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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Mexique (Ratification: 2000)

Autre commentaire sur C182

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Articles 3 a) et 7, paragraphe 1, de la convention. Vente et traite d’enfants et sanctions. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que le Centre national de planification, d’analyse et d’information pour la lutte contre la délinquance (CENAPI), dépendant des services du Procureur général de la République, avait développé le Système national contre la traite des personnes (SINTRA) en vue de recueillir des informations sur la traite des personnes et autres délits connexes. La commission avait également pris note des statistiques fournies par le service du Procureur spécial chargé de la violence envers les femmes et de la traite des personnes (FEVIMTRA) concernant le nombre des enquêtes, condamnations et sanctions. Or la commission s’était dite préoccupée par le nombre peu élevé, malgré l’ampleur du phénomène, de condamnations obtenues pour des faits de traite d’enfants de moins de 18 ans en vue de leur exploitation sexuelle à des fins commerciales et par les allégations de complicité de fonctionnaires de l’Etat dans cette traite.
La commission prend note avec intérêt de l’adoption, le 14 juin 2012, de la loi générale visant à prévenir, réprimer et éradiquer les délits se rapportant à la traite des personnes et à protéger et aider les victimes de ces délits, laquelle abroge la loi du 27 novembre 2007 relative à la prévention et à la répression de la traite des personnes. Elle note que cette loi érige en délits pénaux non seulement la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle et d’exploitation par le travail, mais aussi l’utilisation d’enfants pour la production de matériel pornographique, pour la mendicité et les activités illicites. Elle note en outre que l’article 42(VII) prévoit que les sanctions peuvent être augmentées dans une proportion pouvant aller jusqu’à 50 pour cent lorsque la victime a moins de 18 ans. La loi institue également, pour ce qui est de la lutte contre ce délit, un cadre juridique et institutionnel général définissant les prérogatives, les devoirs et la coordination des divers acteurs impliqués dans la prévention et la répression de ces délits, ainsi que la protection des victimes par le biais d’une aide et de soins spécialisés pour les victimes de moins de 18 ans.
La commission prend note des informations statistiques fournies par le gouvernement dans son rapport sur l’application pratique de la loi relatives à la prévention et à la répression de la traite des personnes. Entre les mois de juin 2011 et juillet 2012, seuls trois délits de traite d’enfants de moins de 18 ans ont été signalés dans la province de Veracruz. Or la commission observe que les informations fournies par le gouvernement ne précisent pas le nombre des condamnations prononcées ni le nombre de cas de complicité de fonctionnaires impliqués dans la traite de mineurs ni les types de sanctions imposées.
La commission exprime le ferme espoir que la mise en œuvre de la loi générale du 14 juin 2012 sur la prévention, la répression et l’éradication des crimes liés à la traite des personnes et sur la protection et l’assistance aux victimes de ces crimes permettra au gouvernement de lutter avec plus d’efficacité contre la vente et la traite d’enfants et d’adolescents de moins de 18 ans. Dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle loi, la commission prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts pour assurer l’élimination dans la pratique de ces pires formes de travail des enfants en veillant à ce que des enquêtes approfondies et la poursuite efficace des personnes qui se livrent à de tels actes, y compris des fonctionnaires de l’Etat soupçonnés de complicité, soient menées à leur terme et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées dans la pratique. Elle le prie de fournir, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur l’application de cette nouvelle loi dans la pratique par les Etats de la fédération, notamment sur le nombre des infractions signalées, des enquêtes menées, des poursuites engagées, des condamnations prononcées et des sanctions pénales imposées.
Article 3 b). Utilisation, recrutement ou offre d’un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note de la constitution d’une base de données fédérale sur le nombre et la nature des infractions relatives à la prostitution, l’exploitation sexuelle et le tourisme sexuel impliquant des personnes de moins de 18 ans et avait pris note du nombre d’enquêtes et de condamnations relatives à des faits de prostitution et de pornographie infantile. Elle avait également pris note des observations finales du Comité des droits de l’enfant du 7 avril 2011 sur le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, qui se disait inquiet de l’ampleur du tourisme pédophile, en particulier dans les régions touristiques (CRC/C/OPSC/MEX/CO/1, paragr. 27).
