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Observation (CEACR) - adoptée 2004, publiée 93ème session CIT (2005)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Burkina Faso (Ratification: 2001)

Autre commentaire sur C182

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La commission prend note des premier et second rapports du gouvernement. Se référant à ses commentaires formulés sous la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, ainsi qu’à l’article 3 a) de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, lequel dispose que l’expression les pires formes de travail des enfants inclut toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la commission considère que le problème de la vente et de la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle ou économique peut être examiné plus spécifiquement dans le cadre de la convention no 182. Elle prie le gouvernement de bien vouloir fournir des informations sur les points suivants.

Article 3 de la convention. Pires formes de travail des enfantsAlinéa a). Toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues. Vente et traite des enfants. La commission avait pris note, dans ses précédents commentaires, des informations convergentes, de différentes sources, selon lesquelles des cas de traite de personnes aux fins d’exploitation par le travail concernent un nombre important d’enfants au Burkina Faso, avec pour but l’utilisation du travail de ces enfants, notamment dans l’agriculture. Elle avait noté, selon les indications figurant au rapport global «Halte au travail forcé» du BIT de 2001 (paragr. 57), que des enfants originaires du Burkina Faso sont obligés de travailler dans les plantations de Côte d’Ivoire, et que le Burkina Faso est à la fois pourvoyeur, destinataire et pays de transit. Elle avait noté que les intermédiaires, qui agissent à partir de la Côte d’Ivoire, se font remettre des enfants par d’autres intermédiaires opérant au Burkina Faso (rapport de synthèse du projet sous-régional du Programme international pour l’abolition du travail des enfants (BIT/IPEC, 2001): «Combattre le trafic des enfants à des fins d’exploitation de leur travail en Afrique de l’Ouest et centrale», p. 9).

La commission note que la loi no 038-2003/AN, portant définition et répression du trafic d’enfants, a été adoptée le 27 mai 2003. Elle note que l’article premier de la loi dispose qu’est enfant tout être humain âgé de moins de 18 ans. L’article 3 dispose qu’est réputé trafic d’enfant(s) tout acte par lequel un enfant est recruté, transporté, transféré, hébergé ou accueilli à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire burkinabé par un ou plusieurs trafiquants, au moyen de menaces et d’intimidation par la force ou d’autres formes de contraintes, de détournements, de fraudes ou supercheries, d’abus de pouvoir ou d’exploitation de la situation de vulnérabilité d’un enfant ou dans le cas d’offre ou de réception de rémunération en vue d’obtenir le consentement d’une personne ayant pouvoir de contrôle sur lui à des fins d’exploitation économique, sexuelle, d’adoption illicite, d’union matrimoniale précoce ou forcée ou à toute autre fin préjudiciable à la santé, au développement physique, mental et au bien-être de l’enfant. La commission note qu’est puni des même peines, quiconque, ayant connaissance d’un trafic d’enfant(s) ou ayant découvert un mineur de moins de 18 ans dans les conditions susvisées, n’a pas averti aussitôt les autorités administratives ou judiciaires ou toute personne ayant capacité de l’empêcher. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’application dans la pratique des dispositions susvisées.

Article 5. Mécanismes pour surveiller l’application des dispositions donnant effet à la convention. La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle des comités de vigilance et de surveillance ont été instaurés par le ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale. Elle note également que ces comités comprennent aussi bien les agents de l’Etat, c’est-à-dire la police, la gendarmerie, les douanes, les agents sociaux, les inspecteurs du travail que les représentants de la société civile. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le fonctionnement de ces comités de surveillance et de vigilance, notamment au moyen d’extraits de rapports ou de documents, ainsi que les résultats obtenus par ces comités pour prévenir la traite des enfants de moins de 18 ans à des fins d’exploitation économique.

Article 6. Les programmes d’action en vue d’éliminer les pires formes de travail des enfants. La commission note que le Burkina Faso est partie au programme LUTRENA (Programme de lutte contre le trafic d’enfants à des fins d’exploitation de leur travail en Afrique de l’Ouest et centrale) du BIT/IPEC, auquel participent neuf pays: Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Ghana, Mali, Nigéria et Togo. Elle note, selon les informations disponibles, que le gouvernement, avec les autres acteurs essentiels dans la lutte contre la traite des enfants, a préparé un projet de Plan national d’action contre la traite des enfants. Il apparaît que ce plan doit être validé dans les prochains mois. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’adoption et la mise en œuvre de ce Plan d’action national.

