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Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Niger (Ratification: 1961)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Niger (Ratification: 2015)

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Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention.Esclavage et pratiques analogues. La question de la persistance de l’esclavage au Niger a été examinée par la commission dans sa précédente observation ainsi que par la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail en juin 2004 (92e session). La commission s’était référée aux commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) – désormais Confédération syndicale internationale (CSI) –, et à l’étude réalisée en 2001 sous l’égide de l’OIT «Identification des obstacles à la mise en œuvre des principes et droits fondamentaux au travail et propositions de solutions au Niger», validée par le gouvernement et les partenaires sociaux. La commission avait relevé qu’il existait au Niger un esclavage archaïque qui se manifestait au sein des communautés nomades et que le statut d’esclave continuait à être transmis par la naissance aux personnes issues de certains groupes ethniques. Le maître dispose de l’esclave à titre gratuit ou onéreux. Les relations entre maîtres et esclaves sont basées sur l’exploitation directe. Ces derniers sont tenus de travailler pour leur maître sans percevoir de salaire, essentiellement en tant que bergers, travailleurs agricoles ou employés domestiques. La commission avait noté que le gouvernement reconnaissait que le phénomène de l’esclavage n’était pas totalement éradiqué et que de nombreuses actions pour lutter contre le travail forcé des personnes réduites en esclavage avaient été entreprises. Ainsi sur le plan législatif, la loi no 2003-025 du 13 juin 2003 a ajouté dans le Code pénal une section consacrée à l’esclavage. Le fait de réduire autrui en esclavage ou d’inciter autrui à aliéner sa liberté ou sa dignité ou celle d’une personne à sa charge pour être réduit en esclavage est puni d’une peine d’emprisonnement de dix à trente ans et d’une amende. Des délits d’esclavage sont également définis et réprimés. Par ailleurs, les associations ayant comme objet de combattre l’esclavage ou les pratiques analogues sont habilitées à exercer l’action civile en réparation des dommages causés par les infractions à la loi pénale sur l’esclavage (art. 270-1 à 270-5 du Code pénal). Sur le plan de la sensibilisation, des activités ont été menées en particulier auprès des chefs traditionnels. La commission avait demandé au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour estimer l’ampleur du phénomène de l’esclavage au Niger, sur les programmes ou actions mis en œuvre spécifiquement en faveur des anciens esclaves ou descendants d’esclaves et sur le nombre de personnes ayant été poursuivies, jugées et sanctionnées pour avoir imposé du travail forcé aux personnes réduites en esclavage.

La commission note que, dans son rapport de 2005, le gouvernement a indiqué qu’aucune condamnation par les tribunaux n’avait été enregistrée faute de plainte déposée par les victimes. Dans une communication ultérieure, et en réponse aux observations formulées par la CISL, le gouvernement a de nouveau indiqué qu’il ne niait pas les survivances de pratiques esclavagistes dans certaines parties du territoire, bien au contraire, il en a toujours fait un sujet de préoccupation et a pris des initiatives en conséquence. Le gouvernement s’est notamment référé aux circulaires du Premier ministre adressées en 2004 et 2005 au ministre de l’Intérieur suite à l’adoption de la loi de 2003 incriminant l’esclavage, lui demandant de convoquer les responsables administratifs, les chefs religieux et traditionnels pour attirer leur attention sur l’impérieuse nécessité de se conformer à la loi et de faire cesser toute pratique esclavagiste sous toutes ses formes. Le gouvernement a précisé que, dans le cadre de la coopération avec le Bureau, le lancement d’un projet de lutte contre les survivances du travail forcé et pratiques analogues était prévu et qu’à cette occasion une étude visant à mieux approfondir les connaissances sur la nature et l’ampleur du phénomène et à identifier les groupes cibles pourrait être réalisée et un plan d’action nationale contre le travail forcé mis en place.

La commission relève avec intérêt que depuis lors une Commission nationale de lutte contre les survivances du travail forcé et la discrimination a été instituée (arrêté no 0933/MFP/T du 4 août 2006) et officiellement mise en place en novembre 2006. Cette commission a notamment pour missions de prévenir les survivances du travail forcé et la discrimination à travers des actions de réduction de la pauvreté dans les zones ciblées; d’élaborer un plan d’action national y relatif résultant d’une étude diagnostique approfondie; et d’assurer le suivi de la mise en œuvre du plan d’action national. La commission note que cette commission s’est déjà réunie à plusieurs reprises et qu’elle bénéficie de l’appui du Bureau à travers le Programme d’action spéciale pour combattre le travail forcé (SAP-FL) et notamment le Projet d’appui à la lutte contre le travail forcé et la discrimination au Niger (PACTRAD) qui ont été associés à ses réunions. Lors de sa réunion d’octobre 2007, la Commission nationale de lutte contre les survivances du travail forcé et la discrimination a finalisé un plan national de lutte contre les survivances du travail forcé et la discrimination qui devra être soumis pour adoption au gouvernement. La commission relève, par ailleurs, qu’à la demande de la commission nationale le Bureau soutient la réalisation d’une étude statistique sur le travail des enfants et sur les séquelles de l’esclavage qui devra être menée par l’Institut national des statistiques.

La commission prend note de l’ensemble de ces informations. Elle espère que le gouvernement continuera à prendre toutes les mesures nécessaires pour adopter rapidement le plan d’action national et pour mener à bien, dans les plus brefs délais, l’étude sur les survivances du travail forcé. La commission considère en effet qu’il est essentiel que le gouvernement dispose de données quantitatives et qualitatives fiables sur les différentes manifestations de l’esclavage et ses séquelles, afin de cibler les actions devant être menées et les populations devant en bénéficier. La commission espère que le plan d’action national prévoira des mesures destinées à assurer la publicité de la loi de 2003 ayant ajouté les dispositions incriminant l’esclavage dans le Code pénal (art. 270-1 à 270-5), ainsi que des actions de sensibilisation de la population et des acteurs amenés à participer à la lutte contre l’esclavage, notamment les chefs religieux et traditionnels, les agents de police judiciaire et les magistrats. Il conviendra également que le plan d’action envisage des activités ou des programmes spécifiquement destinés aux anciens esclaves ou descendants d’esclaves de manière à leur assurer des moyens de subsistance suffisants afin qu’ils ne se retrouvent pas dans une situation de dépendance propice à l’exploitation de leur travail.

Enfin, la commission rappelle que, conformément à l’article 25 de la convention, le gouvernement doit s’assurer que les sanctions pénales imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées. Elle souhaiterait que le gouvernement indique si des décisions de justice ont été prononcées sur la base des articles 270-1 à 270-5 du Code pénal et qu’il en communique copie. La commission souligne qu’il est indispensable que les auteurs de crime ou de délit d’esclavage soient traduits en justice et, le cas échéant, condamnés. Elle espère que le gouvernement prendra à cette fin toutes les mesures qui sont de son ressort et, notamment, en s’assurant que les victimes sont effectivement en mesure de s’adresser aux autorités policières et judiciaires pour faire valoir leurs droits.

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