ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Demande directe (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

Convention (n° 169) relative aux peuples indigènes et tribaux, 1989 - Argentine (Ratification: 2000)

Autre commentaire sur C169

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

1. La commission se réfère à son observation.

2. La commission note qu’en septembre 2001 la Centrale des travailleurs argentins (CTA) a envoyé des observations détaillées sur l’application de la convention, qui ont été transmises par le Bureau au gouvernement en octobre 2001. Constatant que le rapport du gouvernement ne se réfère à aucun des points soulevés par la CTA dans ses observations, la commission invite le gouvernement à donner des informations à ce sujet et, plus particulièrement, sur les points détaillés ci-après.

3. Sur le plan de la législation, la CTA indique que la Constitution de 1994 a introduit un ensemble de règles nouvelles dans les relations avec les peuples indigènes puisqu’elle reconnaît la préexistence ethnique et culturelle de ces peuples et la possession et la propriété collective de la terre, entre autres particularités. Cependant, la loi no 23 302 sur la politique indigène et le soutien aux communautés aborigènes date de 1985, et la plupart des lois nationales et provinciales qui règlent cette question sont antérieures à la réforme constitutionnelle et n’ont pas été modifiées afin de les mettre en conformité avec la convention. La commission espère que le gouvernement examinera sa législation à ces fins et, en tenant compte, ce faisant, du fait qu’en vertu de l’article 6 de cet instrument, les gouvernements doivent consulter les peuples intéressés par des procédures appropriées, et en particulier à travers leurs institutions représentatives, chaque fois que l’on envisage des mesures législatives ou administratives susceptibles de les toucher directement. Elle saurait gré au gouvernement de communiquer copie de la législation nationale et provinciale en vigueur qui concerne les peuples indigènes, d’indiquer de quelle manière il se propose de rendre sa législation conforme à la convention, et de communiquer copie de tout projet de loi en ce sens, en précisant de quelle manière les peuples indigènes ont été consultés à ce propos.

4. Article 1 de la convention. En ce qui concerne le sentiment d’appartenance indigène ou tribale, la CTA déclare que la législation nationale, la législation provinciale et même les formulaires de recensement comportent des critères qui ne sont pas en conformité avec la convention mais prévoient néanmoins que les peuples indigènes seront consultés pour élaborer les questions qui orienteront le recensement de ces populations. Prière d’indiquer pour quand est prévu le prochain recensement indigène et de quelle manière les peuples concernés participeront à sa préparation.

5. La CTA dit que la reconnaissance des peuples indigènes se heurte à de nombreux problèmes, principalement en ce qui concerne l’obtention de la personnalité juridique, qui requiert des procédures longues et compliquées, relevant «davantage de l’octroi que de la reconnaissance». Selon la CTA, cela aurait de graves répercussions, du fait que les peuples concernés ne peuvent défendre leurs droits devant les tribunaux ou devant l’administration publique, faute d’avoir acquis préalablement la personnalité juridique. Sur 850 communautés indigènes, 15 pour cent seulement auraient été reconnus par l’Institut national de l’indigène (INAI) et la définition des critères mêmes de reconnaissance n’aurait pas fait l’objet de consultations avec les communautés concernées. A cela s’ajoute que la personnalité juridique obtenue dans un cadre provincial n’aurait aucune valeur au niveau national parce qu’elle ne constituerait qu’une convention particulière et, en tout état de cause, seulement quatre provinces sur 20 qui comptent des peuples indigènes auraient passé de telles conventions. Veuillez indiquer de quelle manière est assurée la coordination entre les attributions de l’Etat et celle des provinces en matière indigène et, en particulier, de quelle manière est appliqué l’article 75, alinéa 17 in fine de la Constitution, lequel, après avoir fixé les attributions du Congrès en matière de reconnaissance, de terres et de gestion des ressources indigènes, dispose que «les provinces peuvent exercer concurremment ces compétences».

