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Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

Convention (n° 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952 - Portugal (Ratification: 1994)

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Se référant à ses commentaires antérieurs, la commission note les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport ainsi que les commentaires formulés par la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP-IN) qui sont annexés au rapport du gouvernement. Elle a également noté les nouvelles informations formulées par le gouvernement en date du 16 novembre 1998. La commission souhaite attirer l'attention du gouvernement sur les points suivants.

1. Partie IV (Prestations de chômage), article 23 de la convention. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait prié le gouvernement d'expliquer les raisons qui avaient conduit à subordonner l'ouverture du droit à l'allocation de chômage à l'accomplissement d'une période de stage, relativement longue, d'une durée minimale de 540 jours de travail salarié au cours des derniers 24 mois (art. 12 du décret-loi no 79-A/89 établissant le régime de l'assurance chômage du régime général de sécurité sociale), compte tenu de l'article 23 de la convention, selon lequel le stage ne doit pas dépasser la durée considérée comme nécessaire pour éviter les abus. Dans ce contexte, elle avait également demandé au gouvernement de préciser la durée de la réduction du stage, qui avait été décidée, en vertu de la résolution du Conseil des ministres no 6/97, pour les travailleurs en situation de chômage involontaire dans l'industrie textile et du vêtement, ainsi que d'indiquer si des mesures semblables avaient été prises ou étaient envisagées en ce qui concerne les travailleurs protégés dans d'autres secteurs économiques.

En ce qui concerne les motifs qui étaient à l'origine de la fixation dans la législation nationale d'une période de stage de 540 jours de travail salarié, le gouvernement précise dans son rapport qu'ils étaient liés à plusieurs facteurs, dont la nécessité de fixer une période minimum d'emploi, ainsi que d'adapter le régime de protection contre le chômage au cadre du travail qui est caractérisé par une certaine rigidité et où prédomine le régime des contrats à durée indéterminée, le contrat à terme (situation dans laquelle l'achèvement de cette période de stage se posera avec une acuité accrue) étant de nature exceptionnelle. Etant donné que, selon le gouvernement, le régime des contrats du travail existant au Portugal est essentiellement stable, la période de stage en question n'est pas très difficile à atteindre. Par ailleurs, le critère qui est à la base de l'attribution des prestations est lié à l'âge. Enfin, le gouvernement considère que la durée relativement longue des périodes de protection, visant notamment à protéger les travailleurs plus âgés, doit avoir une contrepartie en termes de paiement de cotisations. Quant aux mesures prises dans l'industrie textile et du vêtement en vertu de la résolution du Conseil des ministres no 6/97 du 15 janvier 1997, le gouvernement confirme que, dans le cadre du nouveau programme de développement de ce secteur, la période de stage pour l'ouverture du droit à l'allocation de chômage est passée de 540 jours de travail salarié au cours des derniers 24 mois à 270 jours de travail salarié au cours des derniers 12 mois précédant la date de chômage. Il ajoute que le recours à la réduction de la période de stage comme mesure de protection sociale n'est pas récent et était déjà prévu dans le cadre de l'application du décret-loi no 291/91 du 10 août 1991 instituant des mesures complémentaires de protection destinées aux secteurs en restructuration ou à certaines régions géographiques affectées par l'impact économique et social de la restructuration d'une ou de plusieurs entreprises locales dont le volume d'emploi est significatif. Outre le secteur du textile et du vêtement, ces mesures ont été appliquées aux entreprises LISNAVE, SETENAVE et SOLISNOR (chantiers navals) ainsi que dans le cadre de la restructuration du secteur de la cristallerie en 1994. Le gouvernement souligne toutefois qu'il s'agit de mesures temporaires et exceptionnelles. Enfin, le gouvernement souligne également l'existence d'une allocation sociale de chômage pour laquelle la période de stage exigée est sensiblement moindre puisque le chômeur doit avoir accompli 180 journées de travail au cours de la période de 12 mois précédant immédiatement la date du chômage. Cette prestation, qui concerne plus particulièrement les situations de relations de travail précaires et sans caractère de stabilité, est assortie d'une condition de ressources justifiant l'existence d'un système plus favorable.

La CGTP-IN estime dans ses commentaires que, du point de vue des dispositions de l'article 23 de la convention, la période de stage de 540 jours est excessive, car elle a pour effet d'exclure de la protection un nombre considérable de travailleurs qui, du fait de la précarité et de l'instabilité qui caractérisent actuellement le marché du travail, ne réussissent pas à accomplir cette période. Selon la confédération, cette situation implique une violation du principe d'universalité de la protection consacré par la convention. Quant à l'allocation sociale de chômage qui a pour objet de remplacer ou de compléter l'allocation de chômage, la CGTP-IN souligne qu'il s'agit d'une prestation dont le champ d'application personnel est plus restreint puisqu'elle est sujette à une condition de ressources.

