ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 2010, publiée 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Pakistan (Ratification: 1961)

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

La commission prend note de l’adoption de la loi du 11 mars 2010 sur la protection contre le harcèlement sexuel à l’encontre des femmes sur le lieu de travail qui couvre à la fois le harcèlement sexuel «quid pro quo» et le harcèlement sexuel dû à un environnement de travail hostile. La commission note cependant que, dans ses commentaires du 30 juillet 2010, la Fédération des travailleurs du Pakistan s’est référée à des problèmes d’application de la loi. La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre effective de la loi de 2010 sur la protection contre le harcèlement sexuel à l’encontre des femmes sur le lieu de travail.

La commission note par ailleurs que le rapport du gouvernement n’a pas été reçu. Elle se voit donc obligée de renouveler son observation précédente, qui était conçue dans les termes suivants:

Législation. Interdiction de la discrimination. La commission note que le gouvernement déclare que, en vertu de la Constitution du Pakistan, tous les citoyens ont les mêmes possibilités d’emploi dans les secteurs privé et public et que la législation du travail s’applique de manière égale à tous les travailleurs, sans discrimination. Le gouvernement ajoute qu’aucune plainte pour discrimination dans des entreprises industrielles ou commerciales n’a été enregistrée. La commission fait observer que la convention vise à la protection des travailleurs, nationaux et non nationaux, contre la discrimination dans l’emploi et la profession. La commission rappelle également que la protection constitutionnelle à elle seule, bien qu’importante, peut ne pas être suffisante pour garantir une protection efficace contre la discrimination dans l’emploi et la profession, et que l’absence de dispositions discriminatoires dans la législation ne saurait être considérée comme une interdiction de la discrimination, ni comme une base juridique en vertu de laquelle des plaintes pour discrimination peuvent être présentées.

La commission rappelle que la convention vise à éliminer la discrimination telle que définie à l’article 1 de la convention, pour l’adoption et la mise en œuvre d’une politique nationale tendant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement (article 2). En vertu de l’article 3 b), le Pakistan doit promulguer des lois propres à assurer l’acceptation et l’application de la politique nationale d’égalité. La commission rappelle également que, dans son rapport général de 2008, elle soulignait l’importance d’adopter une législation sur la non-discrimination et l’égalité pour donner effet à la convention. Dans ce contexte, la commission se réfère aux commentaires qu’elle a formulés sur l’application de la convention (no 100) sur l’égalité de rémunération, 1951, dans lesquels elle note que le gouvernement a élaboré un projet de loi sur l’emploi et les conditions de service contenant une disposition sur l’égalité de rémunération entre hommes et femmes. La commission veut croire que le gouvernement envisagera d’intégrer à la législation des dispositions sur la non-discrimination qui interdisent la discrimination dans l’emploi et la profession, fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, et sur tout autre motif défini en consultation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, tel que prévu par l’article 1, paragraphe 1 a) et b), de la convention. La commission rappelle que, dès lors que des dispositions sont adoptées pour donner effet à la convention, elles doivent couvrir, au minimum, les sept motifs de discrimination expressément énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. La convention impose également d’assurer l’égalité de chances et de traitement dans le processus de sélection et de recrutement, les conditions d’emploi et en matière de licenciement. La commission demande au gouvernement de communiquer des informations sur les mesures prises pour intégrer dans le projet de loi sur l’emploi et les conditions de service des dispositions sur la non-discrimination et l’égalité dans l’emploi et la profession, et de communiquer copie de cette loi dès qu’elle aura été adoptée.

Egalité de chances et de traitement entre hommes et femmes. La commission note que, selon l’enquête sur la population active conduite en 2007‑08, le taux d’activité (consolidé) était de 69,5 pour cent pour les hommes et de 19,6 pour cent pour les femmes, alors que les chiffres correspondants pour la période 2001-02 étaient de 70,3 pour cent pour les hommes et de 14,4 pour cent pour les femmes. Se félicitant des progrès accomplis concernant le taux d’activité des femmes, la commission observe néanmoins que la différence de taux d’activité entre les hommes et les femmes demeure très élevée. La commission note également que le taux d’activité des femmes a augmenté dans les zones rurales, alors qu’il a baissé dans les zones urbaines. Concernant l’emploi des hommes et des femmes, la commission note que le pourcentage des femmes salariées et des femmes exerçant une activité indépendante établi pour 2001-02 est considérablement inférieur à celui qui a été établi pour 2007-08, et que, parallèlement, le nombre de femmes dans la catégorie des travailleurs familiaux non rémunérés a progressivement augmenté (passant de 46,9 pour cent à 65 pour cent). Les femmes occupent toujours majoritairement des emplois de base non qualifiés ou des emplois qualifiés dans le secteur agricole. Dans ce contexte, la commission prend note des observations formulées par la Fédération des travailleurs du Pakistan (PWF), dans sa communication du 21 septembre 2008, dans lesquelles l’organisation souligne la nécessité de prendre des mesures qui permettraient aux femmes de passer de l’économie informelle à l’économie formelle, notamment des mesures visant à assurer la sécurité sociale et le salaire minimum, la formation et l’éducation des femmes dans les zones rurales.

