialisées opérant sur le territoire national, en précisant également si les victimes étrangères ont pu bénéficier de permis de résidence, et la manière dont elles obtiennent réparation du préjudice qu’elles ont subi afin d’éviter de retomber dans une situation de vulnérabilité propice à leur revictimisation.
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