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Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Ethiopie (Ratification: 1963)

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La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle regrette que celui-ci se borne à indiquer les dispositions législatives qui, selon le gouvernement, garantissent l’application de la convention alors que la Commission de l’application des normes de la Conférence fait observer depuis plusieurs années que la convention n’est pas appliquée, et a prié, en juin 2007, le gouvernement de donner des informations détaillées à la commission d’experts.

La commission regrette que le gouvernement n’ait pas répondu aux commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), et de l’Internationale de l’éducation (IE) portant sur des allégations analogues et en particulier sur les faits suivants: 1) les bureaux de l’Association des enseignants éthiopiens (ETA) ont été fermés, les documents et l’équipement électronique ont été confisqués dans les bureaux en 2005 et ses avoirs financiers sont gelés depuis 1993; 2) neuf enseignants de la branche d’Addis-Abeba de l’ETA ont été arrêtés et deux sévèrement battus le 25 septembre 2005 à la suite d’une réunion de préparation de la Journée mondiale des enseignants; 3) environ 24 enseignants et membres de l’ETA ont été arrêtés en novembre 2005; 4) des charges incluant la conspiration, l’insurrection armée, la haute trahison et le génocide ont été portées à l’encontre de dirigeants de l’ETA et sont susceptibles d’entraîner des peines allant de trois ans d’emprisonnement à la peine capitale; 5) à la fin de 2005, 58 enseignants et membres de l’ETA auraient toujours été en prison sans possibilité de libération sous caution et empêchés de s’entretenir avec leurs avocats. La commission prend note des commentaires transmis par la CSI le 28 août 2007 sur l’application de la convention, qui porte sur les questions mentionnées ci-dessus et des allégations selon lesquelles les droits syndicaux des enseignants auraient été violés (création d’un syndicat contrôlé par le gouvernement, perturbation de réunions syndicales, harcèlement, arrestations, détention, torture et enlèvement de membres de l’ETA).

De plus, la commission prend note de la discussion qui a eu lieu sur l’application de la convention au sein de la Commission de la Conférence en juin 2007. Elle prend note des observations faites par le gouvernement pendant la discussion relative aux allégations concernant l’ETA à propos de la détention de certains des membres de cette association, de la fermeture de son bureau et de la confiscation de biens et documents lui appartenant. Selon le gouvernement, les allégations selon lesquelles il favoriserait une association de l’ETA contre une autre, aurait transféré illégalement des fonds syndicaux de l’ETA, arrêté des membres de l’autre association et confisqué ses biens sont complètement fausses et infondées. A propos de la détention de M. Kebede, président de la branche d’Addis-Abeba de l’ETA, le gouvernement affirme qu’en avril 2007 la Haute Cour fédérale a ordonné la relaxe de M. Kebede au motif qu’il n’y avait pas de charge contre lui. Le gouvernement ajoute qu’aucun enseignant n’est en détention. La commission se félicite de l’acquittement et de la relaxe de M. Kebede et de ses collègues, mais exprime sa profonde préoccupation face à de nouvelles allégations concernant la récente arrestation de syndicalistes soumis à la torture et à des mauvais traitements en détention, et la persistance des actes d’intimidation et d’ingérence. La commission rappelle que lorsque se sont déroulés des troubles ayant entraîné des pertes de vies humaines ou des blessures graves, l’institution d’une enquête judiciaire indépendante est une méthode particulièrement appropriée pour éclaircir pleinement les faits, déterminer les responsabilités, sanctionner les coupables et prévenir la répétition de telles actions. Ces enquêtes judiciaires devraient être menées à terme dans les meilleurs délais, sinon une situation d’impunité de fait risque d’être créée, qui renforce le climat de violence et d’insécurité, et est donc extrêmement dommageable pour l’exercice des activités syndicales (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 29). La commission prie instamment le gouvernement de diligenter sans délai une enquête approfondie et indépendante sur toutes les allégations formulées par la CSI, et précédemment par la CISL ainsi que par l’IE, et de la tenir informée du résultat. Elle encourage fermement le gouvernement à accepter une mission de contacts directs dans le pays comme recommandée par la Commission de l’application des normes de la Conférence et le Comité de la liberté syndicale.

La commission rappelle que dans ses précédents commentaires elle avait attiré l’attention sur les questions suivantes.

Article 2 de la convention. Droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix. La commission avait noté que selon son article 3 la proclamation de 2003 sur le travail ne s’applique pas aux relations professionnelles découlant d’un contrat conclu dans un but d’éducation, de traitement, de réadaptation, d’enseignement, de formation (autre que l’apprentissage), d’un contrat de service personnel à des fins non lucratives ou d’un contrat d’employé de direction, ni aux employés de l’administration de l’Etat, aux juges et aux procureurs, auxquels s’appliquent des lois spécifiques. Rappelant que les seules exceptions autorisées par la convention sont les membres de la police et des forces armées, la commission demande de nouveau au gouvernement d’indiquer comment le droit de constituer des organisations est garanti, dans la législation et dans la pratique, aux catégories de travailleurs susmentionnées, ainsi que de joindre à son prochain rapport tout texte législatif portant sur cette question.

La commission prend note du cas no 2516 dont est saisi le Comité de la liberté syndicale. Elle note en particulier que des enseignants du secteur public et des fonctionnaires n’ont pas le droit de former des syndicats et de s’y affilier, et que le gouvernement procède actuellement à la révision de la proclamation sur la fonction publique qui protègera et garantira le droit des fonctionnaires (y compris les enseignants des écoles publiques). En conséquence, la commission prie instamment le gouvernement de garantir le droit d’association des fonctionnaires, y compris les enseignants du secteur public, et de la tenir informée de tout progrès réalisé dans ce sens.

Article 3. Droit des organisations de travailleurs de formuler leur programme d’action sans l’intervention des autorités publiques. La commission avait noté que les transports aériens et les transports urbains par autobus étaient inscrits sur la liste des services essentiels dans lesquels la grève est interdite (art. 136(2) de la proclamation sur le travail). La commission considère que ces services ne sont pas des services essentiels au sens strict du terme. La commission prie par conséquent le gouvernement d’envisager la mise en place d’un service minimum dans ces services d’utilité publique plutôt que d’imposer l’interdiction pure et simple de toute grève, interdiction qui ne devrait être possible que pour les services essentiels au sens strict du terme. Elle prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les services susmentionnés soient rayés de la liste des services essentiels et de la tenir informée des mesures prises ou envisagées dans ce sens.

La commission avait déjà fait part de sa préoccupation au sujet de l’arbitrage obligatoire imposé à la demande de l’une des parties à un conflit. Elle avait noté que l’article 143(2) de la proclamation sur le travail autorisait la partie lésée à un conflit du travail à saisir le Conseil des relations du travail pour qu’il procède à l’arbitrage ou à saisir le tribunal compétent. Dans ce cas, la grève est considérée illégale (art. 160(1)). Dans le cas des services essentiels qui figurent sur la liste de l’article 136(2), le conflit peut être porté devant un conseil spécial d’arbitrage (art. 144(2)). La commission rappelle que, à l’exception des cas de services essentiels au sens strict du terme, de crise nationale aiguë ou de fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, le recours à l’arbitrage ne doit être autorisé qu’à la demande des deux parties. La commission invite donc de nouveau le gouvernement à modifier sa législation de façon à la rendre conforme à la convention et de la tenir informée des mesures prises ou envisagées dans ce sens.

La commission avait précédemment noté que l’article 158(3) de la proclamation sur le travail concernant le vote d’une grève prévoyait que ce vote devait être sanctionné par la majorité des travailleurs concernés lors d’une séance réunissant au moins les deux tiers des membres du syndicat. La commission rappelle que, si la législation exige un vote des travailleurs avant qu’une grève puisse être déclenchée, il convient de veiller à ce que seuls soient pris en compte les votes exprimés, le quorum ou la majorité requis étant fixés à un niveau raisonnable (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 170). La commission prie de nouveau le gouvernement de modifier l’article 158(3) de façon à abaisser le quorum requis pour un vote à bulletin secret et de la tenir informée des mesures prises ou envisagées pour ce faire.

Article 4. Dissolution de syndicats. La commission avait noté que l’article 120(c) de la proclamation sur le travail autorise l’annulation du certificat d’enregistrement d’une organisation lorsqu’il s’avère que celle-ci a des activités interdites par la proclamation sur le travail. Comme la commission l’a déjà souligné plus haut, certaines des dispositions de la proclamation sur le travail limitent le droit des travailleurs à organiser leurs activités et sont contraires à la convention. Elle prie par conséquent le gouvernement de veiller à ce que ces dispositions ne soient pas invoquées pour annuler l’enregistrement d’une organisation tant qu’elles ne sont pas mises en conformité avec les dispositions de la convention.

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