ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 35) sur l'assurance-vieillesse (industrie, etc.), 1933 - Chili (Ratification: 1935)

Autre commentaire sur C035

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Suivi des recommandations des comités tripartites (réclamations présentées en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT). 1. Réclamation présentée par le Conseil d’administration en 1986 et 2000 dans le cadre de deux réclamations présentées par le Conseil national de coordination syndicale du Chili et par certains syndicats nationaux de travailleurs d’entreprises des fonds de pension (AFP) du secteur privé. La commission rappelle que l’inobservation par le Chili de la convention no 35 et de la convention (no 37) sur l’assurance-invalidité (industrie, etc.), 1933, suite à la réforme du système de pensions en 1980 a été établie depuis de nombreuses années. Cette question a d’ores et déjà donné lieu à plusieurs procédures de réclamations fondées sur l’article 24 de la Constitution de l’OIT et présentées en 1986 et 2000. Dans ces deux cas, le Conseil d’administration avait conclu au non-respect des conventions en question et confié à la commission d’experts le soin d’assurer le suivi de la mise en œuvre de ses conclusions et recommandations, demandant au gouvernement de modifier la législation nationale afin de faire en sorte que le système de pensions à gestion privée établi par le décret-loi no 3.500 de 1980 soit administré par des institutions ne poursuivant pas un but lucratif; que les représentants des assurés aient la possibilité de participer à la gestion du système; et que les employeurs participent au financement des prestations vieillesse et invalidité. La commission rappelle que, faute de mesures adéquates prises par le gouvernement pour se conformer aux recommandations du Conseil d’administration, ce cas a déjà fait l’objet de discussions répétées au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence en 1987, 1993, 1995, 2001 et dernièrement en 2009. Lors de la dernière discussion de ce cas, le gouvernement a reconnu que le système de pensions à gestion privée établi en 1980 allait à l’encontre des principes de base des systèmes de sécurité sociale qu’encourage l’OIT dans le cadre du tripartisme, et indiqué qu’une réforme législative de 2008 (loi no 20.255) a permis de mener, avec l’assistance technique du Bureau, une réforme sociale de la plus grande envergure moyennant la création, en complément du système de pensions existant, d’un système de pensions minimales fondées sur la solidarité qui permettra de passer d’une couverture totale d’environ 600 000 bénéficiaires en décembre 2008 à près de 1 200 000 bénéficiaires en décembre 2012.

Dans le cadre de l’examen de ce cas en 2009, la commission avait considéré que cette réforme ne permet pas de donner effet aux recommandations du Conseil d’administration dans la mesure où la réforme de 2008 n’a pas modifié la logique générale du système de pensions chilien qui demeure axé sur la capacité d’épargne individuelle: les personnes ayant un emploi restent tenues par la loi de s’affilier à l’un des fonds de pension recherchant un but lucratif et doivent verser sur leur compte individuel de capitalisation un pourcentage de leur rémunération sans que les employeurs ne soient également tenus par la loi de participer au financement des prestations. En ce sens, la commission avait observé que la réforme a non seulement maintenu les AFP, comme le mécanisme principal de protection vieillesse, mais a renforcé leur position étant donné que, si leur gestion privée génère des pensions ne suffisant pas pour couvrir au moins les besoins essentiels du pensionné, celles-ci vont être complétées par une pension complémentaire de vieillesse (APS) financée par la solidarité nationale et versée aux personnes dont les retraites n’atteindraient pas un seuil minimum.

Dans son dernier rapport, le gouvernement se borne à confirmer que le système de pensions à gestion privée est administré par des institutions poursuivant un but lucratif. Selon les informations communiquées par les membres travailleurs lors de la discussion du cas par la Conférence en 2009, 30 pour cent des profits réalisés sur les fonds provenant des contributions versées par les travailleurs reviendraient ainsi aux administrateurs de fonds de pension, en plus des frais de gestion des fonds versés par ces derniers. La commission note avec préoccupation que la gestion du système par des compagnies privées recherchant un but lucratif continue d’occasionner des pertes considérables pour les travailleurs qui sont ainsi privés d’une partie des bénéfices engendrés par les cotisations qu’ils versent sur leur compte de capitalisation.

En ce qui concerne la question de la participation des assurés à la gestion du système, le gouvernement indique que la réforme introduite par la loi no 20.255 a eu pour objet d’assurer une meilleure représentation des assurés dans l’administration des fonds de pension en établissant une commission des usagers composée de représentants des travailleurs, des retraités, des institutions publiques ainsi que des institutions privées et qu’elles sont présidées par un professeur d’université. Selon le gouvernement, cette commission a pour fonction de veiller à l’exactitude des informations transmises aux usagers et sur lesquelles ces derniers basent leurs décisions lorsqu’ils choisissent leur fonds de pension. Le 10 mai 2010, la commission des usagers a rendu son premier rapport contenant, entre autres, des propositions concernant différents aspects du fonctionnement du système de pensions. A cet égard, la commission ne peut qu’observer que la création de la commission des usagers, bien qu’elle représente assurément un pas dans la bonne direction, ne permet toujours pas de garantir aux représentants de ces derniers le droit de pouvoir participer à la gestion de leurs fonds de retraite comme le requièrent les conventions examinées. Le gouvernement est, par conséquent, prié de prendre les mesures nécessaires afin d’assurer, conformément aux conventions examinées, que des représentants des assurés participent aux organes administratifs des AFP et notamment ceux qui déterminent les politiques d’investissement. La commission souligne à cet égard que d’autres pays, qui ont également adopté des systèmes par capitalisation, disposent d’administrations qui garantissent la participation des assurés.

Enfin, en ce qui concerne la nécessité d’assurer que le système de pensions soit financé de manière collective, le gouvernement indique dans son dernier rapport que la réforme du système introduite par la loi no 20.255 de 2008 a eu pour effet de placer à la charge des employeurs les cotisations à l’assurance invalidité et survivants. Pour les entreprises employant cent personnes ou plus, cette nouvelle mesure est entrée en vigueur au 1er juin 2009 et sera étendue à l’ensemble des entreprises à partir du 1er juillet 2011. La commission note que la réforme précitée n’a pas eu d’incidence sur le financement des pensions de vieillesse qui demeure exclusivement à la charge des travailleurs. Elle accueille néanmoins favorablement le fait que la réforme a établi une participation des employeurs au régime de protection contre l’invalidité et le décès permettant ainsi d’introduire le principe de financement collectif. La commission note néanmoins que la charge des cotisations placées à la charge exclusive des salariés (soit les cotisations vieillesse et les déductions sur salaire relatives à l’administration des fonds de pension) représente 11,5 pour cent du salaire mensuel des salariés, alors que la participation des employeurs au financement des prestations invalidité et survivants ne représente que 1,87 pour cent dudit salaire. La commission espère qu’il ne s’agit là que d’un premier pas entrepris par le gouvernement en vue d’instaurer un meilleur équilibre entre participation des employeurs et des travailleurs au financement des assurances vieillesse, invalidité et survivants. La commission signale à ce propos à titre d’information que la convention (no 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952, prévoit que le total des cotisations d’assurance à la charge des salariés protégés ne devrait pas dépasser 50 pour cent.

Compte tenu de l’ensemble des questions de fond que soulève l’application de la convention, la commission encourage le gouvernement à continuer de se prévaloir de l’assistance technique du Bureau, comme il l’a fait ces dernières années, afin de continuer à réformer le système de retraite chilien sur la base des principes de solidarité, de partage des risques et de financement collectif, qui forment l’essence de la sécurité sociale, combinés aux principes de gestion transparente, responsable et démocratique du régime de retraite de la part d’institutions ne poursuivant aucun but lucratif, avec la participation des représentants des personnes assurées.

2. Réclamations présentées par le Collège des professeurs du Chili A.G. En 1999 et en 2007, à l’occasion de deux réclamations présentées par le Collège des professeurs du Chili A.G. et alléguant le non-respect des conventions nos 35 et 37 par le Chili en raison du non-paiement d’une partie des cotisations de sécurité sociale assises sur la rémunération brute des enseignants, le Conseil d’administration a approuvé les rapports des comités tripartites établis en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT, concluant à l’inobservation de ces conventions et priant la commission d’experts d’assurer le suivi des recommandations contenues dans lesdits rapports. Dans le premier cas, le gouvernement avait été appelé à garantir le paiement par les municipalités des arriérés de cotisations de sécurité sociale du personnel enseignant afin que ce dernier puisse prétendre à l’intégralité des prestations de sécurité sociale et, en particulier, aux prestations de vieillesse et invalidité. Dans le second, le Conseil d’administration avait conclu à la responsabilité de l’Etat pour garantir le paiement de la dette à l’égard de la sécurité sociale résultant du non-paiement aux enseignants par les municipalités d’une assignation de perfectionnement qui constituait une composante de la rémunération sur la base de laquelle sont calculées les cotisations de sécurité sociale et qui avait pour conséquence d’entraîner une diminution des prestations de sécurité sociale.