La commission prend note des informations fournies par le gouvernement en réponse à ses commentaires antérieurs sur l’égalité entre les sexes dans l’emploi et la profession. Le gouvernement indique que le ministère du Développement des femmes met actuellement en œuvre un plan d’action national pour l’égalité entre les hommes et les femmes (GRAP), qui prévoit des mesures visant à accroître le taux d’activité des femmes dans le secteur public, notamment par l’amélioration des locaux en y intégrant des sanitaires et des garderies d’enfants. Le gouvernement a maintenu également le quota de 10 pour cent d’emplois réservés aux femmes dans les services publics au niveau fédéral; des efforts sont actuellement déployés pour augmenter ce quota et le faire passer à 20 pour cent. La commission demande au gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur la mise en œuvre du système de quota dans le secteur public, notamment des données statistiques sur la répartition actuelle des hommes et des femmes dans les différents ministères, emplois et postes du secteur public. La commission demande également au gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour promouvoir et garantir l’égalité de chances et de traitement des femmes dans l’emploi et la profession en dehors du secteur public, ainsi que des informations statistiques indiquant les progrès réalisés en matière de participation des femmes au marché du travail, dans les zones rurales et les zones urbaines. A cet égard, la commission demande au gouvernement d’indiquer les mesures spécifiques prises:

i)      pour promouvoir l’égalité entre hommes et femmes dans le secteur privé;

ii)     pour permettre aux femmes de passer de l’économie informelle à l’économie formelle.

En ce qui concerne l’accès des femmes et des filles à l’éducation et à la formation, le gouvernement indique que l’accent est actuellement mis sur l’augmentation de la fréquentation des filles à l’école secondaire. Les mesures prises dans ce domaine consistent en des bourses d’études et des subventions accordées aux ménages à faible revenu, la révision des programmes et des manuels scolaires pour éliminer les stéréotypes sexistes, et des campagnes médiatiques visant à modifier les comportements sociaux à l’égard de l’éducation des filles. Le nouveau projet de politique nationale d’éducation a pour objectif de parvenir à la parité entre hommes et femmes parmi les enseignants à tous les niveaux de l’éducation d’ici à 2015. La commission demande au gouvernement de continuer à communiquer des informations sur les mesures prises pour promouvoir l’égalité d’accès des filles à l’éducation et à la formation à tous les niveaux, ainsi que des données statistiques actualisées à cet égard.

Egalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession des minorités. La commission note avec intérêt que le gouvernement a mis en place, par décision du Conseil des ministres du 20 mai 2009, un quota de 5 pour cent pour l’emploi des minorités dans le secteur public fédéral. Les modalités d’application du quota ont été notifiées par mémorandum no 4/15/94-R-2 du 26 mai 2009 de la division administrative du secrétariat du Conseil des ministres. La commission note que le quota doit s’appliquer à toute personne «non musulmane» telle que définie à l’article 260(3)(b) de la Constitution («toute personne appartenant à la communauté chrétienne, hindoue, sikh, bouddhiste ou parsie, toute personne membre des groupes Quadiani et Lahori qui se réclame du mouvement “Ahmadi” ou autre, toute personne appartenant à la communauté bahaïe et à toute caste répertoriée»). La commission demande au gouvernement de fournir des informations sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre du quota de 5 pour cent d’emploi des minorités dans le secteur public fédéral, notamment des données statistiques sur le nombre de membres de minorités employés, ventilées par sexe et par groupe minoritaire ainsi que par ministère, emploi et poste.

