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- 37. Le Syndicat national des employés des postes et des télécommunications (SNTCT) a présenté une plainte alléguant une violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Portugal dans une communication du 28 mars 1994. Le gouvernement a fourni ses observations sur ce cas dans une communication du 7 octobre 1994.
- 38. Le Portugal a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978. En revanche, il n'a pas ratifié la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations du syndicat plaignant
A. Allégations du syndicat plaignant
- 39. Dans sa communication du 28 mars 1994, le Syndicat national des employés des postes et des télécommunications (SNTCT), dont le siège est à Almeda, soutient que le gouvernement du Portugal a violé les conventions (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et (no 154) sur la négociation collective, 1981, ainsi que la recommandation (no 91) concernant les conventions collectives, 1951. Le syndicat plaignant explique que lui-même ainsi que d'autres organisations syndicales et l'entreprise publique, dénommée Entreprise des postes et des télécommunications du Portugal (CTT, EP), avaient conclu en 1990 un accord d'entreprise et que cet accord avait été modifié en 1991 et en 1992. Le syndicat plaignant ajoute qu'aux termes du décret-loi no 87/92 du 14 mars 1992 l'entreprise CTT, EP a été transformée en société anonyme à capitaux exclusivement publics et qu'elle s'est alors appelée Entreprise des télécommunications du Portugal SA (CTT, SA). Par la suite, aux termes du décret-loi no 277/92 du 15 décembre 1992 par scission de l'entreprise CTT, SA, l'entreprise TELECOM Portugal SA a été créée.
- 40. Or, selon le syndicat plaignant, l'article 9, alinéas 1 et 2, du décret-loi no 87/92 garantit le maintien des droits acquis des travailleurs de la CTT, EP. De même, poursuit le syndicat plaignant, aux termes de l'article 3, alinéas 1 et 2, du décret-loi no 277/92, les travailleurs des télécommunications de TELECOM Portugal SA conservent intégralement leurs droits acquis au sein de la CTT, EP. En conséquence, pour le syndicat plaignant, il n'y a aucun doute que l'accord d'entreprise de la CTT, EP, révisé d'ailleurs après le début du processus de privatisation, continue à lier l'entreprise TELECOM Portugal SA.
- 41. Le syndicat plaignant critique le fait que, nonobstant les droits acquis susmentionnés, le conseil d'administration de l'entreprise TELECOM Portugal SA aurait imposé abusivement à ses travailleurs un autre accord d'entreprise négocié avec des syndicats minoritaires qui représentent 522 adhérents. Il joint en annexe à sa plainte le texte du nouvel accord qui a été publié dans le Bulletin no 38 du Travail et de l'Emploi du 15 octobre 1993. Il s'agit d'un accord d'entreprise signé le 10 septembre 1993 entre l'entreprise TELECOM Portugal SA et le Syndicat démocratique des travailleurs des télécommunications et de la poste (SINDETELCO), ainsi que le Syndicat des communications du Portugal (SICOMP), la Fédération nationale des transports, communications et transports publics (FENTCOP), le Syndicat des économistes (SEC) et la Confédération nationale des syndicats de cadres (FENSIQ). L'accord de 1993 communiqué par les plaignants précise en son article 2, alinéa 2, qu'il est en vigueur pour douze mois et, en son article 1, alinéa 1, qu'il oblige, d'une part, l'entreprise TELECOM Portugal SA et, d'autre part, les travailleurs à son service représentés par les organisations syndicales signataires, quel que soit le lieu où ils se trouvent.
- 42. Le syndicat plaignant prétend que lui-même ainsi que le Syndicat des télécommunications (SINTEL) qui, déclare-t-il, représentent 7 368 travailleurs ne sont pas parvenus à un accord avec l'entreprise TELECOM Portugal SA. En conséquence, il estime que l'accord qui a été signé par les deux organisations syndicales minoritaires porte gravement atteinte aux droits individuels et collectifs des travailleurs.
- 43. De l'avis du syndicat plaignant, la conduite du conseil d'administration de l'entreprise TELECOM Portugal SA, dont les membres sont désignés par le gouvernement portugais, constitue une violation de la convention no 98. L'imposition unilatérale d'un instrument de réglementation collective du travail négocié avec des syndicats tout à fait minoritaires, contre la volonté des syndicats représentatifs, est, affirme-t-il, contraire à la recommandation no 91 et à la convention no 154 ainsi qu'à l'article 56, alinéa 3, de la Constitution portugaise qui consacre le droit de négociation collective. De plus, cette imposition est contraire à l'accord d'entreprise négocié par le syndicat plaignant qui n'a pas été dénoncé et qui est toujours en vigueur. Enfin, toujours selon le syndicat plaignant, la responsabilité du gouvernement portugais est aggravée par l'inaction de l'inspection du travail.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 44. Le gouvernement convient que l'Entreprise publique des postes et télécommunications du Portugal (CTT, EP) avait conclu avec le syndicat plaignant et avec d'autres organisations syndicales un accord d'entreprise en 1990, que cette entreprise publique et ledit syndicat ainsi que d'autres organisations syndicales avaient procédé à la révision dudit accord d'entreprise en 1991 et que la révision de l'accord d'entreprise de 1992 a été signée par la CTT, SA, successeur de la CTT, EP. Ultérieurement, à la suite de la scission de la CTT, SA, TELECOM Portugal SA a été créée.
