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Observation (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Cuba (Ratification: 1965)

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La commission prend note du rapport du gouvernement et des informations qu'il contient en réponse à ses précédents commentaires, ainsi que de ses annexes.

1. Concernant le dossier cumulatif de l'étudiant "expediente acumulativo del escolar", la commission note qu'à la suite d'une enquête menée par le ministère de l'Education il a été reconnu nécessaire de simplifier ledit dossier afin que l'orientation du travail pédagogique corresponde à la qualité éducative requise. La commission a pris connaissance de la circulaire ministérielle adoptée suite à l'enquête, le 6 février 1993, et visant à donner des indications aux enseignants sur la manière de travailler avec le dossier cumulatif de l'étudiant; selon le gouvernement, les éléments ayant fait l'objet des commentaires de la commission ont été retirés. La commission prie le gouvernement de transmettre avec son prochain rapport une copie du nouveau modèle de dossier cumulatif de l'étudiant.

Conditions d'emploi

2. La commission prend note de l'adoption de la résolution no 1 du 5 janvier 1993 (transmise par le gouvernement et reçue le 8 octobre 1993) en vertu de laquelle est abrogée la résolution no 590 du 11 décembre 1980 qui fixait la liste de certains "mérites et démérites du travail" fondés sur des facteurs politiques, à porter au dossier professionnel du travailleur; en conséquence, les informations sur les mérites et démérites du travailleur sont retirées dudit dossier. A cet égard, la commission renvoie à son observation sous la convention no 29.

3. La commission rappelle que l'organisation syndicale CLAT avait allégué, le 19 février 1992, le licenciement de 14 professeurs d'université pour avoir exprimé leurs opinions politiques, conformément à leurs droits constitutionnels, dans une "Déclaration de principes" en huit points (qui appelle, notamment, au respect des droits de l'homme dans le pays, à l'ouverture de la société cubaine par la voie pacifique, à l'autonomie universitaire, à la démocratisation de la vie politique, à la liberté d'expression et de conscience à Cuba, en particulier au sein de l'université) transmise à leur autorité hiérarchique. La commission note que le gouvernement répond que les enquêtes effectuées à cet égard ont montré que ces enseignants avaient perdu les qualités essentielles requises pour l'enseignement et qu'il déclare que neuf des licenciés ont présenté des recours devant le ministre de l'Education supérieure qui ont reçu une fin de non-recevoir. La commission saurait gré au gouvernement de préciser ce qu'il entend par "qualités essentielles requises pour l'enseignement" et en vertu de quelle législation ces enseignants ont été révoqués, et d'indiquer aussi par quels mécanismes de recours, autres que celui devant le ministre de tutelle, ces travailleurs sont protégés contre toute pratique discriminatoire fondée sur un des critères de la convention.

4. La commission rappelle que selon la résolution no 590 du 4 décembre 1986 régissant le système d'inspection dans l'éducation le processus d'enseignement et les résultats obtenus doivent être (pour les objectifs comme pour les méthodes d'inspection) analysés du point de vue du Parti communiste de Cuba (art. 2) et évalués en tenant compte de leur contenu politique, idéologique et scientifique (art. 8). La commission avait estimé que ces critères pouvaient donner lieu à discrimination fondée sur l'opinion politique à la fois i) dans la formation des élèves et étudiants; ii) dans l'évaluation du travail des enseignants soumis à l'inspection; et iii) dans les conditions d'emploi et l'évaluation du travail des inspecteurs eux-mêmes.

En outre, le décret-loi no 34 du 12 mars 1980 fondé sur le principe que "les personnes qui sont liées aux jeunes dans le processus éducatif constituent un exemple pour la formation de leur personnalité communiste" permet de licencier des membres du personnel de l'enseignement supérieur et des institutions éducatives, et du personnel de tout établissement d'éducation en contact direct avec les élèves pour, entre autres motifs, "activités graves et manifestement contraires à la morale socialiste et aux principes idéologiques de la société". Les travailleurs concernés sont les techniciens, professeurs, maîtres, le personnel administratif ou des services qui sont en relation directe avec les élèves et des services qui comprennent le personnel technique de l'enseignement, même s'ils ne travaillent pas dans les établissements d'enseignement ou les institutions éducatives. La commission avait, dans ses précédentes observations, pris note de l'intention du gouvernement de modifier ces textes; elle note qu'il déclare, dans son dernier rapport, vouloir le faire en temps opportun pour répondre aux nécessités de les ajuster aux particularités sectorielles et de les adapter aux circonstances actuelles, et qu'à cette occasion il sera tenu compte des commentaires de la commission.

La commission a aussi examiné la résolution no 2 du 20 décembre 1989 qui traite de la réhabilitation des travailleurs de l'enseignement à qui le décret-loi no 34/80 a été appliqué. Elle note que les travailleurs ayant été licenciés pour l'une des activités énumérées dans le décret-loi no 34/80 ne pourront être réhabilités qu'après avoir effectué cinq ans de travail disciplinaire, période au cours de laquelle ils sont exclus du milieu enseignant.

La commission considère que la législation mentionnée sous ce point est rédigée en des termes très larges, susceptibles de donner lieu à des pratiques discriminatoires vis-à-vis de tout travailleur en contact éducatif avec la jeunesse, assorties de sanctions qui les excluent de leur emploi pendant une longue période. Elle estime que ces dispositions ne sont pas compatibles avec les principes de la convention et précise qu'elles ne pourraient l'être que si elles concernaient des qualifications nécessaires pour certains emplois impliquant des responsabilités particulières. Au paragraphe 126 de son Etude d'ensemble de 1988 sur l'égalité dans l'emploi et la profession, la commission a souligné que "certains critères peuvent être pris en considération pour des emplois déterminés en tant qu'exigences effectives de l'emploi concerné, mais ils ne peuvent, sans contrevenir au principe d'égalité de chances et de traitement, être pris en considération pour la totalité des emplois dans une profession, un secteur d'activité, et notamment dans la fonction publique". La commission prie le gouvernement de faire en sorte que ces textes législatifs soient abrogés dans un proche avenir, conformément à l'article 3 c) de la convention. Elle veut croire que le prochain rapport contiendra des informations sur des progrès à cet égard.

Evaluation des travailleurs

5. La commission rappelle que l'article 3 de la résolution no 50 du 21 septembre 1987, qui réglemente l'évaluation du travail des journalistes, énumère les indicateurs d'après lesquels sont évalués les résultats de leur travail, qui incluent "la portée politico-idéologique, économique et sociale de l'activité accomplie" (alinéa b)). La commission avait noté dans ses précédents commentaires que les résultats de l'évaluation affectent le salaire des travailleurs concernés puisqu'une évaluation qui n'est pas "positive" a pour effet de ramener le salaire à celui du niveau inférieur à celui d'avant l'évaluation (art. 27). En outre, l'évaluation biennale "non positive" des relations professionnelles d'une personne peut entraîner son licenciement (art. 28). Le gouvernement avait indiqué précédemment que le travail des journalistes est évalué uniquement en fonction de leurs qualifications et des résultats de leur travail, et son dernier rapport se limite à noter les commentaires de la commission d'experts avec un engagement d'envoyer toute modification à la résolution. De l'avis de la commission, les dispositions qui se réfèrent à des éléments idéologiques et politiques peuvent affecter à la fois l'accès et la sécurité de l'emploi ainsi que les conditions de travail. En conséquence, la commission prie de nouveau le gouvernement de retirer les éléments contenus à l'article 3 b) de la résolution no 50/87 des critères d'évaluation des journalistes afin qu'en droit comme en pratique ces travailleurs ne soient évalués qu'en fonction de leurs qualifications et des résultats de leur travail. La commission espère que le gouvernement pourra, dans son prochain rapport, informer la commission des mesures prises dans ce sens.

Accès à la formation

6. Faisant suite à ses précédents commentaires, la commission note que le gouvernement réitère ses déclarations antérieures relatives au système d'admission aux études postsecondaires ou supérieures et précise que chaque résolution régissant le système ne s'applique que pour une année universitaire. La commission a pris connaissance de la résolution no 1 du 11 février 1992 qui fait effectivement ressortir, comme le souligne le gouvernement dans son rapport, que les critères mentionnés dans ce texte pour l'accès à l'enseignement supérieur relèvent de la qualification des candidats démontrée par des contrôles d'évaluation basés sur l'indice académique de l'étudiant, lui-même déterminé par des examens. La commission avait noté dans sa précédente observation que, selon le gouvernement, le nouveau modèle de dossier retirait toute information étrangère au processus éducatif, et avait demandé au gouvernement des précisions sur le rôle joué à cet égard par le collectif des étudiants et le syndicat depuis la mise en place de ce nouveau modèle. La commission prie de nouveau le gouvernement de transmettre ces informations. En outre, elle le prie d'expliquer la nature des consultations prévues à l'article 20 de la résolution no 1/92 entre les autorités universitaires et, notamment, le Parti communiste de Cuba et le syndicat, et d'indiquer, dans le cadre de ces résolutions, que des critères autres que les critères de qualifications sont appliqués pour évaluer et, le cas échéant, exclure un candidat.

Accès à l'emploi

7. S'agissant de la fiche de contrôle personnel contenant des informations sur l'attitude morale et la conduite sociale du travailleur, la commission note la déclaration du gouvernement selon laquelle l'enquête générale sur les règlements internes établis par quelques entreprises a fait ressortir que les qualités morales et de conduite sociale requises d'une personne pour pouvoir être recrutée ne diffèrent pas de ce qui est exigé ailleurs, quels que soient le pays ou l'entreprise. Le gouvernement déclare que ces exigences s'inscrivent dans le cadre de relations professionnelles normales et qu'elles ne sont pas parmi les éléments prohibés par la convention. Cependant, le gouvernement fait part de son intention de poursuivre cette enquête et de procéder à la révision desdits règlements afin d'éliminer toute ambiguïté et ne pas aller à l'encontre des principes d'égalité contenus dans le Code du travail.

La commission souligne qu'en vertu de l'article 1, paragraphe 2, de la convention seules les distinctions, exclusions ou préférences fondées sur les qualifications exigées pour un emploi déterminé ne sont pas considérées comme des discriminations. Ainsi, dans son étude d'ensemble susmentionnée, la commission a rappelé, au paragraphe 126, que "si l'on peut admettre que, pour certains poste supérieurs directement en relation avec la mise en oeuvre de la politique gouvernementale, les autorités responsables tiennent généralement compte des opinions des intéressés, il n'en est pas de même lorsque des conditions d'ordre politique sont établies pour toutes sortes d'emplois publics en général ou certaines autres professions". En conséquence, la commission attire l'attention du gouvernement sur le fait que des exigences relatives aux qualités morales et de conduite sociale ne sauraient être acceptables que dans la mesure oû elles sont étroitement liées aux exigences du poste à pourvoir. La commission espère que la révision des règlements aura lieu dans un proche avenir et que le gouvernement sera en mesure de lui fournir des informations à cet égard dans son prochain rapport.

8. La commission note que le gouvernement répète que la résolution no 702 du 29 décembre 1981 du ministère de l'Education (qui prévoit des critères politiques et idéologiques pour l'affectation des diplômés) a été tacitement abrogée par l'adoption de la résolution no 51 du 12 décembre 1988 qui réglemente l'application de la politique de l'emploi, et dont le gouvernement a annoncé la révision dans des déclarations précédentes, le projet étant en discussion sur une base tripartite. Etant donné que le projet de règlement sur la politique de l'emploi définit, entre autres, le contenu du dossier professionnel, la commission saurait gré au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport oû en est ce projet et d'en fournir le texte dès son adoption.

9. Pour ce qui concerne les postes de l'administration de l'Etat, la commission note que ceux qui sont soumis au contrôle du Parti communiste de Cuba sont les postes qui correspondent à la structure institutionnelle établie par le décret-loi no 67 de 1983 sur l'Organisation de l'administration centrale de l'Etat, et qu'il s'agit seulement de certains postes politiques de haut niveau (ministre, vice-ministre, président, vice-président et quelques postes directoriaux déterminés par chaque organisme selon sa spécificité). La commission se réfère au paragraphe 126 de son étude d'ensemble, qu'elle a déjà mentionné ci-dessus, et rappelle que les exigences d'ordre politique doivent être limitées à certains postes supérieurs directement en relation avec la politique gouvernementale pour ne pas être contraires à la convention. La commission prie le gouvernement de continuer à la tenir informée de toute évolution qui surviendrait à cet égard.

10. La commission soulève d'autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.

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