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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
- 102. Lorsqu’il a examiné ce cas pour la dernière fois lors de sa réunion de mars 2001 [voir 324e rapport, paragr. 623-675], le comité avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour qu’une organisation dont le caractère représentatif dans un secteur donné, constaté conformément aux principes de l’OIT, serait objectivement démontrée et qui présenterait un caractère avéré d’indépendance puisse signer, au besoin seule, des conventions collectives, et ce en vue de rendre la pratique luxembourgeoise pleinement conforme aux principes de la liberté syndicale.
- 103. Dans une communication du 27 juillet 2001, le gouvernement indique qu’il n’entend pas s’opposer à la recommandation du comité mais qu’il souhaite toutefois soumettre à l’appréciation de ce dernier certaines réflexions relatives à ce cas. Le gouvernement explique que le système du dialogue social luxembourgeois se base sur un tripartisme institutionnalisé comprenant, du côté des partenaires sociaux, des organisations fortes, présentes dans tous le pays et dans la majorité des branches économiques. De cette présence découle leur représentativité, mais surtout leur responsabilité dans l’élaboration des réponses à des questions d’intérêt national. Par exemple, lors de l’élaboration du Plan d’action national en faveur de l’emploi, en vue de la mise en œuvre de la Stratégie européenne de l’emploi, le Comité national de coordination tripartite, comprenant les grands syndicats représentatifs, a arrêté, comme un des points de ce plan, la modération salariale. A cet égard, le gouvernement estime que seuls des syndicats pouvant dépasser les intérêts partisans d’un groupe de salariés, et pouvant s’engager dans l’intérêt finalement commun de tous les salariés, auront la responsabilité et le poids nécessaires pour contribuer à la mise en œuvre d’une telle politique nationale.
- 104. Par ailleurs, le gouvernement considère que la recommandation du comité peut porter en elle le germe du corporatisme, en donnant un pouvoir, le cas échéant exorbitant, à des syndicats qui défendent exclusivement les intérêts d’un groupe déterminé, plus ou moins réduit, de salariés. En outre, si l’intérêt à court terme des salariés représentés par un syndicat purement sectoriel peut paraître pertinent, une telle attitude corporatiste et égoïste pourrait jouer contre eux à long terme. Ainsi, la gestion d’une crise dans un secteur de nature à s’inscrire utilement dans une politique solidaire prenant en compte les intérêts tant des salariés directement concernés que de la communauté nationale présuppose des syndicats indépendants et puissants. A cet égard, le gouvernement craint que la recommandation du comité ne puisse ouvrir la porte à la fois à un éclatement malsain de la scène syndicale et au risque de voir au sein des entreprises se développer des «syndicats-maisons». Ceci donnerait à ces secteurs «uni-entreprises» une opportunité inespérée de signer des conventions collectives avec un syndicat dont l’employeur aurait favorisé l’éclosion et qui serait plus facile à manipuler que des syndicaux nationaux puissants.
- 105. Enfin, le gouvernement estime qu’une solution viable pourrait être la suivante: si un syndicat est très fortement présent dans un secteur, une convention collective ne pourrait être signée sans lui, mais la cosignature d’un syndicat nationalement représentatif serait nécessaire. De cette manière, le principe défendu par le BIT serait respecté, sans mettre en cause le modèle social luxembourgeois. En outre, le gouvernement indique qu’il a entamé une réforme de la législation sur les conventions collectives et qu’il a, entre autres, voulu intégrer dans sa réflexion la position du BIT. Un avant-projet de loi devrait être finalisé sous peu et faire l’objet d’une consultation des partenaires sociaux.
- 106. Le comité a pris note avec intérêt des informations détaillées fournies par le gouvernement. Tout en tenant compte de la spécificité du modèle social luxembourgeois, le comité réitère ses conclusions antérieures, à savoir que l’imposition d’une représentation nationale et plurisectorielle telle qu’elle ressort de l’interprétation donnée à la loi de 1965 est contraire aux principes de la liberté syndicale puisqu’elle pourrait empêcher le syndicat le plus représentatif dans un secteur déterminé de signer seul les conventions collectives et par là même de défendre au mieux les intérêts de ceux qu’il représente. Le comité insiste toutefois sur le fait que le caractère représentatif d’une organisation syndicale dans un secteur donné doit être objectivement démontré conformément aux principes de l’OIT en la matière. Par ailleurs, s’agissant de la question de l’indépendance d’une organisation syndicale et du danger de voir l’éclosion de syndicats favorisés et manipulés par l’employeur, le comité insiste de nouveau sur le fait que ce n’est que lorsque le caractère d’indépendance vis-à-vis de l’employeur et des autorités publiques est avéré que la négociation collective peut être ouverte aux organisations syndicales. Le comité rappelle à nouveau que les critères de représentativité et d’indépendance attribués aux organisations syndicales devraient pouvoir être déterminés par un organe présentant toutes garanties d’indépendance et d’objectivité. Enfin, prenant note de la réforme législative engagée par le gouvernement sur cette question, le comité rappelle à ce dernier qu’il peut faire appel à l’assistance technique du BIT en ce qui concerne la mise en œuvre de sa recommandation.