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Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Ratification: 1949)

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La commission prend note des observations du Congrès des syndicats (TUC) reçues le 1er septembre 2016 et des observations du gouvernement à ce sujet, ainsi que de nouvelles observations du TUC reçues le 26 octobre 2016. Elle prend note, en outre, des observations à caractère général de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 1er septembre 2016.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 105e session, mai-juin 2016)

La commission prend note des discussions ayant eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence (ci-après la Commission de la Conférence), en juin 2016, sur l’application de cette convention au Royaume-Uni. Elle observe que la Commission de la Conférence a elle-même pris note des indications du gouvernement selon lesquelles la législation d’application pertinente était toujours en discussion et que les partenaires sociaux étaient associés à ce processus. Elle note que la Commission de la Conférence a appelé le gouvernement à respecter le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs de constituer des organisations de leur choix et celui de s’affilier à de telles organisations sans autorisation préalable, et de définir les pouvoirs de l’autorité chargée de l’enregistrement de telle sorte que ceux-ci ne soient pas en contradiction avec les dispositions de la convention.
La commission note d’une manière générale que, selon les déclarations faites par le gouvernement à la Commission de la Conférence ainsi que dans son rapport, celui-ci se dit confiant que les dispositions de la loi sur les syndicats nouvellement adoptée sont non seulement justifiées et proportionnées, mais également entièrement conformes aux obligations internationales du Royaume-Uni en matière de droits syndicaux. A son avis, la loi tend à un juste équilibre entre les droits des individus de s’engager dans une action revendicative et les droits de ceux qui sont affectés par cette même action, et elle modernisera les relations sociales tout en favorisant une approche collaborative plus efficace pour résoudre les conflits sociaux.
Article 3 de la convention. Droit des organisations de travailleurs d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action. La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait prié le gouvernement de revoir le projet de loi sur les syndicats en concertation avec les partenaires sociaux concernés, en vue d’en modifier le texte pour parvenir à ce que le seuil de 40 pour cent des voix de l’ensemble des travailleurs requis pour faire grève dans les services publics importants (art. 3 du projet de loi) ne soit pas applicable dans l’éducation et dans les transports. Elle note que le TUC soulève à nouveau cet aspect et déclare en outre qu’il n’est pas équitablement tenu compte des avis de la commission en ce qui concerne le quorum de 50 pour cent. Sur ce dernier aspect, la commission ne partage pas les appréciations du TUC concernant une législation nationale qui se référerait également à un quorum de 50 pour cent. De plus, elle estime important de souligner qu’il n’existe pas de règle absolument stricte et précise en ce qui concerne la fixation d’un quorum raisonnable. Se référant à cet égard à son étude d’ensemble de 1994, en matière de droit de grève, les conditions posées dans les diverses législations varient à l’infini, et leur compatibilité avec la convention peut également dépendre d’éléments factuels, tels le fractionnement ou l’éloignement géographique des centres de travail ou encore la structure de négociation collective (par entreprise ou par industrie), autant de facteurs qui supposent un examen de chaque cas d’espèce (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 170).
La commission prend note en outre des préoccupations exprimées par le TUC selon lesquelles le quorum instauré par la loi sur les syndicats intervient dans le contexte de procédures de scrutin si obsolètes qu’elles tendaient à faire baisser les niveaux de participation. Le gouvernement fait observer que la loi sur les syndicats lui prescrit de faire procéder à une évaluation du système de vote électronique dans les six mois qui suivront l’approbation de la loi par la Reine, et que la désignation de la personne devant présider pour cette évaluation a été annoncée le 3 novembre 2016. La commission veut croire que cette évaluation produira ses résultats dans un proche avenir et elle prie le gouvernement de donner des informations sur les progrès accomplis et sur les mesures prises afin de faciliter le vote électronique dans le contexte des nouvelles règles établies par la loi sur les syndicats.
S’agissant du seuil de 40 pour cent, le gouvernement avait déclaré devant la Commission de la Conférence que, en raison des conséquences négatives particulièrement étendues des actions de grève dans les services publics, un tel seuil est important pour assurer la légitimité démocratique nécessaire ainsi qu’un soutien majoritaire net dans les services qui revêtent une importance considérable pour le public. La commission rappelle néanmoins que dans ses précédents commentaires elle a souligné que l’exigence d’un appui de 40 pour cent de l’ensemble des travailleurs entraîne dans les faits une exigence de soutien de 80 pour cent lorsqu’un quorum de participation de 50 pour cent a été atteint. Compte tenu des préoccupations exprimées ci-dessus quant aux difficultés qui se posent à propos du système de scrutin actuel et vu l’importance qui s’attache à garantir le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur activité, la commission prie à nouveau le gouvernement de revoir l’article 3 de la loi sur les syndicats en concertation avec les partenaires sociaux concernés et de prendre les mesures nécessaires afin que ce seuil plus contraignant de 40 pour cent des voix de tous les travailleurs concernés, qui est requis pour déclarer une grève, ne s’applique pas dans l’enseignement ni dans les services de transport.
