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Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Cameroun (Ratification: 1960)

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Application de la convention dans la pratique. La commission prend note des observations à caractère général formulées par l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 1er septembre 2016. La commission prend également note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2016, qui font référence aux questions législatives en suspens ainsi qu’à des cas d’ingérence des autorités dans les élections du Syndicat des travailleurs agricoles de Fako (FAWU) ainsi que dans les secteurs de la construction et de la santé, des actes de vandalisme contre les locaux d’un syndicat (DISAWOFA) dans le département de Fako demeurés impunis sans enquête de police, le harcèlement syndical contre les membres syndicaux du FESYLTEFCAM dans le secteur bancaire, et des violences policières répétées à l’encontre de grévistes qui revendiquaient, avec l’appui de la Confédération camerounaise du travail (CCT), de meilleures conditions de travail dans le secteur de la construction.
Par ailleurs, la commission prend note des observations de la Confédération syndicale des travailleurs du Cameroun (CSTC), reçues le 30 août 2016, dénonçant l’ingérence des autorités dans ses affaires internes, suite à la reconnaissance par le ministère du Travail d’une faction qui se prétend élue en tant que bureau confédéral, alors qu’une décision de justice a annulé l’élection en question.
La commission note les observations reçues le 6 septembre 2016 de l’Internationale de l’Education (IE) et de ses affiliés de la plate-forme des syndicats de l’éducation qui réunit la plupart des syndicats d’enseignants du pays, dont la Fédération des syndicats de l’enseignement et de la recherche (FESER), la Fédération camerounaise des syndicats de l’éducation (FECASE) et le Syndicat des travailleurs des établissements scolaires privés du Cameroun (SYNTESPRIC), qui dénoncent le fait que, en l’absence d’un texte réglementant les syndicats ne relevant pas du Code du travail, les huit organisations syndicales des agents publics de l’éducation demeurent sans reconnaissance légale, malgré leurs démarches pour obtenir leur agrément auprès des autorités compétentes. Certaines démarches remontent à 1991. Il en résulte l’hostilité de l’administration à l’égard des dirigeants syndicaux et des syndicalistes, et une véritable entrave au fonctionnement des syndicats qui ne peuvent ni tenir des réunions syndicales dans les établissements scolaires ni obtenir des adhésions sans une existence légale.
La commission prend note des observations reçues de l’Union générale des travailleurs du Cameroun (UGTC) et de la Confédération des travailleurs unis du Cameroun (CTUC), en septembre 2015, qui dénonçaient l’absence de volonté du gouvernement d’achever la révision du Code du travail et d’adopter une loi unique sur les syndicats pour les secteurs privé et public. La CTUC déclare que le Code du travail, dans sa teneur actuelle, restreint la liberté syndicale et viole les prescriptions de la convention pour ce qui concerne l’enregistrement des syndicats, leur dissolution, leur possibilité de s’affilier à des organisations internationales. La commission observe que, dans sa réponse aux observations de la CTUC reçues en janvier 2016, le gouvernement fait état de la poursuite du processus de révision du Code du travail et se borne à nier les autres allégations.
La commission note avec préoccupation les allégations de faits de violence policière à l’encontre de grévistes, ainsi que le temps particulièrement long pour l’enregistrement de syndicats de l’éducation, et prie instamment le gouvernement de fournir ses commentaires et des informations détaillées sur ces points.
La commission prend également note des observations de la CTUC reçues le 14 novembre et le 5 décembre 2016. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.

Questions législatives

Loi portant répression des actes de terrorisme. La commission note qu’à sa réunion de novembre 2016 le Comité de la liberté syndicale a formulé des recommandations au sujet de l’application de la loi portant répression des actes de terrorisme (no 2014/028 du 23 décembre 2014) et a renvoyé à la commission l’examen de sa conformité avec les dispositions de la convention (voir cas no 3134, 380e rapport). A cet égard, la commission souhaite attirer l’attention du gouvernement sur le point suivant: aux termes de l’article 2 de la loi, est puni de la peine de mort, celui qui […] commet tout acte ou menace susceptible de causer la mort, de mettre en danger l’intégrité physique, d’occasionner des dommages corporels ou matériels, des dommages de ressources naturelles, à l’environnement ou au patrimoine culturel dans l’intention: 1.a) d’intimider la population, de provoquer une situation de terreur ou de contraindre la victime, le gouvernement et/ou une organisation nationale ou internationale, à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque, à adopter ou à renoncer à une position particulière ou à agir selon certains principes; 2.b) de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation de services essentiels aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations […]. La commission note le caractère très général des situations couvertes par cette disposition et exprime sa profonde préoccupation du fait que certaines de ses situations pourraient concerner des actes liés à l’exercice légitime d’activités syndicales en vertu de la convention. La commission se réfère notamment aux actions de protestation ou à des grèves qui auraient des répercussions directes sur les services publics. La commission observe par ailleurs que, compte tenu de la peine encourue, une telle disposition peut avoir un caractère particulièrement intimidant à l’égard de représentants syndicaux ou patronaux s’exprimant ou agissant dans le cadre de leurs mandats. En conséquence, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 2 de la loi portant répression des actes de terrorisme pour assurer qu’il ne s’applique pas aux activités légitimes des organisations de travailleurs et d’employeurs, protégés par la convention. Entre-temps, la commission prie instamment le gouvernement de garantir, notamment en donnant les instructions appropriées aux autorités compétentes, que la mise en œuvre de cette loi n’a pas pour conséquence de porter préjudice à des dirigeants et membres s’exprimant dans le cadre de leurs mandats et exerçant des activités syndicales ou patronales en vertu du droit que confère l’article 3 de la convention aux organisations de travailleurs ou d’employeurs d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action. Au surplus, la commission attend du gouvernement qu’il assure que la loi est appliquée de telle sorte qu’elle n’est pas perçue comme une menace ou une intimidation destinée à des syndicalistes ou au mouvement syndical dans son ensemble. La commission prie le gouvernement d’indiquer toute mesure prise dans le sens de ses commentaires.
Réforme législative. La commission note avec un profond regret qu’il ressort des informations fournies par le gouvernement dans ces deux derniers rapports, reçus en août 2015 et août 2016, que le processus de révision du Code du travail, comme l’adoption d’une loi sur les syndicats et l’abrogation des textes réglementaires qui ne sont pas conformes à la convention, n’ont toujours pas été achevés. La commission se voit une nouvelle fois obligée d’exhorter le gouvernement à achever ce processus de révision législative, sans délai supplémentaire, de manière à donner pleinement effet aux dispositions de la convention sur les points qu’elle rappelle ci-dessous.
Articles 2 et 5 de la convention. La commission rappelle depuis plusieurs années la nécessité: i) de modifier la loi no 68/LF/19 du 18 novembre 1968 (qui soumet l’existence juridique d’un syndicat ou d’une association professionnelle de fonctionnaires à l’agrément préalable du ministre en charge de l’administration territoriale); ii) de modifier les articles 6(2) et 166 du Code du travail (portant sur la sanction de promoteurs d’un syndicat non encore enregistré qui se comporteraient comme si le syndicat avait été enregistré); et iii) d’abroger l’article 19 du décret no 69/DF/7 du 6 janvier 1969 (qui prévoit l’autorisation préalable pour l’affiliation des syndicats de fonctionnaires à une organisation internationale). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout élément nouveau à cet égard.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2018.]
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