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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 - Fédération de Russie (Ratification: 1956)

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La commission rappelle qu’elle avait précédemment demandé au gouvernement de communiquer ses observations sur les commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI), de la Confédération du travail de Russie (KTR) et du Syndicat des gens de mer de Russie (RPSM), alléguant de nombreuses violations des droits syndicaux dans la pratique, notamment des actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence des employeurs dans les affaires internes des syndicats, ainsi que l’inefficacité des mécanismes de protection contre de telles violations. La commission note que des allégations similaires ont été présentées par ces organisations en 2011. La commission note en outre qu’une mission du BIT s’est rendue dans le pays en octobre 2011 afin d’examiner une plainte en cours devant le Comité de la liberté syndicale avec toutes les parties intéressées. La commission prend également note du rapport du gouvernement présenté en 2011.
La commission prend note en outre des commentaires formulés par la CSI dans une communication du 31 juillet 2012, alléguant de nouvelles violations de la convention dans la pratique et faisant état en particulier de cas de discrimination antisyndicale, d’ingérence des employeurs dans les affaires internes des syndicats et du refus de négociation collective. La commission prie le gouvernement de communiquer ses observations à ce sujet.
Articles 1 à 3 de la convention. La commission avait précédemment pris note des dispositions du Code du travail, du Code pénal et du Code des infractions administratives prévoyant les sanctions concrètes imposées aux employeurs reconnus coupables de discrimination antisyndicale, ainsi que les sanctions infligées en cas d’ingérence des organisations de travailleurs ou d’employeurs, ou de leurs agents, dans leurs affaires respectives, notamment dans la formation, le fonctionnement et l’administration des organisations. Se référant aux allégations de la CSI selon lesquelles les mécanismes de protection contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence des employeurs dans les affaires internes de syndicats sont inefficaces, la commission avait prié le gouvernement de communiquer, dans son prochain rapport, des informations sur l’application des dispositions législatives susmentionnées en pratique et d’indiquer le nombre de plaintes concernant la discrimination antisyndicale et les actes d’ingérence qui ont été déposées et instruites, et qui ont donné lieu à des poursuites au cours des deux dernières années, ainsi que sur le nombre de personnes sanctionnées et les sanctions concrètes infligées. La commission note que, dans son rapport de 2011, le gouvernement a réitéré une fois encore les informations qu’il avait précédemment communiquées, faisant état des dispositions législatives applicables pertinentes, et a souligné à nouveau que la législation contient des sanctions appropriées en cas de non-respect de la législation du travail. Le gouvernement indique par ailleurs qu’il n’y a pas eu récemment de décision judiciaire rendue à la suite de plaintes présentées par des syndicats portant sur des allégations de discrimination antisyndicale.
A cet égard, la commission prend note des informations contenues dans le rapport de la mission susmentionnée. Elle note en particulier que, selon la KTR, bien que la loi interdise la discrimination, il n’y a pratiquement pas de protection, en particulier contre les actes de discrimination antisyndicale, et que les organes qui sont censés protéger les droits des syndicats ne sont pas efficaces. Les représentants de la KTR expliquent que le système de protection des droits du travail se compose de trois instances: le bureau du procureur, les tribunaux et l’inspection du travail. Le bureau du procureur a pour mandat de surveiller l’application de la législation et de traiter les allégations de violation des droits de l’homme. Néanmoins, selon la KTR, celui-ci refuse souvent de traiter les allégations de violation de droits syndicaux car il considère que ces violations ne relèvent pas de son domaine de compétence et qu’elles devraient être renvoyées vers les inspecteurs du travail. Cependant, la KTR indique que: l’inspection du travail a estimé que les droits syndicaux sont exclus du champ d’application de la législation du travail et qu’elle n’était donc pas compétente pour traiter les violations présumées de droits syndicaux; en conséquence, les syndicats ont été renvoyés vers les tribunaux. S’agissant de la discrimination antisyndicale, selon la KTR, la situation est particulièrement compliquée car les actes de discrimination sont très difficiles à prouver; même lorsque la discrimination a été établie par le tribunal, le bureau du procureur n’engage pas de poursuite auprès des employeurs qui refusent de réintégrer ou d’indemniser un travailleur qui a fait l’objet de discrimination antisyndicale; en outre, bien que la législation prévoie la responsabilité administrative et pénale, les violations des droits syndicaux ne sont pas sanctionnées dans la pratique. Les représentants de la KTR ont déclaré que la responsabilité administrative ne peut être engagée que dans les deux mois suivant le dépôt de plainte; dans ce cas, une enquête est ouverte mais il faut généralement plus de deux mois pour la mener en son terme. Selon la KTR, aucun cas d’employeur ou de fonctionnaire jugé pénalement responsable de violation de droits syndicaux n’a été constaté.
La commission note en outre que des représentants de l’Inspection du travail de l’Etat (Rostrud), compétents pour traiter les cas d’infraction à la législation du travail, notamment les cas présumés de discrimination en général et de discrimination antisyndicale en particulier, ont confirmé qu’il est extrêmement difficile d’établir les faits dans les cas de discrimination devant les tribunaux; ils ont ajouté que, en conséquence, c’est devant le Rostrud que les syndicats présentent leurs plaintes; les employeurs qui disposent de suffisamment de moyens et de ressources pour intenter un recours contre les décisions de l’inspection du travail devant les tribunaux n’hésitent pas à le faire. Ils ont confirmé que, dans la pratique, lorsqu’une plainte est déposée auprès du tribunal, l’inspection du travail ne peut pas intervenir. En ce qui concerne l’application de sanctions, les responsables du Rostrud considèrent d’une manière générale que le montant des amendes est très faible, si bien que les entreprises préfèrent payer des amendes plutôt que de se conformer à la législation.
La commission note, d’après les observations finales de la mission, que d’autres mesures sont nécessaires pour renforcer la protection contre les infractions à la liberté syndicale tant en droit que dans la pratique, et que de meilleures connaissances concernant les procédures disponibles et les pratiques dans ce domaine aideraient les partenaires sociaux et les différentes instances étatiques à agir dans un cadre où les responsabilités ne sont pas toujours claires. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne la relation entre le Rostrud, le bureau du procureur et les tribunaux. La commission note qu’une proposition visant à régler les questions susmentionnées a été élaborée par deux syndicats du pays – la KTR et la Fédération des syndicats indépendants de Russie (FNPR) – que le gouvernement et des représentants des employeurs sont convenus d’examiner dans le cadre de la Commission tripartite de Russie (RTK). Cette proposition indique qu’il faudrait élaborer des dispositions législatives plus efficaces visant spécifiquement à protéger les violations des droits syndicaux en général et les actes de discrimination antisyndicale en particulier, et suggère de créer un organe qui aurait pour mandat d’examiner les cas de violation des droits syndicaux dans les actes de discrimination antisyndicale (ce mandat pourrait aussi être confié à un organe déjà établi). La proposition préconise aussi la formation des organes et des tribunaux compétents en matière de liberté syndicale. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises afin d’examiner et de faire des progrès sur la proposition de la KTR FNPR, y compris sur les plans visant à mettre en œuvre les articles 1 et 2 de la convention dans la pratique. A cet égard, la commission rappelle au gouvernement qu’il peut solliciter la coopération technique du Bureau s’il le souhaite.
Article 4. Parties à la négociation collective. La commission avait précédemment prié le gouvernement de modifier l’article 31 du Code du travail, pour s’assurer qu’il dispose clairement que c’est uniquement lorsqu’il n’existe pas de syndicats sur le lieu de travail qu’une autorisation de négocier collectivement peut être accordée à d’autres organes représentatifs. La commission regrette que le gouvernement ne communique aucune information à ce sujet. La commission se voit donc obligée de renouveler sa demande précédente.
Arbitrage obligatoire. La commission rappelle qu’elle avait précédemment pris note de l’explication du gouvernement selon laquelle, en vertu des articles 402 à 404 du Code du travail, l’arbitrage ne peut avoir lieu qu’avec le consentement des parties au conflit, qui désignent également les arbitres, la seule exception étant prévue à la partie 7 de l’article 404 du code. La commission avait noté que cette disposition renvoie à l’article 413, parties 1 et 2, du code et que, en conséquence, elle impose l’arbitrage obligatoire dans les services essentiels au sens strict du terme, mais également dans d’autres services déterminés par des lois fédérales. La commission note, d’après les indications du gouvernement dans son rapport 2011, qu’il a élaboré en collaboration avec les partenaires sociaux un projet de modification du Code du travail en vue d’améliorer les procédures de résolution des conflits collectifs du travail. La commission note que le Code du travail a été modifié en novembre 2011. Elle croit comprendre néanmoins que la disposition susmentionnée de l’article 413 reste inchangée. La commission rappelle que le recours à l’arbitrage obligatoire lorsque les parties ne parviennent pas à un accord est acceptable uniquement dans les services essentiels au sens strict du terme, ou pour les fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat. Prenant note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la législation du travail est constamment réexaminée dans le cadre de la RTK en vue d’être rendue conforme aux normes internationales du travail, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles pertinents du Code du travail afin d’assurer l’application du principe susmentionné et d’indiquer les mesures prises ou envisagées à cet égard.
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