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Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Polynésie française

Autre commentaire sur C029

Observation
  1. 1993
  2. 1991
  3. 1990
  4. 1987

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La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement concernant le travail d’intérêt général.

Article 2, paragraphe 2 c), de la convention. Concession de main-d’œuvre pénitentiaire à des entreprises privées. La commission prend note des informations contenues dans le rapport du gouvernement concernant le nombre et la nature des postes de travail offerts aux détenus, ainsi que les niveaux de rémunération. Selon ces informations, quatre détenus travaillent au conditionnement d’écouteurs pour une compagnie aérienne privée. Ils sont payés 18 francs CFP la pièce. Le travail est effectué dans l’enceinte de l’établissement sous la direction du personnel pénitentiaire. Selon le gouvernement, ce travail est librement consenti, puisqu’il n’est proposé qu’aux détenus qui en font la demande expresse. Un atelier de repassage fonctionne par ailleurs pour le compte d’une association de réinsertion. Les détenues sont payées 512,50 francs CFP de l’heure et travaillent en moyenne douze heures par semaine. Aucun détenu ne travaille en revanche à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire pour le compte d’une personne physique ou morale de droit privé. Les dix détenus qui travaillent en chantier extérieur, au sujet desquels la commission comprend qu’ils travaillent dans le secteur public, sont payés 2 500 francs CFP par jour de travail; 83 détenus travaillent en outre sous le régime du service général et 11 sous le régime de la concession, pour un total de 224 détenus. La commission note que, selon le gouvernement, la demande de travail étant très largement supérieure à l’offre, la question du libre consentement ne se poserait pas dans les termes évoqués par la commission. Elle note que, dès lors, le gouvernement n’envisage pas de mesure quelconque pour mieux garantir le libre consentement des détenus. Le gouvernement indique par ailleurs que, pour la même raison, il n’est pas utile de prévoir des mesures pour que les détenus consentent librement à travailler pour des personnes morales de droit privé sans craindre de ne pouvoir bénéficier d’une réduction de peine. La commission note que, selon le gouvernement, les réductions de peine sont accordées, sauf incident disciplinaire, de façon quasi automatique, et qu’elles dépendent de nombreux critères liés à la volonté de réinsertion clairement manifestée, la demande de travail n’étant qu’un élément parmi d’autres, soumis à l’appréciation du juge de l’application des peines.

La commission a indiqué dans ses études d’ensemble, notamment aux paragraphes 59 et 60 de son étude d’ensemble de 2007, Eradiqur le travail forcé, qu’à la condition que les prisonniers consentent volontairement à travailler pour une entreprise privée, sans être soumis à des pressions ou à la menace d’une peine quelconque, ce travail ne relève pas du champ d’application de la convention. Dans le même temps, la commission a indiqué que, compte tenu de leurs conditions de captivité, il doit exister des garanties pour que le consentement des prisonniers soit donné librement et volontairement. Aux paragraphes 114 à 122 de son étude d’ensemble de 2007, la commission a abordé la question des garanties, qui ne se résument pas au consentement formel écrit, l’indicateur le plus fiable du caractère volontaire du travail étant que ce travail soit exécuté dans des conditions se rapprochant de celles d’une relation de travail libre. Les facteurs devant être pris en compte dans ce contexte comprennent, notamment, l’existence de niveaux de rémunération et d’une protection en matière de sécurité et santé au travail se rapprochant d’une relation de travail libre.

a) Libre consentement au travail. La commission avait noté, dans sa demande directe de 2002, l’information communiquée par le gouvernement dans son rapport de l’année 2000 faisant état du caractère facultatif du travail pénitentiaire. Elle avait noté, au vu des dispositions applicables en France métropolitaine (art. D99, alinéa 1er, du Code de procédure pénale tel qu’amendé par le décret no 98-1099 du 8 décembre 1998), que ce caractère facultatif était loin d’être reflété aussi clairement dans le Code de procédure pénale applicable en Polynésie française (art. D.P. 98 et D.P. 99 issus du décret no 95-300 du 17 mars 1995). La commission note en effet que la formulation des articles D.P. 98 et D.P. 99 semble indiquer que le travail pénitentiaire a un caractère obligatoire, sauf pour les prévenus, les détenus pour dettes, les détenus qui suivent un enseignement ou une formation professionnelle, ceux qui sont déclarés inaptes après avis médical et les condamnés bénéficiant d’un régime spécial, c’est-à-dire, aux termes de l’article D.P. 490, les détenus poursuivis ou condamnés pour crimes et délits contre la sûreté de l’Etat. En outre, une lecture a contrario de l’article D.P. 493, alinéa 2, du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française semble indiquer que les détenus qui ne bénéficient pas du régime spécial sont astreints au travail. Par ailleurs, la commission note que l’article 717-3 du Code de procédure pénale (ancien art. 720), dont le deuxième alinéa pose le principe du caractère volontaire du travail pénitentiaire, n’est pas applicable en Polynésie française (l’article 804 du Code de procédure pénale l’exclut expressément). Dans ces conditions, et malgré les explications fournies par le gouvernement dans ses rapports, la commission constate qu’il n’existe pas, dans la législation applicable en Polynésie française, de disposition posant le principe du caractère facultatif du travail pénitentiaire, comme c’est le cas dans la législation française applicable sur le territoire métropolitain. La commission prie donc le gouvernement de prendre des mesures pour que le caractère volontaire du travail pénitentiaire se trouve reflété dans la législation applicable sur le territoire de la Polynésie française, comme c’est le cas dans la législation applicable sur le territoire métropolitain, de façon à garantir le respect de la convention.

b)Conditions de travail proches de celles d’une relation de travail libre. Contrat de travail. Rémunération. Dans sa demande directe de 2006 relative à l’application de la convention en France métropolitaine, la commission avait noté que, aux termes de l’article D102, paragraphe 2, du Code de procédure pénale, l’organisation, les méthodes et les rémunérations du travail doivent se rapprocher autant que possible de celles des activités professionnelles extérieures afin notamment de préparer les détenus aux conditions normales du travail libre. La commission constate que ces dispositions sont absentes de la partie réglementaire du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française.

