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Demande directe (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Sénégal (Ratification: 1960)

Autre commentaire sur C029

Observation
  1. 2023
  2. 2019

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La commission a pris note des deux derniers rapports soumis par le gouvernement en 2000 et 2002.

Articles 1, paragraphe 1, et 2, paragraphe 1, de la convention. Liberté des personnes au service de l’Etat de quitter leur emploi. 1. Dans ses précédents commentaires, la commission avait relevé l’incompatibilité avec la convention de dispositions législatives et réglementaires dans la mesure où lesdites dispositions ne permettaient pas aux personnes au service de l’Etat de quitter leur emploi si telle était leur volonté. Les dispositions concernées sont: a) la loi no 61-33 du 15 juin 1961 relative au statut général des fonctionnaires; b) le décret no 77-429 mis à jour le 31 décembre 1987 portant organisation de l’Ecole nationale d’administration et de magistrature; c) le décret no 84-501 du 2 mai 1984 sur l’organisation et les règles de fonctionnement de l’Ecole militaire de santé; d) les textes organisant les écoles de formation des personnes appelées à servir l’Etat. La commission avait ainsi exprimé l’espoir que les nouveaux textes qui seraient adoptés, d’après les indications du gouvernement, garantissent la liberté des agents de l’Etat de quitter leur emploi de leur plein gré. La commission avait également souhaité que le gouvernement communique des informations sur l’application pratique de la loi no 90-02 instituant un dispositif d’incitation au départ volontaire des agents de l’Etat. L’avant-dernier rapport du gouvernement indique que 2 600 agents environ ont bénéficié du programme de départ volontaire pour la période 1990-91. Le rapport précise également que la loi no 97-17 du 1er décembre 1997 portant Code du travail abroge la loi no 61-34 du 15 juin 1961.

2. La commission rappelle que «les dispositions légales empêchant un travailleur engagé pour une durée indéterminée de mettre fin à son emploi moyennant un préavis raisonnable ont pour effet de transformer une relation contractuelle fondée sur la volonté des parties en un service imposé par la loi et sont incompatibles avec les conventions concernant le travail forcé…» (voir paragr. 68 de l’étude d’ensemble de 1979). La commission a souligné, en effet à maintes reprises, que toute personne au service de l’Etat doit pouvoir quitter le service de sa propre initiative, dans des délais raisonnables, soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis; les personnes ayant bénéficié aux frais de l’Etat d’une formation, et qui est dans leur propre intérêt, pouvant être appelées à rembourser une partie des dépenses encourues par l’Etat au prorata du reste de la période pour laquelle elles s’étaient engagées.

3. Dans ces circonstances, la commission relève tout particulièrement la référence faite dans ses rapports par le gouvernement au Code du travail, dans la mesure où l’article L.4 dudit Code interdit le travail forcé ou obligatoire. A ce titre, elle note, d’une part, qu’en vertu de l’article L.287 du Code du travail «sont abrogées toutes dispositions contraires à la présente loi et notamment la loi no 61-34 du 15 juin 1961 et ses modifications». D’autre part, la commission note les dispositions transitoires prévues par ce même article et par l’article L.288. En vertu de ces deux articles, l’abrogation des dispositions législatives ainsi visées et de leurs textes d’application n’est pas d’effet immédiat, notamment l’abrogation des dispositions législatives ne prendra effet «qu’au fur et à mesure de la mise en place des nouvelles institutions» (art. L.287 du Code du travail). Enfin, la commission rappelle, comme elle l’a souligné dans ses commentaires antérieurs, que la loi no 90-02 est de portée limitée dans le temps et que certains fonctionnaires ne rentrent pas dans son champ d’application; cette portée limitée se reflète du reste dans le faible nombre de fonctionnaires ayant bénéficié du programme de départ volontaire pour la période 1990-91.

4. Le gouvernement a plusieurs fois indiquéà la commission que les agents au service de l’Etat ont en pratique la liberté de quitter leur emploi par démission. Nonobstant, la commission prie le gouvernement de bien vouloir indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour abroger ou modifier les dispositions de la loi no 61-33, du décret no 77-429 et du décret no 84-501, des textes organisant les écoles de formation, ainsi que celles des lois relatives au statut de corps particuliers de fonctionnaires, afin que les personnes au service de l’Etat aient la liberté de quitter leur emploi de leur plein gré soit à des intervalles déterminés, soit moyennant préavis raisonnable. A ce titre, la commission prie notamment le gouvernement de bien vouloir préciser quelles sont les nouvelles institutions, prévues par l’article L.287 du Code du travail, qui ont été mises en place afin de rendre effective l’abrogation des dispositions législatives visées par ce même article.