Sur la question des piquets de grève, la commission prend note des observations du TUC selon lesquelles les conditions supplémentaires s’appliquant aux piquets de grève soulèvent un certain nombre d’inquiétudes: l’obligation d’aviser la police de l’identité et des coordonnées des militants fait encourir à ceux-ci le risque de se retrouver sur des «listes noires»; le syndicat se retrouve automatiquement responsable de tout problème; les exigences ainsi posées sont discriminatoires en ce qu’elles affectent uniquement les piquets de grève organisés par des syndicats mais non ceux qui sont organisés par d’autres groupes. Le gouvernement fait observer que, s’il reconnaît que des piquets de grève pacifique sont une action légitime et légale, il est regrettable que dans la pratique les piquets de grève donnent lieu à des intimidations. Il assure toutefois que la police est liée par les dispositions de la loi sur les droits de l’homme et de la loi sur la protection des données individuelles lorsqu’il s’agit pour elle de noter les coordonnées des personnes organisant un piquet de grève. La commission prie le gouvernement ainsi que le TUC de fournir des informations sur les effets de l’application de cette règle de notification dans la pratique, y compris toute réclamation que pourraient susciter le maniement de ces informations ou l’impact de ce système sur les actions revendicatives légales, ainsi que toute information sur les travailleurs figurant sur des listes noires pour avoir participé à des piquets de grève licites.
S’agissant du rôle élargi de l’autorité chargée de l’enregistrement, selon ce qui est prévu aux articles 16 à 20 de la loi sur les syndicats, la commission note que le TUC exprime les préoccupations suivantes: rien ne garantit que l’autorité d’enregistrement sera authentiquement indépendante; les nouveaux pouvoirs dont elle est investie exposeront les syndicats au risque de tracasseries incessantes; les nouvelles responsabilités qui lui sont conférées en matière d’enquête, de prise de décisions et de contrôle de l’application violent des principes légaux élémentaires; un nouveau droit sera perçu pour couvrir les coûts afférents à cet administrateur. Le gouvernement déclare que les pouvoirs conférés par la loi à l’administrateur de l’enregistrement sont comparables à ceux de bien d’autres autorités réglementaires, dont le coût est également couvert par un droit perçu auprès des organisations à l’égard desquelles elles exercent leur contrôle. Le gouvernement considère qu’un tel contrôle est proportionné et parfaitement compatible avec la convention. Enfin, le gouvernement ajoute que l’administrateur de l’enregistrement a toujours exercé ses fonctions en toute indépendance et continuera de le faire, comme le prévoit l’article 16 de la loi. Il ajoute que, exception faite de ses pouvoirs d’investigation dans les affaires financières d’un syndicat ou le registre des membres, l’administrateur de l’enregistrement n’a pas, d’une manière générale, le pouvoir d’enquêter dans les affaires internes d’un syndicat, excepté lorsqu’une plainte a été déposée par un membre d’un syndicat alléguant des manquements à certaines règles syndicales ou à certaines obligations légales. Cette loi a pour effet, entre autres, de réactualiser les pouvoirs d’investigation de l’administrateur de l’enregistrement en ce qui concerne les fonds politiques, les fusions de syndicats et les élections des instances dirigeantes de ceux-ci, et elle a introduit un nouveau régime de sanctions pécuniaires. Le montant exact de telles sanctions sera fixé par voie de réglementation, à propos de quoi le gouvernement consultera les syndicats avant que le Parlement n’examine lui-même la question. Il en sera de même à propos de cette taxe destinée à couvrir les coûts afférents à l’administrateur de l’enregistrement, coûts qui resteront en partie à la charge de la collectivité publique. Enfin, le gouvernement indique que cette loi garantit que les nouveaux pouvoirs seront utilisés de manière proportionnelle et appropriée, les syndicats ayant toujours la possibilité d’exprimer leur avis avant que toute décision soit prise, et ils conservent le droit d’attaquer ces décisions. La commission se déclare préoccupée par le fait que, de fait, cette loi étend considérablement les pouvoirs conférés à l’administrateur de l’enregistrement pour enquêter et pour user des voies d’exécution légales, y compris dans des circonstances où cela ne lui aura nullement été demandé. La commission invite le gouvernement à réexaminer l’impact de ces dispositions en concertation avec les partenaires sociaux concernés afin d’assurer que les organisations d’employeurs et de travailleurs peuvent exercer effectivement les droits qui leur sont conférés d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler leur programme d’action sans intervention des autorités publiques.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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