La commission note ces informations. S'agissant des motifs qui étaient à l'origine de la fixation dans la législation nationale de la période de stage pour l'allocation de chômage, prévue par l'article 12 du décret-loi no 79-A/89, et notamment de ceux liés à la prédominance sur le marché du travail de relations d'emploi à durée indéterminée, à l'âge et au montant de cotisations payées en contrepartie d'une période de protection relativement étendue, la commission rappelle que l'article 23 de la convention autorise uniquement une période de stage dont la durée est considérée comme nécessaire pour éviter les abus. Elle observe en outre que, si dans un régime essentiellement stable de relations d'emploi tel qu'évoqué par le gouvernement, l'accomplissement de la période de stage peut être relativement facile, il en est autrement dans un marché du travail qui se caractérise actuellement, selon la CGTP-IN, par la précarité et l'instabilité grandissantes de l'emploi. Même les travailleurs bénéficiant de contrats de durée indéterminée sont de plus en plus touchés par la restructuration économique, de sorte que des mesures visant à raccourcir la période de stage peuvent s'avérer nécessaires dans certains secteurs afin de protéger ceux qui sont mis en chômage avant d'avoir accompli la totalité du stage prévu par la législation. Quant aux travailleurs sous contrats de travail de durée déterminée dont le nombre semble très important selon les informations communiquées par la CGTP-IN dans le cadre du contrôle de l'application de la convention (no 158) sur le licenciement, 1982, la réalisation de la période de stage actuel de 540 jours de travail salarié au cours des deux dernières années devient particulièrement difficile. A ce sujet, la commission note, par exemple, que selon la réglementation des contrats à terme introduite récemment dans le statut du Service national de santé par le décret-loi no 53/98 du 11 mars 1998 fourni par le gouvernement, les établissements de la santé publique sont autorisés à engager un tiers de leur personnel sous contrats à terme, lesquels ne peuvent dépasser la durée totale de deux ans. Enfin, la commission tient à souligner que l'allocation sociale de chômage, dont la durée de la condition de stage paraît pouvoir s'inscrire dans le cadre de l'article 23 de la convention, ne saurait être considérée comme une méthode de protection permettant d'assurer l'application de la Partie IV de la convention dans la mesure où cette allocation sociale ne répond pas aux critères fixés à l'article 21 b) de la convention en ce qui concerne son champ d'application (tous les résidents dont les ressources pendant l'éventualité n'excèdent pas des limites prescrites). La commission a toutefois noté que le gouvernement évoque dans son treizième rapport annuel sur l'application du Code européen de sécurité sociale la prochaine entrée en vigueur d'un décret-loi portant révision globale du régime juridique de l'assurance chômage. Elle espère qu'à cette occasion le gouvernement pourra reconsidérer la question de la durée de stage ouvrant droit à l'allocation de chômage prévue par l'article 12 du décret-loi no 79-A/89 qui, ainsi que le gouvernement le reconnaît, est relativement longue, à la lumière des dispositions de l'article 23 de la convention, compte tenu des remarques figurant ci-dessus. En tout état de cause, la commission saurait gré au gouvernement de continuer de fournir des informations sur toute nouvelle mesure de réduction de la période de stage en matière de chômage dans les secteurs économiques concernés.

2. Partie VI (Prestations en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles). a) Article 36, paragraphe 1 (en relation avec l'article 65, paragraphe 10). La commission note les informations, fournies par le gouvernement en réponse à ses commentaires antérieurs, concernant les dispositions législatives établissant la méthode de révision des prestations dues en cas d'accidents du travail et de maladies professionnelles, ainsi que les statistiques relatives à l'ajustement de ces prestations pour la période 1997-98. Se référant aux dispositions en vigueur (décret-loi no 668/75 du 24 novembre 1975, tel que modifié par le décret-loi no 39/81 du 7 mars 1981), le gouvernement déclare que les pensions résultant d'invalidité inférieure à 30 pour cent sont exclues des règles d'actualisation des pensions. Il ajoute que le projet de texte réglementant la loi no 100/97 du 13 septembre 1997 portant adoption du nouveau régime juridique d'accidents du travail et de maladies professionnelles (qui n'est pas encore entré en vigueur) comporte un chapitre relatif à l'"actualisation des pensions", préconisant la révision de ces pensions dans les mêmes termes que pour les pensions du régime général de sécurité sociale.

A ce sujet, la CGTP-IN allègue dans ses commentaires que la méthode de la révision des pensions d'accidents du travail n'est pas conforme aux dispositions de l'article 65, paragraphe 10, de la convention, dans la mesure où 1) la réévaluation ne s'applique pas à l'ensemble des pensions, et 2) la méthode indirecte d'actualisation, selon laquelle l'augmentation du montant des prestations est obtenue en fonction d'un nouveau calcul fondé sur le salaire minimum fixé chaque année, ne permet pas d'assurer le maintien de la valeur réelle de la pension par rapport aux variations du coût de la vie.

La commission rappelle que les paiements périodiques en cours servis en cas d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, couverts par l'article 36, paragraphe 1, de la convention (à l'exception de ceux qui couvrent l'incapacité temporaire de travail), doivent être révisés à la suite de variations sensibles du niveau général des gains -- et non pas du salaire minimum -- qui résultent de variations sensibles du coût de la vie, conformément à l'article 65, paragraphe 10, de la convention, et cela quel que soit le taux d'invalidité. Elle espère qu'en adoptant le projet de texte réglementaire de la loi no 100/97, auquel il se réfère dans son rapport, le gouvernement veillera à ce qu'il soit donné plein effet à la convention sur ces deux points. La commission prie le gouvernement de fournir une copie de ce texte une fois adopté.

b) Article 38 (en relation avec l'article 69 f)). Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait soulevé la question de la conformité de la base VI, paragraphe 1 a) et b), de la loi no 2127 de 1965 établissant le régime juridique des accidents du travail et des maladies professionnelles et l'article 12 de la Portaria no 642/83 approuvant le règlement de la caisse nationale d'assurance des maladies professionnelles avec les dispositions susmentionnées du Code. En vertu de la base VI, le paragraphe 1 a) et b) de la loi no 2127 de 1965 ne fait pas l'objet de réparation des accidents provoqués par dol ou résultant d'une action ou d'une omission de la victime, alors qu'elle violait sans raison justificative les règles de sécurité, ainsi que les accidents résultant de la faute grave et inexcusable de la victime. En outre, l'article 12 de la Portaria no 642/83 prévoit également que la faute grave et inexcusable exclut le droit à réparation pour les maladies professionnelles. Etant donné que l'article 69 f) de la convention autorise la suspension des prestations uniquement en cas de faute intentionnelle de l'intéressé, la commission avait prié le gouvernement d'indiquer la manière dont ces dispositions sont appliquées dans la pratique. Dans son rapport, le gouvernement communique le résumé d'un certain nombre de décisions judiciaires sur des cas intervenus entre 1995 et 1997 tout en soulignant que ces cas sont relativement rares.

La commission a examiné les extraits de décisions judiciaires communiqués par le gouvernement. Elle a noté en particulier que, selon la jurisprudence établie par la Cour suprême de justice, la faute grave et inexcusable présuppose l'existence d'un comportement téméraire inexcusable -- et non pas une simple imprudence ou distraction -- réprouvé par un sentiment élémentaire de prudence et constituant la cause unique de l'accident. A cet égard, la commission estime qu'une telle définition de la faute grave et inexcusable ne paraît pas permettre dans tous les cas son assimilation à une faute intentionnelle au sens de l'article 69 f) de la convention, dans la mesure où la notion susmentionnée de faute grave et inexcusable ne semble pas nécessairement tenir compte de l'intention de l'auteur de l'acte. En outre, il ressort de l'application de cette jurisprudence dans les différents cas communiqués par le gouvernement que, dans certains de ceux-ci, une faute grave mais non intentionnelle ait entraîné la décaractérisation de l'accident.

La commission exprime en conséquence l'espoir que le gouvernement pourra, à la lumière des commentaires susmentionnés, réexaminer la question lors de l'élaboration de la réglementation de l'application de la loi no 100/97 de 1997 portant adoption du nouveau régime juridique des accidents du travail et maladies professionnelles, de manière à limiter la suspension des prestations dues en cas de lésions professionnelles aux seuls cas de faute intentionnelle conformément à cette disposition de la convention.

3. Partie VII (Prestations aux familles), article 43. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté que l'article 15 du décret-loi no 133-B/97 établissant le régime juridique des prestations familiales du régime général de sécurité sociale soumet, sauf pour les titulaires de pensions, l'attribution de l'allocation familiale à l'accomplissement d'un stage de six mois d'enregistrement des rémunérations, continus ou interrompus, dans les 12 mois précédant le deuxième mois antérieur à la demande. Etant donné qu'aux termes de l'article 43 de la convention le stage ne doit pas dépasser soit trois mois de cotisation ou d'emploi, soit une année de résidence au cours d'une période prescrite, la commission avait prié le gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer la pleine application de cette disposition de la convention. Dans sa réponse, le gouvernement reconnaît que la condition de stage prévue par l'article 15 du décret-loi susmentionné n'est pas conforme à la convention, et précise que le régime juridique des prestations familiales, qui est à l'étude, va faire l'objet d'améliorations, la question de la condition de stage étant notamment envisagée. De son côté, la CGTP-IN déclare que cette condition de stage est en violation manifeste des dispositions de l'article 43 de la convention et constitue une régression par rapport au régime précédemment en vigueur, qui ne prévoyait aucune période de stage. La commission espère en conséquence que les mesures appropriées pourront être prises dans un proche avenir afin de mettre la législation et la pratique nationales en pleine conformité avec la convention sur ce point important.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 1999.]

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