Articles 1, paragraphe 1, et 2, paragraphes 1 et 2 c). Travail pénitentiaire. 5. La commission note la réponse du gouvernement à son observation générale de 1998 dans son avant-dernier rapport. Les informations contenues dans ce rapport touchent, de l’avis de la commission, à plusieurs aspects de l’application de la convention dont chacun sera repris ci-après. La commission rappelle qu’aux termes de l’article 2, paragraphe 2 c), le travail pénitentiaire est exclu du champ de la convention aux conditions suivantes: a) ce travail ou service est la conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire; b) ce travail ou service doit être exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques; et c) la personne ne doit pas être concédée ou mise à disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privés. A cet égard, la commission rappelle que les conditions b) et c) sont cumulatives et indépendantes. Ceci signifie que le fait qu’un prisonnier demeure constamment sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques ne dispense pas du respect de la seconde condition, à savoir que la personne ne doit pas être concédée ou mise à disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées (voir notamment le paragraphe 119 du rapport général dans le rapport de la commission pour la 89e session de la CIT et les points 6 et 7 de l’observation générale de 2001). Enfin, la commission rappelle que le travail des prisonniers pour des entreprises privées ou des particuliers n’est pas considéré comme incompatible avec la convention si un tel travail est effectué dans des conditions proches de celles d’une relation de travail libre. Ceci implique, d’une part, qu’un tel travail doit dépendre du libre consentement des intéressés, donné avant tout emploi et sans la menace d’une peine quelconque. D’autre part, ce libre consentement doit être corroboré par des conditions de travail (en termes, notamment, de salaire et de sécurité sociale) proches d’une relation de travail libre (voir notamment, les paragraphes 133 à 143 du rapport général de la commission dans le rapport de la commission pour la 89e session de la CIT et le point 10 de l’observation générale de 2001).

6. Condamnation par décision judiciaire. La commission note que l’avant-dernier rapport du gouvernement ne contient pas de précision sur cet aspect. La commission note que par le passé le gouvernement avait communiqué le texte du décret no 66-1081 du 31 décembre 1966 portant organisation et régime des établissements pénitentiaires. Aux termes de ce décret, seuls les condamnés à des peines privatives de liberté peuvent être astreints au travail obligatoire, les prévenus en étant exclus. Enfin, la commission note que l’article L.4 du Code du travail interdisant le travail forcé ou obligatoire exclut de son champ d’application «tout travail ou service exigé d’un individu comme conséquence d’une condamnation prononcée par l’autorité judiciaire». Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement, dans son prochain rapport: a) d’indiquer si les dispositions pertinentes du décret no 66-1081 sont toujours en vigueur; b) si tel n’était pas le cas, de préciser si c’est l’article L.4 du Code du travail qui garantit le respect de la convention sur ce point et de communiquer tout texte d’application mettant en œuvre l’article L.4 en ce qui concerne le travail des prisonniers.

7. Prisonniers concédés à des entreprises privées ou des particuliers. La commission note que, d’après l’avant-dernier rapport du gouvernement, il n’existe pas de prison administrée par des firmes privées à des fins lucratives. En outre, la commission note d’après le rapport du gouvernement que le travail des prisonniers peut revêtir trois formes: le travail en régie, le travail en cession et le travail en concession. La commission comprend d’après les indications fournies par le gouvernement, que seule l’administration pénitentiaire intervient dans le travail en régie. Elle note cependant que le rapport fait référence aussi à d’«autres utilisateurs…» qui «versent 50 francs CFA l’heure en ce qui concerne le travail en régie». Dans le cadre du travail en cession, la commission note que les prisonniers sont mis à disposition non seulement de l’administration, mais aussi d’entreprises privées ou de particuliers. Quant au travail en concession, l’utilisateur est une entreprise privée à la suite d’un contrat qu’elle a conclu avec l’administration pénitentiaire et le détenu. Enfin, la commission relève que des particuliers peuvent être admis dans l’enceinte des prisons aux fins d’embauche de prisonniers mais qu’il n’est pas précisé le type de travaux concernés. Par ailleurs, la commission note que les prisonniers peuvent être employés hors de l’enceinte des prisons par les autorités publiques ou pour des entreprises privées. Enfin, la commission note que les textes applicables n’ont pas été fournis par le gouvernement dans ses deux derniers rapports, tout en relevant que le décret no 66-1081 régissait aussi le travail pénitentiaire.

