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Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

Convention (n° 131) sur la fixation des salaires minima, 1970 - Uruguay (Ratification: 1977)

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1. La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que de la déclaration faite par un représentant gouvernemental devant la Commission de l'application des normes de la Conférence en 1998, et de la discussion qui a fait suite.

La prise en considération des besoins des travailleurs et de leurs familles dans la détermination des salaires minima

2. Dans les précédents commentaires, la commission a prié le gouvernement d'indiquer dans quelle mesure et de quelle manière les besoins des travailleurs et de leurs familles sont pris en considération dans la détermination du niveau des salaires minima, conformément à l'article 3 de la convention.

3. Selon le gouvernement, l'article 3 de la convention trouve son expression dans les dispositions de l'article 1 de la loi no 10449, qui a la teneur suivante: "le salaire minimum est celui qui est considéré comme nécessaire, sur la base des conditions économiques régnant en un lieu donné, pour assurer au travailleur un niveau de vie suffisant pour pourvoir à la satisfaction de ses besoins physiques, intellectuels et moraux". C'est ce mandat juridique qui sert de repère lors de la fixation des salaires minima, tant de ceux qui sont convenus par voie de négociation collective que de ceux qui sont fixés par l'administration.

4. La commission constate qu'en ce qui concerne la fixation du taux des salaires minima, le gouvernement cite dans son rapport certaines dispositions de la loi no 10449 qui ne tendent qu'à "assurer au travailleur un niveau de vie suffisant pour pourvoir à la satisfaction de ses besoins physiques, intellectuels et moraux". La commission souhaite rappeler que cette disposition ne se réfère pas aux besoins des travailleurs et de leurs familles, conformément à ce que prévoit l'article 3 de la convention. D'autre part, le gouvernement n'explique pas non plus de quelle manière précise les besoins des travailleurs et de leurs familles sont pris en considération, en pratique, dans le cadre de la fixation des salaires minima. Il n'indique pas par exemple si le salaire minimum est calculé sur la base d'un ensemble de produits de première nécessité. Il n'indique pas non plus s'il est tenu compte des dépenses minimales d'éducation, de santé et d'alimentation. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement sera en mesure de faire état, dans son prochain rapport, des mesures adoptées afin que la fixation des salaires minima tienne compte des besoins des travailleurs et de leurs familles, et qu'il précisera de quelle manière pratique ces besoins sont évalués.

Absence de consultation des représentants employeurs et travailleurs intéressés dans la détermination des salaires minima

5. Dans les précédents commentaires, la commission -- après avoir constaté d'une manière générale la persistance, depuis de nombreuses années, du problème de la fixation unilatérale par le gouvernement du salaire minimum interprofessionnel et des salaires minima pour les travailleurs ruraux et domestiques -- a exprimé l'espoir que le gouvernement serait prochainement en mesure d'indiquer les mesures prises pour assurer la pleine consultation des représentants des employeurs et des travailleurs intéressés lors de la détermination du salaire minimum national et des salaires minima des travailleurs ruraux et des employés de maison, conformément aux dispositions de l'article 4, paragraphe 2, de la convention.

6. Dans sa réponse à ces commentaires, le gouvernement indique que le salaire minimum national "n'a pas d'application pratique puisque sa fonction n'est pas de déterminer le paiement minimal de la prestation de services mais de constituer en réalité un étalon de référence pour le calcul de certaines prestations de sécurité sociale". Selon le gouvernement, cet état de fait se trouve entériné par les affirmations de la Centrale des travailleurs (PIT-CNT), qui déclarait en 1997 que: "... ce salaire constitue une notion de caractère politique, vide de tout contenu, servant essentiellement à réguler toute une série de dispositions de sécurité sociale (montant des allocations familiales, prime de retraite, etc.)". Selon le gouvernement, cette caractéristique du salaire minimum national en Uruguay fait que "ce salaire ne doit pas être analysé dans l'optique de la convention".

