ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Ouzbékistan (Ratification: 2008)

Autre commentaire sur C182

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Suivi donné aux conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 102e session, juin 2013)

La commission prend note des rapports du gouvernement datés des 3 et 6 mai et 11 novembre 2013. Elle prend également note de la communication de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), en date du 1er septembre 2013, et de la communication de la Confédération syndicale internationale (CSI), en date du 21 août 2013, ainsi que de la réponse du gouvernement à ces deux communications, en date du 31 octobre 2013. La commission prend note aussi des discussions approfondies ayant eu lieu à l’occasion de la 102e session de la Commission de l’application des normes de la Conférence, en juin 2013, à propos de l’application par l’Ouzbékistan de la convention no 182. En outre, elle prend note des observations de la CSI faisant l’objet d’une communication en date du 25 novembre 2013, dénonçant une mobilisation systématique par l’Etat d’une main-d’œuvre forcée constituée par des enfants pour la campagne de récolte du coton de 2013. Ces observations ont été transmises au gouvernement pour commentaires. Enfin, la commission prend note du rapport du 19 novembre 2013 de la mission de haut niveau de l’OIT sur le travail des enfants, qui s’est déroulée en Ouzbékistan pendant la campagne de récolte du coton de 2013 (rapport de mission).
Article 3 a) et d) de la convention. Pires formes de travail des enfants. Travail forcé ou obligatoire dans la production de coton et travaux dangereux. La commission a précédemment pris note de diverses dispositions de la législation nationale interdisant le travail forcé (notamment l’article 37 de la Constitution nationale, l’article 7 du Code du travail et l’article 138 du Code pénal), ainsi que l’emploi d’enfants à l’arrosage et à la récolte du coton (conformément à la liste des activités pour lesquelles, en raison des conditions de travail défavorables qui les caractérisent, il est interdit d’employer des personnes de moins de 18 ans). Cependant, elle a également pris note, au fil des ans, des communications de l’OIE et de la CSI dénonçant le fait que, en dépit d’un tel cadre légal, l’Etat mobilisait chaque année de manière systématique des enfants pour travailler à la récolte du coton, et ce travail s’effectuait dans des conditions souvent dangereuses. Elle a pris note, en outre, d’un large consensus, entre plusieurs organismes des Nations Unies, quant à la réalité de cette pratique de mobilisation des enfants des écoles pour la récolte du coton. Elle a pris note, enfin, des discussions ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence en juin 2010 et en juin 2011 à propos de l’application de cette convention par l’Ouzbékistan.
La commission note que, dans les conclusions qu’elle a adoptées en juin 2013 à l’issue de ses plus récentes discussions concernant l’application de la convention par l’Ouzbékistan, la Commission de la Conférence a prié le gouvernement de poursuivre ses efforts pour que soit organisée rapidement une table ronde avec l’OIT, le PNUD, l’UNICEF, la Commission européenne et les représentants des organisations nationales et internationales de travailleurs et d’employeurs, en vue d’accepter une mission de surveillance de haut niveau durant la récolte du coton de 2013. Cette table ronde a eu lieu en juillet 2013, et il a été convenu que la campagne de récolte du coton serait l’objet d’une supervision assurée conjointement par l’OIT et l’Ouzbékistan sur la base des documents proposés par l’OIT relatifs à l’observation du travail des enfants. Il était convenu que les principes devant régir cette opération seraient la crédibilité, la transparence, l’objectivité, la fiabilité, la validité et les meilleurs intérêts de l’enfant et de l’observation locale. De plus, il a été convenu que l’OIT/IPEC reprendrait ses activités dans ce pays, avec pour mission de développer des capacités, mener des campagnes de sensibilisation et fournir des services consultatifs et techniques et surtout, au premier chef, assurer une supervision.
La commission note que, dans un rapport daté du 21 août 2013 soumis dans le contexte de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, la CSI déclare qu’en 2012 le gouvernement a contraint systématiquement les enfants âgés de 15 à 17 ans qui étudient dans les collèges et les lycées à participer à la récolte du coton de cette année-là et que, en mai 2013, des enfants ont été forcés de participer aux travaux préparatoires de la récolte, tels que le désherbage et le binage.
La commission note que l’OIE déclare que les discussions ayant eu lieu au cours de cette table ronde ont fait ressortir que le travail des enfants demeure une question épineuse dans ce pays. L’OIE déclare que l’acceptation par le gouvernement de la reprise des activités de l’OIT/IPEC dans le pays, ainsi que de la collaboration du gouvernement avec l’OIT pour l’élaboration, dans le cadre de l’Agenda pour le travail décent, d’un projet de coopération technique de plus vaste ampleur marquent des avancées. L’OIT souligne néanmoins qu’un engagement plein et entier du gouvernement et des partenaires sociaux est nécessaire pour la mise en œuvre des mesures de lutte contre le travail des enfants dans ce pays, y compris pour une amélioration de l’échange d’informations entre les autorités gouvernementales et l’OIT (notamment la présente commission) et la consolidation d’un vaste système de surveillance.
La commission note avec intérêt que les opérations d’observation conjointe de l’OIT et de l’Ouzbékistan se sont déroulées du 11 septembre au 31 octobre 2013, faisant intervenir des unités composées d’observateurs de l’OIT et d’observateurs nationaux. Ces unités d’observation ont bénéficié d’un accès sans restriction et ont effectué des visites non annoncées qui les ont amenées à couvrir près de 40 000 kilomètres dans le pays (le territoire a été subdivisé en huit zones aux fins de l’observation). Ces unités ont effectué 806 visites documentées de sites, incluant 406 exploitations, 206 foyers et 395 établissements assurant l’éducation des enfants et des adolescents. Elles ont également effectué 1 592 entretiens documentés avec des employeurs, des exploitants agricoles, des travailleurs agricoles adultes, des enfants rencontrés dans les exploitations agricoles de coton ou aux abords de celles-ci, des enseignants, des administrateurs d’écoles, des étudiants, des parents et des membres de la société civile. Les observateurs n’ont constaté aucun fait de refus de coopération. Au cours de leurs visites, les unités d’observation ont demandé la production de documents écrits; notamment des pièces d’identité, listes de travail, contrats de travail, bulletins de salaire, registres de fréquentation scolaire, listes afférentes à des cours et à des placements pour travaux pratiques. Le rapport de la mission signale que, dans certains districts, des améliorations seraient nécessaires en ce qui concerne la tenue des registres scolaires, notamment de la fréquentation scolaire, des programmes d’études et des programmes de cours. Les unités d’observation ont également donné suite à de nombreuses allégations, plaintes ou autres informations émanant de médias sociaux. Dans certains cas, elles n’ont pas été en mesure de les vérifier. En d’autres occasions, ces informations se sont avérées utiles, pertinentes et vérifiables. De plus, les observateurs internationaux ont pu participer à des activités locales de sensibilisation et de développement des connaissances, dans le cadre de plus d’une vingtaine de séminaires et autres séances de formation sur le travail décent, les normes internationales du travail et le travail des enfants.
Il ressort du rapport de mission que, d’une manière générale, les observateurs ont enregistré 62 cas de présence d’enfants dans les champs de coton, y compris 57 cas confirmés d’enfants travaillant dans les champs de coton. Sur ces cas, 53 enfants entre 16 et 17 ans (21 filles et 32 garçons) étaient engagés dans la récolte du coton. Ces cas avérés concernaient deux des huit zones évoquées plus haut. Dans toutes les zones qu’ils ont parcourues, les observateurs n’ont signalé aucune école secondaire fermée mais il a été signalé six collèges fermés dans deux zones ainsi qu’un absentéisme notable dans les classes 1 et 2 des collèges de quatre zones. Interrogé sur les raisons de cet absentéisme marqué, le personnel enseignant a attribué ce phénomène à la participation des scolaires à des programmes d’expérience de travail pratique. Il a été mentionné que les fermetures d’établissements étaient dues soit à une épidémie, soit à la récolte du coton, mais que les étudiants de moins de 18 ans ont été transférés dans d’autres classes ou à d’autres activités. L’une des zones dans laquelle avait été constaté un nombre relativement élevé d’enfants employés à la récolte du coton coïncidait avec un absentéisme lui aussi élevé dans les collèges. Toujours selon le rapport de mission, là où le travail d’enfants a été établi et documenté, une action de suivi a été engagée par les autorités locales pour veiller à ce que les enfants concernés soient pris en charge et renvoyés dans leurs établissements. Dans certains cas, des réprimandes, des avertissements ou des amendes ont été infligés aux exploitants agricoles ainsi qu’aux responsables des établissements éducatifs.
Le rapport de mission fait état, en outre, d’une bonne collaboration et coopération de la part des autorités nationales et locales tout au long des préparatifs et de la conduite des opérations d’observation. L’observation effectuée dans les huit zones a permis de constater une large sensibilisation aux instructions nationales relayée par les Mahalla (administrations locales) tendant à ce qu’il ne soit pas fait appel à des personnes de moins de 18 ans pour la récolte du coton. Il est indiqué dans ce rapport que, si le respect de l’obligation légale de ne pas employer les personnes de moins de 18 ans à la récolte du coton semble se consolider, des lacunes demeurent dans la pratique. Il arrive encore que des enfants soient employés pendant la récolte du coton, mais dans une mesure limitée. Enfin, il est affirmé dans le rapport de mission qu’il ne semble pas qu’il ait été fait recours de manière systématique au travail forcé d’enfants dans le cadre de la campagne de récolte du coton de 2013.
La commission note que le gouvernement déclare dans son rapport daté du 11 novembre 2013 que les mesures de suivi appropriées ont été prises pour que les enfants réintègrent leurs établissements scolaires chaque fois que les opérations de surveillance ont permis de découvrir des situations de cet ordre. Dans certains cas spécifiques, des sanctions administratives ont été prises à l’égard des personnes responsables. Le gouvernement indique qu’il serait utile d’améliorer le système public de surveillance pour prévenir l’utilisation d’enfants de moins de 18 ans à la récolte du coton et aussi pour répondre à d’autres problèmes de respect des normes du travail. Il déclare à cet égard qu’il est attaché à une poursuite de la coopération avec l’OIT dans le cadre plus large de l’Agenda pour le travail décent, y compris à travers des mesures propres à éradiquer le travail des enfants et le travail forcé, conformément aux conventions de l’OIT nos 182 et 105, et il fait appel à l’assistance technique du BIT pour la mise en œuvre de telles mesures. La commission observe que, d’après le rapport de mission, ces questions de mise en œuvre concernent notamment le cadre et les diverses pratiques qui sont associés à l’ensemble de la production du coton. A cet égard, elle invite à se reporter aux commentaires qu’elle formule dans le contexte de la convention no 105.
La commission se félicite de la collaboration du gouvernement avec l’OIT pour l’observation du travail des enfants pendant la récolte du coton et prend acte de la volonté politique déclarée du gouvernement de s’attaquer au problème du travail des enfants dans le pays. Elle observe que, si des enfants âgés de 16 et 17 ans continuent d’être occupés à la récolte du coton, des progrès considérables ont été réalisés dans le sens de l’application complète de la convention. La commission prie instamment le gouvernement de poursuivre et renforcer ses efforts pour assurer une application effective de la législation nationale interdisant le travail obligatoire et l’occupation d’enfants de moins de 18 ans à un travail dangereux. A cet égard, elle prie instamment le gouvernement de continuer de collaborer avec l’OIT, notamment l’OIT/IPEC, et avec les partenaires sociaux en vue d’une élimination totale de l’emploi d’enfants, y compris de 16 à 18 ans, à un travail dangereux dans le cadre de la récolte du coton. Elle prie le gouvernement de continuer de donner des informations sur les mesures prises à cet égard, y compris sur les mesures prises pour surveiller la récolte du coton, renforcer la vigilance des établissements d’enseignement, sanctionner les personnes qui engagent des enfants dans la récolte du coton et enfin sensibiliser davantage le public à ce sujet.
La commission soulève par ailleurs d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2014.]
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer