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Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Türkiye (Ratification: 1961)

Autre commentaire sur C105

Réponses reçues aux questions soulevées dans une demande directe qui ne donnent pas lieu à d’autres commentaires
  1. 2019

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La commission note que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:
Répétition
La commission prend note des observations formulées par la Confédération des syndicats turcs (TÜRK-İŞ) en date du 10 novembre 2011, et par la Confédération turque des associations d’employeurs (TİSK) en date du 8 novembre 2011, ainsi que du rapport du gouvernement.
Article 1 a) de la convention. Mesure de coercition politique et sanction de l’expression d’opinions opposées à l’ordre établi. 1. Code pénal. La commission a noté précédemment que des peines d’emprisonnement (comportant l’obligation de travailler, en vertu de l’article 198 du règlement no 6/8517 tel que modifié relatif à l’administration des établissements pénitentiaires et à l’exécution des peines, adopté par décision du Conseil des ministres du 5 juillet 1967) peuvent être imposées en vertu de l’article 301 du Code pénal. Cet article 301 (1) et (2) du Code pénal (tel que modifié par la loi no 5759 du 30 avril 2008) érige en infraction pénale, passible d’une peine d’emprisonnement de six mois à deux ans, le dénigrement de la nation turque, de l’Etat de la République turque, de la grande Assemblée nationale de Turquie, du gouvernement de la République de Turquie ainsi que les organes judiciaires, l’armée et ses structures et de sécurité de l’Etat. La commission a noté que, aux termes de l’article 301 (3) tel que modifié, l’expression d’idées sous la forme de critiques ne sera pas punie. Elle a prié le gouvernement de fournir des informations sur l’application de l’article 301 du Code pénal dans la pratique.
La commission note que l’article 301 (4) du Code pénal tel que modifié précise que les poursuites judiciaire initiées sur la base de cet article seront soumises à l’approbation du ministre de la Justice. A cet égard, elle note que, d’après les informations données par le gouvernement dans son rapport, entre mai 2008 et mars 2011, le ministère de la Justice a reçu du bureau du procureur 1 570 dossiers concernant l’article 301 du Code pénal. Il n’a approuvé l’ouverture d’une enquête que dans 5,8 pour cent des cas, c’est-à-dire pour 88 dossiers, les 1 382 autres ayant été classés sans suite. Sur ces 88 affaires, 30 concernaient des actes commis par voie de presse et 58 des infractions d’«outrage flagrant». Sur les 88 dossiers ayant donné lieu à enquête, 49 (mettant en cause 62 suspects) ont été menés à leur terme, et 34 personnes ont été condamnées sur la base de l’article 301, dont 28 à une peine d’emprisonnement. Le gouvernement déclare que le nombre des enquêtes autorisées par le ministère de la Justice sur la base de l’article 301 a considérablement diminué et que cette disposition n’est pas utilisée systématiquement pour restreindre la liberté d’expression, notamment la liberté de presse.
La commission note dans ses observations de 2011 que la Confédération turque des associations d’employeurs (TİSK) déclare que l’amendement apporté à l’article 301, exigeant l’autorisation du ministère de la Justice pour l’ouverture d’enquêtes, a entraîné une chute du nombre de poursuites initiées sur la base de cet article. Au cours des sept premiers mois de 2010, seulement 3,57 pour cent des dossiers soumis ont donné lieu à enquête. La commission note que l’équipe de pays des Nations Unies déclare, dans un rapport du Haut Commissariat aux droits de l’homme établi dans le cadre de l’Examen périodique universel du 19 février 2010 (A/HRC/WG.6/8/TUR/2, paragr. 46), que l’article 301 du Code pénal n’est plus utilisé systématiquement pour restreindre la liberté d’expression et que l’amendement à cet article a entraîné un recul marqué des poursuites par rapport aux années précédentes. Prenant dûment note des informations communiqués par le gouvernement, la commission le prie de continuer de fournir des informations sur l’application de l’article 301 du Code pénal dans la pratique, notamment sur le nombre et la nature des infractions, en particulier dans les affaires à l’issue desquelles des peines d’emprisonnement sont imposées.
2. Loi contre le terrorisme. La commission a noté dans ses précédents commentaires que l’article 8 de la loi no 3713 de 1991 contre le terrorisme interdit la propagande contre l’indivisibilité de l’Etat. Ayant noté que cette législation avait été modifiée en 2006, elle a demandé des informations au sujet de ces amendements.
La commission note que le gouvernement indique que la loi no 3713 a été modifiée en 2006 par la loi no 5532 et que, suite à ces modifications, l’article 8 de la loi no 3713 a été remplacé, ledit article ayant trait désormais au financement du terrorisme. Toutefois, la commission note également que l’article 6(2) de loi no 3713 dans sa teneur modifiée punit d’une peine de un à trois ans d’emprisonnement (alors qu’antérieurement il s’agissait d’une amende) le fait d’imprimer ou de diffuser des déclarations ou tracts d’organisations terroristes. Lorsque cette infraction est commise par voie de presse, l’article 6(4) punit le propriétaire de l’organe de presse d’une peine de 1 000 à 10 000 jours d’emprisonnement et l’éditeur d’une peine pouvant atteindre 5 000 jours d’emprisonnement, même si ni l’un ni l’autre n’ont participé personnellement à la réalisation de l’infraction. En outre, l’article 7(2) de la loi no 3713 punit d’un à cinq ans d’emprisonnement la propagande en faveur d’une organisation terroriste, peine qui est majorée de moitié si elle est commise par voie de presse, cas dans lequel le propriétaire et l’éditeur sont passibles de 1 000 à 10 000 jours d’emprisonnement.
La commission rappelle à cet égard que des restrictions peuvent être imposées par la loi aux droits et libertés individuels pour assurer le respect des droits et libertés d’autrui et répondre aux exigences de l’ordre public et du bien-être général dans une société démocratique et que la convention n’interdit pas de punir de peines comportant une obligation de travailler ceux qui auront usé de la violence, auront incité à la violence ou se seront livrés aux actes préparatoires de la violence. Toutefois, lorsque de telles restrictions sont formulées dans des termes si larges et si généraux qu’elles peuvent donner lieu à l’imposition de peines comportant une obligation de travailler pour punir l’expression pacifique d’opinions opposées à l’ordre politique, social ou économique établi, de telles peines seraient alors contraires à la convention. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer qu’aucune peine de prison comportant une obligation de travailler ne peut être imposée, sur la base de la loi no 3713, à des personnes qui, sans user de violence ni prôner la violence, expriment certaines opinions politiques ou leur opposition à l’ordre politique, social ou économique établi. A cet égard, la commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur l’application dans la pratique des articles 6(2), 6(4) et 7(2) de la loi no 3713 dans sa teneur modifiée, notamment sur les poursuites engagées ainsi que sur les condamnations et sanctions prononcées.
3. Loi sur les partis politiques. La commission a noté précédemment que des peines d’emprisonnement (comportant l’obligation de travailler) peuvent être imposées en vertu des articles 80 à 82, lus conjointement avec l’article 117, de la loi sur les partis politiques (no 2820, 1983), articles qui interdisent aux partis politiques de chercher à modifier le principe de l’unité de l’Etat, d’affirmer l’existence de minorités sur la base d’une culture nationale ou religieuse ou de différences raciales ou linguistiques, de chercher à former des minorités en protégeant et encourageant les langues et cultures autres que la langue et la culture turques, en utilisant une langue autre que le turc dans la rédaction et la publication des statuts et programmes des partis ou en militant pour le régionalisme. La commission a noté, par la suite, que le gouvernement avait indiqué que des changements devaient être apportés à cette loi, conformément au Plan d’action d’urgence publié le 3 janvier 2003, dans le but de garantir que toute la population soit en mesure de participer à des partis politiques et pour rendre possible l’instauration de l’équité et de la justice dans la représentation politique.
La commission note que le gouvernement indique que l’article 83 de la loi sur les partis politiques interdit à ceux-ci de militer pour le régionalisme ou pour le racisme dans le pays. Elle note que le gouvernement se réfère à diverses dispositions du Code pénal, dont l’article 122, qui interdit la discrimination contre les personnes dans les activités commerciales, les services publics et l’activité économique. La commission observe que ces dispositions n’ont pas de lien direct avec l’application de la loi sur les partis politiques. Se référant au paragraphe 307 de son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales concernant les droits au travail, la commission rappelle que l’interdiction de certaines opinions politiques (s’appuyant sur des sanctions comportant une obligation de travailler) en raison de l’interdiction de certains partis politiques ou de certaines associations n’est pas conforme à la convention. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les articles 80-82 de la loi sur les partis politiques soient modifiés de telle sorte que des peines d’emprisonnement (comportant une obligation de travailler) ne puissent être imposées pour le fait d’avoir exprimé certaines opinions politiques, suite à l’interdiction de certains partis politiques ou certaines associations. Dans l’attente de l’adoption de ces amendements, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de ces dispositions dans la pratique.
Article 1 b). Utilisation de conscrits à des fins de développement économique. La commission a noté précédemment que l’article 10 de la loi no 1111 sur le service militaire, telle que modifiée par la loi no 3358, ainsi que l’article 5 de la résolution du Conseil des ministres no 87/11945 du 12 juillet 1987, adopté en application de l’article 10 de la loi no 1111, fixent les procédures de gestion du personnel de réserve, y compris les individus soumis à l’obligation d’accomplir le service militaire qui sont affectés à certaines fonctions dans les organismes et institutions publics. A cet égard, la commission a noté l’indication du gouvernement selon laquelle la loi no 3358 modifiant l’article 10 de la loi sur le service militaire no 1111 n’était plus appliquée depuis 1991. Le gouvernement a indiqué en outre qu’un nouveau projet de loi sur le service militaire, visant à rendre la législation conforme aux «conditions actuelles», avait été examiné par un comité d’experts de la grande Assemblée nationale turque. Il a indiqué en particulier que ce projet de loi avait été conçu de manière à incarner une politique de protection des personnes soumises au service militaire par conscription contre leur affectation sans leur consentement à des tâches dans des organes ou entreprises publics. La commission a demandé au gouvernement de fournir des informations sur l’adoption de ce projet de loi.
La commission note que le gouvernement déclare que le projet de loi tendant à modifier la loi no 1111 sur le service militaire a été soumis à la grande Assemblée nationale turque en 2008 mais qu’il n’a pas été discuté au cours de cette session législative. Cependant, il déclare que les personnes travaillant pour le ministère de la Défense nationale sont employées moyennant un contrat de services. La commission prie le gouvernement de redoubler d’efforts pour modifier la loi no 1111 sur le service militaire afin de la mettre en conformité avec la convention et la pratique indiquée.
Article 1 d). Sanction pour participation à des grèves. La commission a noté que les articles 70-72, 75, 77 et 79 de la loi no 2822 de 1983 concernant les conventions collectives, les grèves et les lock-out prévoient des peines d’emprisonnement (lesquelles comportent une obligation de travailler) en cas de participation à des grèves illégales, dans des circonstances relevant du champ d’application de l’article 1 d) de la convention. Elle a exprimé le ferme espoir que la loi no 2822 serait modifiée. La commission note que le gouvernement déclare que des négociations avec les partenaires sociaux sont actuellement en cours en vue de modifier la loi no 2822. Il ajoute que la modification de cette loi constitue l’une de ses priorités. Se référant aux commentaires qu’elle formule dans le cadre de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la loi no 2822 afin qu’elle ne prévoit aucune peine d’emprisonnement assortie d’une obligation de travailler pour sanctionner la participation pacifique à des grèves.
La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.
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