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Observation (CEACR) - adoptée 2012, publiée 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Venezuela (République bolivarienne du) (Ratification: 1964)

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Article 1 a) et d) de la convention. Imposition de peines de prison comportant l’obligation de travailler en tant que sanction de l’expression d’opinions politiques ou de la manifestation d’une opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi et en tant que punition pour avoir participé à une grève. La commission prend note des observations communiquées le 31 août 2011 par la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) sur l’application par la République bolivarienne du Venezuela d’un certain nombre de conventions. La commission observe que la CTV se réfère à plusieurs dispositions de la législation nationale (Code pénal et loi organique de sécurité et défense de la nation) qui restreindraient l’exercice du droit de grève et serviraient de base à la criminalisation de la protestation sociale dans le pays, constituant ainsi une forme de chantage et de coercition pour empêcher les travailleurs de défendre légitimement leurs intérêts. Selon le syndicat, ces dispositions permettent de sanctionner, par des amendes élevées mais également des peines de prison, les personnes qui, dans l’exercice de leur droit de grève, paralysent les activités d’une entreprise.
La commission relève que, dans le cadre du contrôle de l’application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, tant cette commission que la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail ont fait part de leur préoccupation face à la criminalisation d’activités syndicales légitimes, aux restrictions aux libertés publiques qui sont nécessaires à l’exercice des droits syndicaux ainsi qu’aux allégations selon lesquelles un climat d’intimidation régnerait autour des organisations syndicales ou des organisations d’employeurs et de chefs d’entreprise n’ayant pas de sympathie pour le gouvernement.
La commission prend note du rapport de la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) intitulé «Démocratie et droits de l’homme au Venezuela» (OEA/Ser.L/V/II. Doc. 54, 30 déc. 2009) ainsi que de son rapport annuel de 2010 (OEA/Ser.L/V/II. Doc. 5 corr. 1, 7 mars 2011), et en particulier les paragraphes 608 à 837 consacrés à la situation en République bolivarienne du Venezuela. Dans son rapport de 2009, la CIDH a analysé avec préoccupation la situation de la liberté de pensée et d’expression dans la République bolivarienne du Venezuela; elle a considéré que le manque d’indépendance et d’autonomie du pouvoir judiciaire face au pouvoir politique constitue un point fragile de la démocratie; elle a analysé les obstacles sérieux auxquels sont confrontés les défenseurs des droits de l’homme; et elle a exprimé sa préoccupation face aux informations témoignant d’une tendance aux actes de représailles à l’encontre des personnes qui publiquement désapprouvent les politiques menées par le gouvernement, tendance qui affecte aussi bien les organes de l’opposition que les citoyens qui exercent leur droit d’exprimer leur désaccord avec les politiques menées. Dans son rapport de 2010, la CIDH indique que cette tendance préoccupante s’est poursuivie et fait également état de la tendance à poursuivre disciplinairement, administrativement et pénalement les médias et les journalistes. La CIDH a recommandé à la République bolivarienne du Venezuela de s’abstenir d’exercer des représailles ou d’utiliser le pouvoir répressif de l’Etat pour intimider ou sanctionner les personnes en raison de leurs opinions politiques et de garantir la pluralité des espaces pour l’exercice de la démocratie, y compris le respect des manifestations et des protestations qui sont menées dans le cadre de l’exercice du droit de réunion et de manifestation pacifique. Dans ses communiqués de presse nos 36/10 et 61/10, la CIDH a également exprimé sa profonde préoccupation face à l’utilisation du pouvoir répressif de l’Etat pour criminaliser les défenseurs des droits de l’homme, judiciariser la protestation sociale pacifique et poursuivre pénalement les personnes considérées par les autorités comme des opposants politiques.
La commission note également que, dans le cadre de l’Examen périodique universel mené en octobre 2011 par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a affirmé que la situation du droit à la liberté d’expression s’était détériorée ces dernières années et s’est référée à une série de dispositions de la législation nationale qui risquaient aussi de restreindre le droit à la liberté d’expression (document A/HRC/WG.6/12/VEN/2, paragr. 44 et 46).
La commission rappelle que, en vertu de l’article 1 a) et d) de la convention, les personnes qui expriment des opinions politiques, manifestent leur opposition à l’ordre politique, social et économique établi ou encore participent à une grève ne peuvent faire l’objet de sanctions aux termes desquelles un travail leur serait imposé. La commission note que, selon les articles 12 et 15 du Code pénal, les personnes condamnées à une peine de presidio ou à une peine de prisión sont soumises à l’obligation de travailler. Seules les personnes condamnées à une peine d’arresto sont exclues de l’obligation de travailler (art. 17). La commission attire l’attention sur les dispositions suivantes du Code pénal qui sanctionnent certains comportements par des peines de prisión:
  • -offense ou manque de respect à l’égard du Président de la République ou d’un certain nombre d’autorités publiques (art. 147 et 148);
  • -dénigrement public de l’Assemble nationale, du Tribunal suprême de justice, etc. (art. 149);
  • -offense à l’honneur, la réputation ou le prestige d’un membre de l’Assemblée nationale ou d’un fonctionnaire public, ou d’un corps judiciaire ou politique (art. 222 et 225), la preuve de la véracité des faits n’étant pas admise (art. 226);
  • -diffamation (art. 242 et 244).
Compte tenu des considérations qui précèdent, la commission prie le gouvernement de s’assurer qu’aucune personne qui exprime des opinions politiques, qui s’oppose pacifiquement à l’ordre politique, social ou économique établi ou qui participe pacifiquement à une grève ne sera condamnée à une peine de prison aux termes de laquelle un travail obligatoire lui serait imposé. Elle prie en outre le gouvernement de bien vouloir communiquer des informations sur l’application pratique des dispositions susmentionnées, en fournissant copie des décisions de justice prononcées sur leur fondement ou en indiquant les faits à l’origine des condamnations.
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