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Observation (CEACR) - adoptée 2000, publiée 89ème session CIT (2001)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Bélarus (Ratification: 1956)

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La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend note également des textes législatifs suivants: la loi du 14 janvier 2000 sur les syndicats, le Code du travail du 1er janvier 2000 et le décret présidentiel no 2 du 26 janvier 1999, ainsi que sa réglementation. La commission souhaite évoquer les points suivants à propos de ces textes.

Article 2 de la convention. a) Droit des travailleurs et des employeurs, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix. Se référant à ses commentaires précédents, la commission prend note du décret présidentiel no 2 qui réglemente l’activité des partis politiques, des syndicats et d’autres associations sociales et qui prévoit le réenregistrement obligatoire de tous les syndicats déjà enregistrés à l’échelle nationale, du secteur ou de l’entreprise. La commission note tout d’abord que l’article 3 du décret indique que «les associations qui n’ont pas été enregistrées ne pourront pas déployer leurs activités dans la République» et que «les associations qui n’ont pas été réenregistrées devront mettre un terme à leurs activités et seront dissoutes, conformément à la procédure établie». La commission croit comprendre que, en vertu du décret, l’obtention de la personnalité morale dépend de l’enregistrement de l’organisation. A cet égard, la commission rappelle que les réglementations nationales régissant la constitution d’organisations ne sont pas en soi incompatibles avec les dispositions de la convention mais qu’elles ne doivent pas équivaloir à une «autorisation préalable» ni constituer un obstacle qui reviendrait dans la pratique à une interdiction.

L’article 3 du décret fixe des conditions minima en ce qui concerne le nombre de membres dans une organisation à l’échelle nationale, du secteur ou de l’entreprise; ainsi, dans une entreprise, une organisation doit compter au moins 10 pour cent des effectifs pour pouvoir être enregistrée. La commission rappelle que ce type d’exigence n’est pas en soi incompatible avec la convention, mais que le seuil devrait être fixéà un niveau raisonnable de façon à ne pas entraver la constitution des organisations, ce chiffre pouvant varier selon les conditions particulières dans lesquelles une restriction a été imposée (voir étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 81). Par ailleurs, la commission croit comprendre que l’obligation de fournir l’adresse du domicile à des fins d’enregistrement, conformément aux réglementations applicables, a donné lieu à de nombreux refus d’enregistrement. A cet égard, la commission a estimé que des problèmes de compatibilité avec la convention se posent également lorsque la procédure d’enregistrement est longue et compliquée, ou lorsque l’application des règles d’enregistrement est détournée de son objectif et que les autorités administratives compétentes en matière d’enregistrement font un usage excessif de leur marge d’appréciation, des textes peu précis favorisant de telles interprétations (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 68, 69 et 75).

Compte tenu de ce qui précède et, en particulier, des conséquences graves en cas de non-enregistrement aux termes du décret no 2 (interdiction des activités et dissolution de l’organisation), la commission prie le gouvernement d’envisager de modifier le décret afin d’exclure les syndicats de son champ d’application et, le cas échéant, d’instituer une procédure d’enregistrement plus simple. A défaut, elle prie le gouvernement de modifier le décret de façon à ce que les deux derniers paragraphes de l’article 3, qui interdisent les activités des associations non enregistrées et qui prévoient leur dissolution, ne s’appliquent pas aux syndicats, de modifier la disposition exigeant qu’une organisation compte 10 pour cent au minimum des effectifs d’une entreprise afin de garantir le respect du droit syndical, en particulier dans les grandes entreprises, et de donner les instructions nécessaires pour veiller à ce que la notion d’adresse du domicile ne soit pas interprétée d’une manière restrictive au point d’entraver le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix.

b) Droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations ainsi que de s’y affilier. La commission note que la loi de 1992 sur les syndicats, telle que modifiée le 14 juillet 2000, continue de faire référence à la notion de «citoyen» dans ses articles 1 et 2 en ce qui concerne le droit de s’affilier librement à des syndicats. En outre, dans le Code du travail du 1erjanvier 2000, les «syndicats» sont définis comme étant des organisations publiques bénévoles qui réunissent des «citoyens». Dans ses commentaires précédents, la commission avait rappelé que le droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix ainsi que de s’y affilier implique que tout travailleur résidant sur le territoire d’un Etat donné devrait jouir du droit syndical, conformément à l’article 2 de la convention. Tout en ayant pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle la Constitution garantit le droit de toutes les personnes de résider et de travailler sur le territoire national, la commission avait prié le gouvernement d’envisager de prendre des mesures pour modifier la loi sur les syndicats afin de l’harmoniser avec la Constitution et la législation nationale et de la rendre conforme à la convention. La commission note avec regret que cette modification n’a pas été effectuée en janvier, mois pendant lequel d’autres modifications ont été apportées à la loi sur les syndicats, et que l’article 1 du nouveau Code du travail conserve la notion de droit du citoyen dans sa définition des syndicats. La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier les articles 1 et 2 de la loi sur les syndicats, ainsi que l’article 1 du Code du travail afin d’indiquer expressément que le droit syndical n’est pas limité aux nationaux.

Article 3. a) Droit des organisations de travailleurs d’organiser librement leurs activités. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié instamment le gouvernement de modifier l’ordonnance no 158 du 28 mars 1995 qui établit une liste des services essentiels dans lesquels la grève est interdite, cette liste allant au-delà de la notion de services essentiels au sens strict du terme. La commission note avec satisfaction que, à la suite de l’entrée en vigueur en janvier 2000 du nouveau Code du travail, l’ordonnance no 158 a été abrogée.

