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Informe provisional - Informe núm. 318, Noviembre 1999

Caso núm. 2005 (República Centroafricana) - Fecha de presentación de la queja:: 12-FEB-99 - Cerrado

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  1. 172. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans des communications de l'Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA) en date du 12 février 1999 et de la Confédération nationale des travailleurs de Centrafrique (CNTC) du 10 mai 1999. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications en date des 19 mars et 3 juin 1999. Par une communication du 24 juin 1999, l'Union syndicale des travailleurs de Centrafrique (USTC) s'est associée à la plainte de l'OUSA.
  2. 173. La République centrafricaine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 174. Dans sa communication du 12 février 1999, l'OUSA fait état de l'arrestation de M. Sony Cole, secrétaire général de l'Union syndicale des travailleurs de Centrafrique (USTC), par des éléments de la garde présidentielle centrafricaine en date du 9 janvier 1999. L'OUSA allègue qu'après avoir été torturé par lesdits éléments M. Sony Cole a été détenu à la Brigade territoriale de la gendarmerie de Bangui où toute visite lui a été interdite sauf celle de la Ligue centrafricaine des droits de l'homme. Selon l'OUSA, le seul crime commis par M. Sony Cole aurait été de revendiquer le paiement des arriérés de salaires dont souffrent les travailleurs relevant de la fonction publique depuis plusieurs mois.
  2. 175. Dans sa communication du 10 mai 1999, la CNTC fait tout d'abord état du problème des arriérés de salaires qui touche les fonctionnaires de l'Etat. Selon la CNTC, le cumul des arriérés de salaires pour les fonctionnaires s'élève à 25 mois alors que les retards dans le paiement des pensions s'échelonnent sur 18 mois.
  3. 176. En second lieu, la CNTC allègue que, suite au non-paiement des salaires, les enseignants ont eu recours à plusieurs grèves depuis 1997. Suite à ces grèves, le gouvernement aurait eu recours à des enseignants vacataires pour combler les postes des enseignants titulaires. La CNTC fait également état de cinq enseignants exerçant des fonctions syndicales qui auraient été victimes d'actes de discrimination antisyndicale. En outre, la CNTC accuse le gouvernement de refuser de négocier de bonne foi concernant les problèmes des arriérés de salaires et du blocage du système scolaire. Enfin, la CNTC allègue des violations du local syndical de la CNTC en date du 6 janvier 1999.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 177. Dans sa communication du 19 mars 1999, le gouvernement déclare que l'USTC et plus particulièrement son secrétaire général, M. Sony Cole, ont adopté une stratégie visant à troubler l'ordre public. Plus particulièrement, le gouvernement estime que la direction de l'USTC viole l'article 6 des statuts du syndicat qui pose le principe fondamental de l'indépendance et de l'apolitisme du mouvement syndical. Le gouvernement explique que le secrétaire général de l'USTC est cosignataire d'une convention de gouvernement avec un certain nombre de partis politiques de l'opposition et que l'USTC a présenté des candidats syndicalistes aux élections législatives, en utilisant les moyens logistiques et financiers du syndicat pour le financement de leur campagne. Le gouvernement déclare qu'il se propose de prendre les mesures qui s'imposent si de tels excès se reproduisent afin de garantir l'ordre public. Enfin, en ce qui concerne l'arrestation de M. Sony Cole, le gouvernement déclare que l'affaire est d'origine extrasyndicale et relève de la dérive politique. Dans sa communication du 3 juin 1999, le gouvernement précise que cette affaire suit son cours au niveau judiciaire et qu'il est inopportun de se prononcer avant le verdict.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 178. Le comité note que le présent cas se réfère à des allégations d'arrestation et de détention d'un dirigeant syndical, d'atteintes au droit de grève et de négociation collective ainsi que de la violation d'un local syndical.
  2. 179. Concernant l'arrestation et la détention du secrétaire général de l'USTC, M. Sony Cole, le comité note que le gouvernement ne fournit aucune information précise sur ces allégations, se limitant à déclarer que M. Sony Cole aurait été arrêté pour des motifs politiques et de troubles de l'ordre public et non pour des raisons liées à ses activités syndicales. Le gouvernement précise que l'affaire suit son cours au niveau judiciaire. A cet égard, le comité rappelle que, si des personnes menant des activités syndicales ou exerçant des fonctions syndicales ne peuvent prétendre à l'immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire, les activités syndicales ne devraient pas en elles-mêmes servir de prétextes aux pouvoirs publics pour arrêter ou détenir arbitrairement des syndicalistes. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 83.)
  3. 180. Notant que le gouvernement fait état de "stratégie visant à troubler l'ordre public" et des activités politiques de l'USTC pour justifier les mesures prises à l'encontre de M. Sony Cole, le comité insiste sur le fait que des arrestations pour des motifs de "perturbation de l'ordre public" pourraient permettre, vu le caractère général du chef d'inculpation, de réprimer des activités de nature syndicale. Le comité rappelle aussi que, dans l'intérêt du développement normal du mouvement syndical, il serait désirable que les parties intéressées s'inspirent des principes énoncés dans la résolution sur l'indépendance du mouvement syndical adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 35e session (1952), qui prévoit notamment que l'objectif fondamental et permanent du mouvement syndical est le progrès économique et social des travailleurs, et que, lorsque les syndicats décident, en se conformant aux lois et usages en vigueur dans leurs pays respectifs et à la volonté de leurs membres, d'établir des relations avec les partis politiques ou d'entreprendre une action politique conformément à la Constitution pour favoriser la réalisation de leurs objectifs économiques et sociaux, ces relations ou cette action politique ne doivent pas être de nature à compromettre la continuité du mouvement syndical ou de ses fonctions sociales et économiques, quels que soient les changements politiques qui peuvent survenir dans le pays. Le comité rappelle également que les gouvernements ne devraient pas chercher à transformer le mouvement syndical en un instrument politique qu'ils utiliseraient pour atteindre leurs objectifs et ne devraient pas non plus essayer de s'immiscer dans les fonctions normales d'un syndicat, en prenant prétexte de ses rapports librement établis avec un parti politique. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 450 et 451.)
