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Demande directe (CEACR) - adoptée 1989, publiée 76ème session CIT (1989)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Canada (Ratification: 1972)

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La commission note le rapport détaillé du gouvernement en réponse à ses demandes précédentes et, en particulier, que des textes de lois importants dans le domaine du travail ont été adoptés dans plusieurs juridictions: au Fédéral: Loi sur les relations de travail des employés du Parlement, qui accorde aux employés du Parlement le droit de négocier collectivement; Alberta: Code des relations du travail (S.A. 1988, C.L-1.2; projet de loi 22) qui abroge et remplace la loi sur les relations de travail et la loi sur les négociations collectives dans l'industrie de la construction; Colombie britannique: Loi sur la réforme des relations professionnelles (S.B. C.1987, C.24, projet de loi 19); Loi sur la profession enseignante (Projet de loi 20); Québec: Loi assurant le maintien des services essentiels dans le secteur de la santé et des services sociaux (projets de loi 160 et 46). La commission note également que la Loi sur la construction au cours du sommet économique de Toronto (L.O. 1988, C.21) a interdit temporairement aux travailleurs de la construction en Ontario le droit de recourir à la grève durant le sommet économique qui s'est tenu en juin 1988, mais qu'une disposition de cette loi prévoyait son abrogation au 30 juin 1988 de telle sorte qu'il n'existe actuellement aucune interdiction particulière concernant les arrêts de travail dans l'industrie de la construction en Ontario.

Se référant à sa précédente demande directe, la commission formule les commentaires suivants.

1. Article 2 de la convention: syndicat nommément désigné dans la législation. Dans sa demande précédente, la commission avait formulé des commentaires sur la législation de trois provinces (île du Prince-Edouard - Loi de 1983 sur la fonction publique; Ontario et Nouvelle-Ecosse - Loi sur la profession enseignante), qui crée une situation de monopole syndical. La commission relève que ces provinces ont pris note de ses commentaires, qu'elles renouvellent leurs réponses précédentes et soulignent que, bien que ces lois ne semblent pas avoir produit les effets négatifs mentionnés par la commission, elles réexamineront la situation à la lumière de ses préoccupations. La commission ne peut que répéter, une fois encore, comme elle le fait depuis 1975 à l'égard de plusieurs textes de lois provinciales qui établissent une situation de monopole syndical en faveur d'un syndicat nommément désigné dans la législation, que cette situation est contraire à l'article 2. Même lorsque la situation semble être acceptée par toutes les parties en cause, il n'en demeure pas moins que toute référence à un syndicat par son nom ne favorise pas la création de nouveaux syndicats, freine le libre choix d'un travailleur pour le syndicat auquel il souhaiterait adhérer et restreint les activités des autres syndicats qui devraient au moins être en mesure, à l'avenir, de revendiquer les avantages que procure la législation en cause, notamment le droit de négocier collectivement.

La commission est d'avis que des amendements à la législation dans les trois provinces en cause devraient être introduits afin de mettre un terme à la question du syndicat nommément désigné, et elle demande au gouvernement de la tenir informée des développements intervenus sur le plan législatif à cet égard.

2. Article 3: lois spéciales visant à mettre fin à des grèves. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que plusieurs textes de loi avaient été adoptés pour mettre fin à des grèves dans plusieurs secteurs et juridictions: Colombie britannique: Loi sur l'assistance à la négociation collective dans les transport métropolitains; Loi sur le règlement des différends dans les chemins de fer; Ontario: Loi sur le règlement des différends pour la commission des transports, etc., de Toronto; Loi sur le règlement des conflits du travail dans les transports (Wheel-Trans); Loi sur le règlement des conflits du travail dans les collèges d'art appliqué et de technologie; Loi sur le règlement des différends pour le conseil de l'éducation et des enseignants du Comté de Wellington; Québec: Loi sur la reprise des services de transport dans certaines commissions scolaires; Saskatchewan: Loi sur le règlement des différends SGEU.

La commission note que ses commentaires précédents ont été portés à l'attention des gouvernements provinciaux, mais elle ne peut s'empêcher d'observer qu'au cours de la période examinée le gouvernement fédéral a lui-même adopté trois lois visant à mettre fin aux grèves déclenchées dans des domaines de compétence fédérale: Loi sur le maintien des services ferroviaires (S.C. 1987, C.36); Loi de 1987 sur le maintien des services postaux (S.C. 1987, C.40); Loi sur la manutention des grains à Prince Rupert (S.C. 1988, C.1). La commission note les explications générales fournies par le gouvernement dans ces trois cas, mais elle rappelle que si sa définition de services essentiels, services où le droit de grève peut être limité, voire interdit, a pour objectif d'assurer le respect d'un des moyens d'action fondamentaux dont les travailleurs doivent pouvoir bénéficier, la commission a toujours été sensible aux circonstances particulières entourant les diverses situations de grève portées à son attention. En particulier, elle a souligné que, lorsque l'étendue et la durée d'une grève risquant de provoquer une situation de crise nationale aiguë mettant en danger la vie ou le bien-être de la population, certaines limites à l'exercice du droit de grève peuvent être acceptables, telles que la mise en place d'un service minimum ou l'utilisation d'une main-d'oeuvre extérieure. La commission a fait observer dans de tels cas qu'une interdiction générale du droit de grève ne serait pas conforme à la convention et que, lorsqu'une grève est déclenchée, l'intervention des autorités devrait être limitée strictement aux circonstances dans lesquelles la poursuite d'une grève fait peser un danger clair et imminent, dans l'ensemble ou une partie de la population, sur la vie, la sécurité ou la santé de la personne. En conséquence, la commission exprime l'espoir que les gouvernements fédéral et provinciaux tiendront compte à l'avenir de ces considérations, et elle demande à être informée de toutes mesures prises pour donner plein effet à la convention sur ce point.