6. Articles 6, 7 et 15 de la convention. La CTA dénonce le fait que les peuples indigènes ne soient pas consultés, à travers des institutions représentatives, d’une manière générale et en particulier à propos de la prospection et de l’exploitation des ressources naturelles. Selon la CTA, c’est l’Etat, et non les communautés indigènes elles-mêmes, qui détermine quelles sont les personnes ou les institutions représentatives. La CTA déclare en outre que, indépendamment de ce que dispose l’article 75, alinéa 17, de la Constitution de 1994, le Congrès a, entre autres fonctions, celle d’assurer la participation des peuples indigènes à la gestion de leurs ressources naturelles et des autres intérêts qui les touchent. Malgré cela, il n’y a eu aucune participation des peuples indigènes, sinon celle des institutions indigénistes provinciales et étatiques, dans le cadre du Projet binational Rio Bermejo et du Projet Hidrovia Parana Paraguay. La CTA craint qu’il en soit de même dans le cadre du Plan maître relatif au Río Pilcomayo, qui touchera près d’un million de personnes et dont la phase préparatoire, pour laquelle il faudrait que les peuples intéressés soient consultés, à travers leurs institutions propres, se trouve déjà engagée. La commission veut croire que le gouvernement prendra les mesures suggérées par les dispositions susmentionnées de la convention et fera connaître celles qui ont été prises à propos des trois projets susmentionnés.

7. La commission saurait également gré au gouvernement de fournir des informations sur les cas suivants évoqués par la CTA: a) la déforestation des terres de la communauté Hoktei T’oi, laquelle aurait introduit un recours en inconstitutionnalité contre cette procédure devant la Haute Cour de justice de Salta; b) l’affaire Lhaka Honhat, secteurs 55 et 14, province de Salta, à propos de laquelle la communauté concernée aurait porté plainte devant la Commission interaméricaine des droits de l’homme à cause de la construction d’un pont par l’Argentine et le Paraguay, sans avoir procédé préalablement à des consultations et des études d’impact sur le milieu; c) la mise en vente par décret, dans la province de Formosa, de 40 000 hectares de forêt primitive sur des terres domaniales où vivent des indigènes et des créoles à l’entreprise australienne LIAG en vue de leur déforestation; et d) la construction du gazoduc du Nord andin sur des terres dont la propriété est revendiquée par des indigènes, construction qui aurait déjà provoqué trois incendies de forêt dans la province de Salta. La commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises en application des articles 6, 7 et 15 dans les cas en question.

8. Terres. La CTA dit que les formes de propriété prévues par le Code civil, de tradition romaine, sont inadéquates pour la reconnaissance de la possession et de la propriété des terres ancestrales, et que l’application de ce droit a pour conséquence que les indigènes sont déboutés de la plupart des actions qu’ils intentent pour revendiquer leurs terres. La CTA évoque en particulier la situation dans la province de Río Negro, où vivent des indigènes mapuches. La CTA affirme que le gouvernement provincial a engagé une procédure de «régularisation» de terres domaniales (publiques) dont 75 pour cent seraient indigènes, de manière à les constituer en garantie en vue de contracter de nouveaux emprunts internationaux, et qu’une étude menée par l’Etat avec une aide internationale, dont les conclusions seraient publiées sous le titre de «Patagonia XXI», prétend que la désertification en Patagonie exige que l’on évacue de ce site des bergers dont les troupeaux d’ovins ne totalisent pas 6 000 têtes et préconise le transfert de petits paysans, parmi lesquels des indigènes mapuches. Le Conseil de tutelle indigène de Río Negro (CAI) s’opposerait à la politique de «régularisation» des terres dans les conditions posées par le gouvernement du Río Negro. La CTA dénonce également dans cette province des procédures cadastrales irrégulières, des faits de constitution illégale de droits de propriété, des faits d’acquisition illégale du droit de possession, des transferts illégaux de droits de propriété et de possession acquis illégalement, des pressions exercées pour la vente à vil prix de terres agricoles. Le gouvernement est prié de fournir des informations sur la politique de «régularisation» des terres dans les différentes provinces, y compris celle du Río Negro, en précisant la situation sur le plan de la législation et dans la pratique. Elle le prie d’indiquer en particulier les mesures prises ou envisagées pour déterminer quelles sont les terres que les peuples concernés occupent traditionnellement et pour garantir la protection effective de leurs droits de propriété et de possession, ainsi que les procédures appliquées pour résoudre les revendications foncières.

9. La CTA émet également des commentaires se rapportant à d’autres articles de la convention, commentaires que la commission se réserve d’examiner en même temps que le prochain rapport du gouvernement.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer