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Demande directe (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Sri Lanka (Ratification: 1995)

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La commission prend note des informations fournies par le gouvernement dans son premier rapport.

Article 2 de la convention (exclusion de certaines catégories de travailleurs). La commission note que, en vertu de la Constitution, "Chaque citoyen jouit ... c) de la liberté d'association; d) de la liberté de constituer un syndicat et de s'y affilier" (art. 14 (1)). Le champ d'application de l'article 14 (1) c) peut être restreint "dans l'intérêt de l'harmonie raciale et religieuse ou de l'économie nationale" (art. 15 (4)), et celui de l'article 14, d'une manière générale, peut être restreint "dans l'intérêt de la sécurité nationale, de l'ordre public et de la protection de la santé ou de la moralité publique ..." (art. 15 (7)). Bien que toutes ces limitations ne semblent pas figurer dans l'ordonnance sur les syndicats, la commission prie le gouvernement d'indiquer si les personnes qui ne sont pas citoyennes de Sri Lanka sont protégées par les droits consacrés dans la convention et, si c'est le cas, dans quelle mesure elles le sont, de préciser de quelle manière les limitations prévues à l'article 15 de la Constitution sont appliquées et de fournir toute loi ou règlement pertinents.

La commission note en outre que l'ordonnance sur les syndicats, qui réglemente la constitution et le fonctionnement des syndicats, exclut certains groupes de son champ d'application, et indique qu'une association ou coalition de ces groupes n'est pas considérée comme syndicat (art. 20 (2)), lorsqu'il s'agit de fonctionnaires judiciaires, de membres des forces armées, d'officiers de police, de fonctionnaires de l'administration pénitentiaire et de toute administration établie dans le cadre de l'ordonnance sur les services de l'agriculture. La commission rappelle que la convention prévoit que les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'y affilier, à la seule exception éventuelle des membres des forces armées et de la police. Par conséquent, les fonctionnaires judiciaires, les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire et les membres d'administrations établies dans le cadre de l'ordonnance sur les services de l'agriculture devraient avoir le droit de constituer des organisations et de s'y affilier. Tout en notant l'indication du gouvernement selon laquelle cette restriction "est due à la nature très particulière de leurs fonctions, lesquelles sont considérées comme essentielles", la commission rappelle que le droit de grève peut faire l'objet de restrictions dans les services essentiels au sens strict du terme mais que cela ne devrait pas pour autant déboucher sur l'interdiction de se syndiquer. La commission prie le gouvernement de préciser si ces travailleurs peuvent s'organiser de quelque autre manière que ce soit pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels.

La commission note que, conformément à l'article 31 de l'ordonnance sur les syndicats, il faut être âgé de plus de 16 ans pour s'affilier à un syndicat. Elle prie le gouvernement d'indiquer s'il s'agit là de l'âge minimum requis pour accéder à l'emploi et elle rappelle que l'article 2 de la convention s'applique aux travailleurs, quel que soit leur âge. Ainsi, si une personne a atteint l'âge nécessaire pour travailler, elle devrait pouvoir aussi appartenir à un syndicat.

