ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 2001, publiée 90ème session CIT (2002)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Allemagne (Ratification: 1956)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Allemagne (Ratification: 2019)

Autre commentaire sur C029

Demande directe
  1. 2023
  2. 2018
  3. 2016
  4. 1992

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Se référant à ses observations antérieures sur l’application de la convention en Allemagne, la commission note la réponse du gouvernement à son observation générale de 1998.

Articles 1, paragraphe 1, et 2, paragraphes 1 et 2 c), de la convention.
Travail de prisonniers pour des entreprises privées

1. La commission note l’indication fournie par le gouvernement dans son rapport, selon laquelle il n’existe dans le pays aucun établissement pénitentiaire qui soit globalement administré par une entreprise commerciale ou autre, et qu’une telle pratique serait contraire à la Constitution nationale. Selon le rapport du gouvernement, il y a deux cas dans lesquels les prisonniers peuvent travailler pour des entreprises privées: a) emploi à l’extérieur dans le cadre d’une relation d’emploi libre («Freigang»); b) travail obligatoire dans un atelier géré par une entreprise privée.

A.  Emploi à l’extérieur dans le cadre d’une relation d’emploi libre

2. En vertu de l’article 39(1) de la loi sur l’exécution des peines:

Le prisonnier est autoriséà travailler ou à suivre des cours de perfectionnement professionnel sur la base d’une relation d’emploi libre à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire, si cela vise la transmission, la préservation ou l’amélioration d’aptitudes permettant d’exercer une activité lucrative après la libération, sans préjudice des conditions impératives de l’exécution de la peine.

Dans son rapport, le gouvernement indique que: les autorités pénitentiaires sont tenues de promouvoir les relations d’emploi libre; une telle relation ne peut être conclue qu’à la demande du prisonnier; le prisonnier est au bénéfice d’un contrat de travail normal, est soumis aux mêmes dispositions législatives que les travailleurs et les apprentis libres, perçoit un salaire fixé par convention collective et bénéficie de la sécurité sociale (retraite, santé, accident et chômage) au même titre que les travailleurs en liberté. Une contribution aux frais de détention peut être prélevée, dont le montant est fonction de la catégorie de logement et de nourriture et, à l’heure actuelle, ne peut dépasser 660,20 DM.

3. La commission prend note avec intérêt de ces indications qui reflètent exactement le cas de figure décrit par la commission au paragraphe 97 de son étude d’ensemble de 1979, c’est-à-dire un système d’emploi privé des prisonniers qui ne tombe pas sous le coup des dispositions de la convention. Toutefois, les conditions d’une relation d’emploi libre ne s’appliquent pas à la deuxième forme de travail pénitentiaire pour le compte d’une entreprise privée, qui est encore pratiquée en vertu de la législation nationale, comme rappelé ci-après.

B.  Travail obligatoire dans un atelier
  géré par une entreprise privée

4. Dans des commentaires formulés depuis de très nombreuses années, la commission a noté qu’en vertu de la législation en vigueur des prisonniers peuvent être obligés à travailler dans des ateliers gérés par des entreprises privées au sein des prisons de l’Etat. Comme l’a fait observer la commission l’année dernière aux paragraphes 96 et 100 de son rapport général, la pratique actuelle en Allemagne à cet égard correspond exactement à la description faite dans le mémoire du BIT de 1931 du «système de l’entreprise spéciale», dans le cadre duquel le travail des prisonniers est concédéà des entreprises privées. Le fait que les prisonniers demeurent en tout temps sous l’autorité et le contrôle de l’administration de la prison n’empêche pas le fait qu’ils sont «concédés»à une entreprise privée, pratique désignée à l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 2 de la convention comme étant incompatible avec cet instrument fondamental des droits de la personne humaine.

5. En 1978, la commission avait pris note avec intérêt de l’adoption de la loi du 13 mars 1976 sur l’exécution des peines. En vertu de l’article 41(3) de cette loi, l’emploi dans un atelier géré par une entreprise privée est subordonné au consentement du prisonnier, consentement que celui-ci peut retirer par la suite, moyennant un préavis de six semaines, si aucun autre prisonnier ne peut le remplacer plus tôt. Toutefois, l’exigence du consentement, prévue à l’article 41(3), qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 1982, a été suspendue par la «deuxième loi visant à améliorer la structure budgétaire» du 22 décembre 1981 et est depuis restée lettre morte.

6. D’autres dispositions de la loi sur l’exécution des peines devaient progressivement élever les conditions d’emploi des prisonniers, y compris ceux qui travaillent dans des ateliers privés, par rapport au niveau de celles d’une relation de travail libre. Ainsi, les articles 191 à 193 de la loi prévoient l’admission des prisonniers au bénéfice de l’assurance maladie et de l’assurance vieillesse, et depuis 1979 le gouvernement indique qu’un projet de loi sur ce sujet est à l’étude. Cependant, bien que les prisonniers aient déjàété effectivement inclus dans le système de sécurité sociale aux termes d’une législation de la Prusse mentionnée dans le mémoire du BIT de 1931 sur le travail pénitentiaire, des dispositions à cet effet ne sont actuellement en vigueur dans aucune partie de l’Allemagne.

7. En ce qui concerne la rémunération des prisonniers qui travaillent dans des ateliers privés, la loi de 1976 sur l’exécution des peines a reconnu à tous les prisonniers le droit à un salaire mais en a fixé le taux initial à 5 pour cent seulement du salaire moyen des ouvriers et employés au bénéfice de l’assurance vieillesse, et une première majoration de ce taux devait être envisagée le 31 décembre 1980.

Plus de vingt ans plus tard, le taux de rémunération s’établit toujours à 5 pour cent du salaire moyen, voire moins: en vertu de l’article 45, paragraphe 2, de la loi, «la rémunération peut être fixée en fonction d’un barème progressif, selon la qualité du travail du prisonnier et la nature des tâches qui lui sont confiées. Moins de 75 pour cent de la rémunération de référence [c’est-à-dire moins de 3,75 pour cent du salaire moyen des travailleurs libres] peuvent être versés uniquement si la performance du prisonnier ne répond pas aux exigences minimales.»

8. Dans son observation précédente, la commission avait pris note d’une décision rendue par la Cour constitutionnelle le 1er juillet 1998, qui avait jugé le taux actuel de rémunération des prisonniers incompatible avec le principe de réhabilitation et instruit le législateur de fixer à cet égard, avant le 31 décembre 2000, de nouvelles règles conformes à la Constitution. Selon le rapport du gouvernement reçu en octobre 2000, le gouvernement avait alors l’intention de présenter prochainement un projet de loi au Parlement. Or aucun changement du taux de rémunération ne semble avoir été introduit dans la législation au 31 décembre 2000 ni signalé par la suite.

9. La commission note avec préoccupation que quarante-cinq ans après la ratification de cette convention fondamentale en matière de droits de la personne humaine les prisonniers qui travaillent pour des entreprises privées en Allemagne se divisent en deux catégories, certains bénéficiant de tous les avantages d’une relation de travail libre tandis que les autres sont concédés à des entreprises qui exploitent leur travail sans leur consentement et dans des conditions qui n’ont rien à voir avec celles du marché du travail libre. La commission doit à nouveau exprimer l’espoir que le gouvernement prendra enfin les mesures nécessaires pour mettre la législation et la pratique à cet égard en conformité avec l’article 1, paragraphe 1, lu conjointement avec l’article 2, paragraphes 1 et 2 c),de la convention.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer