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Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Bélarus (Ratification: 1956)

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Suivi donné aux conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 102e session, juin 2013)

Suivi des recommandations de la commission d’enquête (plainte présentée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT)

La commission prend note de la discussion qui a eu lieu devant la Commission de l’application des normes de la Conférence en juin 2013 à propos de l’application de la convention. Elle prend également note du 369e rapport du Comité de la liberté syndicale sur les mesures prises par le gouvernement de la République du Bélarus afin de mettre en œuvre les recommandations de la commission d’enquête.
La commission prend note en outre des commentaires soumis par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication du 30 août 2013, alléguant de nombreuses violations de la convention, notamment le refus du droit d’organiser des piquets de grève et des manifestations, la radiation d’un syndicat de base affilié au Syndicat des travailleurs de la radio et de l’électronique (REWU) et des pressions et menaces exercées par les autorités envers les responsables du Syndicat libre des travailleurs de la métallurgie (FMWU). La commission prie le gouvernement de fournir des observations détaillées sur les allégations de la CSI. La commission prend note en outre des commentaires soumis par l’Organisation internationale des employeurs (OIE) dans une communication en date du 30 août 2013.
Article 2 de la convention. Droit des travailleurs de constituer des organisations. La commission rappelle que, dans ses précédentes observations, elle avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que le décret présidentiel no 2 et son règlement d’application soient modifiés afin d’en supprimer les obstacles à l’enregistrement des syndicats (les dispositions relatives à l’adresse légale et à la règle du minimum de 10 pour cent de l’effectif). La commission note que, dans la déclaration qu’il a faite devant la Commission de la Conférence en juin 2013, le gouvernement a évoqué sa proposition de modification du décret afin d’en supprimer le critère de 10 pour cent minimum des effectifs requis pour la création d’un syndicat d’entreprise. La commission regrette qu’aucune information additionnelle n’ait été fournie par le gouvernement concernant les progrès effectués à cet égard. En outre, la commission regrette profondément l’absence de toute mesure tangible prise par le gouvernement ainsi que l’absence de toute proposition concrète visant à modifier le critère de l’adresse légale, qui semble continuer à faire obstacle à l’enregistrement des syndicats et de leurs organisations de base dans la pratique.
A cet égard et faisant référence à sa précédente observation et au 369e rapport du Comité de la liberté syndicale, la commission exprime sa préoccupation concernant la situation en matière de droits syndicaux dans l’entreprise Granit. La commission rappelle l’allégation selon laquelle la direction de l’entreprise a refusé de fournir à une organisation de base du Syndicat indépendant du Bélarus (BITU) l’adresse légale exigée, en application du décret no 2, pour l’enregistrement d’un syndicat. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que la majorité des membres du Conseil tripartite pour l’amélioration de la législation sociale et du travail, ayant discuté de la question à leur réunion du mois de mars 2013, avait exprimé des doutes quant à la création du syndicat de base du BITU et considéré que les mesures décidées par la direction de l’entreprise se justifiaient du fait que le BITU n’avait pas communiqué le procès-verbal de la réunion à laquelle le syndicat avait été fondé. Le gouvernement estime que, bien que la législation ne contienne pas de critère chiffré pour la création d’un syndicat de base, d’autres conditions doivent être remplies, notamment l’obligation de tenir une réunion constitutive. D’après le gouvernement, l’analyse de la situation a soulevé suffisamment de doutes quant au fait que cette réunion se soit effectivement tenue et quant à la question de savoir si l’organisation avait réellement été créée. La commission note en outre que le gouvernement indique que, suivant la législation, les employeurs ne sont pas tenus de mettre des locaux à la disposition du syndicat et que cette question doit être réglée par le biais de la négociation collective. D’autre part, le syndicat n’est pas obligé d’avoir son adresse légale dans les locaux de l’entreprise et il est libre de louer des locaux ailleurs. D’après le gouvernement, alors que le Congrès des syndicats démocratiques du Bélarus (CSDB) allègue avoir essuyé un refus lorsqu’il a voulu louer des locaux adéquats, il ne fournit aucune information spécifique pour étayer ses allégations. Enfin, le gouvernement indique qu’à ce jour le BITU n’a pas contacté les autorités compétentes concernant l’enregistrement ou l’homologation de son organisation syndicale de base.
La commission relève ce qui semble être des informations contradictoires à propos de la création de l’organisation de base du BITU, qu’évoque le gouvernement dans ses communications à la présente commission ainsi qu’au Comité de la liberté syndicale. La commission rappelle que la commission d’enquête de 2004 a longuement examiné les difficultés rencontrées dans la pratique par les syndicats extérieurs à la structure de la Fédération des syndicats du Bélarus (FPB) pour obtenir une adresse légale (voir paragr. 590 à 598 du rapport). Elle regrette profondément que, près de dix ans plus tard, ces difficultés semblent persister. La commission croit comprendre que, en l’absence d’adresse légale, compte tenu du critère en la matière imposé par le décret no 2 et des restrictions à ce que peut constituer une adresse légale valide imposées par, entre autres textes de loi, le Code du logement et le Code civil, le BITU n’a plus demandé l’enregistrement de son syndicat de base. Tout en prenant note de l’indication fournie par le gouvernement suivant laquelle il n’y a eu en 2012 aucun cas de refus d’enregistrement d’organisations syndicales, la commission note avec un profond regret que, en dépit des nombreuses demandes en ce sens des organes de contrôle de l’OIT, le gouvernement n’a pris aucune mesure tangible pour modifier le décret. Au vu de ce qui précède, la commission prie instamment le gouvernement d’agir en concertation avec les partenaires sociaux pour modifier le décret no 2 et régler la question de l’enregistrement des syndicats dans la pratique, notamment en réexaminant la situation du syndicat de base du BITU en vue d’autoriser son enregistrement. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport tout progrès réalisé à cet égard.
Concernant sa précédente demande d’informations détaillées à propos de la précédente allégation du CSDB relative au refus de la municipalité de Polotsk d’enregistrer le syndicat de base affilié au syndicat libre des «travailleurs indépendants du marché agricole collectif de plein air», la commission regrette que la réponse du gouvernement se limite à indiquer que le syndicat n’avait pas fourni le dossier complet requis en vue de son enregistrement. Elle attend donc du gouvernement qu’il fournisse dans son prochain rapport des observations détaillées à ce sujet.
Articles 3, 5 et 6. Droit des organisations de travailleurs, y compris les fédérations et confédérations, d’organiser leurs activités. La commission rappelle qu’elle avait précédemment exprimé ses préoccupations à propos des allégations de refus réitérées auxquelles se seraient heurtés le CSDB, le BITU et le REWU, suite à leurs demandes d’autorisation de manifestations et de réunions, et qu’elle avait demandé que le gouvernement diligente des enquêtes indépendantes sur les faits allégués, et attire l’attention des autorités compétentes sur le droit des travailleurs de participer à des manifestations pacifiques pour la défense de leurs intérêts professionnels. La commission note que le gouvernement indique que ces allégations sont trop générales et ne lui permettent donc pas de les commenter. La commission note avec préoccupation l’allégation de la CSI faisant état du refus par le comité exécutif de la municipalité de Minsk d’autoriser la tenue d’une manifestation prévue par le BITU pour le 20 juillet 2013. Rappelant que les manifestations pacifiques sont protégées par la convention et que les réunions et manifestations publiques ne doivent pas être arbitrairement interdites, la commission prie instamment le gouvernement d’enquêter, en collaboration avec les organisations précitées, sur tous les cas allégués de refus d’autoriser la tenue de manifestations et de réunions et d’attirer l’attention des autorités compétentes sur le droit des travailleurs de manifester et de se réunir pacifiquement pour la défense de leurs intérêts professionnels.
La commission rappelle qu’elle avait précédemment pris note avec préoccupation des allégations du CSDB selon lesquelles, suite à la rencontre de la secrétaire générale de l’organisation régionale du BITU de Soligorsk, avec plusieurs travailleuses (sur le chemin menant à leur travail), cette dernière avait été arrêtée par la police le 4 août 2010, inculpée de délit administratif et condamnée à une amende. Selon le CSDB, le tribunal avait considéré que, en rencontrant des membres du syndicat non loin du portail d’entrée de l’entreprise, cette dirigeante syndicale avait violé la loi sur les activités de masse. La commission avait demandé que le gouvernement communique ses commentaires sur les faits ainsi allégués par le CSDB. La commission regrette profondément que le gouvernement ne donne aucune information à ce sujet. En conséquence, elle réitère sa demande.
A cet égard, la commission rappelle que, depuis un certain nombre d’années, elle demande au gouvernement de modifier la loi sur les activités de masse, qui fait peser des restrictions sur ces activités et qui prévoit la dissolution de toute organisation (y compris un syndicat) pour une seule infraction à ces dispositions (art. 15), tandis que ses organisateurs peuvent être accusés de violation du Code administratif, encourant ainsi une peine de détention administrative. La commission regrette profondément, une fois encore, que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur les mesures concrètes prises à cet égard. En conséquence, elle réitère sa précédente demande.