- 45. L'accord d'entreprise qui s'appliquait au sein de la CTT, SA a continué à s'appliquer au sein de TELECOM Portugal SA en application de l'article 9 du décret-loi no 519-C1/79 du 29 décembre 1979 portant réglementation des relations professionnelles. Le gouvernement explique que cet article 9 a été modifié par le décret-loi no 209/92 du 2 octobre 1992 peu avant la création de TELECOM Portugal SA et qu'il dispose désormais qu'"en cas de cession totale ou partielle d'une entreprise ou d'un établissement l'entrepreneur cessionnaire sera tenu d'observer jusqu'au terme de sa validité et au moins pendant douze mois depuis la date de la cession l'instrument de réglementation collective qui lie l'employeur cédant, sauf si une autre convention lui a été substituée".
- 46. Le gouvernement poursuit en expliquant que l'entreprise TELECOM Portugal SA et le SNTCT plaignant ont respectivement présenté des propositions en vue de négocier un nouvel accord d'entreprise en août 1993. Il ajoute qu'ils ont tenu des réunions de négociation sans toutefois parvenir à un accord. D'après lui, ni l'entreprise ni le syndicat plaignant n'ont sollicité l'intervention des pouvoirs publics compétents pour tenter une conciliation. Cependant, dans le même temps, l'entreprise TELECOM Portugal SA est parvenue à un nouvel accord avec cinq organisations syndicales.
- 47. Le gouvernement estime que l'accord antérieur n'était plus en vigueur et qu'en 1993 le nouvel accord a été conclu valablement entre l'employeur et cinq organisations syndicales. Il ajoute néanmoins qu'un procès-verbal d'avertissement a été dressé par l'inspection générale du travail à l'employeur, qui a introduit un recours auprès des tribunaux. Par là, l'inspection a admis l'argumentation du syndicat plaignant relative à la continuation des obligations de l'entreprise aux termes du précédent accord. Les raisons invoquées par le gouvernement pour douter de cette argumentation juridique n'empêchent pas naturellement l'inspection générale du travail d'agir de manière autonome. La question est, en droit interne, complexe et il appartiendra aux tribunaux de statuer.
- 48. Le gouvernement explique aussi que le syndicat plaignant ne nie pas avoir effectivement participé à la négociation avec l'entreprise TELECOM Portugal SA en 1993, mais qu'en l'espèce il a décidé de ne pas signer l'accord d'entreprise.
- 49. Le gouvernement fait également observer que le syndicat plaignant ne dit pas en quoi l'entreprise TELECOM Portugal SA aurait "imposé abusivement à ses travailleurs" un accord d'entreprise qu'elle a signé avec d'autres organisations syndicales. En outre, les informations recueillies par le gouvernement auprès de l'entreprise et de l'inspection générale du travail ne permettent pas, selon lui, d'éclaircir la question. D'après le gouvernement, il ne semble pas que les travailleurs représentés par le syndicat plaignant aient vu leurs salaires diminuer. Le syndicat plaignant lui-même ne dit pas dans la plainte en quoi cette "imposition" de l'accord se serait traduite par des diminutions de salaires ou autres prestations. Le gouvernement poursuit en indiquant que si, d'aventure, il y avait eu des diminutions de salaires ou autres bénéfices, l'entreprise aurait probablement fait l'objet de condamnations par les tribunaux suite au procès-verbal dressé par l'inspection générale du travail. Au contraire, selon le gouvernement, l'entreprise a augmenté les rémunérations des travailleurs, y compris de ceux représentés par le syndicat plaignant, et il serait difficile de sanctionner une telle action.
- 50. En conclusion, le gouvernement estime que l'entreprise TELECOM Portugal SA n'a pas violé la convention no 98. Le syndicat plaignant n'a pas apporté la preuve de cette allégation puisqu'il n'a pas précisé quel serait l'aspect critiquable de la conduite de l'entreprise qui aurait violé la convention. Rien dans la plainte ne comporte l'indication d'une limitation des activités de l'organisation syndicale des travailleurs de l'entreprise TELECOM Portugal SA, et plus spécifiquement du syndicat plaignant. La convention no 98 n'oblige pas à ce que les conventions collectives signées par une entreprise s'appliquent successivement et de manière illimitée dans le temps aux entreprises qui lui succèdent. Par ailleurs, le processus de négociation volontaire des conventions collectives est reconnu et favorisé par la loi portugaise. Le syndicat plaignant jouit du droit constitutionnel légal de négocier collectivement avec les employeurs et les organisations d'employeurs qui occupent les travailleurs qu'il représente. Dans le présent cas, l'entreprise a tenu des négociations sur la base de propositions tant de l'entreprise que du syndicat plaignant. Ces négociations étaient libres, et c'est certainement en toute liberté que le syndicat plaignant n'a pas accepté les propositions de l'entreprise. Les autorités publiques compétentes pour promouvoir la conciliation lors de ces négociations étaient, comme dans toutes les négociations, à la disposition des parties, sur leur demande; or les parties ne les ont pas sollicitées.