Elle note en outre que le programme Carton rouge du BIT/IPEC, permettant la promotion des actions d’information et de sensibilisation au niveau national, à l’occasion des différentes rencontres de championnat, a été mis en place au Burkina Faso. La commission note également que le BIT/IPEC a lancé une nouvelle initiative axée sur l’éducation et la mobilisation sociale, «SCREAM (Supporting children’s rights through education, the arts and the media) Halte au travail des enfants!», en vue d’aider les éducateurs du monde entier à renforcer la compréhension et la sensibilisation des jeunes face au travail des enfants. Cette initiative vise également à sensibiliser les élèves et à renforcer leurs capacités àéduquer et informer leurs pairs et familles en ayant un impact sur leurs propres communautés. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur la mise en œuvre de ces programmes d’action.

Article 7, paragraphe 1. Mesures pour assurer la mise en œuvre effective et le respect des dispositions donnant effet à la convention. La commission note que l’article 398 du Code pénal punit d’un emprisonnement de cinq à dix ans quiconque par violences, menaces ou fraudes enlève ou fait enlever un mineur, ou l’entraîne, le détourne ou le déplace ou le fait entraîner, détourner ou déplacer des lieux où il était mis par ceux à l’autorité ou à la direction desquels il était soumis ou confié. Elle note également que l’article 4 de la loi du 31 juillet 2003 portant définition et répression du trafic d’enfants punit d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 300 000 à 1 500 000 francs CFA, ou de l’une de ces deux peines seulement, quiconque se livre à un trafic d’enfants, quel que soit le lieu de commission de l’infraction. L’article 4, alinéa 2, précise qu’est puni des mêmes peines, quiconque, ayant connaissance d’un trafic d’enfants ou ayant découvert un mineur de moins de 18 ans dans les conditions susvisées, n’a pas averti aussitôt les autorités administratives ou judiciaires, ou toute personne ayant capacité de l’empêcher. La commission note en outre avec intérêt que l’article 5 de la même loi punit d’un emprisonnement de cinq à dix ans tout individu coupable de trafic d’enfants commis dans les circonstances suivantes si la victime est exposée à des travaux dangereux, pénibles ou aux pires formes de travail des enfants. La commission prie le gouvernement de communiquer des informations sur l’application de ces sanctions dans la pratique.

Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces dans un délai déterminéAlinéa b). Soustraire les enfants des pires formes de travail et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. La commission note, selon l’information contenue dans le rapport de synthèse du BIT/IPEC pour le programme LUTRENA de 2000 contre la traite (p. 22), que les études ont révélé que des enfants du Burkina Faso sont acheminés par le Togo vers le Bénin. La commission note, selon le même rapport (p. 9), qu’en 1996 la police avait intercepté cinq enfants en partance pour la Côte d’Ivoire; en 1999, les mêmes services avaient découvert huit enfants burkinabés à Divo en Côte d’Ivoire, 12 en Allemagne en partance pour l’Italie et deux enfants convoyés vers le Ghana. Elle note également que 27 enlèvements d’enfants ont été enregistrés: 10 d’entre eux ont été retrouvés au Nigéria et 17 en Côte d’Ivoire. Elle note en outre qu’en mars 2000 un convoi en partance pour la Côte d’Ivoire transportant 22 enfants âgés de 14 à 20 ans a été intercepté. La commission note, selon ce même rapport de synthèse, que 116 enfants travaillant dans le secteur informel ont été interrogés; ils travaillent comme vendeurs ambulants ou domestiques, dans l’agriculture et la prostitution. La plupart sont des filles, âgées de 12 à 17 ans; 45 pour cent de ces enfants sont analphabètes, 49 pour cent d’entre eux ont atteint le niveau de l’école primaire et seuls 6 pour cent celui de l’école secondaire. Elle note qu’en juillet 2004 cinq enfants burkinabés, victimes de traite à des fins d’exploitation économique dans les plantations de coton, ont été rapatriés dans leur famille par le comité de vigilance et de surveillance. La commission note que 250 enfants ont été retirés de la traite et réhabilités au Burkina Faso depuis le début du projet LUTRENA. Elle note en outre que le programme LUTRENA a coordonné l’organisation de modules d’entraînement pour les forces de sécurité (la police en particulier) sur les actions de lutte contre la traite des enfants. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur l’impact du programme LUTRENA pour soustraire les enfants de la traite et assurer leur réadaptation et leur réintégration sociale.

Article 8. Coopération et/ou assistance internationale renforcées. 1.   Coopération internationale. La commission note que le Burkina Faso est membre d’Interpol, organisation qui aide à la coopération entre les pays de différentes régions, surtout dans la lutte contre la traite des enfants. Elle note également que le Burkina Faso a ratifié la Convention sur les droits de l’enfant en août 1990, et qu’il a signé le protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants en novembre 2001. Elle note en outre l’indication fournie par le gouvernement dans le rapport soumis au Comité des droits de l’enfant en 2002 (CRC/C/65/Add.18, paragr. 482), selon laquelle, en vertu du principe d’extraterritorialité, il existe des accords judiciaires entre le Burkina Faso et la France, et le Burkina Faso et 11 pays africains.

2. Coopération régionale. La commission note qu’un accord de coopération a été signé le 25 juin 2004 entre la République du Mali et le Burkina Faso pour la traite des enfants transfrontalière. Cet accord a été rendu possible grâce à l’assistance du projet LUTRENA, l’UNICEF et Save the Children Canada. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la mise en œuvre de cet accord, ainsi que sur les résultats obtenus concernant la traite des enfants entre le Burkina Faso et le Mali. 

3. Elimination de la pauvreté. La commission note qu’un document de stratégie de réduction de la pauvreté a été développé en juin 2000, le Burkina Faso étant, selon ce document, un des pays les plus pauvres au monde. Le plan d’action prévu dans ce document se concentre autour de trois axes; la santé, l’éducation et le développement rural. Notant que les programmes de réduction de la pauvreté contribuent à briser le cycle de la pauvreté, ceci étant essentiel dans l’élimination des pires formes de travail des enfants, la commission demande au gouvernement de fournir des informations sur l’impact de cette aide au développement sur l’élimination des pires formes de travail des enfants, en particulier de la traite.

La commission encourage le gouvernement à coopérer avec les autres pays et le prie de fournir des informations détaillées sur la coopération et/ou une assistance internationales renforcées, y compris par des mesures de soutien au développement économique et social, aux programmes d’éradication de la pauvreté et à l’éducation universelle. 

Point III du formulaire de rapport. Décisions judiciaires. La commission prend note de trois jugements du Tribunal de grande instance siégeant à Fada N’Gourma (nos 152, 153 et 165), en date des 13 juin 2001 et 29 mai 2002. Elle note que, dans ces affaires, des individus ont été interceptés alors qu’ils transportaient des mineurs et planifiaient d’aller les faire travailler dans leur plantation au Bénin, sans l’accord de leurs parents. Dans ces trois procès, la commission note que la Cour a requalifié les faits reprochés aux accusés en détournement de mineurs, ce qui constitue une infraction en vertu de l’article 402 du Code pénal, et est passible d’une peine d’emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 300 000 à 1 500 000 francs CFA. La commission note toutefois que l’existence de circonstances atténuantes a permis au tribunal d’appliquer les dispositions de l’article 81, alinéa 2, du Code pénal dans les trois affaires et de condamner les accusés à seulement un mois d’emprisonnement ferme en juin 2001, et les deux autres accusés à six mois d’emprisonnement avec sursis et une amende de 50 000 francs CFA par les jugements de mai 2002. La commission prie le gouvernement de préciser la nature des circonstances atténuantes retenues par le tribunal, d’indiquer si ces peines ont été exécutées par les auteurs de l’infraction, et si des décisions judiciaires ont été rendues postérieurement à la nouvelle loi du 27 mai 2003 sur la traite des enfants. Dans l’affirmative, la commission prie le gouvernement de communiquer une copie de ces décisions.

En outre, la commission soulève d’autres points dans une demande directe adressée directement au gouvernement.

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