134. Dans une communication du 28 mai 1997, l'Internationale de l'éducation (IE), la Fédération des enseignants canadiens et la Société des enseignants du Manitoba (MTS) ont présenté une plainte contre le gouvernement du Canada (Manitoba) pour violation de la liberté syndicale.
- 134. Dans une communication du 28 mai 1997, l'Internationale de l'éducation (IE), la Fédération des enseignants canadiens et la Société des enseignants du Manitoba (MTS) ont présenté une plainte contre le gouvernement du Canada (Manitoba) pour violation de la liberté syndicale.
- 135. En réponse à ces allégations, le gouvernement fédéral a transmis la réponse du gouvernement du Manitoba dans une communication du 10 février 1998. Il a fourni des informations complémentaires dans une communication du 2 mars 1998.
- 136. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Il n'a ratifié ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, ni la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 137. Dans leur communication du 28 mai 1997, l'Internationale de l'éducation, la Fédération des enseignants canadiens et la MTS allèguent que les modifications apportées récemment à la loi sur les écoles publiques par l'adoption de la loi modifiant la loi sur les écoles publiques ("la Loi") enfreignent les normes et principes de l'OIT relatifs à la liberté syndicale et à la négociation collective. Les plaignants soutiennent en particulier que la Loi porte atteinte à l'indépendance des arbitres des différends et à l'équité de la procédure d'arbitrage, contrevenant ainsi à la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, à la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, à la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et à la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
- 138. Les plaignants contestent les trois points ci-après des modifications récemment apportées: premièrement, le fait que certaines questions aient été soustraites à la compétence des arbitres des différends; deuxièmement, l'obligation faite à ces arbitres de tenir compte de certains éléments comme la capacité à effectuer les paiements; troisièmement, la création d'un nouveau système de médiation et d'arbitrage.
- 139. Pour situer le débat, les plaignants rappellent que, au Manitoba, le droit de grève des enseignants des écoles publiques a été remplacé par voie législative par l'arbitrage obligatoire (loi sur les écoles publiques). Il en va de même des fonctionnaires de police de Winnipeg (loi sur la ville de Winnipeg) et de certains fonctionnaires provinciaux (loi sur la fonction publique). De manière générale, les relations du travail sont régies par la loi sur les relations du travail.
- 140. Les négociations collectives concernant les enseignants des écoles publiques sont menées au niveau des divisions ou des districts scolaires. Les syndicats d'enseignants de chacun d'eux négocient les conventions collectives avec leur employeur respectif, ces conventions pouvant différer largement de l'une à l'autre.
- 141. Les plaignants demandent que l'on examine les modifications apportées à la loi sur les écoles publiques à la lumière de la loi adoptée récemment par le Manitoba au sujet des rémunérations des enseignants des écoles publiques et d'autres catégories d'agents du secteur public. La loi sur la réduction de la semaine de travail et la gestion des salaires dans le secteur public ("projet de loi no 22") autorisait les employeurs du secteur public, y compris les divisions et districts scolaires, à déroger aux conventions collectives en imposant des journées de congés non rémunérées. Au cours des années scolaires 1993-94 et 1994-95, les enseignants des écoles publiques ont ainsi perdu respectivement 6 631 366 dollars et 6 802 378 dollars. Ces chiffres sont d'autant plus graves que le niveau de vie des enseignants a déjà été érodé par les effets du projet de loi no 22. Faisant suite à ce texte, les modifications apportées à la Loi ne peuvent avoir pour effet que de détériorer et de déstabiliser encore plus le climat des relations du travail dans les écoles publiques du Manitoba. En outre, ces modifications ont été apportées à titre permanent, et non à titre de réponse temporaire à une crise économique.
- 142. En ce qui concerne la situation économique actuelle du Manitoba, les plaignants affirment que, de l'aveu même du gouvernement de la province, cette situation est florissante. A l'appui de leurs dires, ils joignent un exemplaire du discours de présentation du budget du Manitoba pour 1997.
- 143. Avant d'être modifiée, la loi sur les écoles publiques ne contenait aucune restriction quant aux questions dont pouvaient connaître les arbitres des différends, lesquels étaient tenus de prendre une décision sur l'ensemble des points litigieux. Par suite des modifications apportées, certaines questions sont exclues de leur compétence, comme l'indiquent les dispositions suivantes de la loi:
- Malgré les autres dispositions de la présente loi, il est interdit de soumettre à arbitrage et il est interdit à l'arbitre d'examiner ou d'inclure dans sa sentence les questions suivantes:
- a) la sélection, la nomination, l'affectation et la mutation des enseignants et des principaux;
- b) la méthode d'évaluation de la performance des enseignants et des principaux;
- c) le nombre d'élèves des diverses classes;
- d) la détermination des périodes de récréation et de la pause du midi.
- 144. S'agissant des questions qui ne peuvent être soumises à arbitrage, la Loi contient également une nouvelle disposition, selon laquelle "les commissions scolaires agissent de façon raisonnable et équitable et de bonne foi dans l'application de leur politique et de leurs usages...", le défaut de se conformer à cette disposition pouvant faire l'objet d'un grief en vertu de la convention collective.
- 145. Les plaignants soutiennent que, si les divisions et les districts scolaires peuvent s'engager volontairement à inclure dans les conventions collectives des dispositions portant sur les questions exclues, les arbitres des différends ne sont plus habilités à imposer ces dispositions. En pratique, il en résulte que les divisions et districts scolaires ont toute latitude pour imposer leur volonté aux syndicats d'enseignants dans le domaine des questions exclues. Ces syndicats n'ont aucun recours: non seulement ils ne peuvent déclencher de grève, mais ils ne peuvent même plus désormais s'en remettre à l'arbitrage des différends. Les plaignants soutiennent qu'il s'agit là d'un problème très concret, puisque différentes conventions collectives actuellement en vigueur contiennent des dispositions détaillées sur au moins certaines des questions exclues, par exemple la mutation des enseignants. En annexe à leur plainte, les plaignants joignent copie d'une convention collective conclue entre la division scolaire no 1 de Winnipeg et l'association no 1 des enseignants de Winnipeg de la Société des enseignants du Manitoba, dont l'article 26 porte sur les mutations.
- 146. Selon les plaignants, l'exclusion unilatérale de la négociation collective des questions énumérées dans la Loi constitue une ingérence injustifiable dans cette négociation. En outre, il ne s'agit pas d'une mesure temporaire ou d'une mesure visant à faire face à une crise économique.
- Facteurs devant être pris en considération par les arbitres des différends
- 147. L'ancienne loi ne restreignait pas les questions que les arbitres des différends pouvaient prendre en considération lorsqu'ils déterminaient les dispositions financières des conventions collectives. L'article 129(3) et (4) de la loi modifiée contient les nouvelles dispositions suivantes:
- Dans le cas des questions qui pourraient vraisemblablement avoir une incidence financière sur la division ou le district scolaire, l'arbitre fonde sa décision principalement sur la capacité de la division ou du district scolaire à effectuer les paiements. Cette capacité est déterminée en tenant compte des recettes actuelles de la division ou du district scolaire, y compris le financement obtenu du gouvernement, ou du gouvernement du Canada, ainsi que de ses recettes fiscales.
- ... l'arbitre détermine la capacité de payer de la division ou du district scolaire en tenant compte également des facteurs suivants:
- a) la nature des services que la division ou le district scolaire devra probablement réduire par suite de la décision ou de la sentence arbitrale si les recettes actuelles de la division ou du district scolaire n'augmentent pas;
- b) le climat économique actuel au Manitoba et dans la division ou le district scolaire;
- c) une analyse comparative des conditions d'emploi des enseignants de la division ou du district scolaire et de celles des employés exerçant des fonctions similaires dans les secteurs public et privé, tout en donnant plus de poids à la situation des employés qui exercent des fonctions similaires dans la division ou le district scolaire ou dans la région de la province où est situé la division ou le district scolaire;
- d) la nécessité dans laquelle la division ou le district scolaire se trouve de recruter des enseignants qualifiés et de retenir leurs services.
- 148. Les plaignants déclarent que, en vertu de la loi sur les écoles publiques, les ressources des divisions et districts scolaires du Manitoba proviennent essentiellement de deux sources: les subventions du gouvernement du Manitoba et les taxes de soutien à l'éducation (qui s'ajoutent à la taxe foncière municipale). A toutes fins pratiques, les divisions et districts scolaires ont la possibilité de moduler leurs recettes en augmentant ou en diminuant les taxes. Elles peuvent fonder leurs décisions à ce sujet sur la situation économique du Manitoba, mais il s'agit avant tout d'un choix politique. Les plaignants estiment que les nouvelles exigences imposées aux arbitres des différends par la Loi les contraignent à prendre en considération des facteurs politiques, à concilier des impératifs politiques et à prendre des décisions politiques, ce qui a pour effet de nuire à leur indépendance et à leur impartialité. Les décisions tendant à ne pas augmenter les impôts devraient être prises par des élus, et non par des arbitres indépendants et impartiaux.
- Création d'un nouveau système de médiation et d'arbitrage
- 149. Enfin, la Loi comporte de nouvelles dispositions relatives à la conciliation, à l'arbitrage et à la médiation. L'ancienne loi comportait des dispositions relatives à la conciliation et à l'arbitrage entre les syndicats d'enseignants et les divisions scolaires. L'une ou l'autre partie pouvait demander au ministère de l'Education et de la Formation de nommer un conciliateur qui "délibère avec les parties et s'efforce de les aider à conclure une convention collective ou le renouvellement ou la révision d'une convention collective", les dispositions de la loi sur les relations du travail relatives aux conciliateurs s'appliquant alors. En vertu de cette dernière loi, les conciliateurs sont rémunérés par un fonds consolidé alimenté par les recettes publiques. En vertu de la loi modifiée, les parties doivent maintenant demander au ministre de nommer un conciliateur, dont la rémunération et les dépenses sont prises en charge à parts égales par les parties. Les plaignants soutiennent que cette situation défavorise les enseignants par rapport aux autres employés syndiqués du Manitoba, qui restent régis par les dispositions de la loi sur les relations du travail relatives à la conciliation.
- 150. Sous l'empire de l'ancienne loi, lorsqu'un conciliateur ne parvenait pas à amener les parties à une entente, l'une ou l'autre de ces parties pouvait demander au ministre de nommer un conseil d'arbitrage. De son côté, le ministre était habilité à nommer ce conseil de sa propre initiative. Rien de ce qui avait été dit ou fait durant les tentatives visant à régler un différend par la conciliation ne pouvait être invoqué à titre de preuve dans la procédure du conseil d'arbitrage. En vertu des modifications, chacune des parties peut demander au ministre de nommer un médiateur-arbitre chargé de délibérer avec les parties et de s'efforcer de les aider à conclure une convention collective. Si les parties ne parviennent pas à conclure un accord par la médiation, chacune d'elles ou le ministre peut alors demander au médiateur-arbitre de fixer les dispositions de la convention collective par voie arbitrale.
- 151. La Loi ne contient aucune disposition établissant une distinction entre le rôle de médiation et le rôle d'arbitrage du médiateur-arbitre au sujet de l'admissibilité des moyens de preuve. Les informations et déclarations qui lui sont fournies au cours de la médiation peuvent avoir un effet sur le résultat de l'arbitrage, ce qui risque de nuire à la confiance des parties, et donc d'enfreindre les dispositions de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978. Par ailleurs, la rémunération et les dépenses du médiateur-arbitre sont prises en charge à parts égales par les parties, alors que les dispositions de la loi sur les relations du travail disposent que la rémunération des médiateurs doit être divisée en trois parts égales, chacune des parties en payant une et la troisième étant versée par le fonds consolidé. Ici encore, les enseignants des écoles publiques sont défavorisés par rapport à l'ensemble des autres employés syndiqués du Manitoba. Les plaignants soutiennent que la loi modifiée enfreint ainsi les dispositions de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, en omettant d'encourager et de promouvoir le développement et l'utilisation de procédures permettant la négociation des conditions d'emploi. La loi modifiée omet également de promouvoir la négociation collective, contrairement aux dispositions de la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
- 152. Les plaignants soutiennent également que la loi modifiée enfreint le principe selon lequel les restrictions au droit de grève doivent s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives. En effet, les modifications apportées ont pour effet de combiner l'interdiction de faire grève avec un système d'arbitrage qui n'est ni approprié ni impartial.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 153. De manière générale, le gouvernement considère que les mesures qu'il a prises sont pleinement conformes aux principes fondamentaux de l'Organisation internationale du Travail.
- 154. Le gouvernement conteste la déclaration des plaignants selon laquelle les modifications récemment apportées à la Loi résultaient essentiellement de la récession économique subie par le Canada en général et par le Manitoba en particulier au début et au milieu des années quatre-vingt-dix. Il est simpliste de considérer que ces modifications reposent sur des motifs économiques. Au contraire, le ministère de l'Education et de la Formation du Manitoba se préoccupe depuis des années des dysfonctionnements qui affectent les mécanismes de la négociation collective au sein du système scolaire public. Par exemple, 13 divisions scolaires et syndicats d'enseignants sont sans nouveau contrat depuis septembre 1997 pour la période commençant le 1er janvier 1995. Les modifications qui font l'objet de la plainte ont été mises en oeuvre pour améliorer les mécanismes et le cadre de la négociation collective, et non simplement pour en réduire les coûts. Le but premier de la législation actuelle n'est pas de limiter les rémunérations.
- 155. Situant la question dans son cadre, le gouvernement déclare que les mécanismes de négociation collective applicables aux enseignants des écoles publiques sont en place depuis une quarantaine d'années. En 1992, après des audiences publiques, le Groupe de travail sur la réforme de la législation de l'éducation a recommandé la mise à jour des dispositions relatives à la négociation collective de la loi sur les écoles publiques. Une commission comprenant des représentants de l'Association des administrateurs des écoles du Manitoba (MAST) et de la MTS a été chargée d'analyser les questions relatives à la négociation collective. Cette commission n'ayant pas donné de résultats, on l'a remplacée en 1995 par la Commission de la négociation collective et de la rémunération des enseignants, composée de deux membres gouvernementaux et du ministre adjoint de l'Education. Ce comité a mené de larges consultations auprès du public et des parties prenantes avant de faire des recommandations sur lesquelles les modifications litigieuses reposent très largement. Le comité s'est appuyé sur les critères suivants:
- -- nécessité de préserver la possibilité d'une intervention et d'une participation locales;
- -- nécessité de réduire les coûts et la durée de la négociation;
- -- nécessité de planifier efficacement le budget;
- -- nécessité de garantir aux élèves la continuité de l'enseignement;
- -- nécessité de concilier les droits et responsabilités des employeurs et des salariés;
- -- nécessité de tenir compte des contraintes financières.
- 156. Le gouvernement confirme que les négociations collectives menées par les enseignants des écoles publiques se déroulent au niveau des divisions et des districts scolaires. Théoriquement, ces négociations sont menées par les syndicats d'enseignants dans chaque division du district. Cependant, ces syndicats confient largement à leur union, la MTS, le soin d'effectuer des recherches et autres tâches en vue de la négociation, et les divisions scolaires font de même avec leur organe central, la MAST. Cette manière de faire explique le grand nombre de conventions collectives en vigueur dans la province (57). Toutefois, contrairement à l'affirmation des plaignants, cette multiplicité n'entraîne pas de grandes différences dans le contenu des conventions. Elles sont généralement conformes à un modèle commun, et leurs dispositions relatives aux rémunérations, aux avantages et aux conditions de travail sont très similaires. Si certaines diffèrent quelque peu des autres, c'est seulement sur un nombre de points limité.
- 157. Le gouvernement confirme que la législation modifiée comprend les nouvelles catégories de dispositions exposées par les plaignants.
- 158. Le gouvernement reconnaît que, à la différence de l'ancienne législation, la nouvelle dispose que certains points énumérés ne peuvent être soumis à arbitrage, étant toutefois entendu que les parties restent libres de les négocier si elles le souhaitent. Cette clause a été ajoutée en raison des restrictions notables imposées récemment par certaines sentences arbitrales à la faculté des autorités locales de remplir leurs obligations envers leur électorat et les élèves dont elles ont la responsabilité. Le Groupe de travail sur la réforme de la législation de l'éducation a bien précisé que personne, au cours de ces consultations publiques, n'avait demandé que l'on inclue dans les mécanismes de négociation certaines questions comme les suivantes: sélection, nomination, affectation et évaluation des enseignants; tâches qu'ils doivent accomplir; nombre, type, catégorie et description des écoles; cours et programmes d'études; effectif des classes, nombre d'élèves par enseignant, temps de préparation ou nombre de classes; heures ou jours de l'année scolaire.
- 159. Le gouvernement confirme que la législation modifiée contient une disposition faisant obligation aux commissions scolaires d'agir de façon raisonnable et équitable et de bonne foi dans l'application de leur politique régissant les questions exclues de l'arbitrage par la loi. Le défaut d'une commission scolaire de se conformer à cette disposition peut faire l'objet d'un recours. Le gouvernement estime que cette disposition impose une contrainte considérable aux commissions. Par ailleurs, la législation n'interdit pas aux divisions et districts scolaires de conclure des accords avec les enseignants sur les questions exclues.
- 160. Le gouvernement déclare que peu de conventions collectives -- si tant est qu'il y en ait -- traitent de l'effectif des classes ou de l'horaire des récréations et de la pause de midi. Un nombre croissant de contrats doivent confirmer par accord que les enseignants doivent disposer d'une pause ininterrompue, généralement de 55 minutes, entre 11 heures et 14 heures. Quelques conventions collectives traitent de la question des évaluations. Nombre d'entre elles reconnaissent des droits à la direction en matière d'affection des enseignants, tout en comprenant des dispositions qui exigent à ce sujet un préavis raisonnable.
- Facteurs devant être pris en considération par les arbitres des différends
- 161. Si la loi ne vise pas par essence à limiter les rémunérations, il n'en est pas moins vrai que les difficultés financières rencontrées par le Manitoba au début de la décennie ont un rapport avec une question résultant des modifications controversées, à savoir l'inclusion de la notion de capacité à effectuer les paiements dans les facteurs que les arbitres doivent prendre en considération. Les commissions scolaires du Manitoba représentent un troisième niveau de gouvernement, et ce sont les administrateurs élus qui gèrent le système éducatif au sein de chaque division et conseil de district. Le système scolaire est largement financé par une taxe locale dont le taux est fixé par les commissions scolaires. Cependant, les administrateurs ont des difficultés à gérer les affaires des divisions scolaires, en grande partie parce que la part prépondérante de leur budget qui est consacrée aux rémunérations des enseignants est fixée par voie de convention collective et échappe donc à leur contrôle, mais aussi parce que nombre de fonctions opérationnelles font de plus en plus l'objet de négociations, puis ensuite de décisions d'arbitrage contraignantes. Il en est résulté une forte hausse de la fiscalité locale à une époque où l'économie de nombre des collectivités se dégradait. Cette situation a été aggravée par le fait qu'un nombre croissant de questions extrasalariales ont fait l'objet d'arbitrages contraignants, ce qui a compliqué la tâche des administrateurs, lesquels sont tenus de gérer les affaires des divisions d'une manière souple et responsable tout en maintenant les dépenses dans des limites acceptables.
- 162. Le gouvernement déclare que les divisions scolaires sont souvent contraintes de procéder à des augmentations de taxes lorsqu'un arbitre décide de se fonder sur les augmentations salariales accordées dans d'autres divisions pour accorder une augmentation similaire malgré la différence de situation économique qui peut exister entre ces divisions. La division intéressée se trouve alors devant un choix difficile: augmenter les taxes ou, si la situation économique ne permet pas de recourir à un autre moyen de financer les coûts supplémentaires résultant de la sentence, supprimer des programmes, avec les conséquences dommageables que cela a pour les élèves.
- 163. Le gouvernement déclare qu'il n'est pas demandé aux arbitres de prendre des décisions politiques, mais simplement de tenir compte des réalités financières locales ainsi que d'autres facteurs comme la situation des autres divisions et districts scolaires, la nécessité où se trouve la division scolaire intéressée de recruter des enseignants qualifiés et de retenir leurs services et le montant de la rémunération que touchent des salariés autres que les enseignants mais ayant une formation comparable dans la même zone géographique. Certains de ces facteurs sont de nature à jouer en faveur des enseignants. Les deux derniers ont été en fait ajoutés à la Loi pour faire droit aux demandes de la MTS. Le gouvernement estime que les facteurs financiers eux-mêmes sont neutres, puisque, s'ils rendent plus difficiles de fortes augmentations salariales quand la situation économique est défavorable, ils ont l'effet opposé quand celle-ci s'améliore. Quant à l'allégation selon laquelle le rôle de l'arbitre en vertu de la loi modifiée peut être considéré comme "politique", le gouvernement estime que ce rôle n'était pas moins politique en vertu de l'ancienne loi, puisque les arbitres pouvaient exercer une influence notable sur l'organisation du système scolaire local sans exercer la moindre responsabilité quant aux conséquences de leurs décisions.
- Création d'un nouveau système de médiation et d'arbitrage
- 164. Le gouvernement confirme la description faite par les plaignants du système de conciliation prévu par l'ancienne loi. Il convient cependant de préciser que ce système était considéré par les parties comme une étape purement formelle sur la voie de l'arbitrage. Les conciliateurs parvenaient rarement à faire s'entendre les parties, et il apparaît que ni la MTS ni la MAST ne prenaient cette procédure très au sérieux.
- 165. Il est exact que l'ensemble des coûts de la conciliation étaient acquittés par le gouvernement avant l'adoption de la Loi. Aujourd'hui, ces coûts sont fixés par le gouvernement et payés à parts égales par les parties. On veut par là inciter à la fois les enseignants et les employeurs à prendre au sérieux la procédure de conciliation.
- 166. S'agissant des coûts du médiateur-arbitre, le gouvernement estime que la formule consistant à ne payer que la moitié des coûts d'un médiateur-arbitre unique sera en fin de compte moins coûteuse pour les parties que le financement d'un conseil d'arbitrage. Par ailleurs, il déclare que, si le ministre de l'Education et de la Formation a effectivement le droit de nommer un arbitre, il n'a jamais exercé ce droit et ne le fera qu'en cas d'impasse des négociations et de refus absolu par les parties de suivre la procédure réglementaire. Il note en outre que le ministre nomme l'arbitre sur une liste dressée soit par la Commission des conventions collectives, soit par la Commission du travail du Manitoba, liste qui comprend des noms acceptables à la fois pour les salariés et la direction. En juillet 1997, le ministre a écrit à la MTS et à la MAST pour leur donner la liste des noms figurant sur le répertoire de la Commission des conventions collectives et les inciter à désigner d'autres personnes qui ont ou pourraient acquérir des compétences dans ce domaine. La MTS n'a pas encore répondu à cette invitation.
- 167. Si la loi n'établit pas de distinction entre le rôle de médiation et d'arbitrage du médiateur-arbitre en ce qui concerne l'admissibilité de la preuve, les parties sont libres de décider dès le départ que l'ensemble des débats auxquels donnera lieu la médiation se feront sans préjuger de la question. Par ailleurs, les parties restent libres de se faire assister par un conciliateur et, si cette initiative échoue, de changer d'arbitre, au lieu d'être tenues de recourir aux services du médiateur-arbitre.
- 168. Le gouvernement soutient que la procédure modifiée laisse toujours à la MTS la faculté de négocier au nom des enseignants et qu'il n'y a aucune raison de croire que cette procédure est moins équitable que celle qui était prévue par l'ancienne loi. Il soutient également que le nouveau système fournit le cadre d'une procédure de conciliation et d'arbitrage appropriée, impartiale et expéditive, qui est au coeur de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. De même, le gouvernement nie que les modifications controversées enfreignent les dispositions de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. Non seulement la procédure de négociation collective applicable aux enseignants a été maintenue, mais elle a été renforcée par des mesures tenant à rendre la conciliation et l'arbitrage plus rapides et en fin de compte moins coûteux pour les parties. De même encore, en améliorant une procédure de conciliation et d'arbitrage qui était devenue lente et lourde, le gouvernement favorise et soutient l'élaboration et l'utilisation de mécanismes de négociation des conditions d'emploi, conformément aux dispositions de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
- 169. Le gouvernement déclare également que les modifications controversées ont fait l'objet de très larges consultations, conformément aux dispositions de la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981. Le Groupe de travail sur la réforme de la législation de l'éducation créé en 1992 a tenu de nombreuses audiences publiques, et la première commission instituée en application des conclusions du rapport de ce groupe de travail était largement composée des parties prenantes, notamment la MTS et la MAST. Comme elles n'ont pas réussi à s'entendre, on a créé la Commission de la négociation collective et de la rémunération des enseignants, qui a tenu onze réunions publiques et une réunion spéciale pour entendre la position officielle de la MTS et de la MAST. Enfin, après que la législation en question eut été soumise à l'Assemblée législative et conformément à la procédure législative du Manitoba, de nombreuses séances publiques ont été tenues au stade de la commission publique, au cours desquelles les modifications ont été débattues et ont été en fait modifiées sur certains points importants à la demande des représentants de la MTS, avant l'adoption définitive du projet de loi. Le gouvernement est disposé à poursuivre les consultations et à réexaminer tout domaine où pourraient apparaître des problèmes liés à la structure législative. Il fait toutefois remarquer que la bonne marche d'un processus de consultation authentique exige que l'ensemble des parties soient disposées à dialoguer et à envisager des compromis raisonnables, et il affirme que la MTS n'a pas toujours fait preuve de l'esprit voulu à cet égard.
- 170. En conclusion, le gouvernement affirme que, lorsqu'on les situe dans leur contexte, les modifications apportées ont non seulement un caractère raisonnable, mais que, si les parties prenantes font preuve de bonne foi, elles apporteront des améliorations à la procédure de négociation collective applicable aux enseignants et administrateurs du Manitoba dans les années à venir.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 171. Le comité note que les violations de la liberté syndicale alléguées dans le présent cas concernent trois catégories de modifications apportées récemment à la loi sur les écoles publiques de la province du Manitoba: en premier lieu, le fait que certaines questions ont été soustraites à la compétence des arbitres des différends dans un système où l'arbitrage obligatoire a été substitué par la loi au droit de grève des enseignants des écoles publiques; en deuxième lieu, le fait que, pour prendre une décision, les arbitres des différends doivent prendre en considération des éléments spécifiques, parmi lesquels la capacité à effectuer les paiements; en troisième lieu, le fait que l'ancien système de conciliation et d'arbitrage a été remplacé par un système combinant médiation et arbitrage. Les plaignants soutiennent que ces modifications ont eu pour effet de nuire à l'indépendance des arbitres et à l'équité de la procédure d'arbitrage, ce qui est contraire aux normes et principes de l'OIT relatifs à la liberté syndicale.
- 172. Le comité note que le gouvernement ne considère pas ces modifications comme une réponse temporaire aux graves difficultés financières et budgétaires auxquelles il faisait face, mais comme un moyen d'améliorer la procédure et les conditions de la négociation collective. Le comité note également qu'alors que les travailleurs du secteur de l'éducation sont autorisés à exercer le droit de grève s'ils le veulent (voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 545) les plaignants ne mettent en cause ni la validité de la procédure d'arbitrage obligatoire en tant que telle ni, par voie de conséquence, l'interdiction de recourir à la grève pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux, mais qu'ils contestent certains changements apportés à la procédure d'arbitrage.
- Compétence des arbitres des différends
- 173. Le comité note que, par suite des modifications apportées récemment à la loi sur les écoles publiques en matière de règlement des différends, les arbitres ne sont plus habilités à prononcer une sentence portant sur les points suivants: sélection, nomination, affectation et mutation d'enseignants et de principaux; méthode d'évaluation de la performance des enseignants et des principaux; effectif des classes; horaires des récréations et de la pause de midi. Tout en soustrayant ces questions à la compétence des arbitres, on a imposé aux commissions scolaires l'obligation d'agir de façon raisonnable et équitable et de bonne foi dans l'application de leur politique et de leurs usages régissant les questions exclues.
- 174. Selon le gouvernement, ces modifications ont été adoptées en raison des contraintes sérieuses que certaines sentences arbitrales récentes imposaient aux autorités locales. La nature de ces contraintes n'est pas précisée. Un autre argument mis en avant est celui selon lequel, d'après un rapport publié en 1992, il n'avait pas été demandé que les questions débattues soient incluses dans la négociation. Par ailleurs, le gouvernement affirme qu'en tout état de cause peu de conventions collectives traitent des questions énumérées.
- 175. Le comité rappelle tout d'abord que le droit de négocier librement avec les employeurs au sujet des conditions de travail constitue un élément essentiel de la liberté syndicale et que les syndicats devraient avoir le droit, par le moyen de négociations collectives ou par tout autre moyen légal, de chercher à améliorer les conditions de vie et de travail de ceux qu'ils représentent. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 782.) Auparavant, le comité avait noté en particulier l'importance de promouvoir la négociation collective dans le secteur de l'éducation. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 804.) En deuxième lieu, s'agissant de la question de la négociation collective, le comité rappelle le point de vue exprimé par la Commission d'investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale, selon lequel "il est certaines questions qui, manifestement, relèvent au premier chef ou essentiellement de la gestion des affaires du gouvernement; ces questions peuvent raisonnablement être considérées comme étrangères au champ de la négociation". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 812.) L'élaboration des grandes lignes de la politique générale de l'enseignement est donnée comme un exemple d'un domaine qui peut être exclu de la négociation collective; en revanche, certaines autres questions qui se rapportent au premier chef aux conditions d'emploi ne devraient pas être considérées comme étant en dehors du champ des négociations collectives. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 812-813.) Le comité considère donc que, à l'exception éventuelle des effectifs scolaires, les domaines qui ont été exclus de la compétence des arbitres concernent manifestement les conditions d'emploi et doivent donc, dans le contexte du système de détermination des conditions d'emploi dans le secteur de l'éducation du Manitoba, pouvoir relever de la juridiction de l'arbitrage. Quoique ces domaines ne figurent pas nécessairement dans les conventions collectives applicables aux enseignants des écoles publiques du Manitoba, ils n'en sont pas moins compris dans certaines de ces conventions; en tout état de cause, ils soulèvent pour les travailleurs d'importantes questions qui relèvent de plus en plus des conventions collectives. En ce qui concerne la sélection et le recrutement des enseignants et des principaux, le comité considère que l'établissement de procédures à cet égard devrait pouvoir être inclus dans les domaines relevant de l'arbitrage, tandis que les cas spécifiques de recrutement et de sélection peuvent en être exclus. En ce qui concerne l'effectif des classes, le comité reconnaît que cette question, si elle est susceptible d'influer sur les conditions d'emploi, peut aussi être considérée comme un sujet davantage lié à la politique générale de l'enseignement. Si le gouvernement estime que les questions comme celle des effectifs des classes doivent être réglées en dehors de la négociation collective, le comité lui demande de faire en sorte que les associations d'enseignants intéressées soient dûment consultées préalablement à l'élaboration et la mise en oeuvre des mesures prises à cet égard.
- 176. Le comité note l'affirmation du gouvernement selon laquelle il n'y a pas de violation puisque les parties restent libres de négocier volontairement ces questions et que l'obligation de bonne foi constitue une contrainte de poids pour les organismes employeurs. Cependant, le comité observe que, lorsque les organisations de travailleurs ne sont pas autorisées à recourir à un moyen quelconque de pression pour défendre leur position dans la négociation collective, l'efficacité de cette dernière risque de s'en ressentir. De l'avis du comité, les dispositions faisant obligation au gouvernement d'agir de manière raisonnable, équitable et de bonne foi dans l'application de sa politique régissant les questions qui ont été exclues par la loi -- la procédure de règlement des différends restant ouverte en cas de violation alléguée -- ne peuvent être considérées comme l'équivalent de la négociation collective, puisque le gouvernement garde la faculté d'agir unilatéralement dans ces domaines et que ces dispositions ne compensent pas suffisamment les restrictions apportées au droit de grève. Le comité rappelle que le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts professionnels. Ce droit ne peut être restreint que dans les services essentiels ou à l'égard des fonctionnaires publics agissant en tant qu'organes de la puissance publique, et les enseignants ne tombent pas dans la définition de l'une ou l'autre de ces catégories. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 474-475 et 536; voir aussi le 278e rapport, cas no 1570 (Philippines), paragr. 165-166.) Dans le présent cas, les plaignants ne contestent pas l'interdiction du droit de grève; en revanche, en échange de leur acceptation de renoncer à ce moyen important de défendre leurs revendications dans la négociation collective, ils devraient bénéficier des garanties voulues, notamment de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 547.) Puisque les domaines énumérés ne peuvent faire l'objet d'un arbitrage, les travailleurs et leurs organisations se trouvent dépourvus de moyens efficaces de défendre les revendications exprimées au cours des négociations et de compensations satisfaisantes.
- 177. Le comité demande donc instamment au gouvernement de prendre des mesures visant à faire abroger les modifications à la loi sur les écoles publiques du Manitoba qui limitent la compétence des arbitres des différends. Il lui demande de le tenir informé à cet égard. Le comité soumet cet aspect du cas à l'attente de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
- Facteurs que les arbitres des différends doivent prendre en considération
- 178. Le comité note que la loi sur les écoles publiques a fait également l'objet de modifications tendant à contraindre les arbitres des différends, quand ils ont à traiter de questions qui pourraient vraisemblablement avoir une incidence financière sur la division ou le district scolaire, à fonder leur décision principalement sur "la capacité de la division ou du district scolaire à effectuer les paiements" en tenant compte de ses recettes actuelles. La loi énumère ensuite un certain nombre de facteurs dont l'arbitre doit "tenir compte" pour déterminer la capacité à effectuer les paiements de la division ou du district intéressé.
- 179. Le comité note que, malgré les dénégations du gouvernement, ces modifications semblent être une tentative visant à maintenir le niveau des rémunérations dans certaines limites budgétaires tout en maintenant une certaine flexibilité par la recherche d'un équilibre entre les facteurs énumérés, comme la nécessité pour les divisions et districts scolaires de recruter des enseignants qualifiés et de retenir leurs services. Le comité considère qu'alors que les aspects financiers doivent être pris en compte en demandant à l'arbitre de baser sa décision "principalement" sur la capacité de payer, la législation va au-delà de ce qui est acceptable selon les principes de la liberté syndicale. En conséquence, le comité prie le gouvernement de modifier la législation en consultation avec les organisations de travailleurs concernées et de le tenir informé de l'évolution à cet égard. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur ce cas.
- Création d'un nouveau système de médiation et d'arbitrage
- 180. Le comité note que, en vertu de l'ancienne loi sur les écoles publiques, chaque partie pouvait, au cours de la négociation d'une convention collective, déclencher une procédure de conciliation financée par des recettes publiques. Si cette conciliation échouait, chacune des parties pouvait demander au ministre de nommer un conseil d'arbitrage. En vertu des modifications, la conciliation ne peut avoir lieu que si les parties demandent conjointement l'aide d'un conciliateur, dont elles doivent prendre en charge à parts égales la rémunération et les dépenses. Fondamentalement, la procédure de conciliation, puis d'arbitrage par un conseil, a été remplacée par une procédure de médiation et d'arbitrage. Aujourd'hui, chacune des parties peut demander au ministre de nommer un médiateur-arbitre pour l'aider à conclure une convention collective. Si la médiation échoue, chacune des parties ou le ministre pourra demander à ce médiateur-arbitre de fixer les clauses de la convention collective par arbitrage.
- 181. Comme on l'a indiqué ci-dessus, le comité admet que les restrictions apportées au droit de grève dans le présent cas soient compensées par une procédure de conciliation et d'arbitrage appropriée, impartiale et expéditive. Les plaignants soutiennent que le nouveau système de médiation et d'arbitrage n'est ni approprié ni impartial pour trois raisons: la procédure de conciliation doit être déclenchée conjointement et doit désormais être également payée conjointement; les fonctions de médiation et d'arbitrage du médiateur-arbitre ne sont pas suffisamment indépendantes; les parties sont conjointement responsables de la rémunération et des dépenses du médiateur-arbitre. Par ailleurs, les plaignants semblent indiquer que la révision du système n'a pas été précédée de consultations suffisantes avec les parties intéressées.
- 182. S'agissant de l'obligation faite aux parties de payer les services de conciliation et de médiation-arbitrage, le comité conclut que, si les coûts sont d'un montant raisonnable et ne nuisent pas à la capacité des parties, en particulier celles disposant de ressources financières insuffisantes, de recourir aux services offerts, il n'y a pas violation de la liberté syndicale. Par ailleurs, le comité ne prend pas position sur la supériorité de la conciliation par rapport à la médiation, étant donné qu'il s'agit de deux moyens d'aider les parties à atteindre un accord volontaire. Il ne prend pas position non plus sur la supériorité d'un système de conciliation distinct de l'arbitrage par rapport à un système combiné médiation-arbitrage tant que les membres des organes chargés de ces fonctions sont impartiaux et apparaissent comme tels. En cas de médiation et d'arbitrage de conflits collectifs, l'essentiel réside dans le fait que tous les membres des organes chargés de telles fonctions doivent non seulement être strictement impartiaux, mais doivent apparaître comme tels aussi bien aux employeurs qu'aux travailleurs, afin que la confiance dont ils jouissent de la part des deux parties et dont dépend le succès de l'action, même s'il s'agit d'arbitrage obligatoire, soit maintenue. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 549.)
- 183. S'agissant du dernier élément de la plainte, qui concerne le fait que le système d'arbitrage a été modifié sans consultations, le comité rappelle que, lorsqu'un gouvernement souhaite modifier les structures de négociation dans lesquelles il agit directement ou indirectement en tant qu'employeur et que, comme c'est le cas ici, ce système de négociation débouche sur l'arbitrage, il est particulièrement important qu'il suive une procédure de consultation appropriée, dans laquelle tous les objectifs puissent être examinés par toutes les parties intéressées. Ces consultations impliquent que la procédure soit conduite de bonne foi et que les deux parties disposent de toutes les informations nécessaires pour prendre une décision en connaissance de cause. (Voir 299e rapport, cas no 1802 (Canada/Nouvelle-Ecosse), paragr. 281; 300e rapport, cas no 1806 (Canada/ Yukon), paragr. 126.) Le comité note que, s'il y a bien eu un certain nombre de réunions publiques au sujet de la réforme de la législation du système éducatif, une seule de ces réunions a eu pour objet d'entendre la position officielle de la MTS et de la MAST. Par ailleurs, bien que la MTS semble avoir pu obtenir quelques modifications à la Loi après qu'elle eut été soumise à l'Assemblée législative, cette participation s'est produite très tard au cours de la procédure et ne peut être considérée comme une solution de remplacement aux consultations de bonne foi en vue de l'élaboration d'une politique visant à modifier la structure des négociations. Le comité demande au gouvernement de faire en sorte que des consultations de bonne foi soient désormais menées dans des conditions telles que les parties disposent de toutes les informations nécessaires pour pouvoir faire des propositions et prendre des décisions en connaissance de cause.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 184. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a. Le comité demande instamment au gouvernement de prendre des mesures visant à faire abroger les modifications à la loi sur les écoles publiques du Manitoba qui limitent la compétence des arbitres des différends et de le tenir informé à cet égard.
- b. Le comité demande au gouvernement, s'il considère que les questions comme celle des effectifs des classes doivent être réglées en dehors de la négociation collective, de faire en sorte que les syndicats d'enseignants intéressés soient dûment consultés avant l'élaboration et la mise en oeuvre des mesures prises dans ce domaine.
- c. Le comité demande au gouvernement de faire en sorte que des consultations de bonne foi soient désormais menées au sujet des changements à apporter à la structure des négociations dans des conditions telles que les parties disposent de toutes les informations nécessaires pour faire des propositions et prendre des décisions en connaissance de cause.
- d. Le comité soumet le présent cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.