S’agissant de sa précédente demande de modification du décret présidentiel no 24 relatif à l’utilisation de l’aide gratuite de l’étranger, la commission note que le gouvernement indique qu’en aucun cas des demandes d’enregistrement d’une telle aide n’ont été refusées et que les organisations qui ont demandé cet enregistrement l’ont obtenu. Tout en prenant note de cette information, la commission rappelle que la commission d’enquête observait dans son rapport que le décret interdit «l’utilisation d’une aide gratuite de l’étranger pour, entre autres choses, mener des réunions publiques, des rassemblements, des cortèges, des manifestations, des piquets, des grèves ou organiser des séminaires ou d’autres formes de campagnes auprès de la population. Le non-respect de cette disposition fait encourir à l’organisation de fortes amendes ainsi que, éventuellement, la cessation de ses activités. Alors que le gouvernement affirme que le décret no 24 ne vise qu’à rendre la situation antérieure transparente et instaure une procédure simple et rapide dans l’enregistrement de l’aide étrangère, la commission a entendu de l’une des organisations d’employeurs qu’il s’agissait au contraire d’une démarche onéreuse et de longue haleine. La commission rappelle que, selon les principes établis par les organes de contrôle de l’OIT, le droit reconnu aux articles 5 et 6 de la convention no 87 implique le droit de bénéficier des liens qui peuvent avoir été noués avec une organisation internationale de travailleurs ou d’employeurs. Une législation qui interdit à un syndicat national ou une organisation nationale d’employeurs d’accepter une aide financière venant d’une organisation internationale de travailleurs ou d’employeurs, à moins que cette aide n’ait été approuvée par le gouvernement, et qui permet d’interdire une organisation s’il est avéré qu’elle a reçu une telle aide sans l’autorisation prescrite n’est pas conforme à ce droit. Bien qu’il n’y ait pas eu de dénonciations spécifiques concernant l’application pratique de ce décret, la commission réitère les conclusions de ces mêmes organes de contrôle selon lesquelles l’autorisation préalable prescrite par le décret no 24 afin de pouvoir bénéficier d’une aide gratuite de l’étranger et les restrictions qu’il impose à l’utilisation de cette aide sont incompatibles avec le droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leurs propres activités et de bénéficier de l’assistance que peuvent leur apporter des organisations internationales de travailleurs et d’employeurs.» (Voir paragr. 623 et 624 du rapport de la commission d’enquête.) En conséquence, la commission prie de nouveau instamment le gouvernement de modifier, en consultation avec les partenaires sociaux, le décret no 24 pour faire en sorte que les organisations de travailleurs et d’employeurs puissent effectivement organiser leur administration et leurs activités et bénéficier de l’aide d’organisations internationales de travailleurs et d’employeurs conformément aux articles 5 et 6 de la convention. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur toutes les mesures prises à cet égard.
La commission regrette que le gouvernement n’ait fourni aucune information sur les mesures concrètes prises pour modifier les articles 388, 390, 392 et 399 du Code du travail affectant le droit des organisations de travailleurs à organiser librement leurs activités. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement demande de préciser dans quelle mesure la position de la commission à cet égard reflète une position nuancée des partenaires sociaux en fonction des principes du tripartisme. La commission rappelle qu’elle demande au gouvernement de modifier les dispositions précitées depuis l’adoption du Code du travail, en 1999. En conséquence, elle encourage le gouvernement à réviser ses dispositions en consultation avec les partenaires sociaux et à fournir des informations sur toutes les mesures prises ou envisagées à cette fin.
La commission note avec un profond regret l’absence de tout progrès de la part du gouvernement s’agissant de la mise en œuvre des recommandations de la commission d’enquête et de l’amélioration de l’application de la convention en droit et dans la pratique pendant la période couverte par le rapport. A vrai dire, le gouvernement n’a fourni aucune information sur les mesures prises afin de modifier les dispositions législatives en question, comme l’avaient demandé précédemment cette commission, la Commission de la Conférence, la commission d’enquête et le Comité de la liberté syndicale. En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de redoubler d’efforts afin d’assurer que la liberté syndicale et le respect des libertés publiques sont garantis pleinement et effectivement, en droit et dans la pratique, et elle exprime le ferme espoir que le gouvernement intensifiera sa coopération avec tous les partenaires sociaux à cet égard.
La commission accueille favorablement l’acceptation par le gouvernement d’une mission de contacts directs en vue d’obtenir un panorama complet de la situation des droits syndicaux dans le pays et d’aider le gouvernement à mettre en œuvre, rapidement et efficacement, toutes les recommandations en suspens qui ont été formulées par la commission d’enquête. La commission espère que cette mission aura lieu dans un avenir très proche.
[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 103e session, et de répondre en détail aux présents commentaires en 2014.]
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