En ce qui concerne le contrat de travail, la commission note que, comme en France métropolitaine, la réglementation du travail des détenus applicable en Polynésie française exclut la possibilité de l’existence d’un contrat de travail. En effet, aux termes de l’article D.P. 103, alinéa 2, du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, sont exclusives de tout contrat de travail les relations qui s’établissent entre l’administration pénitentiaire et le détenu auquel elle procure un travail ainsi que les relations entre l’entreprise concessionnaire et le détenu mis à sa disposition selon les conditions d’une convention administrative qui fixe, notamment, les conditions de rémunération et d’emploi. La commission note qu’en vertu de l’article D.P. 103, alinéa 4, pour les activités de production les conditions de rémunération et d’emploi sont fixées par convention, en référence aux conditions d’emploi à l’extérieur, en tenant compte des spécificités de la production en milieu carcéral. Aux termes de l’alinéa 6 c) du même article, la convention comprend également la grille des rémunérations applicables en fonction du degré de qualification de chaque poste de travail.

La commission renvoie à sa demande directe de 2006 relative à l’application de la convention en France métropolitaine. Dans des commentaires précédents, la commission avait espéré, compte tenu des informations positives communiquées par le gouvernement, que des mesures seraient prises en vue de proposer aux détenus travaillant pour une entreprise privée un contrat de travail avec l’organisme employeur, qu’il s’agisse de l’entreprise pour laquelle le travail est effectué ou d’un organisme relevant de l’administration pénitentiaire. Le gouvernement avait indiqué dans son rapport de 2004 que le Plan d’amélioration des conditions de travail et d’emploi (PACTE 2) s’était fixé trois objectifs, dont celui de rapprocher les conditions d’exercice du travail pénitentiaire des conditions observables à l’extérieur. La commission avait par ailleurs relevé que le rapport d’information réalisé en 2002 par le sénateur Paul Loridant soulignait la nécessité d’introduire le droit et le contrat dans la relation de travail en prison. La commission s’était aussi référée à l’avis du Conseil économique et social de février 2006 sur «les conditions de la réinsertion socioprofessionnelle des détenus en France» et au rapport de la Cour des comptes «Garde et réinsertion – la gestion des prisons», publié en 2006. Compte tenu de ces indications, la commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur les mesures qui sont envisagées afin de donner suite à ces initiatives sur le territoire de la Polynésie française. Elle le prie par ailleurs de communiquer copie des conventions administratives mentionnées à l’article D.P. 103, alinéas 1, 2, 4 et 6, du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française.

En ce qui concerne le niveau des rémunérations, outre les dispositions mentionnées ci-dessus, la commission note que, aux termes de l’article D.P. 103, alinéa 5, du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, en tout état de cause, la rémunération horaire ne saurait être inférieure à un seuil fixé annuellement par arrêté du Haut Commissaire de la République. La commission prie le gouvernement de communiquer copie du dernier arrêté en date du Haut Commissaire de la République.

La commission note par ailleurs que, aux termes de l’article D.P. 103-1 du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, les détenus employés à l’extérieur des établissements pénitentiaires peuvent bénéficier de l’ensemble des mesures destinées à faciliter l’accès à l’emploi pour les travailleurs libres et que, d’une manière générale, les dispositions de la réglementation du travail leur sont applicables.

Aux termes de l’article D.P. 104 du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, les concessions de travail à l’intérieur des établissements pénitentiaires font l’objet de clauses et conditions générales arrêtées par le Haut Commissaire de la République. La commission prie le gouvernement de communiquer copie du texte contenant ces clauses et conditions générales.

La commission note en outre les autres dispositions réglementaires applicables au travail des détenus en Polynésie française. Elle note que, aux termes de l’article D.P. 108, alinéa 1er, du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, la durée du travail par jour et par semaine, déterminée par le règlement intérieur de l’établissement, doit se rapprocher des horaires pratiqués dans le territoire ou dans le type d’activité considéré et qu’en aucun cas elle ne saurait leur être supérieure. En vertu de l’alinéa 2 du même article, le respect du repos hebdomadaire et des jours fériés doit être assuré; les horaires doivent prévoir le temps nécessaire pour le repos, les repas, la promenade et les activités éducatives et de loisirs. Aux termes de l’article D.P. 109 du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, les dispositions législatives et réglementaires en vigueur localement, relatives à l’hygiène et à la sécurité des travailleurs, sont applicables dans les établissements pénitentiaires. Enfin, aux termes de l’article D.P. 110 du Code de procédure pénale applicable en Polynésie française, le droit à la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles est reconnu aux détenus exécutant un travail.

La commission prie le gouvernement de continuer à communiquer des informations concernant le nombre de détenus qui travaillent pour des personnes morales privées, la nature des travaux accomplis, les entreprises privées et autres personnes morales privées concernées, et la rémunération horaire ou mensuelle des personnes concernées.

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