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Observation (CEACR) - adoptée 2008, publiée 98ème session CIT (2009)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Guatemala (Ratification: 1952)

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La commission prend note du rapport du gouvernement, de la discussion qui a eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence en 2008 et des différents cas dont est saisi le Comité de la liberté syndicale (dont certains concernent de graves allégations de violences visant des dirigeants de syndicats et des syndicalistes). La commission prend également note du rapport de la mission de haut niveau qui s’est rendue dans le pays en avril 2008 et de l’accord tripartite signé pendant cette mission pour améliorer l’application de la convention.

La commission prend note des observations détaillées sur l’application de la convention présentées par le Mouvement syndical du peuple indigène et des paysans guatémaltèques pour la défense des droits des travailleurs et des travailleuses dans une communication du 31 août 2008 ainsi que celles formulées par la Confédération syndicale internationale (CSI) dans une communication du 29 août 2008, qui portent sur des questions déjà abordées par la commission, telles que de graves actes de violence visant des responsables syndicaux et des syndicalistes, le retard dans le processus d’enregistrement d’organisations syndicales, les difficultés que rencontrent les organisations syndicales pour exercer le droit de réunion, ainsi que d’autres violations de la convention. A cet égard, la commission espère que, dans le cadre de l’accord tripartite signé pendant la mission de haut niveau, le gouvernement et les partenaires sociaux examineront de manière tripartite l’ensemble des questions posées ainsi que les commentaires de la CSI de 2005 et de l’Union syndicale des travailleurs du Guatemala (UNSITRAGUA) de 2006. Cet examen pourrait se faire en tenant compte des travaux de la Commission tripartite sur les questions internationales, de la Sous-commission des réformes juridiques et du mécanisme de traitement rapide des cas.

Actes de violence visant des syndicalistes

La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle prend note dans ses observations d’actes de violence visant des syndicalistes; elle avait prié le gouvernement de l’informer sur l’évolution en la matière. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique: 1) qu’il trouve aussi les actes de violence préoccupants; selon lui, ils concernent non seulement les personnes qui exercent des activités syndicales, mais aussi la société en général; 2) qu’il espère qu’à moyen terme il sera possible de faire baisser les taux de délinquance en élaborant des stratégies qui renforcent les systèmes de renseignement civil afin d’identifier, de poursuivre et de condamner les auteurs de délits; 3) que, récemment, un nouveau Procureur général et chef du ministère public a été nommé, et que la Commission tripartite sur les questions internationales a demandé un entretien avec lui pour aborder la question des actes de violence qui visent les syndicalistes et la nécessité d’arrêter, de poursuivre et de condamner les auteurs de ces actes; et 4) que les membres de la commission tripartite entendent assurer une coordination avec le ministère public afin de faciliter la mise en place de mesures de sécurité efficaces pour les membres du mouvement syndical qui font l’objet d’intimidations ou de menaces.

La commission prend note des conclusions de la mission de haut niveau et a relevé que, s’agissant des droits de l’homme en matière syndicale, la mission a constaté qu’une plus grande attention était accordée à ce problème, comme le montre la décision du ministère public, dirigé par le Procureur général, d’allouer un budget plus important aux services chargés d’enquêter sur les délits commis à l’encontre de journalistes et de syndicalistes, et de nommer quatre autres enquêteurs pour ces services. De plus, des avancées ont été réalisées dans l’enquête concernant l’assassinat de Don Pedro Zamora (secrétaire général du Syndicat des travailleurs de Puerto Quetzal) survenu en janvier 2007, qui avait donné lieu à une mission spéciale de l’OIT, ainsi qu’à des mesures de la mission de mars-avril 2007. Les enquêtes réalisées permettent d’établir que deux personnes inculpées pour ce crime font l’objet d’un mandat d’arrêt. Il faut également ajouter que, d’après les recherches effectuées, le syndicaliste López Estrada, porté disparu, se trouvait sain et sauf au domicile de sa mère à Puerto Barrios.

De même, la commission note que, sur proposition de la mission, la commission tripartite a approuvé un accord pour éradiquer la violence, en vertu duquel: 1) il faut évaluer les actions institutionnelles, y compris les plus récentes, en particulier les mesures spéciales de protection, qui permettraient de prévenir les actes de violence visant les syndicalistes menacés; et 2) il faut évaluer les mesures prises actuellement (augmentation du budget et augmentation du nombre d’enquêteurs) pour réaliser une enquête efficace avec des moyens suffisants afin de faire la lumière sur les délits dont les syndicalistes ont été victimes et d’identifier les responsables.

A cet égard, la commission est à nouveau profondément préoccupée par les actes de violence qui visent les dirigeants syndicaux et les syndicalistes, et rappelle que les droits syndicaux ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement continuera à prendre des mesures pour garantir le plein respect des droits humains des syndicalistes, et à appliquer le mécanisme de protection à tous les syndicalistes qui le demandent. La commission prie aussi le gouvernement de prendre sans délai les mesures nécessaires pour diligenter les enquêtes correspondantes afin d’identifier les responsables d’actes de violence visant les dirigeants syndicaux et les syndicalistes, de les traduire en justice et de les sanctionner conformément à la loi. Elle le prie d’indiquer tout fait nouveau à cet égard.

Problèmes d’ordre législatif

La commission rappelle que, depuis plusieurs années, elle formule des commentaires sur les dispositions suivantes, qui ne sont pas conformes à la convention:

–           restrictions à la libre constitution d’organisations (obligation, en vertu de l’article 215 c) du Code du travail, de réunir la majorité absolue des travailleurs du secteur intéressé pour pouvoir constituer un syndicat de secteur), retards dans l’enregistrement de syndicats ou refus d’enregistrement. A cet égard, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle: 1) la nouvelle direction du ministère du Travail a engagé un processus permettant de réduire considérablement le délai administratif nécessaire à l’autorisation de syndicats; 2) la Direction générale du travail avait autorisé 40 syndicats nouveaux en août 2008; et 3) le traitement des demandes d’inscription en cours dépend de la vitesse avec laquelle il sera tenu compte des observations adressées par les organes techniques du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale aux représentants des syndicats en cours de constitution;

–           restrictions au droit de libre choix des dirigeants syndicaux (obligation d’être d’origine guatémaltèque et de travailler dans l’entreprise ou dans le secteur économique en question pour pouvoir être élu dirigeant syndical (art. 220 et 223 du Code du travail));

–           restrictions au droit des organisations de travailleurs d’exercer librement leurs activités (en vertu de l’article 241 du Code du travail, pour être licite, la grève doit être déclarée non par la majorité des votants, mais par la majorité des travailleurs); possibilité d’imposer l’arbitrage obligatoire en cas de conflit dans les transports publics et dans les services de distribution de combustibles; il convient de déterminer si les grèves intersyndicales de solidarité restent interdites (art. 4, alinéas d), e) et g), du décret no 71-86, tel que modifié par le décret législatif no 35-96 du 27 mars 1996); sanctions professionnelles et sanctions au civil et au pénal applicables en cas de grève de fonctionnaires ou de travailleurs de certaines entreprises (art. 390-2) et art. 430 du Code pénal, et décret no 71-86);

–           projet de loi sur la fonction publique. Dans son observation précédente, la commission avait pris note d’un projet de loi sur la fonction publique qui, selon l’UNSITRAGUA et la Fédération nationale des syndicats des travailleurs de l’Etat (FENASTEG), imposait un pourcentage trop élevé pour constituer un syndicat et fixait certaines restrictions à l’exercice du droit de grève. La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle le projet a été paralysé en juillet 2008, lorsqu’une table ronde réunissant plusieurs secteurs a été organisée pour élaborer un projet de loi tenant compte des besoins spécifiques des secteurs concernés;

–           situation de nombreux travailleurs dans le secteur public qui ne jouissent pas des droits syndicaux. Il s’agit de travailleurs engagés en vertu du poste 029 et d’autres postes du budget pour des tâches spécifiques ou temporaires. Pourtant, ils réalisent des tâches ordinaires et permanentes et, souvent, ne bénéficient ni des droits syndicaux ni d’autres prestations liées au travail, en dehors des salaires, ne cotisent pas à la sécurité sociale et ne bénéficient pas des négociations collectives lorsqu’il y en a. La commission note que les membres de la Cour suprême de justice ont déclaré à la mission de haut niveau qu’en vertu de la jurisprudence ces travailleurs jouissaient du droit syndical.

S’agissant de ces questions, la commission note que, sur la proposition de la mission de haut niveau, la commission tripartite a approuvé un accord destiné à moderniser la législation et à assurer une meilleure application des conventions nos 87 et 98. Cet accord prévoit «un examen des dysfonctionnements de l’actuel système de relations professionnelles (retards excessifs et abus dans le cadre de procédures, mauvaise application de la loi et des décisions de justice, etc.), notamment des mécanismes de protection du droit de négociation collective et des droits des organisations de travailleurs et d’employeurs et de leurs membres consacrés dans les conventions nos 87 et 98. L’examen devrait tenir compte de considérations techniques et des commentaires – de fond ou de forme – formulés par la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’OIT». La commission relève que la mission de haut niveau s’est engagée à prendre des mesures afin que l’assistance technique souhaitée soit apportée pour ces questions, et note avec intérêt que cette assistance a été fournie.

La commission a pris note du rapport de la première mission d’assistance technique (novembre 2008) qui a suivi la mission de haut niveau (avril 2008).

La commission espère vivement que, grâce à l’assistance technique qu’il reçoit, le gouvernement sera en mesure de fournir, dans son prochain rapport, des informations faisant état d’une évolution positive concernant les différents points mentionnés.