3. Colombie britannique, cas no 1430. La commission a pris note des conclusions du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1430 (voir le 256e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 240e session, mai-juin 1988). Après avoir considéré avec attention les conclusions et recommandations dans ce cas et les commentaires du gouvernement provincial, la commission note avec intérêt que les dispositions de la Loi sur les relations industrielles instituant un mécanisme d'arbitrage obligatoire ne sont pas entrées en vigueur, et formule les commentaires suivants:

a) Articles 137.95 et 137.96 de la Loi sur les relations professionnelles: critère de la "capacité de payer". Le gouvernement mentionne que le Comité de la liberté syndicale, en indiquant que les articles 137.95 et 137.96 subordonnaient l'entrée en vigueur d'une convention collective à une autorisation préalable (paragr. 183, cas no 1430), n'a pas établi de distinction entre l'approbation de conventions collectives négociées librement et la révision d'une sentence arbitrale par le commissaire du Conseil des relations professionnelles. Le gouvernement souligne ensuite que les employés du secteur public ont le droit de faire grève (à condition que les services essentiels soient assurés) pour appuyer leurs demandes et que les articles 137.97, 137.98 et 137.99, qui permettraient le recours à l'arbitrage obligatoire dans certaines circonstances, ne sont pas entrés en vigueur.

La commission prend note des commentaires du gouvernement, mais elle doit souligner que le point dont il est question ici n'est pas directement le droit de grève mais le critère de "la capacité de payer" qui, aux termes de l'article 137.96(2) de la Loi sur les relations professionnelles, constitue l'élément prédominant que les conseils d'arbitrage doivent considérer pour fixer les modalités et conditions d'une convention collective. Si un conseil d'arbitrage rend une sentence arbitrale non conforme au critère de "la capacité de payer", le commissaire peut, à la demande d'une partie (art. 137.96(10)(a)), recommander au conseil toute modification qu'il estime nécessaire pour satisfaire au critère ci-dessus mentionné. La décision du commissaire est sans appel.

La loi établit donc un système qui accorde au commissaire la possibilité de substituer sa propre décision à celle du conseil d'arbitrage s'il est d'avis que la sentence arbitrale doit être modifiée pour satisfaire au critère de "la capacité de payer". En pratique, cette procédure équivaut à une autorisation préalable.

b) Article 137.8(1)(b): services essentiels. La commission note les commentaires du gouvernement selon lesquels il a toujours eu et aura toujours recours à des consultations lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre les dispositions relatives aux services essentiels. Cependant, la commission souligne qu'à défaut d'accord entre les parties le Conseil des relations professionnelles peut en dernier recours désigner les services essentiels. La commission rappelle ses commentaires généraux sur cette question (Etude d'ensemble, paragr. 208-214): le droit de grève peut perdre tout son sens si les services essentiels sont définis trop largement; toute restriction à cet égard visant les employés des services essentiels devrait être compensée par des procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et rapides, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer; les décisions devraient être dans tous les cas obligatoires pour les deux parties.

c) Articles 137.9(7) et 137.97(8): sanctions disciplinaires en cas de refus d'obéir à un ordre de retour au travail. La commission note les commentaires du gouvernement selon lesquels, dans de telles circonstances, les employés peuvent avoir recours à une procédure d'arbitrage indépendante. Il est vrai qu'au sens strict les sanctions disciplinaires ne sont pas laissées à l'entière discrétion de l'employeur. Cependant, la mesure initiale qui peut conduire à l'imposition de ces sanctions ne doit pas elle-même être incompatible avec les principes inscrits dans la convention; d'où les commentaires figurant au paragraphe 190 de la décision du Comité de la liberté syndicale concernant les cas où un ordre de retour au travail peut être considéré conforme à la convention.

d) Article 4(1): interdiction législative des clauses de boycott de solidarité. La commission est consciente que, dans le cadre du système canadien tel qu'il existe maintenant, l'une des caractéristiques essentielles est l'interdiction des grèves et des lock-out durant la durée des conventions collectives et que, dans ce contexte, les boycotts de solidarité sont considérés comme des grèves déclenchées durant une convention, donc illégales. La commission n'a jamais traité la question des boycotts de solidarité proprement dits, mais elle tient à rappeler que, sur un problème connexe, à savoir les grèves de solidarité, elle a mentionné qu'on semble avoir recours de plus en plus fréquemment à ce type de mouvement en raison de la structure ou de la concentration des entreprises ou de la localisation des centres de travail dans les différentes régions du monde; la commission estime à ce propos qu'une interdiction générale des grèves de solidarité risquerait d'être abusive et que les travailleurs devraient pouvoir avoir recours à de tels mouvements pour autant que la grève initiale qu'ils soutiennent soit elle-même légale (Etude d'ensemble, paragr. 217).

En conclusion, la commission demande au gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport les mesures prises ou envisagées pour assurer que toutes restrictions au droit de grève soient conformes aux principes de la liberté sydnicale.

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