La commission note que, selon les indications du gouvernement, la Commission nationale pour les minorités, qui avait été officiellement créée en 1993, n’est désormais plus active, malgré la proposition visant à sa recomposition présentée au Premier ministre pour approbation. Présidée par le ministre chargé des minorités, la commission a pour mandat, entre autres, d’examiner les lois et les pratiques administratives supposées discriminatoires à l’égard des minorités, afin de recommander au gouvernement les mesures à prendre pour assurer la participation pleine et effective des minorités à tous les aspects de la vie du pays, et d’examiner les plaintes des communautés minoritaires. La commission note également que le gouvernement met en œuvre un plan pour le développement et offre des bourses d’études aux étudiants issus des minorités. La commission veut croire que la Commission nationale pour les minorités sera reformée dans un futur proche et demande au gouvernement de communiquer des informations sur toute évolution à cet égard. Elle demande aussi au gouvernement de continuer à fournir des informations sur la mise en œuvre de plans et de programmes visant à promouvoir et assurer l’égalité de chances et de traitement des minorités en matière de formation et d’éducation, et de fournir aussi des informations sur toute autre mesure prise pour promouvoir l’accès des minorités à l’emploi et à la profession, notamment à l’emploi indépendant.

Discrimination fondée sur l’origine sociale. La commission note que le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, dans ses observations finales du 4 mars 2009, s’est dit préoccupé par la ségrégation et la discrimination persistante de facto à l’égard des dalits, concernant l’exercice de leurs droits économiques, civils, politiques et sociaux, et concernant le fait qu’aucune législation spécifique interdisant la discrimination fondée sur la caste n’ait été adoptée (CERD/C/PAK/CO/20, 4 mars 2009, paragr. 21). Rappelant que la discrimination fondée sur la caste est une forme de discrimination fondée sur l’origine sociale couverte par la convention, la commission fait observer que les Etats ayant ratifié la convention ont l’obligation de prendre des mesures efficaces pour éliminer de telles formes de discrimination dans l’emploi et la profession. A cet égard, la commission recommande d’intégrer à la législation l’interdiction de la discrimination fondée sur l’origine sociale, et notamment la caste. La commission demande également au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour promouvoir et assurer l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession, quelle que soit la caste, par le biais de la législation et d’autres mesures appropriées.

Discrimination fondée sur la religion. La commission rappelle ses précédents commentaires à propos de certaines dispositions du Code pénal liées à l’outrage à la religion («lois sur le blasphème»). Certaines dispositions désignent particulièrement les membres de la minorité Ahmadi. Par exemple, l’article 298C prévoit des peines d’emprisonnement allant jusqu’à trois ans à l’encontre des membres de ce groupe qui, entre autres, propageraient leur foi, verbalement ou par écrit ou par une représentation visible. La commission rappelle également que les passeports pakistanais font mention de la religion et que les musulmans qui demandent un passeport doivent signer une déclaration selon laquelle le fondateur du mouvement Ahmadi est un imposteur, afin d’empêcher les membres de ce mouvement d’obtenir des passeports les présentant comme musulmans. La commission rappelle que, depuis un certain nombre d’années, les organes de contrôle de l’OIT se sont dits préoccupés par l’impact de ces mesures sur l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession de la minorité religieuse concernée. La commission rappelle également que le Rapporteur spécial des Nations Unies sur l’intolérance religieuse avait conclu en 1996 que les dispositions s’appliquant spécifiquement à la minorité Ahmadi étaient discutables, soulignant que la législation sur le blasphème ne devait pas être discriminatoire, ni source d’abus. Le Rapporteur spécial avait aussi recommandé de supprimer toute mention de la religion sur le passeport et de supprimer la déclaration mentionnée ci-dessus (E/CN.4/1996/95/Add.1, paragr. 82 et 85). Dernièrement, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale s’est dit préoccupé par le fait que les lois sur le blasphème risquaient d’être appliquées de façon discriminatoire à l’égard des groupes minoritaires (CERD/C/PAK/CO/20, paragr. 19). La commission note également qu’à l’occasion de l’examen périodique universel du Pakistan, conduit sous les auspices du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, le gouvernement avait indiqué que «des mesures concrètes visant à renforcer la législation et les procédures existantes afin de limiter les possibilités d’abus sont à l’étude» (A/HRC/8/42/Add.1, 28 août 2008, paragr. 8). Prenant note des explications générales fournies par le gouvernement dans son rapport concernant la protection de la liberté de religion en vertu de la Constitution, la commission prie à nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour réviser les dispositions susmentionnées, et de fournir des informations sur toute évolution à cet égard, comme indiqué à l’occasion de l’examen périodique universel.

La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

La commission espère que le gouvernement fera tout son possible pour prendre les mesures nécessaires dans un proche avenir.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer