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Observation (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Ratification: 1949)

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La commission prend note du rapport et des renseignements complémentaires communiqués par le gouvernement. Elle note également que de larges discussions ont eu lieu en 1992, au sein de la Commission de la Conférence, essentiellement au sujet de la situation au Centre gouvernemental des communications de Cheltenham (GCHQ). Elle prend également note des commentaires formulés par le Congrès des syndicats (TUC) dans plusieurs communications en 1992.

1. Licenciement de travailleurs au GCHQ

Dans sa précédente observation, la commission avait prié instamment le gouvernement de reprendre rapidement des discussions constructives susceptibles de déboucher, par la voie d'un réel dialogue, sur un compromis acceptable pour les deux parties sur cette question, qui a été examinée pour la première fois en 1985. A sa session de 1992, la Commission de la Conférence, tout en déplorant que certaines initiatives n'aient toujours pas abouti à un dialogue authentique, a pris bonne note de l'intention, exprimée par le gouvernement, de parvenir à une solution de ce problème; elle a exprimé le ferme espoir que cette déclaration serait rapidement suivie d'un dialogue substantiel, franc et constructif, mené de bonne foi, en vue de dégager une solution pleinement conforme à la convention.

La commission note qu'après la Conférence, lors d'un échange de lettres entre le TUC et le gouvernement, ce dernier a rappelé qu'il continuait d'attacher une importance fondamentale à la préservation de la sécurité et de la continuité des activités essentielles au GCHQ, et ne pouvait envisager dans la composition ou la représentation syndicale au sein de cet organisme aucune modification risquant de perturber son fonctionnement ou d'entraîner des conflits de loyauté pour le personnel. Tout en déclarant que rien ne garantissait qu'une solution acceptable aux deux parties pourrait être trouvée, le gouvernement a indiqué qu'il était disposé à étudier soigneusement toute proposition compatible avec sa position fondamentale. A cet égard, la commission a noté avec intérêt que, d'après le gouvernement, des réunions de haut niveau s'étaient tenues sur ce sujet en octobre 1992 et janvier 1993 entre le gouvernement et les syndicats, et que d'autres rencontres devraient normalement suivre.

La commission a noté également que la Fédération du personnel du centre gouvernemental des communications (GCSF), organisation de travailleurs acceptée par le gouvernement au GCHQ, s'est pourvue devant le Tribunal d'appel du travail (EAT) contre la décision de l'agent d'accréditation de ne pas lui accorder un certificat d'indépendance. L'EAT a débouté le GCSF dans sa décision du 10 décembre 1992.

La commission note avec intérêt une reprise du dialogue dans cette affaire et espère vivement qu'il permettra une issue positive, satisfaisante pour les deux parties. Elle invite le gouvernement à le tenir informé de l'évolution de la situation dans son prochain rapport.

2. Sanctions disciplinaires injustifiées (articles 64-67 de la loi de 1992)

La commission rappelle que ses précédents commentaires dans cette affaire concernaient les dispositions (article 3 de la loi de 1988) empêchant les syndicats de prendre des sanctions contre leurs membres qui refusent de participer à des grèves ou autres actions de revendication licites, ou qui cherchent à convaincre d'autres syndiqués de refuser de participer à une telle action. Dans sa précédente observation, la commission avait prié les parties de fournir des précisions sur la portée exacte de ces dispositions et sur leur application dans la pratique.

Dans son rapport, le gouvernement:

- confirme que les articles 64 à 67 de la loi de 1992 n'imposent aucune limitation sur le contenu des règlements d'un syndicat;

- déclare que les syndicats restent libres d'adopter les règlements de leur choix, sous réserve du respect des droits fondamentaux de l'homme et de la législation du pays, et qu'il considère donc normal que la législation comporte des dispositions empêchant qu'une personne soit exposée à des pressions ou à des sanctions excessives parce qu'elle a refusé d'agir en marge de la loi et contre ses convictions en rompant un contrat de travail auquel elle est partie;

- précise qu'à sa connaissance, depuis l'adoption de la loi de 1988, les tribunaux du travail ont été saisis de plus de 240 affaires concernant des syndicalistes qui alléguaient avoir été victimes de sanctions de ce genre (plaintes déclarées recevables dans 130 cas);

- cite des exemples de décisions judiciaires concernant certaines mesures disciplinaires prises à l'encontre de syndicalistes par leur syndicat pour avoir passé outre un piquet de grève.

Dans sa communication du 24 décembre 1992, le TUC déclare que les syndicats restent libres d'adopter leurs règlements quant aux sanctions disciplinaires à l'encontre des briseurs de grève, mais qu'ils ne peuvent pas légalement les faire observer. Le TUC donne également des exemples sur la façon dont la législation est appliquée dans la pratique.

La commission convient avec le gouvernement que, d'un point de vue technique, les articles 64 à 67 n'imposent aucune limitation directe ou explicite à la teneur des règlements d'un syndicat. Toutefois, l'article 66(1) autorise tout membre d'un syndicat à saisir un tribunal du travail au motif qu'il a subi une "sanction disciplinaire injustifiée" au sens de l'article 65(1), lequel vise notamment les mesures disciplinaires prises par un syndicat contre un syndiqué qui a traversé un piquet de grève tenu par des membres du même syndicat. Les décisions de justice expressément mentionnées par le gouvernement et le TUC montrent que, si les syndicats sont "libres" d'adopter les règlements de leur choix à cet égard, ils s'exposent à de lourdes peines pécuniaires s'ils les appliquent.

La commission estime que les dispositions en question privent les syndicats du droit d'exprimer leur insatisfaction à l'égard des membres qui refusent de suivre ou cherchent à renverser les décisions prises démocratiquement par les membres du syndicat de mener une grève ou d'autres actions de revendication licites. La commission prie le gouvernement de prendre sérieusement en considération le préjudice qui pourrait en résulter pour le fonctionnement normal des organisations de travailleurs dans le cadre du système de relations professionnelles en place. Elle l'invite à envisager de modifier les dispositions en cause, de façon à permettre aux syndicats d'exprimer réellement leur insatisfaction envers les membres qui refusent de suivre ou cherchent à renverser les décisions prises démocratiquement de mener une grève ou d'autres actions de revendication licites.

3. Indemnisation des syndicalistes et dirigeants syndicaux (article 15 de la loi de 1992)La commission rappelle que ses précédents commentaires à ce sujet concernaient les dispositions (article 8 de la loi de 1988) qui rendent illégale l'utilisation du patrimoine d'un syndicat pour dédommager une personne condamnée à une peine pécuniaire pour outrage à magistrat, et qui prévoient également la récupération par le syndicat de toute somme injustement versée au titre d'un tel dédommagement. Dans ses précédentes observations, la commission priait les parties de lui communiquer des informations sur l'application pratique de ces dispositions, notamment le texte de décisions judiciaires ou quasi judiciaires rendues dans ces domaines.

Dans son rapport le gouvernement:

- réaffirme que, lorsqu'une personne n'est que "l'agent" passif d'un syndicat, toute sanction pour acte délictuel est normalement infligée au syndicat mais que, lorsque cette sanction est infligée à une personne, cette décision implique que l'intéressé aura été jugé sans équivoque coupable d'un acte illégal délibéré;

- déclare que le libellé de la loi (qui mentionne explicitement l'utilisation des fonds d'un syndicat pour régler, en lieu et place d'une personne, une peine pécuniaire infligée pour "une infraction ou un délit d'outrage à magistrat") implique que ces dispositions ne sont applicables qu'au dédommagement d'une peine pécuniaire pour acte criminel ou délit d'outrage à magistrat;

- déclare qu'il n'existe pas à sa connaissance: 1) de décision aux termes de laquelle un tribunal aurait infligé une peine pécuniaire à une personne dans de telles circonstances; 2) de procédure judiciaire engagée par des syndiqués en vertu de l'article 15(3) de la loi de 1992 pour obtenir la possibilité de récupérer le montant d'un dédommagement illicite, au nom et aux dépens d'un syndicat.

Dans sa communication du 24 décembre 1992, le TUC déclare qu'il n'a pas connaissance d'affaires se rapportant à la disposition susmentionnée.

La commission prend dûment note de toutes les informations communiquées. Bien qu'il subsiste une incertitude quant à la signification et aux conséquences exactes de la distinction faite par le gouvernement entre les "agents passifs" et les personnes agissant à titre individuel, la commission note que, à ce jour, les tribunaux n'ont rendu aucune décision qui aurait confirmé les préoccupations qu'elle a exprimées antérieurement, à savoir que l'article 15 puisse, en pratique, être appliqué d'une manière contraire à la convention. La commission invite le gouvernement, dans ses futurs rapports, ainsi que le TUC, dans ses futures observations, à la tenir informée de l'application pratique de cette disposition.

4. Immunités contre la responsabilité civile découlant des grèves et autres actions de revendication (articles 223 et 224 de la loi de 1992)

La commission rappelle que ses précédentes observations à ce sujet concernaient les dispositions (article 4 et article 9(2) et (3) de la loi de 1990) levant l'immunité (ou, plus précisément, la "protection") qui pouvait antérieurement être invoquée dans le cas, notamment: a) de certaines formes "d'action secondaire" (c'est-à-dire d'une action conduite par des travailleurs n'étant pas en conflit avec leur propre employeur); b) d'actions de revendications exercées pour soutenir des salariés licenciés pour avoir participé à une action de revendication "non officielle". La commission avait formulé des commentaires à ce sujet en 1989 et 1991, et elle avait demandé au gouvernement en 1992 de lui fournir toutes précisions sur l'objectif et les effets de ces dispositions.

Renvoyant à ses précédentes réponses, le gouvernement souligne dans son rapport qu'aucune disposition de la convention ne permet selon lui de conclure que le fait d'organiser de telles actions ou d'y inciter devrait bénéficier d'une protection juridique.

La commission a examiné soigneusement la réponse élaborée du gouvernement, ainsi que les documents produits à l'appui de ses commentaires (destinés aux syndicats, aux employeurs et aux intéressés) expliquant en termes simples la situation juridique avant et après les modifications susmentionnées de la législation, ainsi que leurs implications. Désormais, il n'existe pas d'immunité pour l'organisation d'une action de revendication "secondaire" (appelée parfois action de "soutien" ou de "solidarité"), sauf s'il s'agit d'incitations exercées par des piquets de grève pacifiques. L'immunité a également été supprimée en cas d'actions de revendication organisées pour soutenir des salariés licenciés dans le cadre d'une action de revendication "non officielle".

La commission renvoie à l'analyse détaillée qu'elle avait faite en 1989 dans ses observations sur cette question, ainsi qu'à ses observations ultérieures, où avaient été décrites en détail les positions juridiques du gouvernement et du TUC. Pour pouvoir prendre une décision en pleine connaissance de cause, elle prie ces derniers de lui communiquer des renseignements sur l'application pratique des articles 223 et 224 de la loi de 1992 et, en particulier, de lui communiquer le texte de décisions judiciaires ou quasi judiciaires mettant en jeu l'application de ces dispositions.

5. Licenciements pour faits de grève et autres actions de revendication

En raison de la demande du gouvernement et du fait que certains aspects soulevés dans ce cadre peuvent relever d'autres instruments, la commission étudiera cette question lorsqu'elle examinera le prochain rapport du gouvernement sur l'application de la convention no 98. Elle prie le gouvernement et le TUC de lui communiquer entre-temps des précisions sur la situation en droit et en fait à cet égard, en lui communiquant notamment le texte de décisions judiciaires ou quasi judiciaires mettant en jeu l'application des dispositions pertinentes.

6. Complexité de la législation

Dans ses précédentes observations, la commission a exprimé sa préoccupation devant le volume et la complexité des modifications législatives intervenues depuis 1980 en relation avec les domaines couverts par la convention, préoccupation qui a été réaffirmée par les membres travailleurs lors de la Conférence de 1992.

La commission note avec intérêt que, conformément aux assurances données par le gouvernement lors de la Conférence de 1992, la loi de 1992 sur les syndicats et les relations professionnelles (codification) a été adoptée et est entrée en vigueur en octobre 1992. Ce document a le mérite de rassembler en un seul texte les principales dispositions en la matière. La commission espère que cette mesure, ainsi que les brochures gratuites publiées par le gouvernement, expliquant cette législation et son application aux employeurs, aux travailleurs et aux syndicats, contribueront à une meilleure compréhension de la législation par toutes les parties concernées.

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