La commission note toutefois que l’article 388 du Code du travail permet des restrictions législatives au droit de grève lorsque sont en jeu les intérêts de la sécurité nationale, l’ordre public, la santé de la population, ainsi que les droits et la liberté d’autrui. En outre, l’article 393 autorise le président à retarder, voire à faire cesser, les grèves pendant une période allant jusqu’à trois mois dans les cas susmentionnés. Toutefois, l’article 388 indique qu’une grève ne peut être engagée plus de trois mois après la date à laquelle elle a été déclarée. La commission rappelle que le droit des syndicats d’organiser leurs activités (article 3 de la convention) implique la reconnaissance du droit de grève, et que ce droit ne peut être restreint, voire interdit, que dans les cas de crise nationale aiguë, des fonctionnaires qui exercent une autorité au nom de l’Etat, ou dans le cas de services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire ceux dont l’interruption mettrait en danger la vie, la sécurité personnelle ou la santé de l’ensemble ou d’une partie de la population. La commission prie le gouvernement de confirmer que les articles 388 et 393, comme elle croit le comprendre, ne s’appliquent que dans ces derniers cas. En ce qui concerne la faculté présidentielle de retarder une grève pour une période allant jusqu’à trois mois, ce qui rend potentiellement illicite toute grève, étant donné qu’un délai maximum de trois mois est prévu entre la déclaration et la réalisation d’une grève, la commission demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation de façon à ce que les dispositions de l’article 393 ne rendent pas impossible, dans la pratique, l’exercice d’une action revendicative légitime.

En ce qui concerne les exigences relatives au préavis de grève, aux termes de l’article 390 du Code du travail, la commission note qu’elles comportent des dispositions en ce qui concerne la durée de la grève. La commission estime qu’exiger que la durée de la grève soit précisée au moment de notifier la grève est contraire au droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler librement leur programme d’action. Par définition, le droit de grève constitue un moyen de pression dont les travailleurs et leurs organisations disposent pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux. La commission demande donc au gouvernement d’abroger l’obligation susmentionnée.

Par ailleurs, la commission note qu’au moment de notifier la grève il faut faire des propositions en ce qui concerne les services minima à assurer pendant la grève, et que l’article 392 rend ces services obligatoires. La commission souhaite attirer l’attention du gouvernement sur le paragraphe 160 de son étude d’ensemble de 1994 dans lequel elle a estimé que, afin d’éviter des dommages irréversibles ou exagérément disproportionnés par rapport aux intérêts professionnels des parties aux différends, ainsi que les dommages causés à des tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs qui subissent les effets économiques des conflits collectifs, les autorités pourraient établir un régime de service minimum dans les autres services d’utilité publique. La commission considère toutefois que la notion de service minimum devrait être limitée à ces cas et que le service minimum ne devrait pas être exigé, de manière excessive, dans l’ensemble des entreprises, même dans les cas où l’action revendicative aurait un effet limité sur des tiers. De plus, la commission note que lorsque les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la portée du service minimum, il revient aux autorités exécutives et administratives locales de trancher. En cas de désaccord à propos du service minimum, la commission estime qu’il est préférable que ce soit un organe indépendant qui tranche ces désaccords. Elle demande donc au gouvernement d’amender le Code du travail de façon à ce qu’un organe indépendant détermine le service minimum à assurer en cas de désaccord entre les parties et à ce qu’un service minimum ne soit pas requis dans toutes les entreprises, mais seulement dans les cas susmentionnés, ou pour garantir le bon fonctionnement des services nécessaires.

b) Droit des organisations de travailleurs d’élire librement leurs représentants. La commission prend note des instructions en date du 11 février 2000 prises par le chef de l’administration présidentielle, qui ordonne aux ministres et aux chefs de commissions gouvernementales d’intervenir dans les élections de syndicats de branche. La commission rappelle que l’autonomie des organisations ne peut être réellement garantie que si leurs membres ont le droit d’élire en toute liberté leurs représentants (article 3 de la convention). Les autorités publiques devraient donc s’abstenir de toute intervention de nature à entraver l’exercice de ce droit, que cela concerne le déroulement des élections syndicales, les conditions d’éligibilité, la réélection ou la destitution des représentants (voir étude d’ensemble, op. cit., paragr. 112). La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’il n’y ait pas d’intervention de ce type en abrogeant notamment les instructions applicables.

Article 5. La commission note que l’article 388 interdit aux personnes morales étrangères d’apporter une aide financière aux participants d’une grève. La commission attire l’attention du gouvernement sur le paragraphe 197 de son étude d’ensemble dans laquelle elle estime que les législations qui interdisent aux syndicats de recevoir une aide ou une subvention financière d’organisations étrangères créent de graves difficultés en ce qui concerne le droit des organisations de s’affilier à des organisations internationales et de recevoir l’aide et les subventions qui découlent de cette affiliation. La commission prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier cet article de façon à ce que les organisations nationales de travailleurs puissent recevoir une aide, même financière, d’organisations internationales de travailleurs, même lorsqu’il s’agit de contribuer à l’exercice d’une action revendicative librement choisie.

La commission adresse également une demande directe au gouvernement.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 2001.]

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