Visualizar en: Inglés - Español
Allégations: Les organisations plaignantes dénoncent une série de violations de
la liberté syndicale et du droit à la négociation collective à la suite de la fusion entre
deux organisations syndicales de l’industrie du sucre
- 139. La plainte figure dans une communication du Syndicat des
travailleurs du sucre, du miel, de l’alcool et des industries similaires du Honduras
(SITIAMASH) datée du 28 janvier 2020 et dans des communications de la Confédération
unitaire des travailleurs du Honduras (CUTH) datées du 7 mai et du 30 novembre
2021.
- 140. Le gouvernement du Honduras a fait parvenir ses observations sur les
allégations dans des communications datées du 6 août 2020 et du 12 janvier 2022.
- 141. Le Honduras a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 142. Dans une communication datée du 28 janvier 2020, le SITIAMASH
indique que, de leur propre initiative, le Syndicat des travailleurs des exploitations
sucrières du Nord et d’autres entreprises connexes du secteur Guanchias (SITRAZUNOSASG)
et le SITIAMASH ont décidé de procéder à une fusion à l’issue de laquelle le premier
syndicat, établi dans une entreprise et ses filiales (ci-après «le syndicat de groupe»),
est devenu une branche du second, qui est un syndicat sectoriel. L’organisation ajoute à
cet égard que: i) le SITIAMASH, principal syndicat des travailleurs du sucre du pays, a
été créé en 1959 et est affilié à la Fédération unie des travailleurs du Honduras, à la
Confédération unitaire des travailleurs du Honduras (CUTH) et à l’Union internationale
des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du
tabac et des branches connexes (UITA); ii) la fusion a été conforme à toutes les
procédures internes des deux organisations et réalisée dans le respect des formalités
administratives correspondantes, telles qu’énoncées dans la résolution no 012/2018 du
14 mars 2018 émise par le secrétariat d’État aux Bureaux du travail et de la sécurité
sociale (STSS); iii) à l’occasion de cette fusion, le SITIAMASH et le syndicat de groupe
se sont mis d’accord sur l’objectif consistant à conclure des conventions collectives
visant à garantir une vie digne et décente aux travailleurs du sucre et à lutter pour la
mise en place d’une seule convention collective dans l’industrie du sucre du Honduras;
et iv) avec l’accompagnement de l’inspection du travail et du représentant légal chargé
de la fusion, l’entreprise Azunosa (ci après «l’entreprise») a été informée de ladite
fusion, afin que celle-ci produise tous ses effets, notamment en ce qui concerne la
négociation collective et la déduction des cotisations syndicales au sein de
l’entreprise.
- 143. L’organisation plaignante déclare ensuite que, le 10 décembre 2018,
le syndicat de groupe a informé le STSS de sa scission unilatérale du SITIAMASH. Elle
précise à cet égard que: i) à aucun moment le SITIAMASH n’a été mis au courant de cette
démarche de scission, qui n’est pas régie par la législation du travail; ii) en
violation de la législation du travail, l’administration du travail, par la résolution
no 143/2018 du 10 décembre 2018 a immédiatement acté ladite scission sans que celle-ci
ne soit précédée d’aucune procédure administrative et sans exiger le respect de toutes
les obligations et formalités correspondantes, ce qui avait pourtant été imposé pour la
fusion; et iii) l’administration du travail a immédiatement reconnu un nouveau comité
exécutif pour le syndicat de groupe.
- 144. L’organisation plaignante fait en outre valoir que: i) les
travailleurs qui se sont opposés à ladite scission ont été licenciés; ii) l’entreprise a
refusé de recevoir la visite d’un inspecteur du travail à la suite de la réclamation
déposée par le SITIAMASH alléguant l’illégalité de ladite scission et des licenciements;
iii) l’entreprise n’a jamais respecté son obligation de remettre au SITIAMASH les
cotisations syndicales des travailleurs syndiqués à la suite de la fusion réalisée le
14 mars 2018; iv) dans ce contexte, le président du SITIAMASH a été persécuté et son
domicile a été placé sous surveillance; et v) l’avocate engagée par le SITIAMASH pour
mener à bien les démarches administratives et judiciaires liées à la procédure de fusion
syndicale et aux licenciements en question a été la cible d’une attaque le 11 janvier
2020, à l’occasion de laquelle plusieurs coups de feu ont été tirés sur son véhicule et
sa maison, sans qu’aucun dommage physique, fort heureusement, ne soit à déplorer.
- 145. Dans une communication datée du 7 mai 2021, la CUTH fournit des
éléments supplémentaires concernant les allégations présentées par le SITIAMASH. Elle
indique en particulier que: i) la fusion entre le syndicat de groupe et le SITIAMASH,
officiellement enregistrée par l’administration du travail le 14 mars 2018, résulte
d’une décision de l’assemblée générale du syndicat de groupe prise le 26 août 2017, qui,
à ce moment-là, n’a suscité aucune opposition ni de la part de l’entreprise ni de la
part de l’administration du travail; ii) à l’issue de la fusion, le syndicat de groupe
est devenu la section Guanchias du SITIAMASH; iii) le 21 mai 2018, la section Guanchias
du SITIAMASH a soumis à l’entreprise un cahier de revendications concernant tous les
travailleurs exerçant leurs fonctions sur le site de l’entreprise, c’est-à-dire à la
fois ceux employés directement par l’entreprise et ceux employés par l’intermédiaire
d’entreprises de sous-traitance; iv) comme indiqué dans plusieurs rapports d’inspection,
l’entreprise a refusé d’engager les pourparlers demandés à plusieurs reprises par le
SITIAMASH; v) en violation de la loi, l’administration du travail a refusé de désigner
un médiateur, contrairement à ce que demandait le SITIAMASH; vi) le 4 novembre 2018,
l’entreprise, avec la complicité de certains travailleurs de confiance et sans chercher
à négocier avec le SITIAMASH, a créé un comité exécutif parallèle pour le syndicat de
groupe qui n’existait plus, en faisant valoir que ce comité avait été nommé par
l’assemblée générale du syndicat, qui avait pourtant déjà fusionné avec le SITIAMASH,
conformément à une décision prise, justement, par son assemblée générale; vii) par la
suite, le nouveau comité exécutif parallèle, sans l’autorisation de l’assemblée
générale, a entamé une procédure de scission, sans en informer dûment le SITIAMASH et en
dissimulant cette démarche aux membres de la section Guanchias de ce dernier; viii) en
l’espace de trois mois, l’entreprise a négocié avec ce comité exécutif cinq conventions
collectives, qui ont été enregistrées par le ministère du Travail et de la Sécurité
sociale comme des conventions collectives conclues avec des entreprises sous-traitantes
de l’entreprise; ix) le 9 juillet 2019, l’entreprise a licencié MM. Gustavo Alberto
Quiroz Baquedano, Francisco Enrique Mendoza Canales, Rubén Darío Umanzor, Maynor José
Ponce, Rony Alexis Cruz et José Magdaleno Benítez, travailleurs qui composaient
justement le comité exécutif de la section Guanchias du SITIAMASH; x) près de deux ans
après avoir déposé plainte pour non-respect de l’immunité syndicale des dirigeants
susmentionnés, les sanctions prévues par la loi relative à l’inspection du travail ne
sont toujours pas appliquées; xi) les membres de la section Guanchias du SITIAMASH ont
fait l’objet de pressions, de menaces de licenciement, ainsi que d’offres d’emploi et
d’avantages économiques pour qu’ils se désaffilient et rejoignent le syndicat géré par
l’entreprise, dans le cadre d’une campagne permanente d’intimidation consistant
notamment à placer des gardes de sécurité armés dans les zones de travail afin qu’ils
surveillent et harcèlent les membres de la section Guanchias; et xii) le 30 août 2019,
le STSS a été saisi d’une réclamation visant à s’opposer à l’enregistrement des
conventions collectives susmentionnées au motif que le syndicat de groupe manquait de
représentativité juridique et constituait une organisation syndicale parrainée par
l’employeur.
