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Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Burundi (Ratification: 1993)

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La commission note que le rapport du gouvernement ne fournit pas d’information sur ses commentaires antérieurs, qui portaient sur les questions ci-après. La commission prend aussi note des commentaires formulés par la Confédération des syndicats du Burundi (COSYBU).

Article 2 de la convention. La commission note que l’article 8 de la loi no 1/015 du 29 novembre 2002, portant réglementation de l’exercice du droit syndical et du droit de grève dans la fonction publique, fixe à 50 le nombre minimal de membres que doivent compter les syndicats de fonctionnaires au moment de leur constitution. L’article 24 dispose qu’aucun syndicat ne peut subsister s’il ne justifie plus d’un nombre minimal de membres. La commission rappelle que l’exigence d’un nombre minimal de membres pour qu’une organisation soit créée, n’est pas en soi incompatible avec la convention, mais le seuil doit être fixé à un niveau raisonnable de façon à ne pas entraver la constitution des organisations (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 81). De l’avis de la commission, l’exigence de 50 membres minimum fixée par la loi semble excessive. La commission demande donc au gouvernement de prendre les mesures appropriées pour modifier l’article 8 afin que le nombre minimal de membres nécessaires pour la constitution d’un syndicat soit abaissé pour garantir, de manière effective, le droit des fonctionnaires de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier, conformément à l’article 2 de la convention.

Article 3. 1. La commission note que l’article 10 pose, comme condition d’éligibilité pour être dirigeant d’un syndicat, une ancienneté d’au moins trois ans dans la fonction publique. La commission rappelle que l’autonomie des organisations ne peut être réellement garantie que si leurs membres ont le droit d’élire en toute liberté leurs représentants. Les autorités publiques devraient donc s’abstenir de toute intervention de nature à entraver l’exercice de ce droit, notamment en matière de condition d’éligibilité des dirigeants. La question de l’ancienneté comme condition d’éligibilité devrait être laissée à la discrétion des organisations et de leurs membres. La commission demande donc au gouvernement de supprimer la condition d’ancienneté pour l’éligibilité des dirigeants syndicaux afin que les fonctionnaires puissent élire en toute liberté leurs représentants, conformément à l’article 3 de la convention.

2. La commission note que l’article 7 de la loi dispose que, en cas de conflit à la direction d’un syndicat, le ministre de la Fonction publique peut saisir la chambre administrative de la Cour suprême en vue de trancher le litige. La commission souligne que la résolution de tout conflit interne à un syndicat devrait être laissée à la discrétion des membres du syndicat eux-mêmes, en dehors de toute intervention des autorités publiques. La commission considère dès lors que, à tout le moins, la saisine de la chambre administrative de la Cour suprême devrait s’effectuer par les membres du syndicat eux-mêmes. Elle demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 7 afin de laisser la résolution d’un conflit interne à un syndicat, ou tout au moins son initiative, à l’appréciation de ses membres, afin de garantir pleinement le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur gestion et leurs activités, conformément à l’article 3 de la convention.

3. La commission note que, pour qu’une grève des fonctionnaires publics soit légale, elle doit remplir un certain nombre de conditions, à savoir notamment que: 1) elle doit être précédée d’un préavis précisant la durée de la grève, en vertu de l’article 30; 2) elle doit être réalisée par un groupe de fonctionnaires syndiqués ou non, après avis conforme de la majorité absolue des effectifs du service public concerné, en vertu de l’article 31. La commission estime qu’obliger légalement les travailleurs et leurs organisations à préciser la durée d’une grève limite le droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leur gestion et leurs activités et de formuler leur programme d’action. Pour ce qui est de l’approbation de la grève par la majorité absolue des effectifs du service public concerné, si le principe d’une telle approbation n’est pas incompatible avec la convention, la commission souligne que le mode de scrutin, le quorum et la majorité requis ne doivent pas être tels que l’exercice du droit de grève devienne en pratique très difficile. L’exigence d’une majorité absolue de l’ensemble des effectifs a toujours été considérée par la commission comme excessive; si un Etat Membre juge opportun d’établir dans sa législation des dispositions exigeant un vote des travailleurs avant qu’une grève puisse être déclenchée, il devrait faire en sorte que seuls les votes exprimés soient pris en compte, le quorum et la majorité requis étant fixés à un nombre raisonnable (voir étude d’ensemble de 1994, op. cit., paragr. 170). La commission demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour amender les articles 30 et 31 afin, d’une part, de garantir qu’il n’y ait pas d’obligation légale de préciser la durée de la grève dans le préavis et, d’autre part, que l’approbation préalable de la grève soit soumise simplement à la majorité des suffrages exprimés.

4. La commission note que l’article 39 dispose que les grèves de solidarité sont interdites. La commission considère qu’une interdiction générale des grèves de solidarité, pour ceux des fonctionnaires n’exerçant pas de fonctions d’autorité au nom de l’Etat et bénéficiant ainsi du droit de grève, risquerait d’entraîner des abus. Les travailleurs concernés devraient pouvoir exercer de telles actions pour autant que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légale (voir étude d’ensemble de 1994, op. cit., paragr. 168). La commission demande donc au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour limiter l’article 39 aux fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat.

5. La commission note que les articles 32 à 35 de la loi traitent des différends collectifs et des procédures à suivre. Elle note que, pendant la grève, les négociations doivent se poursuivre entre les parties ou sous la direction d’un médiateur agréé d’un commun accord par les parties. En cas de désaccord sur le médiateur ou d’échec de la médiation, un conseil d’arbitrage est nommé par le ministre de la Fonction publique, sur requête d’une des parties. Dans les quatre jours francs suivant sa nomination, le conseil d’arbitrage rend une sentence arbitrale, laquelle est notifiée immédiatement aux parties. L’article 35 prévoit que, en cas de conciliation, la sentence est exécutée immédiatement. En cas de non-conciliation, le différend est porté devant la Cour administrative par la partie perdante. La commission rappelle que les fonctionnaires n’exerçant pas de fonctions d’autorité au nom de l’Etat devraient bénéficier du droit de grève et que celui-ci ne peut être restreint ou interdit que dans les deux cas suivants: 1) si les fonctionnaires travaillent dans des services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou une partie de la population, la vie, la santé ou la sécurité de la personne; 2) en cas de crise nationale aiguë. Par conséquent, la commission prie le gouvernement de préciser l’effet de l’intervention de la Cour et, notamment, si elle aboutit à une décision exécutoire mettant fin à la grève pour les fonctionnaires qui ne peuvent pas être considérés comme exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat ou comme travaillant dans un service essentiel.

Article 5. La commission note que, en vertu de l’article 20 de la loi, les syndicats peuvent créer des unions, des fédérations et des confédérations; aux termes de l’article 21, ces organisations sont régies par les dispositions du chapitre I concernant notamment la constitution des organisations de premier degré. La commission note que la conséquence concrète de l’article 21 est que les organisations de base ne peuvent s’affilier qu’à des unions ou fédérations de syndicats de fonctionnaires, à l’exclusion de syndicats regroupant d’autres travailleurs. La commission rappelle donc que, si l’on peut admettre que les organisations de base des agents de la fonction publique soient limitées à cette catégorie de travailleurs, ces organisations devraient cependant pouvoir s’affilier librement aux fédérations et confédérations de leur choix, y compris celles regroupant également des organisations du secteur privé (voir étude d’ensemble de 1994, op. cit., paragr. 193). La commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de modifier l’article 21 en vue de garantir le droit aux organisations syndicales de fonctionnaires de constituer des fédérations et confédérations de leur choix, y compris celles pouvant regrouper des organisations du secteur privé et de s’y affilier, conformément à l’article 5 de la convention.

La commission prie à nouveau le gouvernement de la tenir informée sur l’ensemble des points soulevés ci-dessus dans son prochain rapport.

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