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- protection insuffisante contre des licenciements arbitraires
- 182 La Confédération nationale des travailleurs des institutions financières (CNTIF) a présenté la plainte faisant l’objet du présent cas par communication du 24 août 2000. Le gouvernement a transmis le 11 janvier 2001 la réponse de la SA Banco do Brasil, datée du 8 décembre 2000.
- 183 Le Brésil n’a pas ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais, en revanche, il a ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (nº 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 184. Dans sa communication du 24 août 2000, la Confédération nationale des travailleurs des institutions financières (CNTIF), qui réunit 180 syndicats du secteur bancaire et sept fédérations et est elle-même affiliée à la Centrale unique des travailleurs (CUT), déclare que le gouvernement du Brésil, à travers la SA Banco do Brasil, société d’économie mixte, a failli à ses obligations au regard des conventions nos 98, 135, et par conséquent de la convention no 87, pour les motifs exposés ci-après.
- 185. La CNTIF déclare que jusqu’à la fin du mois d’août 1999 la SA Banco do Brasil négociait avec ses employés la participation de ces derniers aux bénéfices de l’entreprise, comme prévu par la Constitution fédérale et réglementé par la mesure provisoire no 1982-67. Cette participation s’effectuait par l’entremise des syndicats, que ce fût directement, avec la négociation et la signature de la convention collective applicable, ou bien au sein d’une commission de négociation composée de personnes désignées par les parties (et dans laquelle les syndicats concernés étaient représentés). L’organisation plaignante allègue que, en violation des règles précitées, la SA Banco do Brasil a modifié unilatéralement ces mécanismes de participation aux bénéfices, et que cette initiative a été avalisée par le gouvernement, lequel a modifié la mesure provisoire susmentionnée. De l’avis, toujours, de l’organisation plaignante, ces mesures portent atteinte à la liberté syndicale collective, comme en atteste la confirmation, par le tribunal suprême fédéral, de l’obligation de garantie de la présence des entités syndicales dans les commissions de négociation.
- 186. La CNTIF allègue en outre que la SA Banco do Brasil tient les syndicats à l’écart des négociations collectives en prenant comme interlocuteur la Confédération nationale des travailleurs des entreprises de crédit (CONTEC), alors que les syndicats avaient expressément retiré à la CONTEC tout mandat de négociation, sur décision des travailleurs prise en assemblée, et que ce désaveu avait été signifié à la CONTEC comme à l’entreprise. De l’avis de l’organisation plaignante, les entités syndicales affiliées à la CONTEC devraient pouvoir préserver leur liberté syndicale «négative», c’est-à-dire celle qui consiste à ne pas se faire représenter pour toutes les questions par des instances de niveau supérieur. Il ressort néanmoins de la jurisprudence du tribunal supérieur du travail qu’en cas de conflit collectif les instances confédérales peuvent agir sans l’autorisation d’une assemblée syndicale. L’organisation plaignante ajoute que la SA Banco do Brasil refuse même de reconnaître le caractère officiel des négociations collectives menées avec les syndicats, mais non celui des négociations qui ont été menées avec la CONTEC. Qui plus est, pour le tribunal supérieur du travail, la solution des conflits collectifs d’ampleur nationale relève exclusivement de la compétence des instances syndicales confédérales, sans considération de la volonté des instances de premier niveau. Selon l’organisation plaignante, ce système se révèle dangereux dans la mesure où la représentativité de l’instance confédérale est légitimée non pas directement par les travailleurs mais par un conseil de représentants et où il n’est pas tenu compte de la représentativité des syndicats.
- 187. La CNTIF allègue également que, pour la période comprise entre le 1er septembre 1999 et le 31 août 2000, qui correspond à celle pendant laquelle les effets de la convention collective applicable couraient, la banque a exigé une réduction du nombre des dirigeants syndicaux bénéficiant d’un régime de mise en disponibilité à la charge de l’entreprise et la suspension de la clause concernant les représentants syndicaux de base, laquelle était applicable pendant la période d’effet de la convention collective de 1998-99, ce qui équivalait à une négation du droit d’organisation syndicale à partir du lieu de travail. Pour la plaignante, cette mesure est contraire à la convention de l’OIT no 135, ratifiée par le Brésil.
- 188. Enfin, la CNTIF déclare que la SA Banco do Brasil, malgré son appartenance à l’administration publique, n’accorde pas à ses employés une protection adéquate contre le licenciement arbitraire (en 1997, plus de 500 employés ont été licenciés sans juste cause). Elle ajoute à ce sujet que la banque conçoit le «licenciement» comme une «sanction» pour manquement à la discipline et s’arroge ainsi le droit de licencier sans motif un employé de catégorie supérieure recruté sur concours et ayant même beaucoup d’ancienneté pour engager en lieu et place des «temporaires» pour suppléer à une insuffisance criante de personnel.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 189. Pour répondre à la première allégation, le gouvernement déclare que la banque pratique, en accord avec les entités syndicales, la participation aux bénéfices et distribue ainsi des parts de bénéfices à ses employés, selon un programme qui a été conçu sur la base de la mesure provisoire régissant cette matière et qui a été homologué par l’organe de contrôle du gouvernement fédéral. Il existe un accord collectif dans lequel est prévue la négociation à ce sujet.
- 190. Pour répondre aux allégations suivant lesquelles la SA Banco do Brasil aurait conclu des conventions collectives avec une confédération sans le consentement des syndicats et en passant outre certaines décisions prises en assemblée, le gouvernement déclare ne pas être d’accord avec l’organisation plaignante parce que, affirme-t-il, la SA Banco do Brasil négocie et conclut des conventions collectives aussi bien avec la Confédération nationale des travailleurs des entreprises de crédit (CONTEC) qu’avec les syndicats. La CONTEC est la confédération nationale légalement habilitée à représenter les employés de banque au niveau national en vertu de la Constitution fédérale et de la législation en vigueur. Le gouvernement se déclare par conséquent surpris qu’un organisme avec lequel la banque n’a jamais négocié saisisse l’OIT d’une plainte à ce sujet.
- 191. En réponse aux allégations de discrimination à l’égard de dirigeants syndicaux, le gouvernement signale qu’à la SA Banco do Brasil près d’une centaine d’employés investis de fonctions syndicales bénéficient pour les exercer d’un régime de mise en disponibilité avec salaire qui est entièrement à la charge de l’entreprise. Il rappelle en outre qu’en période de négociation collective il est naturel que chacun des partenaires adopte une position stratégique qui n’est pas forcément agréable pour l’autre. Par conséquent, admettre la recevabilité d’une plainte de ce genre serait méconnaître que toute négociation, dont les résultats sont nécessairement le fruit d’une certaine dialectique, obéit à des mécanismes bien spécifiques.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 192. Le comité prend note du fait que l’organisation plaignante allègue qu’en violation du droit de négociation collective et de la pratique antérieure, la SA Banco do Brasil, entreprise d’économie mixte qui, jusqu’en septembre 1999, négociait collectivement avec ses employés les modalités de participation de ces derniers aux bénéfices de l’entreprise, a décidé unilatéralement de modifier les formes de cette participation. Le comité note également que le gouvernement a avalisé ce changement par le fait que celui-ci trouve son expression dans la mesure provisoire régissant la matière. Le comité observe que, selon le gouvernement, il existe un accord collectif dans lequel est prévue la négociation sur ces questions. Le comité estime opportun de rappeler que, dans son Etude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations a émis l’avis qu’il est contraire aux dispositions de la convention no 98 d’exclure de la négociation collective certaines questions tenant notamment aux conditions d’emploi. De plus, toujours de l’avis de cette commission, les mesures prises unilatéralement par les autorités pour restreindre l’étendue des sujets négociables sont souvent incompatibles avec la convention [paragr. 265 et 250]. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat des négociations annoncées.
- 193. S’agissant de la négociation collective menée par la SA Banco do Brasil avec une confédération syndicale sans que les instances syndicales de premier niveau n’y aient consenti et même après que ces dernières eurent expressément retiré à ladite confédération tout mandat en ce sens, le comité fait observer que la Constitution fédérale consacre en son article 8 le principe de l’unicité syndicale, puisque cet article interdit la création de plus d’une organisation syndicale de quelque niveau que ce soit, représentative d’une catégorie professionnelle ou économique sur une seule et même base territoriale. Le comité note également que, selon le gouvernement, la CONTEC est une confédération nationale légalement habilitée à représenter les employés de banque au niveau national. Il observe également que, selon l’organisation plaignante, la SA Banco do Brasil refuse même de reconnaître le caractère officiel des négociations collectives menées avec les syndicats, mais non celui des négociations menées avec la CONTEC. Il note en outre que, selon la jurisprudence du tribunal supérieur du travail, en cas de conflit collectif les instances confédérales peuvent agir sans avoir nécessairement obtenu une autorisation d’une assemblée syndicale et la solution des conflits collectifs d’ampleur nationale relève de la compétence des entités syndicales confédérales, sans considération de l’avis des organisations de premier niveau. Dans ces conditions, le comité rappelle qu’en vertu du caractère libre et volontaire que l’article 4 de la convention no 98 attribue à la négociation collective, la détermination du niveau de négociation collective relève essentiellement de la volonté des parties et, par conséquent, ce niveau ne devrait pas être imposé par la législation, par une décision d’autorité administrative ou encore par la jurisprudence de l’autorité administrative du travail. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 851.] De plus, le comité souligne que l’imposition par la loi du monopole syndical n’est pas compatible avec les principes de la liberté syndicale. Il incite donc vivement le gouvernement à faire ce qui est en son pouvoir pour que la législation nationale soit conforme à ces principes. Enfin, il signale l’aspect législatif de ce cas à l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations.
- 194. Pour ce qui est des allégations de traitement discriminatoire au préjudice de dirigeants et représentants syndicaux dans l’entreprise, la commission note que, selon l’organisation plaignante, la SA Banco do Brasil a réduit le nombre des mises en disponibilité avec salaire dont bénéficient les employés investis de responsabilités syndicales pour l’exercice de celles-ci. Tout en considérant que cette réduction n’est pas contraire aux principes de la liberté syndicale, dans la mesure où elle résulte de la négociation collective, le comité prie néanmoins le gouvernement de prévenir, dans ce contexte, toute discrimination entre syndicats.
- 195. En dernier lieu, pour ce qui est des allégations de protection inadéquate contre des licenciements arbitraires, le comité constate qu’il ne ressort pas de la plainte que ces licenciements seraient la conséquence de mesures antisyndicales. Par conséquent, il n’entend pas poursuivre davantage l’examen de cette question.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 196. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des négociations prévues sur la participation des employés de la SA Banco do Brasil sur les bénéfices de l’entreprise.
- b) Le comité rappelle qu’en vertu du caractère libre et volontaire que l’article 4 de la convention no 98 attribue à la négociation collective, la détermination du niveau de celle-ci devrait résulter essentiellement de la volonté des parties. Soulignant en outre que l’imposition par la loi du monopole syndical n’est pas compatible avec les principes de la liberté syndicale, il incite vivement le gouvernement à faire ce qui est en son pouvoir pour que la législation nationale soit rendue conforme à ces principes.
- c) Tout en considérant que la réduction du nombre des employés bénéficiant d’un régime de mise en disponibilité avec salaire à la charge de l’entreprise pour pouvoir exercer leurs fonctions de délégués syndicaux n’est pas contraire aux principes de la liberté syndicale dans la mesure où elle résulte de la négociation collective, le comité prie le gouvernement de veiller à prévenir dans ce contexte toute discrimination entre syndicats.