Autres questions

Secteur des maquilas (zones franches d’exportation). Dans sa précédente observation, la commission avait pris note des commentaires d’organisations syndicales faisant état de problèmes importants liés aux droits syndicaux dans les maquilas. Elle avait prié le gouvernement d’adopter les mesures nécessaires pour que la convention s’applique pleinement dans ce secteur. La commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle: 1) l’Inspection générale du travail du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a traité les plaintes concernant le secteur des maquilas, et son unité spécialisée pour ce secteur a réalisé les inspections de routine; 2) en 2007, 19 entreprises du secteur ont fermé et dix en 2008; 3) en 2008, dans dix entreprises du secteur, une procédure de conciliation administrative a permis de verser des prestations aux travailleurs touchés par les fermetures, et les travailleurs qui avaient décidé de ne pas participer à ces procédures et d’engager une action judiciaire ont bénéficié de l’assistance gratuite des services de défense du travailleur; 4) il existe dix syndicats dans le secteur auxquels sont affiliés 258 travailleurs au total; 5) en 2007, dix plaintes pour violation de la liberté syndicale ont été enregistrées et, pour six d’entre elles, une solution a été trouvée par voie de conciliation. En 2008, 17 plaintes concernant des violations de la convention ont été reçues; 16 plaintes sont en cours de traitement; et 6) les activités de formation prévues pour le secteur des maquilas sur les droits consacrés dans les conventions nos 87 et 98 vont se poursuivre; le gouvernement espère bénéficier de l’appui technique du BIT.

A cet égard, la commission note que, dans ses conclusions, la mission de haut niveau a indiqué que «cette question, comme la question abordée dans le précédent paragraphe, montre la mesure dans laquelle les problèmes mis au jour pendant la mission de 2007 persistent. En effet, d’après le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, sept conventions collectives s’appliquent dans le secteur des maquilas, mais deux seulement datent de 2007. Les autres datent de 2003, voire des années antérieures. Quant à l’affiliation syndicale, d’après les autorités administratives, il existe six syndicats auxquels sont affiliés 562 travailleurs des maquilas, alors que le secteur compte près de 200 000 travailleurs. Pour la direction du mouvement syndical, il n’existe que deux syndicats dans ce secteur. Quel que soit le chiffre exact, dans les maquilas, l’activité syndicale reste faible et la négociation collective peu répandue, et un problème d’application des conventions nos 87 et 98 se pose.»

Dans ces conditions, la commission espère que le gouvernement continuera à bénéficier de l’assistance technique du Bureau pour que la convention soit pleinement appliquée dans les maquilas, et qu’il continuera à transmettre des informations sur cette question.

Commission tripartite nationale. Dans sa précédente observation, la commission avait prié le gouvernement de continuer à la tenir informée des travaux de la Commission tripartite sur les questions internationales, de la Sous‑commission des réformes juridiques et du mécanisme de traitement rapide des cas. La commission prend note des informations du gouvernement selon lesquelles: 1) il se dit satisfait de l’évolution des réunions de la commission tripartite, notamment de la réalité du dialogue et de l’ouverture dont elle a fait preuve pour procéder à des analyses et formuler des recommandations; 2) en août 2008, 10 réunions avaient été organisées pour examiner des questions concernant les relations ouvriers/patronat; 3) la dynamique de la commission tripartite lui a permis d’exercer certaines fonctions de la Sous-commission des réformes juridiques, et actuellement une analyse est réalisée pour établir un ordre de priorité dans les cas à traiter; 4) les représentants des travailleurs et les représentants des employeurs de la commission tripartite ont donné des informations sur les cas examinés grâce au mécanisme de traitement rapide des cas, et la participation constante de l’Inspecteur général du travail a permis de traiter les cas de manière satisfaisante, tant dans le secteur agricole que dans le secteur textile ou celui des maquilas; et 5) le vice-ministre du Travail est intervenu directement pour les cas dont était saisie la commission tripartite, se rendant en personne sur le lieu des conflits et contribuant à trouver des solutions adaptées. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les travaux de la Commission tripartite sur les questions internationales, de la Sous-commission des réformes juridiques et du mécanisme de traitement rapide des cas.

Enfin, la commission relève que, dans le cadre de la session de la Conférence internationale du Travail de 2008, lorsqu’elle a examiné si la convention était appliquée par le Guatemala, la Commission de l’application des normes a invité le gouvernement à accepter la visite d’une mission constituée des porte-parole des groupes employeur et travailleur de cette commission pour contribuer à la recherche de solutions durables à tous les problèmes évoqués. La commission note avec intérêt que, dans son rapport, le gouvernement se félicite de cette invitation, et qu’il indique que toutes missions effectuées de bonne foi pour contribuer à remédier aux situations complexes concernant la liberté syndicale sont accueillies favorablement.

La commission espère pouvoir constater prochainement que de véritables progrès ont été réalisés dans l’application de la convention.

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