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Demande directe (CEACR) - adoptée 1993, publiée 80ème session CIT (1993)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Eswatini (Ratification: 1978)

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La commission note les indications du gouvernement dans son rapport, reçu le 26 mars 1992, qu'un rapport détaillé sur les commentaires de la commission était en préparation conjointement avec la sous-commission tripartite du Conseil consultatif du travail.

La commission constate toutefois qu'aucun rapport n'a été envoyé depuis. La commission exprime à nouveau l'espoir que le gouvernement fournira, dans son prochain rapport, des informations détaillées sur les progrès réalisés en liaison avec les points suivants qui avaient déjà été soulevés.

1. Dans des commentaires formulés depuis plusieurs années, la commission a observé qu'en vertu de l'article 10 1) p) de la loi no 79 de 1950 sur l'administration du Swaziland, des arrêtés peuvent être édictés faisant obligation à tout Swazi de cultiver une terre de dimensions telles, et rapportant des récoltes telles, qu'elle assure en suffisance sa nourriture et celle des personnes à sa charge. La commission avait noté les indications du gouvernement selon lesquelles, aux termes de cet article, la nourriture ainsi produite demeure la propriété du travailleur. Elle avait néanmoins fait remarquer que l'article 19 de la convention n'autorise le recours aux cultures obligatoires que dans le dessein de prévenir la famine ou une disette de produits alimentaires, alors que, si l'article 11 de la même loi a un champ d'application limité à de tels cas d'urgence, il n'en est pas de même de l'article 10 1) p).

Dans son rapport pour la période se terminant le 30 juin 1987, le gouvernement a déclaré que l'article 10 1) p) a pour objet de prévenir la disette. Tout en réaffirmant qu'aux termes de cette disposition la nourriture produite demeure la propriété de l'intéressé le gouvernement a ajouté que cette disposition ne fait que refléter une tradition ancienne en vertu de laquelle il appartient au chef et, parfois, à la communauté responsable d'en disposer afin d'assurer que la population concernée mange à sa faim.

La commission a pris note de ces indications. Elle a observé que les pouvoirs des chefs, tels qu'ils découlent de l'article 11 de la loi, sont limités aux cas où "il se présente ou risque de se présenter une pénurie de vivres telle que la famine sévit ou menace de sévir", mais aucune limitation de cette nature ne concerne les arrêtés édictés aux termes de l'article 10 1) p). La commission espère par conséquent, compte tenu également de la pratique suivie, telle qu'elle est mentionnée par le gouvernement, que les mesures nécessaires seront prises pour mettre la législation en conformité avec la convention sur ce point, par exemple en insérant au début de ce dernier article les mots "lorsqu'il se présente ou risque de se présenter une pénurie de vivres telle que la famine sévit ou menace de sévir". Compte tenu d'autre part de la tradition à laquelle se réfère le gouvernement, il paraît en outre nécessaire de préciser la nature de la propriété de la nourriture produite, par exemple en insérant à l'article 10 1) p), après le mot "vivres" les mots "qui demeurent la propriété de l'intéressé".

La commission espère que le gouvernement sera en mesure d'indiquer dans son prochain rapport les modifications auxquelles il aura procédé dans ce texte.

2. La commission s'était aussi référée précédemment à l'article 10 l) q) de la loi précitée, aux termes duquel des arrêtés, obligatoires pour tout Swazi, peuvent être édictés pour prévenir l'érosion du sol et pour la protection et la construction d'ouvrages destinés à empêcher cette érosion, de même qu'à son article 10 l) u), aux termes duquel des arrêtés semblables peuvent être pris pour la construction, l'entretien et la protection des routes. La commission avait exprimé l'espoir que ces dispositions seraient modifiées afin que de tels arrêtés ne concernent que les menus travaux de village visés à l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, et le gouvernement avait indiqué dans son rapport reçu en 1982 que des mesures étaient en cours pour modifier l'article 10 l) de la loi en conséquence.

Dans son rapport pour la période se terminant le 30 juin 1987, le gouvernement a déclaré qu'il est fait appel aux dispositions de l'article 10 1) q) pour prévenir l'érosion du sol et encourager la population à s'adonner à l'agriculture, ce qui, à son avis, doit être assimilé à de menus travaux de village, compte tenu de la pénurie de vivres produits localement. Le gouvernement a ajouté que cette politique d'encouragement, connue sous le nom d'"EKHAYA", datant du début de 1985, a été favorablement accueillie par des personnes précédemment en chômage dans des zones urbaines et a pour objet, notamment, de rendre le pays moins dépendant des importations de vivres d'Afrique du Sud. En ce qui concerne l'article 10 l) u), le gouvernement a déclaré qu'il y a été recouru à la suite d'un cyclone en 1984, c'est-à-dire dans un cas de sinistre conformément à l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention, mais que cette disposition est tombée depuis lors en désuétude.

La commission a pris note de ces indications. Elle a cependant précisé que, dans sa teneur actuelle, l'article 10 l) q) et u) ne se limite pas aux exceptions visées à l'article 2, paragraphe 2 e) et d), de la convention, qui vise les menus travaux de village et les cas de force majeure. Au paragraphe 37 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, la commission a eu l'occasion d'appeler l'attention sur les trois critères qui déterminent les limites de l'exception visée à l'article 2, paragraphe 2 e), qui sont les suivants.

- il doit s'agir de "menus travaux", c'est-à-dire essentiellement des travaux d'entretien et, exceptionnellement, des travaux relatifs à la construction de certains bâtiments destinés à améliorer les conditions sociales de la population du village elle-même (petites écoles, salles de consultations et de soins médicaux, etc.);

- il doit s'agir de travaux "de village" effectués "dans l'intérêt direct de la collectivité" et non pas de travaux destinés à une communauté plus large;

- la population "elle-même", c'est-à-dire celle qui doit effectuer les travaux, ou ses représentants "directs", c'est-à-dire, par exemple, le conseil du village, doivent avoir "le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux".

Aucun de ces critères n'est contenu dans l'article 10 l) q) et u), car ni la portée géographique, ni l'étendue des services requis n'y sont limitées. Aux termes de l'article 10 l), les arrêtés peuvent être édictés par le roi en conseil et exécutés contre l'opposition du chef régional (art. 12), sans qu'une consultation de la communauté locale ou de ses représentants soit nécessaire. D'autre part, les alinéas q) et u) de cet article ne sont pas limités dans leur portée aux exigences de force majeure mettant en danger la vie ou les conditions d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population.

Pour ce qui est de la pratique suivie, la commission a noté, d'après le rapport du gouvernement, que l'article 10 l) q), bien que ne visant dans son énoncé que les travaux destinés à empêcher l'érosion du sol, a servi depuis 1985 au déplacement de personnes précédemment en chômage dans des zones urbaines et à leur affectation à des travaux agricoles afin que le pays soit moins dépendant des importations de vivres. Se référant, d'autre part, à ses commentaires formulés au point l) ci-dessus, la commission se doit de préciser que le travail obligatoire à de telles fins est contraire à la convention.

Etant donné les assurances données par le gouvernement selon lesquelles sa politique a été favorablement accueillie par les intéressés, la commission veut croire que le gouvernement s'appuiera désormais sur une main-d'oeuvre libre pour la production agricole aussi bien que pour la construction, l'entretien et la protection des routes, lorsque de tels travaux intéressent un groupe de populations plus étendu qu'une communauté locale, et que l'article 10 l) q) et u) sera modifié, comme l'a annoncé le gouvernement en 1982, de façon à assurer l'application de la convention. A cet égard, la commission a noté avec intérêt la déclaration du gouvernement selon laquelle des mesures sont prises pour incorporer dans la loi sur l'administration du Swaziland l'obligation des consultations, conformément à l'article 144 4) de la loi sur l'emploi, et elle espère que les exigences de l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, concernant le caractère mineur des travaux pouvant être exécutés, et la nécessité de leur intérêt pour la collectivité locale, seront également reprises dans la législation nationale.

La commission prie le gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures adoptées à cet effet et de fournir des informations détaillées sur la manière dont la politique dite "EKHAYA" est mise en oeuvre, en précisant le nombre de personnes intéressées, leurs agglomérations ou régions de résidence et leurs lieux d'affectation, ainsi que leurs droits et obligations.

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