Droit des fonctionnaires publics de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier. La commission note que, d'une manière générale, aucune limitation n'est prévue en ce qui concerne le type de syndicats qui peuvent être constitués, à l'exception des syndicats d'"agents de la fonction publique". Le gouvernement indique dans son rapport que l'ordonnance sur les syndicats restreint l'enregistrement de syndicats de la fonction publique à moins qu'ils ne prévoient, entre autres dispositions, que seuls les agents publics qui sont employés dans un département ou service déterminé du gouvernement, ou qui appartiennent à une classe ou à une catégorie déterminée, pourront s'y affilier ou y remplir des fonctions (art. 21 (1) a)). Le gouvernement fait également mention du chapitre XXXV du Code des effectifs de la fonction publique qui restreint la possibilité pour les fonctionnaires publics de s'affilier à des syndicats a) en leur interdisant de devenir membres d'un syndicat de personnes n'appartenant pas à la fonction publique, et b) en interdisant à quiconque n'est pas fonctionnaire public d'être nommé à la direction ou au bureau du syndicat, ou d'être admis en tant que membre d'une organisation de fonctionnaires, sauf disposition contraire de l'ordonnance sur les syndicats. De l'avis de la commission, si on peut admettre que les organisations de base de fonctionnaires soient limitées à cette catégorie de travailleurs, c'est à la double condition: i) qu'il ne soit pas prévu simultanément que ces organisations de base doivent se limiter aux agents d'un ministère, d'un département ou d'un service particulier; et ii) qu'elles puissent librement s'affilier aux fédérations et confédérations de leur choix, y compris à des organisations de travailleurs du secteur privé. En revanche, les dispositions prévoyant l'obligation de créer des organisations distinctes pour chaque catégorie de travailleurs, comme le prévoit l'article 21, sont incompatibles avec le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier (voir l'étude d'ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective, 1994, paragr. 86). On notera toutefois que les personnes occupant un rang hiérarchiquement élevé et exerçant un rôle déterminant dans l'élaboration et la mise en oeuvre des grandes orientations ou politiques peuvent se voir limiter le droit d'adhérer ou d'appartenir à des syndicats ouverts à des salariés de grade inférieur (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 87 et 88). La commission prie donc le gouvernement de fournir davantage d'informations sur la définition, dans la loi et dans la pratique, de la notion de "fonctionnaire public", "officier de la paix" et "fonctionnaires" qui figure à l'article 21, et de réviser cette disposition afin de la rendre plus conforme aux exigences de la convention. La commission saurait également gré au gouvernement de communiquer copie du Code des effectifs de la fonction publique.

Représentativité. La loi sur les différends du travail introduit la notion de syndicat "suffisamment représentatif", cas dans lequel le champ d'application d'une convention collective en vigueur peut être étendu en vertu d'un arrêté ministériel (art. 10). La commission prie le gouvernement de préciser la manière dont la représentativité est déterminée dans la loi et dans la pratique. Elle rappelle qu'elle considère que la notion de syndicat le plus représentatif ne va pas à l'encontre du droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier, à condition que certaines conditions soient remplies, notamment que la détermination de l'organisation la plus représentative se fasse d'après des critères objectifs, préétablis et précis (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 97).

Article 3 (droit des organisations de travailleurs et d'employeurs d'élaborer leurs statuts et règlements). La commission note que l'article 47 de l'ordonnance sur les syndicats prévoit des procédures et des restrictions pour ce qui est de la gestion d'un fonds ou de versements à des fins politiques. La commission note en particulier qu'aucun bien appartenant à un syndicat qui ne fait pas partie du fonds politique ne peut être directement ou indirectement attribué à des fins politiques. La commission estime que cette disposition risque, dans la pratique, d'être appliquée de manière à restreindre toute une série de dépenses et qu'elle constitue donc une ingérence dans les affaires internes d'un syndicat. La commission invite le gouvernement à réexaminer sa législation afin de permettre une certaine souplesse et de réaliser un équilibre raisonnable entre, d'une part, l'intérêt légitime des organisations à exprimer leur point de vue sur les questions de politique économique et sociale intéressant leurs membres et les salariés en général et, d'autre part, le degré de séparation voulu entre l'action politique proprement dite et les activités syndicales (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 133).

Articles 3 et 10. Notant que la loi sur les différends du travail, qui prévoit des mécanismes de conciliation et d'arbitrage, ainsi que des procédures dans le cadre du tribunal professionnel et du tribunal du travail, ne s'applique pas à la fonction publique (art. 49), la commission prie le gouvernement de fournir des éclaircissements sur les mécanismes de règlement des conflits dans la fonction publique. Elle note que la loi susmentionnée prévoit d'une manière générale une conciliation obligatoire dans le cas d'un conflit du travail, ainsi qu'un arbitrage, avec l'accord des parties (art. 3). Toutefois, dans certaines situations, il peut être mis un terme à la grève par le biais d'un arbitrage ou d'un règlement obligatoire. L'article 40 indique que la grève constitue une infraction dans le cas où le différend du travail a été renvoyé pour règlement à une instance d'arbitrage ou à un tribunal professionnel. Quiconque commet une infraction au titre de la loi en question est passible d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement allant jusqu'à six mois, ou de ces deux sanctions (art. 43; voir également l'article 41). La commission note que l'article 4 (2) confère au ministre le pouvoir de soumettre un différend du travail à un arbitrage sans le consentement des parties, s'il estime que le différend est "d'importance secondaire". Ce libellé n'est pas défini et, de l'avis de la commission, il laisse au ministre une grande latitude pour soumettre un différend à arbitrage. Il ne semble pas qu'une procédure d'appel de la décision du ministre soit prévue. De même, il semble que le ministre jouisse de compétences encore plus amples au titre de l'article 4 (2) qui prévoit que le ministre peut "par un arrêté et par écrit, renvoyer pour règlement tout différend du travail à un tribunal professionnel".

A ce sujet, la commission rappelle l'importance qu'elle attache au droit de grève qui est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux. De l'avis de la commission, ce droit ne peut être limité, restreint ou interdit que dans des circonstances spécifiques, à savoir dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne, et pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 147, 158 et 159). D'après la commission, l'article 4 de la loi sur les différends du travail dépasse manifestement le cadre autorisé des restrictions. Elle prie donc le gouvernement de modifier la législation de façon à la rendre pleinement conforme aux exigences de la convention. En outre, notant que certaines des ordonnances sur la sécurité publique prises par le passé prévoient d'amples facultés pour restreindre les activités qui perturbent les "services essentiels", lesquels sont définis de manière plus ample que ce qui est admis par les organes de contrôle, la commission prie le gouvernement de préciser quelles ordonnances sur la sécurité publique sont en vigueur et, le cas échéant, d'en communiquer copie.

Article 4. La commission relève que, conformément à l'ordonnance sur les syndicats, le greffier peut retirer ou annuler un certificat d'enregistrement dans un certain nombre de cas; cette décision peut être contestée devant le tribunal de district et un appel ultérieur peut être interjeté devant la Cour d'appel (art. 15, 16 et 17). Toutefois, une fois que le retrait ou l'annulation a été effectué, même si un appel a été interjeté, le syndicat est considéré comme une association contraire à la loi et il cesse de jouir des droits, immunités ou privilèges d'un syndicat enregistré. Le syndicat n'est alors plus autorisé à prendre part à des grèves et il est disposé de ses biens conformément au règlement applicable (art. 18). La commission rappelle que la législation ne devrait pas permettre la dissolution ou la suspension d'une organisation par voie administrative; si elle l'autorise, l'organisation visée par de telles mesures doit pouvoir recourir devant un organe judiciaire indépendant et impartial qui a compétence pour examiner le cas quant au fond, et la décision administrative ne devrait pas pouvoir prendre effet avant qu'une décision finale soit rendue (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 184). La commission prie donc le gouvernement de modifier la législation de façon à ce que la décision du greffier des syndicats de retirer ou d'annuler l'enregistrement ne prenne pas effet tant que les procédures d'appel n'auront pas été épuisées.

Article 5. La commission note que, d'une manière générale, l'ordonnance sur les syndicats ne prévoit pas de limitation quant à l'établissement de fédérations. Toutefois, l'article 21 (1) b) prévoit que le greffier des syndicats doit refuser d'enregistrer tout syndicat d'agents de la paix ou de fonctionnaires à moins que les statuts du syndicat ne disposent que "le syndicat ne pourra pas s'affilier à un autre syndicat de fonctionnaires publics ou d'autres catégories de travailleurs, ni fusionner ou se fédérer avec un autre syndicat de ce type...". La commission note que cette disposition va à l'encontre de l'article 5 qui dispose que les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit de constituer des fédérations et des confédérations ainsi que celui de s'y affilier. La commission prie le gouvernement de prendre des mesures pour que cette disposition soit modifiée de manière à ce que toutes les organisations de travailleurs et d'employeurs aient le droit de constituer des fédérations et des confédérations, ainsi que celui de s'y affilier. Se référant à l'article 21 (1) a), la commission saurait gré au gouvernement de préciser si cette disposition, de quelque manière que ce soit, interdit aux syndicats de base de la fonction publique de s'affilier à des fédérations générales. A cet égard, la commission rappelle que, si l'on peut admettre que les organisations de base des agents de la fonction publique soient limitées à cette catégorie de travailleurs, elles devraient cependant pouvoir s'affilier librement aux fédérations et confédérations de leur choix, y compris celles regroupant également des organisations du secteur privé (voir étude d'ensemble, op. cit., paragr. 193).

La commission prie le gouvernement de la tenir informée dans son prochain rapport de toutes mesures prises ou envisagées pour mettre la législation en pleine conformité avec les dispositions de la convention.

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