- 146. Sur la base des faits décrits ci-dessus, l’organisation plaignante
fait valoir que: i) étant donné que le syndicat de groupe a légalement et dûment
fusionné avec le SITIAMASH, l’élection d’un nouveau comité exécutif pour ce syndicat de
groupe, qui n’existe alors plus, constitue un mécanisme de création d’un syndicat
parallèle, contraire aux intérêts des travailleurs défendus au sein de l’assemblée qui a
autorisé la fusion en question; et ii) l’élection du comité exécutif du syndicat
parrainé par l’entreprise et agissant parallèlement à la section Guanchias du SITIAMASH,
ainsi que l’enregistrement des conventions collectives constituent des actes
administratifs illégaux puisque le SITIAMASH n’a jamais été convoqué ni par le syndicat
de groupe ni par le STSS et que la négociation des conventions collectives s’est
déroulée sans la présence de représentants de la section Guanchias du SITIAMASH.
- 147. Dans une communication datée du 30 novembre 2021, la CUTH dénonce
une escalade des actes de harcèlement, d’intimidation, de menaces et de persécution à
l’encontre des dirigeants de la section du SITIAMASH présente au sein de l’entreprise.
Elle dénonce en particulier: i) le licenciement injustifié, le 29 octobre 2021, de
M. Carlos Rivera, secrétaire général de la section du SITIAMASH au sein de l’entreprise;
et ii) les menaces de licenciement à l’encontre des autres travailleurs de l’entreprise
s’ils restent affiliés au SITIAMASH.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 148. Dans une communication datée du 6 novembre 2020, le gouvernement
déclare que l’État du Honduras respecte les conventions nos 87 et 98 et qu’il s’abstient
d’interférer dans tout type d’activité menée par des organisations syndicales. Le
gouvernement note en particulier que: i) le STSS a enregistré la fusion du syndicat de
groupe et du SITIAMASH, par la résolution no 012/2018 du 14 mars 2018, et que les
informations correspondantes figurent dans les registres de la Direction générale du
travail, au département des organisations sociales; ii) toutefois, les registres de cet
organisme ne contiennent pas de renseignements sur les lieux où le SITIAMASH dispose de
sections; iii) la Direction générale du travail ne dispose pas non plus d’éléments
attestant de l’annulation de la personnalité juridique du syndicat de groupe, de sorte
que ladite personnalité juridique reste en vigueur; iv) le 29 novembre 2018,
M. Montenegro Orellana s’est présenté devant la Direction générale du travail pour
communiquer la composition du nouveau comité exécutif du syndicat de groupe; v) étant
entendu que les pouvoirs publics doivent s’abstenir de toute intervention susceptible de
limiter le droit des organisations de gérer leur administration, la Direction générale
du travail a acté la composition du nouveau comité exécutif du syndicat de groupe au
moyen de la résolution no 143/2018 du 10 décembre 2018; vi) par un courrier recommandé
daté du 15 décembre 2018, le comité exécutif du syndicat a porté à la connaissance de la
Direction générale du travail sa décision de se séparer du SITIAMASH; et vii) par un
arrêté daté du 17 janvier 2019, la Direction générale du travail a pris acte de la
décision du syndicat et, compte tenu du type de demande et dans le strict respect de
l’autonomie syndicale, aucune procédure administrative n’a été engagée.
- 149. Le gouvernement déclare ensuite que le syndicat de groupe a
enregistré et déposé six conventions collectives conclues avec différentes entreprises
(Servicios Agrícolas de Soldaduras y Derivados de Montajes Estructuras Metálicas;
Empresa Agrícola EMMODEI; Servicios Múltiples Tilos; Empresa de Operaciones de
Industrias Metálicas; Servicios Múltiples Martínez, et Empresa Agrícola (ESAO)). Il
indique que le SITIAMASH a déposé des recours contre trois de ces conventions
collectives, lesquels sont actuellement examinés dans le cadre des procédures
administratives applicables. Dans la mesure où les conventions collectives
susmentionnées ont été conclues dans le cadre de négociations directes, le STSS n’est
jamais intervenu dans la négociation entre le syndicat de groupe et les entreprises
concernées. Le gouvernement ajoute enfin que les licenciements présumés de dirigeants du
SITIAMASH et la persécution dont le président de cette organisation aurait été victime
font actuellement l’objet d’une enquête et qu’il n’a pas connaissance des éléments
concernant les cotisations syndicales évoqués dans les allégations.
- 150. Par une communication datée du 12 janvier 2022, le gouvernement
confirme que la fusion entre le syndicat de groupe et le SITIAMASH résulte d’une
décision de l’assemblée générale du syndicat de groupe prise le 26 août 2017 et
enregistrée par l’administration du travail le 14 mars 2018. Il souligne que cette
fusion constitue un acte propre à l’organisation syndicale. En ce qui concerne
l’allégation selon laquelle le STSS a rejeté la demande présentée par le SITIAMASH en
vue de la désignation d’un médiateur chargé de lancer les négociations avec l’entreprise
sur le cahier de revendications soumis par le SITIAMASH, le gouvernement indique que les
requérants n’ont pas rempli les conditions juridiques requises pour engager une
médiation, puisqu’il faut d’abord démontrer que la procédure de règlement direct a été
épuisée.
- 151. S’agissant de l’enregistrement du nouveau comité exécutif du
syndicat de groupe, le gouvernement indique à nouveau que, bien que le STSS ait été
informé de la fusion du syndicat de groupe avec le SITIAMASH, il n’est fait aucune
mention dans les registres de la Direction générale du travail de l’annulation de la
personnalité juridique du syndicat de groupe, ce qui explique que la demande
d’enregistrement du nouveau comité exécutif n’ait pas pu être refusée. Il ajoute que,
pour ce qui est des conventions collectives signées par le syndicat de groupe, le STSS
n’est aucunement intervenu et, conformément au principe de bonne foi et d’autonomie
collective, s’est contenté d’enregistrer les conventions collectives signées, car elles
étaient conformes à la législation en vigueur.
- 152. Le gouvernement réaffirme ensuite que, de la même manière, il n’a
fait que prendre acte de la décision du syndicat de groupe de se séparer du SITIAMASH,
soulignant que le STSS ne fait preuve d’ingérence dans aucune organisation syndicale. Il
indique que, dans le présent cas, la scission est la conséquence d’un conflit interne à
l’organisation syndicale et que le règlement de ce type de différend relève de la
compétence des conseils de conciliation et d’arbitrage.
- 153. En ce qui concerne les licenciements des membres du comité exécutif
de la section Guanchias du SITIAMASH, le gouvernement signale que, conformément à
l’article 516 du Code du travail, toute violation de l’immunité syndicale doit être
prouvée devant le tribunal du travail correspondant. Il ajoute que l’organisation
plaignante présente des allégations contradictoires puisque, d’une part, elle mentionne
que l’inspection du travail a constaté les licenciements en question et, d’autre part,
elle allègue des retards dans l’action entreprise par le STSS. S’agissant des
allégations de pressions et de menaces à l’encontre des membres de la section Guanchias
du SITIAMASH, le gouvernement déclare que les plaignants n’indiquent pas précisément qui
sont les auteurs de ces pressions et comment celles-ci ont été exercées.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 154. Le comité observe que le présent cas porte sur des allégations de
violations de la liberté syndicale et du droit de négociation collective dans une
entreprise du secteur sucrier à la suite de la fusion entre une organisation syndicale
établie dans une société du secteur et ses filiales (ci-après le «syndicat de groupe»)
et une organisation syndicale sectorielle, le SITIAMASH. Le comité note que les
organisations plaignantes dénoncent notamment: i) la création d’un syndicat parallèle
qui bénéficie du soutien de l’entreprise, moyennant l’enregistrement irrégulier d’un
comité exécutif du syndicat de groupe alors que ce dernier avait déjà fusionné avec le
SITIAMASH et, par la suite, la séparation irrégulière du syndicat de groupe du
SITIAMASH; ii) l’entrave à la négociation collective menée par la section du SITIAMASH
et l’enregistrement irrégulier de conventions collectives signées par le nouveau comité
exécutif du syndicat de groupe; iii) le licenciement des dirigeants de la section du
SITIAMASH et de son secrétaire général; et iv) les menaces et les actes de violence
antisyndicale à l’encontre du président du SITIAMASH et de l’avocate qui conseille le
SITIAMASH. Le comité note par ailleurs que le gouvernement déclare qu’il respecte
pleinement l’autonomie des syndicats, que l’administration du travail n’a procédé à
aucun acte d’ingérence en faveur de l’un des syndicats concernés par le présent cas et
que l’inspection du travail a rempli ses obligations en ce qui concerne les faits
allégués.
- 155. S’agissant des relations entre le syndicat de groupe et le
SITIAMASH, le comité note que, sur la base des éléments communiqués par les parties, les
faits se seraient déroulés selon la chronologie suivante: i) réuni en assemblée générale
le 24 août 2017, le syndicat de groupe a décidé de fusionner avec le SITIAMASH;
ii) ladite fusion a été enregistrée par l’administration du travail au moyen d’une
résolution datée du 14 mars 2018; iii) le 21 mai 2018, la section du SITIAMASH a soumis
à l’entreprise un cahier de revendications concernant les conditions de travail de tous
les travailleurs exerçant leurs fonctions sur le site de l’entreprise; iv) en novembre
2018, la composition d’un comité exécutif pour le syndicat de groupe a été communiquée,
alors que celui-ci avait fusionné avec le SITIAMASH, fusion enregistrée par le STSS au
titre de la résolution no 143/2018 du 10 décembre 2018; v) le 15 décembre 2018, le
syndicat de groupe a informé le STSS de sa séparation du SITIAMASH et l’administration
du travail a pris acte de cette décision moyennant un arrêté daté du 17 janvier 2019; et
vi) le syndicat de groupe a conclu au cours des mois suivants une série de conventions
collectives avec plusieurs entreprises sous-traitantes de l’entreprise.
- 156. Le comité note que les organisations plaignantes font notamment
valoir que: i) la réactivation du syndicat de groupe par des travailleurs de confiance
de l’entreprise avait pour but de créer, avec le soutien de l’administration du travail,
un syndicat contrôlé par l’entreprise, parallèlement à la section du SITIAMASH;
ii) l’administration du travail n’aurait pas dû enregistrer le nouveau comité exécutif
du syndicat de groupe puisque celui-ci n’existait plus après sa fusion avec le
SITIAMASH; et iii) la démarche de scission du syndicat de groupe, dont le SITIAMASH n’a
pas été informé et qui a été immédiatement enregistrée par l’administration du travail,
n’a pas été soumise aux exigences qui avaient encadré la fusion entre les deux
organisations syndicales.
- 157. Le comité note que, pour sa part, le gouvernement déclare que: i) si
l’administration du travail a enregistré la fusion du syndicat de groupe avec le
SITIAMASH, ses registres ne font pas état ni de l’annulation de la personnalité
juridique du syndicat de groupe ni des lieux où le SITIAMASH dispose de sections;
ii) conformément au principe de non-ingérence, le gouvernement s’est contenté
d’enregistrer les différentes décisions qui lui ont été transmises par les organisations
syndicales; iii) l’administration du travail a été informée de la décision de se séparer
du SITIAMASH prise par l’assemblée générale du syndicat de groupe; et iv) compte tenu du
type de demande dont elle avait été saisie et dans le strict respect de l’autonomie
syndicale, l’administration du travail a considéré avoir été informée de cette décision
et aucune procédure administrative de quelque nature que ce soit n’a été engagée à cet
égard.
- 158. Le comité observe que, d’après les éléments ci-dessus, il existe un
différend sur la légitimité et la validité de la désignation d’un comité exécutif pour
le syndicat de groupe après sa fusion avec le SITIAMASH et sur la séparation du syndicat
de groupe du syndicat sectoriel en question. Le comité observe que de l’avis du
gouvernement, la situation en question reflète l’existence d’un conflit interne au
mouvement syndical alors que les organisations plaignantes estiment que celle-ci traduit
l’existence d’ingérences ayant pour but de promouvoir la mise en place d’un syndicat
contrôlé par l’entreprise, dans un contexte marqué par des actes antisyndicaux visant
les dirigeants du SITIAMASH. Le comité rappelle, d’une part, qu’il a insisté sur le
principe fondamental de libre choix des organisations par les travailleurs et la
non-ingérence de l’entreprise en faveur d’un syndicat et que le respect des principes de
la liberté syndicale suppose que les autorités publiques fassent preuve d’une grande
retenue en ce qui concerne toute intervention dans les affaires internes des syndicats.
Il est plus important encore que les employeurs se comportent avec circonspection à cet
égard. Ils ne devraient rien faire, par exemple, qui puisse être interprété comme
favorisant un groupe au détriment d’un autre au sein d’un syndicat. [Voir Compilation
des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 1190 et
1193.] Le comité rappelle, d’autre part, qu’il a considéré qu’il n’appartient pas au
comité de se prononcer sur des conflits internes à une organisation syndicale, sauf si
le gouvernement est intervenu d’une manière qui pourrait affecter l’exercice des droits
syndicaux et le fonctionnement normal d’une organisation et que, lorsqu’il se produit
des conflits internes au sein d’une organisation syndicale, ils doivent être réglés par
les intéressés eux-mêmes (par exemple par un vote), par la désignation d’un médiateur
indépendant avec l’accord des parties intéressées, ou par les instances judiciaires.
[Voir Compilation, paragr. 1613 et 1621.] Tout en constatant qu’il n’a pas été informé
d’initiatives visant à trouver une solution interne aux organisations concernées, le
comité observe qu’il ressort des annexes fournies par les organisations plaignantes que
le SITIAMASH a intenté une action en justice pour obtenir la dissolution du syndicat de
groupe. Le comité prie donc le gouvernement et les organisations plaignantes de
l’informer de l’issue de cette démarche, ainsi que de toute autre action en justice
éventuelle que le SITIAMASH aurait entreprise au sujet des allégations d’irrégularités
concernant la séparation du syndicat de groupe du SITIAMASH, soulevées par les
organisations plaignantes.
- 159. En ce qui concerne les allégations relatives à la négociation
collective avec l’entreprise et ses filiales, le comité note que les organisations
plaignantes font valoir que: i) l’entreprise a refusé de négocier le cahier de
revendications soumis en mai 2018 par le SITIAMASH en vue de réglementer les conditions
de travail de tous les travailleurs exerçant leurs fonctions sur le site de
l’entreprise, qu’ils soient employés directement par l’entreprise ou par ses filiales;
ii) l’administration du travail a refusé de désigner un médiateur, contrairement à ce
que demandait le SITIAMASH; iii) au lieu de cela, l’administration du travail a
enregistré au début de l’année 2019 une série de conventions collectives conclues par le
syndicat de groupe avec plusieurs filiales de l’entreprise sans que le SITIAMASH et sa
section n’aient été associés à la procédure de négociation collective; et iv) le
SITIAMASH a saisi l’administration du travail pour s’opposer à l’enregistrement des
conventions collectives susmentionnées au motif que le syndicat de groupe manquait de
représentativité juridique et constituait une organisation parrainée par l’employeur. Le
comité note que, pour sa part, le gouvernement déclare que: i) le SITIAMASH n’a pas
rempli les conditions juridiques requises pour la désignation d’un médiateur, car il n’a
pas démontré qu’il avait épuisé la procédure de règlement direct avec l’entreprise;
ii) le SITIAMASH a déposé des recours administratifs pour s’opposer à trois des six
conventions collectives négociées et signées par le syndicat de groupe; et
iii) conformément au principe de l’autonomie collective et après avoir vérifié la
légalité des conventions collectives signées par le syndicat de groupe, l’administration
du travail a procédé à leur enregistrement.
- 160. Le comité prend bonne note des éléments communiqués tant par les
organisations plaignantes que par le gouvernement. Il note en particulier que: i) les
organisations plaignantes font valoir que le SITIAMASH n’a pas été associé aux démarches
de négociation collective entamées au début de l’année 2019 par le syndicat de groupe,
une organisation qui, selon elles, manque de représentativité juridique et de
l’indépendance nécessaire; et ii) les organisations plaignantes déclarent que le
SITIAMASH a présenté, en août 2018, un cahier de revendications concernant les
travailleurs de l’entreprise et de ses filiales, un élément qui n’a pas été réfuté par
le gouvernement. À cet égard, le comité rappelle qu’il a considéré que la détermination
des organisations susceptibles de signer seules des conventions collectives devrait être
établie sur la base d’un double critère, celui de la représentativité et celui de
l’indépendance. Selon le comité, les organisations répondant à ces critères devraient
être déterminées par un organisme présentant toutes garanties d’indépendance et
d’objectivité. [Voir Compilation, paragr. 1374.] Le comité observe également que,
conformément à l’article 54 du Code du travail du Honduras, si plusieurs syndicats sont
présents au sein d’une même entreprise, la convention collective doit être conclue avec
celui qui compte le plus grand nombre de travailleurs. Notant que le gouvernement
indique que le STSS a constaté la légalité des conventions collectives dont
l’enregistrement a donné lieu à un recours administratif de la part du SITIAMASH, le
comité prie le gouvernement de préciser les critères retenus par le STSS pour établir la
plus grande représentativité et indépendance du syndicat de groupe. Il prie en outre les
organisations plaignantes d’indiquer si les décisions susmentionnées de l’administration
du travail ont été contestées devant les tribunaux.
- 161. En ce qui concerne l’allégation de licenciements antisyndicaux des
dirigeants de la section Guanchias du SITIAMASH, le comité note que l’organisation
syndicale soutient que: i) six dirigeants de la section Guanchias ont été licenciés le
9 juillet 2021; ii) deux ans après avoir déposé plainte pour violation de l’immunité
syndicale, les sanctions prévues par la loi ne sont toujours pas appliquées; et
iii) Carlos Rivera, secrétaire général de la section Guanchias, a été licencié de
manière injustifiée le 29 octobre 2021. Le comité note en outre que le gouvernement:
i) a indiqué dans sa première communication que les licenciements de juillet 2019
faisaient l’objet d’une enquête; ii) a fait savoir dans sa deuxième communication que
l’inspection du travail avait constaté les licenciements et que, étant donné qu’il
s’agissait d’une plainte pour violation de l’immunité syndicale, la question relevait
des tribunaux du travail; et iii) n’a pas fait mention du prétendu licenciement
injustifié du secrétaire général de la section du SITIAMASH. Le comité observe en outre
qu’il ressort des documents et annexes fournis par les organisations plaignantes que:
i) dans un courrier daté du 10 août 2019 adressé à l’inspection du travail, l’avocate
des responsables syndicaux licenciés a, d’une part, achevé la procédure administrative
relative aux licenciements afin qu’une procédure judiciaire puisse être engagée et,
d’autre part, demandé à l’inspection du travail de procéder à des investigations afin de
vérifier l’éventuelle violation de l’article 469 du Code du travail, qui prévoit
l’imposition d’une amende en cas de violation du droit d’association syndicale; et
ii) une action en justice a été intentée le 7 octobre 2019 pour obtenir la réintégration
des six travailleurs licenciés. Le comité rappelle que nul ne devrait faire l’objet de
discrimination antisyndicale en raison de ses activités syndicales légitimes, et la
possibilité d’être réintégré dans leur poste de travail devrait être ouverte aux
personnes qui ont été l’objet de discrimination antisyndicale, et que lorsqu’elles sont
saisies de plaintes en discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent
mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux
conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatés. [Voir
Compilation, paragr. 1163 et 1159.] Observant en outre que les actions intentées en
justice à la suite des licenciements qui ont eu lieu en juillet 2019 n’auraient toujours
pas fait l’objet de décisions, le comité rappelle que les affaires soulevant des
questions de discrimination antisyndicale devraient être examinées promptement afin que
les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces et qu’une lenteur
excessive dans le traitement de tels cas constitue une violation grave des droits
syndicaux des intéressés. [Voir Compilation, paragr. 1139.] Sur la base de ce qui
précède, le comité prie le gouvernement de: i) l’informer de la conduite des enquêtes
demandées par le SITIAMASH pour violation du droit d’association syndicale à la suite du
licenciement de plusieurs de ses dirigeants en juillet 2019 et des résultats de
celles-ci; et ii) de lui faire part de ses observations sur le licenciement présumé du
secrétaire général de la section du SITIAMASH en octobre 2021. Le comité prie également
les autorités de prendre les mesures nécessaires pour que les procédures judiciaires
relatives aux licenciements susmentionnés soient rapidement menées à bien dans le
respect de la liberté syndicale et prie le gouvernement de le tenir informé à cet
égard.
- 162. En ce qui concerne les allégations de menaces, de pressions et de
violences antisyndicales dans le contexte de la fusion et de la scission susmentionnées
entre les deux syndicats, le comité note que les organisations plaignantes dénoncent en
particulier: i) des menaces de licenciement et des offres d’emploi et d’avantages
économiques visant à inciter les membres de la section Guanchias du SITIAMASH à se
désaffilier de cette organisation et à rejoindre le syndicat géré par l’entreprise;
ii) la présence de gardes de sécurité armés dans les zones de travail pour surveiller et
harceler les membres du SITIAMASH; iii) la persécution du président du SITIAMASH et la
surveillance de son domicile; et iv) le 11 janvier 2020, l’attaque à l’occasion de
laquelle plusieurs coups de feu ont été tirés contre le véhicule et la maison de
l’avocate chargée par le SITIAMASH de s’occuper des dossiers relatifs au présent cas. Le
comité note que, de son côté, le gouvernement déclare que les allégations de menaces et
de pressions à l’encontre des membres du SITIAMASH ne sont pas suffisamment précises sur
leurs modalités et leurs auteurs. Il constate également que le gouvernement: i) a
indiqué dans sa première communication qu’une enquête était en cours sur la persécution
dont le président du SITIAMASH aurait fait l’objet et qu’il n’a pas fourni d’autres
informations à cet égard dans sa deuxième communication; et ii) n’a pas communiqué ses
observations sur les allégations concernant l’attaque qui aurait été commise contre
l’avocate de l’organisation. Rappelant que les droits des organisations de travailleurs
et d’employeurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions
ou menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces
organisations, et qu’il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce
principe [voir Compilation, paragr. 84], le comité prie instamment le gouvernement de
prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des personnes qui auraient été
victimes de violence antisyndicale et pour enquêter sur les faits dénoncés par les
organisations plaignantes. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à cet
égard.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 163. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité
prie le gouvernement et les organisations plaignantes de l’informer des résultats de
la procédure judiciaire engagée par le SITIAMASH pour obtenir la dissolution du
syndicat de groupe, ainsi que sur toute autre action en justice éventuelle que le
SITIAMASH aurait entreprise au sujet des allégations des organisations plaignantes
concernant les irrégularités qui se seraient produites au cours de la séparation du
syndicat de groupe du SITIAMASH.
- b) S’agissant de l’enregistrement des
conventions collectives conclues par le syndicat de groupe, le comité prie le
gouvernement de préciser les critères retenus par le STSS pour établir la plus
grande représentativité et indépendance de l’organisation en question. Le comité
prie en outre les organisations plaignantes d’indiquer si les décisions
susmentionnées de l’administration du travail ont été contestées devant les
tribunaux.
- c) Le comité prie le gouvernement de:
- l’informer de la
conduite des enquêtes demandées par le SITIAMASH pour violation du droit
d’association syndicale à la suite du licenciement de plusieurs de ses
dirigeants en juillet 2019 et des résultats de celles-ci;
- et de lui
faire part de ses observations sur le licenciement présumé du secrétaire
général de la section du SITIAMASH en octobre 2021.
- d) Le
comité prie les autorités de prendre les mesures nécessaires pour que les
procédures judiciaires relatives aux licenciements susmentionnés soient
rapidement menées à bien dans le respect de la liberté syndicale et prie le
gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- e) Le comité prie instamment
le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des
personnes qui auraient été victimes de violence antisyndicale et pour enquêter
sur les faits dénoncés par les organisations plaignantes. Le comité prie le
gouvernement de le tenir informé à cet égard.