La commission note que, selon les informations fournies par le gouvernement dans son dernier rapport, des actions ont été entreprises en vue d’éviter les retards dans le versement des cotisations de sécurité sociale en combinaison avec une réforme sans précédent améliorant le fonctionnement du système de la justice du travail. Le gouvernement indique néanmoins que le système d’éducation est sujet à des conflits liés au problème du paiement de certaines composantes des salaires, notamment des assignations spéciales, en raison d’une structure de rémunération complexe qui a pour effet de compliquer la détermination des arriérés – ces questions étant du ressort de la Cour des comptes (Contraloría General) et de la direction du travail qui ont dû résoudre ces conflits de manière opportune. Le gouvernement indique, en outre, en ce qui concerne le problème spécifique des enseignants employés par les municipalités, que la loi organique du secteur municipal a été modifiée afin de prévoir des sanctions adéquates à l’encontre des maires de municipalités qui ne respecteraient pas leurs obligations, y compris celle de payer les cotisations sociales dues à raison de leurs employés. Désormais, la législation inclut la notion dissuasive d’«abandon de devoir notable» qui permet la destitution des responsables et l’interdiction d’exercer des mandats publics. Enfin, la réforme du système prévisionnel de 2008 est venue renforcer la responsabilité des maires et des autres autorités compétentes en matière de paiement des cotisations de sécurité sociale.

La commission prend dûment note de ces informations et invite le gouvernement à décrire la manière dont la nouvelle législation est appliquée dans la pratique en indiquant notamment le nombre d’inspections réalisées, y compris par la Division du travail et la Cour des comptes, en vue de contrôler le paiement par les municipalités de l’allocation de perfectionnement; le nombre et la nature des infractions constatées et le nombre et la nature des sanctions infligées. Le gouvernement est également prié de préciser si la situation des arriérés des municipalités a pu être réglée et d’indiquer, le cas échéant, tout montant restant dû, le nombre de municipalités qui ne sont toujours pas à jour dans le paiement de l’allocation de perfectionnement; le montant des sommes en cause et le nombre de travailleurs affectés; ainsi que le montant des remboursements effectués.

3. Réclamation présentée par le Collège des professeurs du Chili A.G. Le 9 novembre 2009, le Collège des professeurs du Chili A.G., invoquant l’article 24 de la Constitution de l’OIT, a présenté une réclamation alléguant l’inexécution par le Chili de la convention no 35 et de la convention no 37. Lors de sa 308e session (juin 2010), le Conseil d’administration du BIT a déclaré cette réclamation recevable et décidé de «différer la désignation du comité chargé d’examiner la réclamation jusqu’à l’examen du cas par la commission d’experts, à sa prochaine session, en novembre-décembre 2010». Le Conseil d’administration a également décidé de «communiquer les informations fournies par l’organisation plaignante à la commission d’experts en vue de l’examen de cette question dans le cadre de la suite donnée aux recommandations antérieurement adoptées par le Conseil d’administration à propos de questions similaires, comme prévu par le paragraphe 3 de l’article 3 du Règlement relatif à la procédure à suivre pour l’examen des réclamations».

La commission note le mandat qu’elle a reçu du Conseil d’administration, conformément à l’article 3(3) du Règlement relatif à la procédure à suivre pour l’examen des réclamations. Aux termes de cette disposition «… si une réclamation que le Conseil d’administration juge recevable porte sur des faits et allégations similaires à ceux ayant fait l’objet d’une précédente réclamation, la désignation du comité chargé de l’examen de la nouvelle réclamation peut être reportée jusqu’à l’examen par la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, à sa prochaine session, des suites données aux recommandations adoptées antérieurement par le Conseil d’administration». Les réclamations précédentes portant sur des faits et allégations similaires ont été présentées par le Collège des professeurs en 1999 et 2007 et les suites données sont examinées sous le point 2 ci-dessus.

La présentation de la réclamation en 2009 avait entraîné la suspension de l’examen au titre de l’article 22 des questions liées à la réclamation dans l’attente d’une décision du Conseil d’administration en la matière. La commission rappelle, en effet, qu’elle avait été amenée à traiter de ces questions dans le cadre de ses observations de 2008 et 2009 au moyen des informations mises à sa disposition par le Collège des professeurs et le gouvernement ainsi que des informations émanant de la discussion en 2009 par la Commission de l’application des normes de la Conférence de l’application de la convention no 35 par le Chili.

La commission note que le Collège des professeurs du Chili A.G. indique qu’en 1980 le décret-loi no 3.551 portant normes pour la rémunération dans le secteur public a instauré, à compter du 1er janvier 1981, une assignation spéciale non imposable destinée au personnel enseignant placé sous la tutelle du ministère de l’Education publique. Calculée au prorata du traitement de base, cette assignation s’élevait à 90 pour cent de ce dernier pour les enseignants diplômés et à 50 pour cent pour ceux n’étant pas titularisés. En 1982, une loi a transféré sous la tutelle des municipalités les enseignants qui étaient auparavant placés sous la tutelle du ministère de l’Education publique et les a assujettis au système de rémunération du secteur privé. Ce transfert a entraîné la cessation du versement de cette assignation. Le Collège des professeurs fait valoir que le non-paiement de cette partie de la rémunération des enseignants serait à l’origine d’une «dette historique» de l’Etat envers les enseignants. En outre, le Collège des professeurs indique que, dans la mesure où les cotisations de sécurité sociale représentent un pourcentage de la rémunération brute et doivent être versées par l’employeur aux organismes de prévoyance compétents, la cessation du versement de l’assignation spéciale a également eu pour conséquence de diminuer les contributions des employeurs sur leurs comptes individuels de capitalisation retraite et donc de diminuer le niveau des pensions d’environ 80 000 enseignants, en violation des principes généraux énoncés par les conventions nos 35 et 37 ratifiées par le Chili.

Selon les informations fournies par le gouvernement dans le cadre de ses rapports communiqués conformément à l’article 22 de la Constitution en 2009 et 2010, l’assignation spéciale créée par le décret-loi no 3.551 de 1980 constitue un complément de rémunération de nature non imposable servi aux seuls fonctionnaires publics n’étant pas soumis à cotisations vieillesse et invalidité. Il ajoute que l’ensemble des enseignants ont été transférés sous le régime de rémunération du système privé par l’effet de la loi no 18.196 de 1982 qui prévoit expressément que les textes normatifs régissant le système de rémunération du secteur public, dont le décret-loi no 3.551 de 1980, ne seront plus applicables aux personnes concernées. Le gouvernement indique par ailleurs que, depuis 1991, le statut des enseignants relevant des municipalités est désormais régi par la loi no 19.070, laquelle ne prévoit pas le maintien de l’assignation susmentionnée et que la Cour suprême a établi que le fait que des accords aient, dans certains cas, pu être passés de manière à prévoir le maintien du système de rémunération antérieur ne saurait être considéré comme pouvant valablement s’appliquer aux contrats de travail conclus après l’adoption de la loi no 18.196 qui prohibe de tels accords. En outre, la Cour des comptes (Contraloría General de la República) a considéré que, bien que certains enseignants transférés sous la tutelle des municipalités aient pu continuer à percevoir un complément de salaire de nature similaire à l’assignation spéciale établie par le décret-loi no 3.551, ce paiement résultait d’un accord passé par ces derniers avec les municipalités dont ils dépendaient. Il considère, par conséquent, qu’il n’existe pas de «dette historique» envers lesdits enseignants, mais qu’il s’agit d’une revendication politique de ces derniers.

La commission note que la nouvelle réclamation du Collège des professeurs du Chili A.G. présente des similitudes avec les deux précédentes réclamations puisqu’il s’agit dans les trois cas d’allégations portant sur le non-paiement des contributions sociales ayant un impact sur le niveau des pensions vieillesse et invalidité des enseignants. La commission note que les deux premières réclamations portaient sur le non-respect par les autorités compétentes des dispositions de la législation nationale et que l’existence au plan national de bases légales établissant le droit des enseignants d’obtenir le paiement des arriérés de contributions sociales était clairement établie. En revanche, la nouvelle réclamation présentée par le Collège des professeurs en 2009 soulève la question de savoir s’il existe ou non dans le droit national du Chili une base légale prévoyant le droit des enseignants de conserver un droit dérivé du statut de fonctionnaires publics en dépit du transfert des enseignants sous un autre statut.

La commission observe, par conséquent, que, dans le contexte de la réclamation de 2009, le statut des enseignants soulève des questions nouvelles régies par des dispositions contestées du droit national. La commission note que, bien que la nouvelle réclamation soit fondée sur des allégations similaires à celles de 1999 et 2007, les faits juridiques à l’origine de la réclamation de 2009 sont différents de ceux des réclamations précédentes. Dès lors, la commission, en répondant au mandat que lui a confié le Conseil d’administration, conclut que les suites données aux recommandations adoptées précédemment par le Conseil d’administration ne sont pas pertinentes en ce qui concerne l’examen de la réclamation de 2009.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer