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Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Mexique (Ratification: 1950)

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La commission prend note du rapport du gouvernement.

La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle se réfère aux questions suivantes.

1. Monopole syndical imposé par la Constitution et par la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat dans les administrations publiques. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, ses commentaires ont trait aux dispositions suivantes de la Constitution et de la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat:

i)  interdiction de la coexistence de plusieurs syndicats en tant que tels au sein d’un même organisme de l’Etat (art. 68, 71, 72 et 73);

ii)  interdiction faite aux membres d’un syndicat de cesser de faire partie de ce syndicat (disposition d’exclusion en vertu de laquelle ces personnes perdent leur emploi si elles quittent le syndicat) (art. 69);

iii)  interdiction de la réélection dans les syndicats (art. 74);

iv)  interdiction, pour les syndicats de fonctionnaires, de s’affilier à des organisations syndicales ouvrières ou agricoles (art. 79);

v)  extension des restrictions applicables aux syndicats en général - existence d’une seule et unique fédération des syndicats de travailleurs au service de l’Etat (art. 84); et

vi)  imposition par la législation du monopole syndical de la Fédération nationale des syndicats des établissements bancaires (art. 23 de la loi portant réglementation du titre XIII bis, paragr. B, de l’article 123 de la Constitution).

A propos des points i), iv), v) et vi), la commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) contrairement à ce qu’affirme la commission, il est inexact que la Constitution politique impose le monopole syndical; 2) la Constitution politique consacre le principe de libre syndicalisation des travailleurs au service de l’Etat; 3) conformément à la thèse jurisprudentielle no 43/1999, le Tribunal fédéral de conciliation et d’arbitrage a octroyé l’enregistrement à des organisations syndicales dans des administrations où un autre syndicat était en place; 4) il découle de ce qui précède que l’existence de plusieurs syndicats dans des administrations publiques est possible, à condition que les travailleurs souhaitent constituer plusieurs organisations et qu’ils réunissent les conditions que la loi prévoit pour l’intégration et le fonctionnement des syndicats; et 5) le pouvoir législatif est le seul habilitéàémettre les lois réglementaires de l’article 123 de la Constitution politique, conformément à l’article 73, paragraphe X, de la Constitution. A cet égard, tenant compte de la pratique suivie par le Tribunal fédéral de conciliation et d’arbitrage et de la thèse jurisprudentielle susmentionnée, la commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les dispositions législatives en question afin de rendre la législation conforme à la convention et à la pratique actuelle, en ce qui concerne les points que le gouvernement a indiqués.

A propos du point ii), qui fait référence à la disposition d’exclusion, la commission note que, selon le gouvernement, cette disposition n’est pas applicable aux organisations syndicales des travailleurs au service de l’Etat, étant donné que l’article 76 de la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat l’interdit, et que le Tribunal fédéral de conciliation et d’arbitrage a considéré comme manifestes la renonciation des travailleurs d’un syndicat à leur affiliation et leur demande d’affiliation à d’autres syndicats (le gouvernement mentionne les cas de cinq syndicats). A ce sujet, la commission note que l’article 69 dispose que tous les travailleurs ont le droit de faire partie du syndicat correspondant mais que, une fois qu’ils auront demandé et obtenu leur affiliation, ils ne pourront pas quitter leur syndicat, sauf s’ils en sont radiés. Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de prendre en compte les dispositions de l’article 76 et de prendre des mesures pour modifier l’article 69 dans le sens indiqué et conformément à la pratique du Tribunal fédéral de conciliation et d’arbitrage.

A propos du point iii), qui porte sur l’interdiction de la réélection dans les syndicats, la commission note que, selon le gouvernement, le Tribunal fédéral de conciliation et d’arbitrage applique la thèse jurisprudentielle no CXVII/2000 de la Cour suprême de justice, laquelle établit que l’article 75 de la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat, qui interdit la réélection de leurs dirigeants, va à l’encontre du principe de liberté syndicale établi dans l’article 123 de la Constitution. Par ailleurs, le gouvernement indique qu’il a été pris note de la réélection de dirigeants dans 20 syndicats. A cet égard, la commission demande au gouvernement de modifier l’article 74 dans le sens de la jurisprudence afin de le rendre conforme à la convention et à la pratique actuelle.

La commission demande de nouveau au gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, les mesures prises à propos des questions susmentionnées.

2. Interdiction pour les étrangers de siéger dans les instances dirigeantes des syndicats (art. 372, titre II, de la loi fédérale du travail). La commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) dans le cadre de la «nouvelle culture du travail», la Table centrale de décision, qui réunit des organisations de travailleurs et d’employeurs, a été instituée en vue de la réforme de la loi fédérale du travail. Ainsi, ces organisations de travailleurs et d’employeurs se sont mises d’accord sur un projet de réforme de la loi fédérale du travail; et 2) ce projet est devenu, le 12 décembre 2002, un projet de loi que le pouvoir législatif examine actuellement. A cet égard, la commission exprime l’espoir que le projet de loi en question prévoira la modification de l’article 372, titre II. La commission demande au gouvernement de l’informer, dans son prochain rapport, sur l’évolution du projet de loi en question.

3. Restriction du droit de grève des fonctionnaires qui n’exercent pas des fonctions d’autorité au nom de l’Etat:

i)  Les travailleurs, dont ceux du secteur bancaire public, ne peuvent exercer leur droit de grève, dans une ou plusieurs administrations publiques, qu’en cas d’infractions générales et systématiques aux droits que consacre le paragraphe B de l’article 123 de la Constitution (qui dispose que les travailleurs ont le droit de se syndiquer pour défendre leurs intérêts communs) (art. 94, titre 4, de la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat, et art. 5 de la loi sur la banque et le crédit, qui réglemente l’application du titre XIII bis,paragr. B, de l’article 123 de la Constitution). La commission note que le gouvernement réitère ce qu’il avait indiqué dans son rapport de 2002, en particulier qu’il n’y a pas de projet de loi en vue de la modification de ces dispositions législatives. A ce sujet, la commission souligne de nouveau que l’interdiction du droit de grève dans la fonction publique devrait se limiter aux fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat. La commission demande donc à nouveau au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation afin de la rendre conforme à la convention. La commission demande au gouvernement de l’informer, dans son prochain rapport, sur toute mesure prise à cette fin.

ii)  Obligation, pour pouvoir déclarer la grève, de recueillir l’appui des deux tiers des effectifs de l’administration publique intéressée (titre II de l’article 99 de la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat). La commission note que, selon le gouvernement, il faut tenir compte du fait que la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat prévoit, à son article 93, que la grève met en évidence la volonté de la majorité des travailleurs d’une administration de suspendre le travail, conformément aux conditions prévues par la loi en question. A ce sujet, notant que l’une des conditions pour pouvoir déclarer la grève est celle de recueillir l’appui des deux tiers des effectifs de l’administration publique intéressée, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les dispositions de l’article 99, titre II (par exemple, on pourrait prévoir simplement la majorité simple des voix émises pour pouvoir déclarer la grève). La commission demande au gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport, les mesures prises à cette fin.

Par ailleurs, dans son observation précédente, la commission avait noté que plusieurs lois relatives au service public contiennent des dispositions qui prévoient la réquisition d’effectifs, entre autres, lorsque l’économie nationale pourrait être touchée (art. 66 de la loi fédérale sur les télécommunications, art. 56 de la loi portant réglementation des services ferroviaires, art. 112 de la loi sur les moyens généraux de communication, art. 25 de la loi sur l’enregistrement national des véhicules, art. 83 de la loi sur l’aviation civile, art. 5 du règlement intérieur du secrétariat des communications et des transports, et art. 26 du règlement intérieur de la Commission fédérale des télécommunications). La commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) on entend par réquisition l’expropriation de biens ou l’utilisation forcée de meubles ou d’immeubles, y compris l’incorporation temporaire de personnes dans des services déterminés. Ces mesures, décidées par l’autorité compétente, visent à réunir les conditions qu’exigent immédiatement la tranquillité ou l’ordre publics; et 2) la grève est le droit qu’a un ensemble de travailleurs au service de l’Etat de suspendre temporairement leurs tâches lorsque le directeur de l’administration, en sa qualité d’employeur, n’accède pas à leurs revendications, et en cas de violation générale et systématique des droits garantis par la Constitution (art. 123 B); en revanche, la réquisition est une mesure administrative que les autorités prennent en cas de catastrophe naturelle, de guerre, de troubles graves de l’ordre public ou lorsqu’il existe un danger imminent pour la sécurité nationale, pour la paix à l’intérieur du pays ou pour l’économie nationale. La commission estime que la notion de danger imminent pour l’économie nationale est trop large. Elle rappelle au gouvernement que les restrictions au droit de grève, dans les cas où l’économie nationale est touchée, peuvent être contraires aux dispositions de la convention, et que la réquisition de travailleurs en grève implique des possibilités d’abus comme moyen de régler les différends du travail (voir étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 163). La commission demande donc au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les dispositions susmentionnées et de l’informer à ce sujet dans son prochain rapport.

Lors de ses commentaires antérieurs, la commission avait pris note des observations de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur l’application de la convention, et de la réponse du gouvernement à ce sujet. La commission note que le gouvernement a joint à son rapport d’autres informations et que, en premier lieu, il indique ce qui suit: 1) dans son rapport, la CISL cherche à relier la politique commerciale aux normes du travail alors que l’objectif de la commission, lorsqu’elle examine les rapports des gouvernements, est de vérifier dans quelle mesure les gouvernements observent les dispositions des conventions et les obligations qu’ils ont acceptées, conformément à la Constitution de l’OIT; 2) les commentaires de la CISL ne sont que l’un des éléments de l’ensemble des documents dont la commission dispose pour examiner le rapport sur l’application de la convention; et 3) la commission doit prendre en compte le fait qu’aucune autre information ne confirme les allégations d’ordre général et sans fondement de la CISL. Il est donc impossible de déterminer la véracité de ces allégations. La commission rappelle que la CISL a fait référence à de nombreuses questions, qui sont exposées ci-après.

Article 2 de la convention. 1. Droit des travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations syndicales.

i) Travailleurs des maquiladoras. Selon la CISL, bien que la législation mexicaine garantisse les mêmes droits syndicaux à tous les travailleurs, les travailleurs des zones franches (maquiladoras) se heurtent, lorsqu’ils veulent constituer des organisations syndicales, à des obstacles considérables suscités par les employeurs, avec la complicité tacite des autorités locales. La commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) au Mexique, les zones franches n’existent pas d’un point de vue juridique; il est donc impossible de déterminer les lieux de travail où les travailleurs se seraient heurtés à des obstacles pour pouvoir constituer les syndicats, pas plus qu’il n’est possible de déterminer comment les autorités locales tolèrent ces prétendues pratiques; 2) la législation nationale reconnaît le principe de la liberté syndicale et tous les travailleurs sur le territoire national bénéficient des mêmes droits du travail; par conséquent, ils ont le droit de constituer des organisations syndicales. La commission fait observer que la communication de la CISL qui a été transmise au gouvernement mentionne les noms des maquiladoras (par exemple: Han Young, Kuk-Dong, Duro-Bag et l’usine Alcoa dans l’Etat de Coqhuila) dans lesquelles plusieurs infractions aux droits syndicaux auraient été commises. Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de veiller, tant en droit que dans la pratique, à ce que tous les travailleurs des maquiladoras bénéficient des garanties consacrées dans la convention.

ii) Travailleurs sous contrats de prestations de service. La CISL signale que de nombreux travailleurs sont considérés comme prestataires de services et, en conséquence, ne sont pas couverts par la législation du travail et ne peuvent pas exercer leurs droits syndicaux. La commission note que, selon le gouvernement, toutes les personnes liées par une relation de travail, quelle qu’en soit la forme ou quelle que soit la dénomination de l’élément qui a donné lieu à la relation de travail, sont régies par la loi fédérale du travail. De plus, le gouvernement indique que les dispositions de cette loi sont d’ordre public. Par conséquent, la renonciation d’un travailleur à l’un quelconque des droits ou prérogatives établis dans les normes du travail n’a aucun effet juridique et ne peut empêcher ni la jouissance ni l’exercice de ces droits.

iii) Travailleurs domestiques. La commission note que, selon la CISL, les travailleurs domestiques ne jouissent pas de la protection de la législation du travail et, en conséquence, ne peuvent ni s’affilier à une organisation syndicale ni en constituer une. La commission note que le gouvernement réaffirme que les travailleurs domestiques ont les droits et obligations prévus par la loi fédérale du travail pour les travailleurs en général, et qu’ils sont en outre protégés par les dispositions du chapitre XIII, titre sixième, articles 331 à 343 de cette loi. Notant que les travailleurs domestiques sont couverts par les protections prévues par la loi fédérale du travail, la commission demande au gouvernement d’assurer que, dans la pratique, ces travailleurs jouissent des garanties prévues par la convention.

2. Droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choixRetards dans les inscriptions. La CISL fait état des obstacles et délais imposés par les conseils de conciliation et d’arbitrage pour l’inscription d’un nouveau syndicat. La commission note que le gouvernement se réfère à la procédure prévue dans la loi fédérale du travail. Il indique que, dans le cas où une organisation syndicale estimerait que l’autorité ne s’est pas prononcée sur sa demande d’enregistrement d’une manière conforme aux dispositions de la loi susmentionnée, cette organisation peut recourir aux moyens de défense prévus par la loi. La commission demande de nouveau au gouvernement de veiller à ce que, dans la pratique, l’inscription des syndicats s’effectue sans délais excessifs, afin que ceux-ci puissent exercer leurs droits syndicaux.

Article 3. Droit des organisations de travailleurs de formuler leur programme d’action. Selon la CISL, les conseils de conciliation et d’arbitrage ont compétence pour déclarer des grèves «non existantes», ce qui peut entraîner le licenciement des travailleurs ayant participéà ces grèves. La CISL donne des statistiques faisant apparaître que lesdits conseils usent souvent de ce pouvoir, car il est très rare que les grèves soient reconnues comme légales. Dans ses précédents commentaires, la commission avait demandé au gouvernement de communiquer des statistiques sur les cahiers de revendications présentés - une grève étant prévue si ces revendications ne sont pas prises en compte - et sur les grèves effectivement menées, en indiquant précisément lesquelles ont été déclarées «inexistantes» et les raisons évoquées par l’autorité administrative. La commission prend note de l’indication du gouvernement, à savoir que, pendant la période couverte par le rapport, le Conseil fédéral de conciliation et d’arbitrage a été saisi de 11 370 cahiers de revendications prévoyant des grèves le cas échéant. Ces cahiers de revendications ont donné lieu à 66 grèves seulement et deux ont été déclarées non existantes: dans un cas, il a été déterminé que l’objectif de la grève n’était pas conforme à ce que dispose le titre II de l’article 450 de la loi fédérale du travail; dans l’autre cas, la grève a été déclarée inexistante conformément à la décision de l’autorité de tutelle qui a considéré que les conditions requises à l’article 290 de la loi fédérale du travail n’étaient pas réunies.

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