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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Türkiye (Ratification: 1967)

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La commission prend note des observations de la Confédération turque des associations d’employeurs (TİSK) et de la Confédération des syndicats turcs (TÜRK-İŞ), jointes au rapport du gouvernement.
Articles 1 et 2 de la convention. Discrimination fondée sur l’opinion politique. Depuis un certain nombre d’années, la commission demande au gouvernement de fournir des informations sur l’application pratique de la loi antiterrorisme et du Code pénal dans les affaires ayant trait à l’expression d’opinions politiques par des journalistes ou autres auteurs et des éditeurs. La commission note que, selon la TÜRK-İŞ, leurs opinions politiques ont valu à des centaines de journalistes non seulement des poursuites au civil mais aussi des arrestations et des condamnations. La commission note avec regret que le gouvernement n’a fourni une fois de plus aucune information sur cette question et elle rappelle que, en protégeant les individus contre la discrimination fondée sur l’opinion politique dans l’emploi et la profession, la convention implique que cette protection soit reconnue dans le cadre d’activités où s’exprime ou se manifeste une opposition aux principes et opinions politiques établies, étant donné que la protection à l’égard d’opinions qui ne s’exprimeraient ni ne se manifesteraient pas serait sans objet (étude d’ensemble sur l’égalité dans l’emploi et la profession, 1988, paragr. 57; et étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 805, 832 et 833). La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des informations sur le nombre d’affaires dans lesquelles des journalistes, des écrivains et des éditeurs ont été poursuivis et sur leur issue, en précisant succinctement les faits qui leur sont reprochés et les charges retenues contre eux. La commission demande également au gouvernement de fournir des informations sur toute mesure prise, y compris sur le plan législatif, pour garantir que des restrictions ne pourront être imposées à des journalistes, des écrivains ou des éditeurs du fait des opinions politiques qu’ils expriment dans le cadre de leur emploi ou dans l’exercice de leur profession.
Article 2. Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles la circulaire du Premier ministre no 2010/14 visant à accroître l’emploi des femmes et instaurer l’égalité de chances a pour objectif de renforcer le statut économique et social de la femme, de parvenir à l’égalité entre hommes et femmes dans la vie sociale, de développer l’emploi des femmes, d’assurer l’égalité salariale entre hommes et femmes et de créer une commission nationale de suivi et de coordination sur l’emploi des femmes. La commission prend note, en outre, de la création d’une commission parlementaire sur l’égalité de chances entre hommes et femmes et de l’adoption du Plan d’action national sur l’égalité de genre (2008-2013), dont les objectifs sont la progression de l’employabilité des femmes, l’amélioration de la situation des femmes en milieu rural et la lutte contre la discrimination fondée sur le genre, et qui énonce diverses stratégies visant à améliorer la situation de l’emploi des femmes. Le gouvernement indique en outre que, dans le cadre du Plan stratégique (2008-2012) établi par la Direction générale sur le statut de la femme, des programmes de formation axés sur l’égalité de genre ont été organisés, de même que des séminaires régionaux en 2009 et 2010, et une étude est actuellement menée sur l’impact des projets concernant l’emploi des femmes et la création d’entreprises par des femmes qui ont été exécutés par des institutions publiques et des organismes non gouvernementaux. Le gouvernement indique que des dispositions ont également été prises pour faire en sorte que l’Agence pour l’emploi turque remplisse sa mission de manière plus efficace et permette aux femmes de s’insérer plus facilement dans la vie active et d’accéder à de meilleurs emplois. La commission prend note des divers projets et activités visant à la sensibilisation du public et à la formation professionnelle des femmes, mentionnés par le gouvernement dans son quatrième Rapport national sur la mise en œuvre de la Charte sociale européenne révisée soumis au Comité des droits sociaux du Conseil de l’Europe le 16 février 2012 (RAP/RCha/TU/IV(2012)). Elle note en outre que le projet de loi concernant le congé parental est actuellement devant l’Assemblée nationale. Enfin, elle note que, selon la TİSK, 30 986 femmes ont bénéficié des mesures d’incitation mises en place par le gouvernement en 2009.
D’après les statistiques présentées par le gouvernement concernant l’éducation, la commission note que le taux de fréquentation scolaire des garçons et des filles dans le primaire est resté comparable à celui de 2010. Néanmoins, le taux d’inscription des filles dans le secondaire n’a été que de 62,21 pour cent en 2010 contre 67,55 pour cent pour les garçons la même année. Elle prend note également des informations concernant la participation élevée des femmes aux études universitaires.
Tout en prenant note de l’éventail des politiques et mesures adoptées par le gouvernement, la commission observe que celui-ci ne fournit que peu d’informations sur l’impact de ces mesures en termes de progression de la participation des femmes sur le marché du travail. De fait, d’après les statistiques communiquées, ce taux reste faible (32 513 hommes contre 6 668 femmes dans le secteur de la fabrication des produits du cuir et apparentés, 27 192 hommes contre 6 658 femmes dans le secteur de la fabrication des produits du papier et apparentés). La commission note que la TÜRK-İŞ estime que les rôles attribués traditionnellement aux hommes et aux femmes tendent à restreindre les choix des femmes en matière d’emploi et de profession et à confiner celles-ci dans les emplois les moins rémunérés et les plus pénibles. La commission observe à cet égard que, d’après les informations communiquées par le gouvernement, les femmes sont apparemment concentrées dans les secteurs de l’éducation et des services de santé, seuls secteurs où elles sont plus nombreuses que les hommes. De plus, si la scolarisation des filles a considérablement progressé ces dernières années, cette évolution ne semble pas avoir eu un impact systématique sur leur insertion dans le marché du travail.
La commission souligne l’importance qui s’attache à ce que le gouvernement poursuive sa politique volontariste, afin de surmonter les inégalités persistantes entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession, et à ce qu’il veille à ce que les filles qui entrent dans le système éducatif aujourd’hui soient en mesure, demain, de participer pleinement et sans discrimination à la vie économique dans tous les secteurs et toutes les professions. La commission demande au gouvernement de fournir des informations concrètes sur les résultats obtenus à travers tous les programmes et toutes les mesures adoptés, notamment dans le cadre du Plan d’action national pour l’égalité de genre (2008-2013), conformément à l’article 3 f) de la convention. Prière également d’inclure des informations sur les femmes en milieu rural et les femmes de plus de 45 ans. Elle le prie de continuer de fournir des données statistiques détaillées illustrant la situation des hommes et des femmes sur le marché du travail, et notamment leur représentation dans les différents secteurs et les différentes professions.
Dans ses commentaires précédents, la commission demandait au gouvernement de donner des informations sur le nombre d’étudiantes expulsées des universités pour avoir porté un foulard ainsi que sur les mesures prises afin que cette situation soit réexaminée. La commission note que le gouvernement se réfère aux autorités qui sont chargées du traitement des admissions et de l’enregistrement des étudiants et responsables de l’expulsion des étudiantes, mais ne fournit pas les informations demandées. La commission croit comprendre que, d’après les informations accessibles sur le site Internet de l’Assemblée nationale, la Commission de l’égalité des chances des hommes et des femmes a examiné un projet de loi concernant la liberté de la tenue vestimentaire dans les universités. La commission rappelle à nouveau que, même si l’interdiction en vigueur du port de tout couvre-chef englobe toutes les formes que celui-ci peut présenter et s’applique aux hommes et aux femmes, elle peut avoir un effet discriminatoire à l’égard des femmes en ce qui concerne l’accès de celles-ci à l’université. La commission demande au gouvernement de prendre des mesures plus énergiques pour obtenir des informations sur le nombre des étudiantes qui ont été expulsées des universités pour avoir porté le foulard dans les locaux et de fournir des informations sur les mesures prises afin que cette question soit réexaminée. Elle le prie également de donner des informations sur tout projet de loi concernant la liberté de la tenue vestimentaire qui serait examiné par la Commission de l’égalité des chances entre hommes et femmes, sur les résultats de cet examen et sur les suites éventuelles.
Articles 1, 2 et 3. Discrimination aux stades de la sélection et du recrutement. Depuis un certain nombre d’années, la commission indique que l’article 5, paragraphe 1, du Code du travail, qui interdit toute discrimination fondée sur la langue, la race, le sexe, l’opinion politique, les convictions philosophiques, la religion ou le culte ou d’autres considérations similaires dans le cadre de la relation d’emploi, n’interdit pas une telle discrimination au stade du recrutement. Elle avait néanmoins noté qu’en vertu de l’article 122 du nouveau Code pénal turc toute personne qui commet une discrimination fondée sur la langue, la race, la couleur, le sexe, le handicap, l’opinion politique, les convictions philosophiques, la religion, la croyance ou quelque autre motif, qui subordonne l’emploi d’une personne à l’un de ces motifs ou qui empêche une personne d’exercer une activité économique ordinaire sur la base de l’un de ces motifs, encourt une peine d’emprisonnement de six mois à un an ou une amende. La commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur le nombre, la nature et l’issue des procédures pénales fondées sur l’article 122 du Code pénal et d’indiquer si les personnes s’estimant victimes d’une discrimination au stade du recrutement peuvent porter plainte sur le fondement de cet article et, le cas échéant, prétendre à des indemnités ou d’autres compensations. La commission observe que le gouvernement n’a pas donné d’informations concrètes à ce sujet. Cependant, selon la TİSK, les personnes s’estimant victimes d’une discrimination lors du recrutement ne peuvent pas prétendre à des réparations sur le fondement de l’article 122 du Code pénal. Tout en reconnaissant l’importance du rôle des sanctions pénales à l’égard des employeurs ayant commis une discrimination, notamment de leur effet dissuasif, la commission souligne que la discrimination cause un préjudice matériel et moral à ceux qui l’ont subie et qu’il est donc important que des voies de droit soient ouvertes aux victimes de discrimination et que celles-ci puissent prétendre à des réparations dans ce cas (voir étude d’ensemble, 1988, paragr. 227 et 228, et étude d’ensemble, 2012, paragr. 884 à 886). La commission prie le gouvernement de prendre des mesures propres à garantir que les victimes d’une discrimination lors d’un recrutement ou d’une sélection auront accès à des procédures adéquates, ouvrant droit à réparation, et de fournir des informations à ce sujet. Prière également de fournir des informations sur le nombre, la nature et l’issue des procédures pénales engagées sur le fondement de l’article 122 du Code pénal.
Contrôle de l’application. Dans ses précédents commentaires, la commission se référait à la discrimination persistante, dénoncée par les syndicats, et priait le gouvernement d’indiquer si l’inspection du travail avait eu connaissance de cas fondés sur l’article 5 du Code du travail et si les tribunaux avaient été saisis d’affaires de cette nature. La commission note que, d’après les plus récents commentaires de la TÜRK-İŞ, le seul moyen d’obtenir réparation en cas de discrimination est d’entamer des procédures longues et coûteuses. La TÜRK-İŞ ajoute que, dans ce contexte, la charge de la preuve incombe au travailleur et, au surplus, qu’il est très difficile d’obtenir la réintégration dans l’emploi même si le licenciement a été reconnu discriminatoire. La commission note que le gouvernement ne fournit pas d’informations à ce sujet. La commission souligne l’importance qui s’attache à faire connaître la législation applicable, à renforcer les capacités des autorités compétentes, notamment des magistrats, inspecteurs du travail et autres fonctionnaires, identifier les discriminations et les traiter et à examiner si les dispositions de fond et de procédure en vigueur permettent, dans la pratique, aux réclamations d’avoir une chance d’aboutir. La commission insiste également sur la nécessité de recueillir et publier des informations sur la nature et l’issue des plaintes pour discrimination et de faire en sorte que la législation et les voies de recours existantes soient mieux connues et, enfin, d’évaluer l’efficacité de ces procédures et mécanismes (voir étude d’ensemble, 2012, paragr. 871). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les cas ayant trait à l’application de l’article 5 du Code du travail, dont l’inspection du travail aurait eu à connaître, ainsi que sur les affaires qui auraient été portées devant les instances judiciaires. Prière également de donner des informations sur le nombre, la nature et l’issue de ces affaires, y compris sur le nombre de réintégrations, de même que sur toute évaluation de l’efficacité des procédures en vigueur dans ce domaine, notamment en ce qui concerne la charge de la preuve, et sur l’action déployée pour sensibiliser le public ou développer les capacités.
Articles 1, 2 et 3 d). Application de la convention dans la fonction publique. La commission note que le gouvernement réaffirme que les fonctionnaires sont nommés sur la base des résultats d’un examen centralisé, organisé à l’échelle du pays. Il indique en outre que la sélection s’effectue conformément au «règlement général des examens à passer par les nouveaux candidats à un poste dans la fonction publique» et aux «procédures et principes concernant le recrutement des travailleurs des institutions et établissements publics» du 1er novembre 2009. Selon le gouvernement, ce recrutement s’effectue sans discrimination fondée sur le sexe, et l’avancement s’effectue sur la base d’un examen préalable. Il indique en outre que des mesures positives sont prises en faveur des femmes à qui la priorité est accordée pour certains postes ayant trait au soutien à l’enfance et aux services sociaux. La commission note cependant que, d’après les statistiques communiquées par le gouvernement dans son plus récent rapport, la fonction publique comptait 1 148 001 hommes et 592 923 femmes. Elle considère que, lorsque des mesures sont prises afin de corriger une présence faible des femmes dans la fonction publique, ces mesures doivent permettre aux femmes d’accéder à tous les emplois et à tous les niveaux, y compris aux emplois les plus élevés et à ceux qui offrent les meilleures perspectives de carrière. De plus, il convient d’éviter les mesures qui font écho aux attitudes et préjugés traditionnels concernant les aspirations, préférences et capacités des hommes et des femmes et ne font qu’accroître ou accentuer la ségrégation entre hommes et femmes sur le marché du travail. La commission demande au gouvernement de prendre des mesures volontaristes pour encourager l’accès des femmes à la fonction publique et pour qu’une réponse soit apportée à toute allégation de discrimination dans les nominations ou dans l’avancement dans la fonction publique, et de fournir des informations sur les résultats obtenus. Elle lui demande également de veiller à ce que les hommes et les femmes participent aux examens donnant accès aux différents postes de la fonction publique sur un pied d’égalité. Elle le prie de fournir des informations ventilées par sexe détaillées sur le nombre de personnes qui participent à ces examens et les types de postes concernés ainsi que sur le nombre de personnes nommées aux différents postes de la fonction publique.
Dans ses précédents commentaires, la commission exprimait ses craintes à propos des enquêtes de sécurité et, plus précisément, du risque que ces enquêtes ne se traduisent par des rejets de candidatures à des postes de la fonction publique. La commission croit comprendre que, d’après la réponse du gouvernement, si le tribunal administratif se prononce pour un tel rejet, sa décision ne constitue qu’une simple indication qui n’aura pas nécessairement d’incidence sur le recrutement du candidat. Relevant que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur les décisions administratives prises suite aux enquêtes de sécurité à propos de candidats à un poste de la fonction publique ni sur les recours introduits contre ces décisions par les candidats écartés du service public suite à ces enquêtes et sur l’issue de telles procédures, la commission réitère sa demande précédente, priant le gouvernement de fournir des informations détaillées à cet égard.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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