La commission relève dans les statistiques fournies par le gouvernement dans son rapport qu’entre juin 2011 et juillet 2012, le FEVIMTRA a ouvert 14 enquêtes sur des cas de pornographie impliquant des personnes de moins de 18 ans, lesquelles sont actuellement en cours. Elle note également que, suivant la base de données fédérale regroupant des informations sur le nombre et la nature des délits relatifs à la prostitution, à l’exploitation sexuelle et au tourisme sexuel impliquant des personnes de moins de 18 ans, entre les mois de juin 2011 et juillet 2012, un total de 11 délits portant sur l’utilisation d’un enfant à des fins de pornographie ont été signalés dans les Etats de Chiapas et de Chihuahua. La commission note en outre que le service du Procureur général de la République indique que le 21 février 2012 a été prononcée une condamnation à sept années de prison pour des faits de pornographie infantile. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le nombre des infractions signalées, des enquêtes menées, des poursuites engagées, des condamnations prononcées et des sanctions pénales imposées pour des infractions en matière de prostitution infantile et de pornographie infantile.
Articles 3 d) et 4, paragraphe 1. Travaux dangereux et détermination de la liste de travaux dangereux. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que certaines dispositions de la législation nationale fixe à 18 ans l’âge d’admission à certains types de travaux qui, par leur nature et les circonstances dans lesquelles ils s’exercent, risquent de porter atteinte à la santé, à la sécurité ou à la moralité des adolescents. Elle avait cependant noté que, exception faite de cette disposition, l’âge général d’admission à des travaux dangereux ou insalubres est fixé à 16 ans. La commission avait également noté que le gouvernement avait dressé, en collaboration avec l’OIT/IPEC, une liste des travaux dangereux et insalubres interdits aux enfants, en vue de l’adopter sous forme de législation nationale.
La commission note que, le 14 novembre 2012, le Sénat et le Congrès ont approuvé un décret de réforme de la loi fédérale sur le travail intitulé «Initiative en vue de réformer, ajouter et abroger diverses dispositions de la loi fédérale sur le travail» comportant, en ses articles 175 et 176, une liste détaillée des travaux dangereux pour les enfants. La commission note que ce décret n’est pas encore entré en vigueur parce qu’il doit encore être signé par le Président et être publié au Bulletin officiel. Tout en se félicitant de l’adoption de cette liste, la commission note avec préoccupation que seul un nombre réduit d’activités (six) reprises à l’article 176(b) est interdit aux personnes de moins de 18 ans, tandis que l’article 176(a) autorise l’affectation d’enfants à une série d’activités dangereuses (27) dès l’âge de 16 ans. Ainsi, hormis les exceptions prévues à l’article 176(b), l’âge minimum général fixé pour l’admission aux types de travail dangereux et insalubres reste inchangé à 16 ans. A cet égard, la commission avait noté précédemment qu’il n’existe dans la législation mexicaine aucune disposition autorisant l’emploi ou le travail de jeunes dès l’âge de 16 ans dans des conditions strictes de protection et de formation préalable, conformément au paragraphe 4 de la recommandation (nº 190) sur les pires formes de travail des enfants, 1999. La commission note que le processus de réforme de la législation du travail n’a pas abordé cette question qui ne fait l’objet d’aucune disposition du décret précité.
Dans ce contexte, la commission attire également l’attention sur les résultats du module intitulé «Travail des enfants» publié dans le cadre de l’étude nationale de 2011 sur l’emploi et la profession, qui indique que, en 2011, 28 pour cent de tous les enfants et adolescents âgés de 5 à 17 ans ayant une activité étaient exposés à des risques dans leur travail. Ce pourcentage représente 850 000 enfants, dont 79,3 pour cent de garçons et 20,7 pour cent de filles. Ces risques consistent notamment en une exposition à de la poussière, des fumées ou au feu, à un bruit excessif, de l’humidité ou des températures extrêmes, des outils dangereux, des machines lourdes, une pénombre excessive, des produits chimiques, des explosifs et des chocs électriques. La commission note que beaucoup de ces risques sont afférents aux activités mentionnées à l’article 176(a) du décret précité et qui sont autorisées aux enfants dès l’âge de 16 ans.
En conséquence, la commission observe à nouveau que l’âge minimum général fixé par la loi fédérale sur le travail, même après approbation du processus de réforme de la législation du travail, pour l’admission à des types de travail dangereux et insalubres, est de 16 ans (art. 175(a)), ce qui contrevient à l’article 3 d) de la convention. La commission rappelle au gouvernement que, aux termes de l’article 3 d) de la convention, les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s’exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant, constituent une des pires formes de travail des enfants et que, conformément à l’article 1 de la convention, les Etats Membres doivent prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer l’interdiction et l’élimination des pires formes de travail des enfants, et ce de toute urgence. Elle rappelle également que le paragraphe 4 de la recommandation no 190 mentionne la possibilité d’autoriser, après consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs, l’emploi ou le travail de jeunes à partir de l’âge de 16 ans, pour autant que la santé, la sécurité et la moralité de ces enfants soient totalement protégées et qu’ils aient reçu un enseignement particulier ou une formation professionnelle adaptés à la branche d’activité dans laquelle ils seront occupés.
La commission prend note avec préoccupation du nombre élevé d’enfants de 16 à 18 ans engagés dans des activités dangereuses dans la pratique. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de mettre sa législation en conformité avec l’article 1 de la convention, lu conjointement avec l’article 3 d), pour faire en sorte que le travail dangereux soit interdit aux enfants de moins de 18 ans. Toutefois, lorsqu’un tel travail est effectué par des jeunes de 16 à 18 ans, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que ce travail ne soit effectué que dans le respect des conditions strictes énoncées au paragraphe 4 de la recommandation no 190, à savoir pour autant que la santé et la sécurité de ces jeunes soit protégée et qu’ils reçoivent un enseignement particulier ou une formation professionnelle adaptés à cette activité. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès accomplis à cet égard.
Article 6. Programmes d’action. Traite. Faisant suite à ses commentaires précédents, la commission note que le gouvernement a adopté une série de mesures dans le cadre du Programme national 2011 pour la prévention et la suppression de la traite. En collaboration avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, le gouvernement procède à une étude de diagnostic sur la situation nationale en matière de traite des personnes. En outre, la commission prend note de l’élaboration de plusieurs protocoles relatifs à l’harmonisation des procédures en matière d’enquêtes et de poursuites dans les cas de traite, ainsi qu’aux soins à apporter aux victimes, à la mise en place de mécanismes destinés à alerter les populations vulnérables à la traite des personnes (en particulier les peuples autochtones et les jeunes), à diverses activités d’information et de sensibilisation ainsi qu’à des efforts de renforcement des capacités à l’intention des fonctionnaires engagés dans la prévention de la traite des personnes et les enquêtes sur ces cas. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises dans le cadre du Programme national pour la prévention et la suppression de la traite, en particulier pour ce qui a trait à l’élimination de la vente et de la traite d’enfants.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces dans un délai déterminé. Alinéas a) et b). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et les soustraire à ces pires formes, et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Traite et exploitation sexuelle à des fins commerciales. Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des informations détaillées sur les mesures prises dans le contexte du plan national d’action visant à prévenir, combattre et éradiquer l’exploitation sexuelle des enfants, s’agissant en particulier des activités de sensibilisation et des soins dispensés aux victimes de traite et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales dans des centres spécialisés.
La commission note que les services du Procureur général de la République ont élaboré, en collaboration avec le Secrétaire au tourisme et d’autre parties prenantes, un code de conduite national pour la protection des enfants et des adolescents dans le secteur du tourisme, le but étant de créer et renforcer les liens avec le système judiciaire en matière de traite des personnes et d’échanger des indicateurs et des facteurs de vulnérabilité afin d’identifier les victimes éventuelles de traite. En outre, la commission prend note de la création, en septembre 2011, de l’Office social pour les soins aux victimes du crime (PROVICTIMA), cet office offrant les services suivants aux victimes de traite et d’exploitation sexuelle: assistance médicale, aide psychologique spécialisée, conseils juridiques et services d’action sociale. PROVICTIMA gère également un centre extrêmement sécurisé destiné à protéger et fournir des soins complets aux victimes de traite et d’extrême violence.
La commission prie instamment le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour soustraire les enfants à la traite et à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Elle prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard, notamment dans le cadre du Plan d’action national visant à prévenir, combattre et éradiquer l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que sur les résultats obtenus s’agissant du nombre d’enfants qui auront été soustraits à ces pires formes de travail des enfants puis réadaptés et intégrés socialement.
Article 8. Coopération internationale. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que, à la suite de la signature de mémorandums d’accord avec plusieurs pays d’Amérique centrale, un nombre élevé de fonctionnaires chargés de la protection de l’enfance ont reçu une formation en vue de la création d’un modèle régional de protection, et qu’une étude binationale sur la traite entre El Salvador et le Mexique était en cours. La commission prend note de l’indication fournie par le gouvernement suivant laquelle, dans le cadre de mémorandums d’accord signés avec El Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua, des activités spécialisées de renforcement des capacités ont été organisées afin d’assurer le rapatriement en toute sécurité d’enfants non accompagnés et d’adolescents victimes de traite. Le gouvernement indique également que l’étude binationale sur la traite entre El Salvador et le Mexique n’est pas encore disponible. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises et les résultats obtenus dans le cadre des mémorandums d’accord signés avec les gouvernements du Guatemala, du Honduras, d’El Salvador et du Nicaragua. Elle prie également le gouvernement de communiquer un exemplaire de l’étude binationale sur la traite entre El Salvador et le Mexique lorsque celle-ci sera disponible.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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