8. La commission prie le gouvernement, dans son prochain rapport: a) d’indiquer si les trois formes de travail pénitentiaire concernées sont toujours régies par le décret no 66-1081 et de communiquer, s’il y a lieu, toutes modifications apportées à ce texte ou tout nouveau texte en vigueur le remplaçant; b) de communiquer copie du contrat type s’il existe ou de plusieurs exemples de contrats conclus entre l’administration pénitentiaire, le détenu et une entreprise dans le cadre du travail en concession; c) de préciser quels sont les utilisateurs autres que l’administration pénitentiaire qui interviennent dans le travail en régie; d) de préciser quels sont les particuliers qui peuvent intervenir dans le travail des prisonniers et les types de travaux concernés (travail en cession ou autres); e) de décrire les conditions dans lesquelles les prisonniers sont employés hors de l’enceinte des prisons par des entreprises privées.

9. Prisonniers concédés à des entreprises privées ou des particuliers et consentement des prisonniers. La commission note que l’avant-dernier rapport du gouvernement ne contient aucune information à cet égard. La commission note aussi le décret no 68-583 du 28 mai 1968 modifiant et complétant le décret no 66-1081, et qui a été fourni par le gouvernement dans des commentaires antérieurs. Le décret no 68-583 conditionne au «consentement des détenus intéressés…» la cession de la main-d’œuvre carcérale aux particuliers, compagnies ou personnes morales de droit privé. En conséquence, la commission prie le gouvernement, dans son prochain rapport: a) d’indiquer si le décret no 68-583 est toujours en vigueur; b) et si tel n’était pas le cas, de lui communiquer les dispositions législatives ou réglementaires qui garantissent le consentement préalable des prisonniers avant tout travail pour des entreprises privées ou des particuliers et à ce titre de préciser comment, en pratique, le consentement des prisonniers est garanti.

10. Prisonniers concédés à des entreprises privées ou des particuliers et conditions d’emploi proches d’une relation de travail libre. Pour ce qui est de la question de la rémunération du travail en cession (dans la mesure où il concerne des entreprises privées ou des particuliers), la commission note que l’avant-dernier rapport du gouvernement indique, d’une part, que le travail fait l’objet d’une rétribution forfaitaire et, d’autre part, que les «utilisateurs versent 50 francs CFA de l’heure». Pour ce qui est du travail en concession, la commission relève que, d’après les informations données par le gouvernement, la rémunération se fait «suivant les barèmes en vigueur dans la législation sociale». La commission note aussi que, lorsqu’ils sont embauchés par des particuliers dans l’enceinte des prisons, les prisonniers perçoivent un salaire «ainsi que les autres émoluments prévus par la législation sociale». Enfin, la commission relève que, dans le passé, le gouvernement lui avait communiqué copie d’un arrêté ministériel en date du 8 mai 1967 qui fixait à 40 ou 30 francs de l’heure, selon la région, «la redevance destinée à la rémunération du travail de la main-d’œuvre pénale». La commission prie donc le gouvernement d’indiquer, dans son prochain rapport: a) la rémunération moyenne que perçoivent effectivement les prisonniers dans le cadre du travail en cession et, si elle est différente, celle qu’ils perçoivent effectivement lorsqu’ils sont embauchés par des particuliers dans l’enceinte des prisons; b) les barèmes de rémunération applicables au travail en concession et la rémunération moyenne que perçoivent effectivement les prisonniers, notamment après déduction au titre des charges sociales; c) le taux horaire du salaire minimum interprofessionnel garanti en vigueur, dans la mesure où il est applicable à des travaux identiques que ceux effectués par les prisonniers; d) la durée de travail applicable aux prisonniers; e) si les prisonniers bénéficient d’une majoration des heures supplémentaires et le calcul de cette majoration.

11. Enfin, en ce qui concerne la couverture sociale, la commission note que, dans le cadre du travail en cession, le prisonnier bénéficie d’une prise en charge par l’administration pénitentiaire. La commission a pris bonne note également que, au titre du travail en concession, le prisonnier bénéficie de l’application du Code de sécurité sociale au bénéfice du prisonnier et qu’il semble en être de même lorsque des prisonniers sont embauchés par des particuliers dans l’enceinte des prisons. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport: a) quels sont les éléments concrets de la prise en charge en la matière du prisonnier par l’administration pénitentiaire pour le travail en cession et si cette prise en charge vaut également lorsque le prisonnier travaille pour des particuliers ou des entreprises privées; b) quelles sont les prestations sociales auxquelles le Code de sécurité sociale donne droit aux prisonniers.

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