- 51. Selon le gouvernement, la recommandation no 91 concernant les conventions collectives n'a pas non plus été violée. D'après les informations recueillies par le gouvernement, l'entreprise aurait augmenté les rémunérations et autres prestations des travailleurs, y compris de ceux qui étaient représentés par le syndicat plaignant, avec propositions de modifications de leurs contrats de travail acceptées par les travailleurs. Même s'il y avait eu une convention collective en vigueur pour les travailleurs représentés par le syndicat plaignant, cette procédure est expressément acceptée par la recommandation no 91 qui prévoit que "des dispositions de contrats de travail plus favorables aux travailleurs que celles que prévoit la convention collective ne devraient pas être considérées comme contraires à la convention collective".
- 52. Enfin, toujours selon le gouvernement, il n'est pas exact de dire que l'accord d'entreprise passé entre le syndicat plaignant et la CTT, EP, postérieurement applicable à l'entreprise TELECOM Portugal SA, était en vigueur. Le gouvernement ne comprend pas quelle serait la pratique qui, selon le syndicat plaignant, serait contraire à la Constitution portugaise. La procédure d'augmentation de salaires et autres paiements aux travailleurs, y compris à ceux qui sont représentés par le syndicat plaignant, après propositions de modifications de leurs contrats de travail, et dès lors que ces propositions ont été acceptées par les travailleurs, n'est certainement pas contraire à une règle constitutionnelle et encore moins aux normes de l'OIT.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 53. Le comité observe que ce cas concerne une plainte du Syndicat national des employés des postes et télécommunications (SNTCT), alléguant la violation d'un accord d'entreprise par une entreprise portugaise des télécommunications, TELECOM Portugal SA, qui a pris la suite de l'entreprise CTT, EP, signataire de l'accord. Selon le syndicat plaignant, l'accord d'entreprise conclu en 1990 par lui-même et d'autres organisations syndicales avec la CTT, EP, puis révisé en 1991 et 1992, aurait été écarté par l'"imposition abusive" par TELECOM Portugal SA d'un nouvel accord d'entreprise négocié avec des syndicats minoritaires en 1993.
- 54. Le gouvernement soutient que le précédent accord d'entreprise de 1990, tel que révisé en 1991 et 1992, était arrivé à expiration et que le syndicat plaignant, qui a d'ailleurs accepté d'engager des négociations avec le nouvel employeur en août 1993, a refusé de signer le nouvel accord d'entreprise. Le gouvernement ajoute qu'entre-temps un nouvel accord a été signé entre l'entreprise TELECOM Portugal SA et cinq autres organisations syndicales, et qu'il a été publié le 15 octobre 1993. D'après le gouvernement, le nouvel accord d'entreprise contient des augmentations de salaires accordées aux travailleurs, y compris aux membres des organisations signataires du premier accord. Le gouvernement admet cependant que l'inspection générale du travail a dressé un procès-verbal d'avertissement à l'entreprise TELECOM Portugal SA pour avoir cessé d'appliquer le précédent accord d'entreprise à ses travailleurs. Le gouvernement indique que l'employeur, auquel le procès-verbal a été dressé, a introduit un recours auprès des tribunaux.
- 55. Le comité relève que l'accord précédant immédiatement l'accord actuellement en vigueur a été déposé le 7 octobre 1992 et publié au Bulletin officiel no 39 du 22 octobre 1992. Cet accord dispose, aux termes de son article 3, alinéa 1, qu'il ne pourra être dénoncé avant dix mois après la date de son dépôt, soit le 7 août 1993. Le comité note également que le plaignant reconnaît qu'il n'est pas parvenu à un accord avec l'entreprise TELECOM Portugal SA.
- 56. Le comité observe que le nouvel accord a été signé entre TELECOM Portugal SA et cinq organisations mentionnées le l4 septembre 1993. Constatant que la date de signature de cet accord est postérieure à la date à laquelle pouvait être dénoncé l'accord d'entreprise précédent, le comité estime qu'il n'y a pas dans le cas d'espèce violation d'un accord collectif en vigueur. En conséquence, le comité estime que ce cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 57. Vu les conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que ce cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.