  4. 181. Sur cet aspect de la plainte, la communication de l'USTC, appuyant la plainte de l'OUSA, indique que M. Sony Cole est maintenant en liberté puisqu'il a participé à un conseil national extraordinaire de l'USTC en date du 26 avril 1999. Toutefois, considérant que M. Sony Cole a été arrêté le 9 janvier 1999 et que la procédure judiciaire est toujours en cours, le comité rappelle au gouvernement que les syndicalistes inculpés doivent, à l'instar des autres personnes, bénéficier d'une procédure judiciaire régulière et avoir le droit à une bonne administration de la justice, à savoir notamment: être informés des accusations qui pèsent contre eux, disposer du temps nécessaire à la préparation de leur défense, communiquer sans entrave avec le conseil de leur choix et être jugés sans retard par une autorité judiciaire impartiale et indépendante. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 102.)
  5. 182. De plus, en relation avec les allégations de mauvais traitements physiques et de tortures infligés à M. Sony Cole, le comité déplore que le gouvernement n'ait fourni aucun élément de réponse concernant ces allégations et rappelle que le gouvernement devrait donner les instructions nécessaires pour qu'aucun détenu ne fasse l'objet de mauvais traitements et imposer des sanctions efficaces dans les cas où de tels actes auraient été commis. De même, le comité souligne l'importance qu'il convient d'attribuer au principe consacré par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques selon lequel toute personne privée de liberté doit être traitée avec humanité et dans le respect dû à un être humain. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 59.) A cet effet, le comité prie instamment le gouvernement d'envoyer ses observations concernant les allégations de tortures à l'endroit du secrétaire général de l'USTC et de diligenter une enquête judiciaire indépendante. Enfin, déplorant que le gouvernement n'ait fait état d'aucun fait précis concernant les modalités et les motifs d'arrestation et de détention de M. Sony Cole, le comité prie instamment le gouvernement de lui faire parvenir ses observations concernant ces aspects du cas et de le tenir informé de l'évolution de la procédure judiciaire en cours.
  6. 183. En ce qui a trait aux allégations formulées par la CNTC relatives aux atteintes au droit de grève, à la négociation collective et à la violation de locaux syndicaux, le comité déplore que le gouvernement n'ait fourni aucune information à ce sujet. Plus particulièrement, concernant les allégations de réquisitions de travailleurs et d'actes de discrimination antisyndicale à l'encontre de travailleurs ayant exercé leur droit de grève suite au non-paiement de leur salaire, le comité doit rappeler d'ores et déjà qu'il a toujours reconnu aux travailleurs et à leurs organisations le droit de grève comme moyen légitime de défense de leurs intérêts économiques et sociaux. De plus, si une grève est légale, l'utilisation d'une main-d'oeuvre étrangère à l'entreprise afin de remplacer les grévistes, pour une durée indéterminée, comporte un risque d'atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 571.) Enfin, le comité insiste fermement sur le fait que nul ne devrait faire l'objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de déclencher une grève légitime.
  7. 184. Concernant les allégations de refus du gouvernement de négocier de bonne foi sur le problème des arriérés de salaires, en l'absence d'éléments de fait précis de la part de l'organisation plaignante et du gouvernement, le comité se doit de rappeler l'importance qu'il attache à l'obligation de négocier de bonne foi pour le maintien d'un développement harmonieux des relations professionnelles et demande aux parties de fournir des informations détaillées concernant cet aspect du cas. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 814.)
  8. 185. En ce qui concerne les allégations de violation du domicile du secrétaire général de la CNTC ainsi que du local syndical de cette organisation par les forces de l'ordre, le comité insiste sur le fait que les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. De plus, le comité rappelle qu'en dehors des perquisitions effectuées sur mandat judiciaire l'intrusion de la force publique dans les locaux syndicaux constitue une grave et injustifiable ingérence dans les activités syndicales. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 47 et 176.)
  9. 186. Le comité demande au gouvernement de communiquer sans tarder ses observations sur l'ensemble des allégations de la CNTC afin qu'il puisse se prononcer à leur égard en toute connaissance de cause.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 187. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Déplorant que le gouvernement n'ait fait état d'aucun fait précis concernant les modalités et les motifs d'arrestation et de détention de M. Sony Cole, le comité prie instamment le gouvernement de lui faire parvenir ses observations concernant cet aspect du cas ainsi que de le tenir informé de l'évolution de la procédure judiciaire.
    • b) En ce qui concerne les allégations de mauvais traitements physiques et de tortures infligés à M. Sony Cole, le comité rappelle au gouvernement qu'il devrait donner les instructions nécessaires pour qu'aucun détenu ne fasse l'objet de mauvais traitements et prie instamment le gouvernement de diligenter une enquête judiciaire indépendante et d'envoyer ses observations concernant ces allégations.
    • c) En ce qui concerne les allégations formulées par la CNTC relatives aux atteintes au droit de grève, à la négociation collective et à la violation de ses locaux syndicaux, le comité demande au gouvernement de communiquer sans tarder ses observations sur l'ensemble des allégations de la CNTC.
    • d) Concernant les allégations de refus du gouvernement de négocier de bonne foi sur le problème des arriérés de salaires, le comité demande aux parties de fournir des informations détaillées sur cet aspect du cas.
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