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Observation (CEACR) - adoptée 1997, publiée 86ème session CIT (1998)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Nigéria (Ratification: 1960)

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La commission prend note de la déclaration faite par le représentant gouvernemental devant la Commission de la Conférence sur l'application des normes en juin 1997, des informations complémentaires données par le gouvernement à cette même instance, du débat qui a fait suite et du paragraphe spécial qui a été inclus dans le rapport de cette Commission de la Conférence pour défaut continu d'application de la convention. Elle note en outre avec un profond regret que l'examen du cas no 1793 par le Comité de la liberté syndicale (308e rapport, adopté par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997)) fait ressortir que le gouvernement n'a toujours pas accepté la proposition d'une mission de contacts directs. Enfin, elle note avec regret qu'il n'a été reçu aucun rapport du gouvernement sur l'application de la convention, malgré la demande formulée à ce sujet par la Commission de la Conférence.

I. Article 2: Droit, pour les syndicats et associations des personnels enseignants, de s'affilier aux organisations de leur choix. Dans ses précédents commentaires, la commission avait noté avec une profonde préoccupation que le décret sur les conflits du travail (libéralisation des services essentiels, proscription et interdiction de participer à des activités syndicales) et l'ordonnance du 21 août 1996 sur les conflits du travail (services essentiels) (proscription) interdisent de participer à toute activité syndicale du Syndicat des personnels non enseignants des établissements d'enseignement et établissements associés (NASU), du Syndicat des personnels enseignants des universités et de l'Association des dirigeants d'universités, hôpitaux universitaires, instituts de recherche et instituts associés, et que ces instruments portent dissolution du Conseil exécutif national et des conseils exécutifs de branche fonctionnant dans toute université du Nigéria, en violation des articles 2 et 4 de la convention. Elle prend note des indications du gouvernement selon lesquelles l'ordonnance précitée a dû être prise à la suite de la fermeture prolongée -- pendant plus de six mois -- des universités du pays et du refus, de la part du syndicat, de régler le conflit, situation qui a débouché sur une crise nationale et qui était contraire à l'article 8 de la convention.

S'il est vrai que le gouvernement indique par ailleurs que la reconnaissance syndicale a été rétablie en ce qui concerne le NASU par effet du décret no 26 de 1996, il semblerait que le gouvernement se réfère simplement au fait que le NASU soit inclus dans la liste des 29 syndicats restructurés affiliés à l'Organisation centrale du travail. La commission n'a pas connaissance d'un décret ultérieur abrogeant l'ordonnance de proscription de 1996 interdisant à trois syndicats universitaires l'exercice de toute activité syndicale. Elle prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que cette ordonnance soit abrogée afin de garantir, en ce qui concerne les trois syndicats précités, le droit d'exercer des activités syndicales et de constituer des organisations de niveau supérieur.

II. Article 2: Droit de constituer des organisations et de s'y affilier sans être exposé à une décision administrative de dissolution. En ce qui concerne la restructuration des 41 syndicats de branche enregistrés antérieurement en 29 syndicats affiliés à l'Organisation centrale du travail (désignée dans la législation par l'appellation de Nigerian Labour Congress (NLC) en conséquence de la promulgation du décret no 4 du 5 janvier 1996 (modificateur) sur les syndicats, la commission note que le gouvernement déclare avec insistance que ces mesures ont été prises en réponse à une démarche spontanée de la part de la NLC. Constatant que ce décret porte création d'un nombre déterminé de syndicats pour chaque catégorie professionnelle en fonction d'une liste préétablie, ce qui confirme davantage le système de monopole syndical, la commission rappelle que l'organisation ayant formulé cette demande est placée depuis 1994 sous la tutelle d'un administrateur désigné par le gouvernement. Elle rappelle que l'article 2 de la convention dispose que les travailleurs et les employeurs ont le droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier. En conséquence, elle prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier sa législation afin de donner pleinement effet à l'article 2 de la convention.

III. Article 3: Conditions d'éligibilité. En ce qui concerne la règle prévoyant que les dirigeants d'un syndicat doivent posséder une carte de membres titulaires et doivent exercer des fonctions dans la profession ou le secteur représenté par le syndicat sous peine d'une amende et/ou de cinq ans d'emprisonnement (art. 7 et 8 du décret no 26), la commission rappelle que, lorsque des dispositions prescrivent que les membres d'un syndicat doivent appartenir à la profession et que les dirigeants de l'organisation doivent être choisis parmi ses membres, il existe un risque réel d'ingérence de la part de l'employeur, par le biais du licenciement des dirigeants syndicaux, qui perdent, de ce fait, leur qualité de responsables syndicaux. De telles dispositions sont en outre incompatibles avec le droit, pour une organisation, d'élire ses représentants en toute liberté puisqu'elles empêchent des personnes qualifiées, telles que des permanents syndicaux ou des retraités, d'exercer des fonctions syndicales et privent ainsi le syndicat de l'expérience de certains dirigeants alors qu'il ne dispose pas en nombre suffisant de personnes compétentes dans ses propres rangs (voir étude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 117). La commission prie donc le gouvernement de modifier ces dispositions soit en admettant comme candidats des personnes ayant travaillé antérieurement dans la profession, soit en exonérant de la règle d'appartenance à la profession une proportion raisonnable des dirigeants d'une organisation.

IV. Article 4: Dissolution ou suspension d'une organisation par les autorités administratives. La commission ne peut que noter avec le plus profond regret que les décrets nos 9 et 10 d'août 1994 portant dissolution des conseils exécutifs du Congrès national du Nigéria, du Syndicat national des travailleurs du pétrole et du gaz naturel (NUPENG) et de l'Association des cadres nigérians du pétrole et du gaz naturel (PENGASSAN) n'ont pas été abrogés et que ces syndicats restent, depuis plus de trois ans aujourd'hui, toujours sous la tutelle d'un administrateur unique désigné par le gouvernement. Elle prie instamment le gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour rendre la législation et la pratique conformes aux dispositions de la convention, notamment en abrogeant les décrets susmentionnés et en rétablissant le droit, pour les organisations de travailleurs et les organisations d'employeurs, de constituer des organisations de leur choix et d'élire leurs représentants en toute liberté, sans ingérence de la part des pouvoirs publics.

En ce qui concerne l'article 8 du décret no 4 de 1996, qui prévoit qu'"aucune question quant à la validité de toute décision prise par toute personne ou autorité compétente en application de la présente loi ne saurait être soulevée devant aucune cour ou aucun tribunal du Nigéria", la commission prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles, dans le contexte de la Constitution nigériane et de la transition en cours vers le régime civil du gouvernement fédéral, les dispositions de ce décret découlent de la nécessité d'instaurer un climat propice à la sécurité, l'ordre et la moralité publics, qui constitue le terrain favorable d'une paix et d'une harmonie solides et durables du monde du travail à l'échelle du pays et contribue à l'évolution réussie du programme de démocratisation en cours au Nigéria. La commission note en outre que l'article 3 du décret no 26 du 16 octobre 1996 modifie également la loi sur les syndicats de sorte qu'il ne puisse être fait appel d'une décision d'annulation de l'enregistrement d'un syndicat que devant le ministre. Cette disposition suscite de profondes préoccupations, surtout lorsqu'elle est lue conjointement aux autres modifications apportées par ce décret, qui prévoient notamment que le ministre peut, pour des raisons dirimantes d'intérêt public, annuler le certificat d'enregistrement de tout syndicat recensé dans la liste annexée à la loi (art. 3) et qu'il peut, en vertu de l'article 7, annuler l'enregistrement d'un syndicat lorsqu'un membre non titulaire d'une carte exerce des prérogatives au sein de l'un quelconque des organes politiques ou décisionnels de ce syndicat.

Rappelant qu'en vertu de l'article 4 de la convention les organisations de travailleurs et d'employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative, la commission prie le gouvernement de modifier les décrets nos 4 et 26 en annulant les pouvoirs permettant au ministre de dissoudre des organisations et en permettant aux travailleurs et à leurs organisations de saisir les tribunaux de toute décision d'annulation ou de refus de leur enregistrement.

En ce qui concerne l'omission de la liste des syndicats enregistrés de quelque 25 syndicats de cadres et dix associations d'employeurs antérieurement reconnus et enregistrés, la commission note que, selon les indications du gouvernement, la liste figurant dans le troisième annexe au décret no 4 ne vise que les organisations affiliées au NLC et n'affecte en aucune façon l'enregistrement de syndicats de cadres ou d'associations d'employeurs.

V. Article 5: Affiliation internationale. La commission note avec regret l'adoption du décret no 29 de 1996 sur les syndicats (Affiliation internationale) qui, à l'instar d'un précédent décret de 1989, annule l'affiliation internationale de l'Organisation centrale du travail et de tous les syndicats enregistrés auprès d'une organisation internationale du travail ou du secrétariat professionnel d'une telle organisation, si ce n'est auprès de l'Organisation de l'unité syndicale africaine, de l'Organisation des travailleurs de l'Afrique de l'Ouest ou de toute autre organisation internationale du travail pour laquelle une demande expresse a été acceptée par le Conseil exécutif provisoire. Toute affiliation internationale subséquente est donc soumise à approbation préalable. En outre, toute infraction à ce décret peut être punie d'une peine allant jusqu'à cinq ans d'emprisonnement, tandis que le certificat d'enregistrement du syndicat en infraction sera annulé. La commission rappelle à cet égard que la solidarité internationale des travailleurs et des employeurs exige que leurs fédérations et confédérations nationales puissent se regrouper et agir librement sur le plan international, ce droit étant prévu aux articles 5 et 6 de la convention (voir étude d'ensemble de 1994, paragr. 198.) Elle prie donc le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation soit modifiée de manière à permettre à des organisations de travailleurs de s'affilier à des organisations internationales de leur propre choix, sans autorisation préalable.

[Le gouvernement est prié de fournir des données complètes à la Conférence à sa 86e session.]

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