7. En ce qui concerne les salaires minima des travailleurs ruraux et des employés de maison, le gouvernement rappelle en premier lieu que le pays a un système de fixation des salaires minima qui est complexe. D'une part, il existe un régime général éventuellement applicable à tous les travailleurs du secteur privé, qui est prévu dans la loi no 10449 sur les "conseils des salaires". D'autre part, le pouvoir exécutif limite les possibilités d'application de cette loi à certains secteurs d'activité (transports publics des personnes, santé et construction) et favorise la négociation collective sans participation de l'Etat dans les autres branches. Enfin, le pouvoir exécutif fixe par décret les salaires minima des travailleurs ruraux et des employés de maison ainsi que le salaire minimum national. Les autorités administratives compétentes pour déterminer les différents secteurs d'activité sont le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, qui a pris un décret précisant les activités incluses dans chaque catégorie, et la Direction nationale du travail qui, à travers sa commission de classification des activités professionnelles, centralise et étudie les cas particuliers que peuvent poser les nouvelles activités ou des activités complexes. L'accord préalable des organisations professionnelles concernées a été obtenu avant de prendre les décrets en la matière. Selon le gouvernement, la pratique en vigueur dans le pays depuis plus de cinquante ans, sanctionnée entre-temps d'un point de vue juridique par la ratification de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, institue la négociation collective sans restriction aucune par entreprise ou branche d'activité. Les plus grandes facilités sont accordées et il n'existe aucun obstacle bureaucratique ou administratif qui risquerait de compromettre la négociation collective, y compris la procédure habituelle de fixation des salaires dans le pays. Il n'existe pas non plus d'activité ni de catégorie de travailleurs qui soient exclues de ce système. Le fait que ce soit le gouvernement qui fixe et réajuste tous les trimestres le salaire minimum des travailleurs ruraux et domestiques résulte de la quasi-inexistence d'organisations représentatives qui puissent négocier. Le gouvernement estime en conséquence qu'il joue un rôle subsidiaire, en établissant des salaires minima qui ne peuvent être ignorés par aucun employeur. Ces salaires minima prévoient des prestations de sécurité sociale incluant l'assistance médicale, l'assurance accident du travail, les cotisations de retraite et même d'autres prestations plus courantes pour ces catégories de travailleurs, comme le logement ou la nourriture, autant d'éléments qui rentrent dans ce que prévoit l'article 3 de la convention. Le gouvernement rappelle avoir déclaré, devant la Commission de l'application des normes de la Conférence, en 1998, qu'il n'existe aucun obstacle à ce que, dans la mesure où des organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs viendraient à voir le jour dans ces secteurs, la négociation collective soit encouragée et se concrétise, comme cela a été le cas avec l'apparition de conventions collectives pour les travailleurs ruraux entre 1996 et 1997. Pour conclure, le gouvernement déclare que: i) le système de fixation et de réajustement des salaires des travailleurs ruraux et des employés de maison donne effet à l'article 1, paragraphe 1, de la convention dans la mesure où il suppose l'établissement d'un système de salaires minima applicable à toutes les catégories de salariés dont les conditions d'emploi le permettent, étant entendu que, dans le cas contraire, ces catégories de salariés restent libres de négocier individuellement avec leurs employeurs; ii) il n'a lui-même justifié à aucun moment le système de fixation et de réajustement des salaires des employés de maison et des travailleurs ruraux sur la base des accords conclus dans le cadre du Marché commun du Sud (MERCOSUR); iii) la politique salariale en vigueur, conjuguée à d'autres mesures, a permis: a) d'abaisser l'inflation de 130 pour cent par an en 1991 à moins de 20 pour cent en 1997; b) d'abaisser le chômage de 12 pour cent en 1996 à 10 pour cent en mars 1997; et c) d'augmenter le pouvoir d'achat des salaires de 3,64 pour cent de 1993 à 1997.

8. La commission, prenant note de la réponse détaillée du gouvernement, rappelle qu'en vertu de l'article 4, paragraphe 2, de la convention, dans le cadre de l'établissement, de l'application ou de la modification des méthodes de fixation des salaires minima, tout Membre qui ratifie cet instrument doit prendre des dispositions afin que les organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs intéressées soient pleinement consultées ou, en l'absence de telles organisations, les représentants des employeurs et des travailleurs intéressés. Ces dispositions n'expriment pas l'obligation d'une négociation mais celle d'une consultation. En l'absence d'organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs, le gouvernement a l'obligation de consulter les représentants des employeurs et des travailleurs intéressés. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement adoptera prochainement les mesures nécessaires afin que les représentants des employeurs et des travailleurs intéressés soient consultés dans le cadre de l'établissement, de l'application et de la modification des salaires minima.

[Le gouvernement est prié de communiquer un rapport détaillé en 1999.]

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