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Demande directe (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

Convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 - Etats-Unis d'Amérique (Ratification: 1991)

Autre commentaire sur C105

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Article 1 d) de la convention. 1. Dans ses précédentes demandes directes, la commission avait pris note de la déclaration faite par la représentante du gouvernement, en juin 2002, à la Commission de la Conférence, selon laquelle, après un examen approfondi de la législation et de la pratique pénitentiaires, fédérales et étatiques, le Conseil consultatif tripartite sur les normes internationales du travail (TAPILS) avait constaté que l’emprisonnement de grévistes pour offense à la Cour était rare aux Etats-Unis. Elle avait également affirmé que les personnes emprisonnées dans ces circonstances étaient considérées comme étant en «détention préventive» et non comme des prisonniers ordinaires; que la réglementation du Bureau fédéral des prisons et d’autres directives fédérales interdisaient l’imposition de travail forcé ou obligatoire aux personnes en détention préventive; et que le TAPILS n’avait trouvé aucun cas dans lequel du travail aurait été imposé contrairement à ces directives. La commission avait pris note de ces indications et des conclusions auxquelles était parvenu le TAPILS au sujet du traitement réservé dans la pratique à des personnes incarcérées pour avoir désobéi à une ordonnance de la Cour leur interdisant de faire grève. Elle avait cependant fait observer qu’elle avait pour mandat de s’assurer de la conformité tant de la loi que de la pratique avec les conventions ratifiées et avait prié le gouvernement de donner des informations et des explications complémentaires concernant la législation correspondante des Etats, et notamment du Michigan, du Missouri et du Nevada, ainsi que d’indiquer toutes mesures prises ou envisagées pour en garantir la conformité avec la convention.

2. La commission relève que, dans son dernier rapport, le gouvernement indique que les lois en question des Etats du Michigan, du Missouri et du Nevada ne soulèvent et ne devraient soulever aucune inquiétude eu égard à la convention, parce qu’«aucun problème ne s’est jamais posé ni n’a menacé de se poser» dans ces Etats.

Michigan

3. Les commentaires antérieurs de la commission portaient sur les sections 423.202 et 423.202a du recueil de lois du Michigan (loi de 1947 sur les relations de travail dans le secteur public, telle que modifiée), lues conjointement avec d’autres dispositions législatives, en vertu desquelles les employés publics n’ont pas le droit de faire grève, interdiction qui est mise en œuvre par le biais d’une injonction de la Cour, dont l’inobservation donne lieu à une condamnation pour offense à la Cour qui peut entraîner l’imposition d’un travail obligatoire. La commission prend note de l’indication du gouvernement, selon laquelle la section 423.202a(10) du recueil de lois du Michigan «a été conçue et appliquée par les tribunaux de cet Etat» uniquement en cas de «violence, dommage irréparable ou atteinte à l’ordre public», et donc «l’incarcération pour non-respect d’une injonction de ne pas faire grève est possible uniquement dans des circonstances remarquablement analogues à celles que la commission reconnaît comme des «circonstances spéciales».

4. La commission considère que le critère d’«atteinte à l’ordre public», cité par le gouvernement comme étant l’une des conditions préalables, en vertu de la législation du Michigan, à l’ordre de faire cesser une grève dans l’enseignement public, est trop vague pour qu’elle puisse déterminer s’il est conforme à la convention. Elle prie par conséquent le gouvernement de fournir des informations complémentaires sur l’application de ce critère par les tribunaux en joignant des copies des décisions judiciaires correspondantes. Le gouvernement est également prié d’indiquer toutes mesures prises ou envisagées pour garantir qu’aucune sanction comportant un travail obligatoire ne puisse être infligée en cas de participation à une grève.

Nevada

5. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait attiré l’attention du gouvernement sur certaines dispositions de la législation du Nevada. Elle avait noté, entre autres, qu’aux termes de la section 211.120 des lois révisées du Nevada le conseil exécutif du comté ou d’une ville hors comté doit prendre toutes les dispositions nécessaires pour utiliser la main-d’œuvre des prisonniers «assignés» à toute prison d’un comté ou d’une ville de l’Etat, pour une durée d’emprisonnement ordonnée par les juges des différentes cours de district de l’Etat ou les juges de paix de toute municipalité de l’Etat. Elle avait également noté qu’aux termes de la section 211.130 tous les prisonniers condamnés par un juge d’une cour de district ou par un juge de paix à une peine d’incarcération dans une prison ou tout autre établissement de détention d’un comté ou d’une ville sont censés avoir également été condamnés au travail pour la durée correspondante, à moins que le juge ou juge de paix ayant condamné le prisonnier n’en ait décidé autrement pour de bonnes raisons.

6. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement attire l’attention sur la section 211.130.1 des lois révisées du Nevada (annotations), aux termes de laquelle l’incarcération n’est censée comporter un travail que si le détenu est «condamné à une durée d’emprisonnement». De l’avis du gouvernement, «tout dirigeant d’une organisation de salariés qui est incarcéré pour avoir désobéi à une injonction de ne pas faire grève n’étant pas “condamné à une durée d’emprisonnement” mais pouvant dans la pratique décider de rester ou non incarcéré, il peut ne pas être obligé d’effectuer un travail pénitentiaire». La commission saurait gré au gouvernement de fournir des informations qui précisent, en ce qui concerne la section 211.130 relative aux prisonniers «condamnés», le sens et l’application dans la pratique de la section 211.120 des lois révisées du Nevada, dans la mesure où elle prévoit l’utilisation de la main-d’œuvre des prisonniers «assignés» pour une durée d’emprisonnement à toute prison dans un comté ou une ville de l’Etat.

Article 1 e). 7. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait pris note des statistiques gouvernementales faisant apparaître des disproportions raciales dans la composition de la population carcérale et une importante disparité raciale dans les taux d’incarcération fédéraux, étatiques et locaux. Elle avait notamment constaté que le nombre d’hommes afro-américains arrêtés, reconnus coupables et condamnés dans des affaires de drogue était disproportionné. Sachant qu’une peine de prison comporte normalement l’obligation de travailler, la commission avait prié le gouvernement de commenter ces chiffres et d’indiquer toutes mesures prises ou envisagées pour assurer que la condamnation à une peine de prison comportant du travail obligatoire soit exempte de discrimination fondée sur la race, le milieu social ou l’origine nationale.

8. Dans son rapport, le gouvernement affirme que «la législation et la politique des Etats-Unis interdisent clairement la discrimination raciale dans le système judiciaire pénal» et rappelle que le Constitution des Etats-Unis garantit l’égalité de protection. Il indique qu’il existe dans la législation des Etats-Unis plusieurs moyens de recourir contre une condamnation à une peine de prison, fondée sur la discrimination raciale en invoquant le principe de l’égalité de protection, y compris les recours individuels et les actions que peut intenter le Procureur général pour contester la conduite de services chargés d’appliquer la loi qui privent les prisonniers de leurs droits constitutionnels. La commission saurait gré au gouvernement de communiquer des données statistiques et d’autres informations sur l’usage qui est fait dans la pratique de tels moyens de recours contre une condamnation à une peine d’emprisonnement fondée sur la discrimination raciale.

9. La commission prend note du rapport publié en novembre 2004 par la Commission des peines des Etats-Unis (sentencing commission), qui porte en partie sur la question de la discrimination raciale et d’autres formes de discrimination dans le système fédéral de fixation des peines, au regard de la loi de 1984 sur la réforme du système de fixation des peines (sentencing reform act) et du système de directives contraignantes relatives à la fixation des peines, mis en place en vertu de cette loi. La commission relève que ce rapport fait état «d’une importante préoccupation face à la possible discrimination raciale ou ethnique lors de l’imposition des peines, quinze ans après l’entrée en vigueur des directives destinées à l’éliminer». Elle relève en outre qu’«à l’évidence, la commission doit s’attaquer à ce problème et déterminer si la discrimination fondée sur le statut démographique perdure et, le cas échéant, comment elle se manifeste et ce qui peut être fait pour l’éliminer». A propos d’études sur la question de la discrimination, qui ont été réalisées dans le cadre des directives sur la fixation des peines, le rapport indique que «ces études n’apportent pas toutes la même réponse à la question de savoir si les condamnations sont influencées par la discrimination et, le cas échéant, dans quelles mesures elles le sont. Les résultats varient également à propos de la question de savoir quels groupes raciaux et ethniques sont victimes de discrimination et exactement à quel stade de la procédure pénale cette discrimination survient». La commission espère que, dans son prochain rapport, le gouvernement fournira des informations sur le rôle et l’impact du système des directives fédérales relatives à la fixation des peines et d’autres aspects de la réforme, sur la discrimination raciale et d’autres formes de discrimination dans le système de fixation des peines. Elle espère également qu’il communiquera des informations sur les mesures que prend la Commission des peines pour déterminer les causes de cette discrimination, savoir pourquoi elle perdure, comment elle se manifeste et ce qui peut être fait pour l’éliminer, ainsi que des informations sur les travaux de recherche les plus récents sur la discrimination raciale et les autres formes de discrimination dans les condamnations et la justice pénale en général.

10. La commission prend note du rapport publié en 2006 par le département de la Justice, intitulé «Juvenile offenders and victims: 2006 national report», qui cite les résultats de travaux de recherche, selon lesquels les jeunes appartenant à des populations minoritaires (noires, en particulier) sont surreprésentés à pratiquement tous les stades du système de justice juvénile, et indique qu’il appartient aux chercheurs de déterminer si la discrimination a, en soi, un impact sur les décisions de justice. Le rapport précise qu’en vertu de la loi sur la justice juvénile et la prévention de la délinquance (JJDPA) les Etats sont tenus d’évaluer la mesure dans laquelle l’internement de personnes appartenant à des groupes minoritaires est disproportionné (Disproportionate minority confinement – DMC) et qu’un amendement de 2002 à la JJDPA, reconnaissant que des disparités peuvent exister à de nombreux stades (et pas seulement à celui de la détention et du prononcé des peines), a étendu la notion d’internement à celle de «contact». Le rapport explique que, lors de leur passage devant les différents stades du système de justice juvénile, les jeunes entrent en contact avec une série de décideurs qui peuvent chacun rendre une décision susceptible d’aboutir à une disparité raciale. Mesurer cette disparité à chaque stade de la prise de décision permet de mieux comprendre où apparaît la disparité et où elle est amplifiée. Le rapport fait également référence à un nouvel instrument mis au point par le Bureau de la justice juvénile et de la prévention de la délinquance (Office of juvenile justice and delinquency prevention – OJJDP), à savoir l’indice du taux relatif de DMC (DMC relative rate index – RRI) pour mesurer le degré de disparité à chaque stade de la prise de décision. La commission espère que le gouvernement fournira des informations sur l’application de la méthode statistique DMC prévue dans la loi sur la justice juvénile et la prévention de la délinquance, ainsi que sur l’utilisation de l’indice RRI par le Bureau de la justice juvénile et de la prévention de la délinquance, en précisant la façon dont ces instruments sont utilisés pour déterminer l’influence de la discrimination sur les disparités raciales constatées dans les condamnations et l’internement de jeunes délinquants, ainsi que les autres effets qu’ils ont sur la prise de décision dans le système judiciaire, et en indiquant comment ils peuvent être également utilisés pour déterminer l’origine de la discrimination.

Traite des personnes

11. Dans ses précédentes observations, la commission avait noté que le gouvernement avait mentionné la loi de 2000 sur la protection des victimes de la traite (TVPA), complétée par la loi de 2003 sur la réautorisation de la protection des victimes de la traite (TVPRA) et par la loi de 2005 du même objet, instruments qui classent désormais comme crimes fédéraux de nouvelles infractions, dont celle de «travail forcé», visée au nouvel article 1589 inséré dans le titre 18 du Code des Etats-Unis, et qui renforcent les sanctions prévues contre les délits liés à la traite et offrent aux victimes de la traite une protection nouvelle et des services plus développés. La commission avait également noté qu’un groupe de travail «interagences» pour la répression de la traite des personnes avait été créé en février 2002 et qu’un rapport de ce groupe de travail signalait que «depuis l’adoption de la loi TVPA, en octobre 2000, le département de la Justice a exercé des poursuites contre 79 personnes au cours des exercices 2001 et 2002, c’est-à-dire trois fois plus qu’au cours du biennium précédent, ouvert 127 enquêtes sur des affaires de traite et lancé en octobre 2002 la plus vaste initiative de formation des procureurs et agents fédéraux dans ce domaine».

12. Notant également que, d’après les conclusions du Congrès, annexées au rapport du gouvernement, chaque année environ 50 000 femmes et enfants sont victimes de la traite à destination des Etats-Unis, la commission avait demandé au gouvernement de donner de plus amples informations sur les mesures prises par les autorités pour que les infractions de traite soient poursuivies et pour que les victimes soient protégées plutôt que d’être punies, et aussi sur l’issue des poursuites engagées dans les 79 cas susmentionnés et des 127 enquêtes ouvertes au cours des exercices fiscaux 2001 et 2002 mentionnées dans le rapport.

13. La commission note que le gouvernement se réfère à des rapports du département de la Justice (DOJ) de 2004 et 2005. Elle prend également note d’un rapport du DOJ datant de septembre 2006 intitulé «Assessment of U.S. government efforts to combat trafficking in persons in fiscal year 2005». Ce document donne des statistiques qui font apparaître qu’en 2005 il y a eu 139 enquêtes ouvertes sur des affaires de traite, c’est-à-dire 10 de plus qu’en 2004; qu’elles ont débouché sur des poursuites en vertu de la TVPA dans 27 affaires mettant en cause 83 personnes (contre 10 affaires mettant en cause 24 personnes en 2004) et qu’elles ont abouti à 26 condamnations, contre 15 en 2004. Ce document donne des précisions sur les condamnations: «sur les 25 prévenus qui ont été condamnés sur la base de la TVPRA en 2005, 23 ont été condamnés à une peine de prison simple, un a été condamné à une peine de prison suivie de liberté surveillée et un à une mise à l’épreuve seulement. La durée moyenne de la peine de prison infligée aux 23 prévenus était de 103 mois, les condamnations allant de 14 à 270 mois: 10 personnes ont été condamnées à des peines de 1 à 5 ans, cinq à des peines de 5 à 10 ans et huit à des peines de plus de 10 ans. Un prévenu a été condamné à une simple mise à l’épreuve de 12 mois et un autre à une peine partagée de 37 mois de prison et de 36 mois de mise à l’épreuve». La commission note que le nombre des équipes d’action contre la traite est passé de 22 en 2004 à 32 en 2005, et qu’il devait y en avoir encore 10 de plus en 2006.

14. La commission note en outre que le rapport du DOJ de 2006 énonce que: «le gouvernement des Etats-Unis reconnaît cependant qu’il reste encore beaucoup à faire pour que le nombre des enquêtes et des poursuites progresse. Des mesures ont été prises en ce sens, principalement en associant les autorités locales et celles des Etats à la lutte contre la traite. Pour améliorer les capacités du gouvernement des Etats-Unis en termes d’investigation et de poursuite des trafiquants, l’Institut national de justice mène des études sur la meilleure procédure à suivre pour faire la lumière sur les affaires de traite des personnes et aussi sur les obstacles juridiques auxquels le gouvernement des Etats-Unis peut se heurter lorsqu’il engage des poursuites contre des trafiquants. Les projets suivants ont été lancés: des études sur la réactivité des organes de répression de niveau local dans les affaires de traite, des études au niveau des procureurs fédéraux et des procureurs des Etats, une analyse de la législation intérieure et de la législation internationale visant la traite, une observation de l’action déployée par des organes de répression visant à connaître les formes locales de la traite et le nombre et la nature des enquêtes menées. Toutes ces recherches contribueront à définir les meilleurs moyens de lutte contre la traite des personnes au niveau local et à celui de l’Etat.»

15. La commission exprime l’espoir que le gouvernement continuera de communiquer des statistiques actualisées sur la répression de la traite (poursuites, condamnations), notamment sur les progrès enregistrés grâce aux mesures prises pour intensifier les enquêtes et les poursuites et associer les autorités locales et celles des Etats à la lutte contre la traite, de même que sur les conclusions des recherches et des projets de recherche menés sous la direction du NIJ quant aux procédures les plus à même d’identifier et d’enquêter sur les affaires de traite et résoudre les obstacles juridiques que rencontrent les autorités pour poursuivre les trafiquants.

16. En ce qui concerne les services de protection des victimes, la commission note que le rapport du DOJ de 2005 signale que, «pour améliorer l’accès des victimes aux services de l’Etat, le gouvernement doit poursuivre les efforts qu’il déploie pour identifier les victimes. Suivant les recommandations contenues dans l’évaluation de septembre 2005, le gouvernement a augmenté les moyens mis en œuvre pour connaître les victimes et les prendre en charge, en concentrant ses efforts sur certains secteurs, sur certains fournisseurs de services, sur l’industrie des voyages et sur les sectes. Une fois les victimes de la traite connues, les autorités doivent augmenter leurs efforts pour coordonner l’action des services assurés par les organismes fédéraux en faveur des victimes. Même si le gouvernement a amélioré sa coordination «interagences» dans les affaires de traite des personnes, une meilleure coordination contribuerait à faciliter l’accès des victimes à des services et à une assistance». La commission saurait gré au gouvernement de communiquer dans son prochain rapport des informations actualisées sur les mesures prises pour améliorer les moyens permettant d’identifier les victimes de la traite et les prendre en charge et pour améliorer l’accès des victimes aux services gouvernementaux, y compris sur les mesures tendant à améliorer la coordination «interagences» des services s’adressant aux victimes.

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