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- 240. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) figurait dans une communication du 21 décembre 1988. Le gouvernement avait répondu dans une communication du 27 mars 1989. A sa session de mai 1989, le comité avait chargé le Bureau d'obtenir des informations complémentaires des plaignants et du gouvernement en vue de procéder à l'examen de cette affaire en pleine connaissance de cause. (Voir 265e rapport du comité, approuvé par le Conseil d'administration à sa session de mai-juin 1989, paragr. 5.) Par la suite, la CISL avait envoyé des informations complémentaires à l'appui de sa plainte dans une communication du 11 septembre 1989. Le gouvernement avait fait parvenir ses commentaires et observations en réponse à ces informations complémentaires dans une communication du 30 janvier 1990. A sa réunion de mai 1990, le comité avait examiné ce cas et présenté un rapport intérimaire. (Voir 272e rapport, paragr. 389 à 444, approuvé par le Conseil d'administration à sa 246e session (mai-juin 1990).) Depuis lors, la CISL a envoyé de nouvelles allégations dans une communication du 1er août 1990, et le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication du 26 septembre 1990.
- 241. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 1. Allégations de la confédération plaignante
- 242. Dans sa communication du 21 décembre 1988, la CISL avait allégué que la loi sur les associations solidaristes institutionnalisait une série de pratiques antisyndicales en violation des conventions nos 87 et 98. Elle ajoutait que ce type d'associations, leurs structures et leurs mécanismes n'étaient pas conformes aux principes des organisations de travailleurs indépendantes, du fait de la présence d'employeurs en leur sein et du contrôle qu'ils exerçaient sur elles, qu'elles empêchaient le développement et le fonctionnement des véritables organisations de travailleurs, qu'il s'agisse de syndicats ou de coopératives, et qu'elles avaient eu pour résultat l'affaiblissement du mouvement syndical et la destruction de nombreuses organisations syndicales, objectif que visaient déjà les idéologues et les fondateurs du mouvement solidariste. La CISL signalait que, lorsque la commission législative avait discuté de la loi précitée, les représentants syndicaux n'avaient pas été autorisés à assister aux séances, bien qu'ils en eussent fait la demande, et les autorités avaient seulement accepté que les centrales syndicales donnent leur avis par écrit, mais en leur impartissant pour cela un délai maximum de deux jours, de sorte qu'il n'avait pas été possible que leur réponse parvînt à temps.
- 243. La loi sur les associations solidaristes représentait un retour en arrière dans le domaine du travail. Elle prévoyait qu'une telle association pouvait être constituée avec un minimum de 12 personnes, disposition manifestement injuste puisque, pour créer un syndicat, il en fallait au moins 20 (article 273 du Code du travail). En outre, alors que les activités commerciales à but lucratif étaient interdites aux syndicats, les associations solidaristes étaient légalement autorisées à exercer des activités économiques très diverses. La CISL indiquait qu'elle avait pu constater en pratique qu'à partir de l'adoption de la loi sur les associations solidaristes il s'était produit une dégradation sensible des droits syndicaux et une augmentation des pratiques antisyndicales. Les associations solidaristes s'étaient transformées en un simple mécanisme de manipulation de la part de secteurs sociaux extérieurs à la classe ouvrière. Il était évident, à cet égard, que le secteur patronal capitaliste exerçait sur ce mécanisme un contrôle social et idéologique qui correspondait à des caractéristiques inhérentes à la pensée, à l'idéologie, au mode d'organisation et à l'action du mouvement solidariste. En pratique, par exemple, pour ce qui était de la gestion des associations solidaristes, qui était censée être assumée par les travailleurs de l'entreprise, il avait été établi, pour 50 associations prises au hasard en 1981, que les postes les plus importants du conseil de direction étaient occupés par des personnes exerçant les professions d'administrateurs ou de gérants, de cadres, de techniciens ou de vendeurs (c'est-à-dire appartenant au personnel administratif de confiance). La proportion de travailleurs exerçant des métiers simples (ouvriers, artisans, personnel de service) parmi les responsables de ces associations se situait entre 5 et 12 pour cent pour les postes importants et atteignait 20 pour cent pour les moins importants. La CISL avait également signalé la dégradation subie par la négociation collective débouchant sur des conventions collectives, qui était remplacée par des accords directs conclus entre des groupes de travailleurs et d'employeurs.
- 244. Selon la CISL, la progression des associations solidaristes s'accompagnait irrémédiablement d'une tendance à la disparition des syndicats. Cela s'était vérifié de façon spectaculaire dans la zone atlantique du Costa Rica et dans d'autres zones géographiques précédemment contrôlées par le syndicalisme costa-ricien. Les associations solidaristes avaient réussi à évincer, au cours de la présente décennie, la majorité des syndicats de l'industrie et du secteur de la banane. Selon des informations provenant du ministère du Travail, il existait en janvier 1987, dans le secteur de l'industrie, 19 syndicats, comptant 4.313 membres, et 343 associations solidaristes, groupant 16.229 travailleurs. Dans le secteur de la banane, ancien bastion de l'organisation syndicale du pays, les syndicats avaient été décimés et des associations solidaristes avaient été constituées à leur place. La persécution des syndicats et le développement d'associations solidaristes dans le secteur privé avaient eu notamment pour conséquence une importante dégradation de la négociation collective. Les patrons, s'appuyant sur le solidarisme, avaient imposé aux travailleurs des accords directs en guise de "négociation collective", afin de supprimer les conventions collectives et les conflits socio-économiques. Ainsi, en 1980, les conventions collectives et les conflits de caractère socio-économique avaient compté, respectivement, pour 29 pour cent et 64 pour cent dans les négociations collectives, et il n'y avait eu que 7 pour cent d'accords directs. En 1986, la proportion n'était plus que de 28 pour cent pour les conflits et de 21 pour cent pour les conventions. En revanche, elle était passée à 51 pour cent pour les accords directs. Cette évolution était liée à la disparition des syndicats.
- 245. Vu la gravité de la situation, une délégation de la CISL s'était rendue au Costa Rica, où ses membres s'étaient entretenus avec des représentants des organisations affiliées à la confédération et avec diverses autorités du pays. Le thème central de ces entretiens avait été le danger que représentent les associations solidaristes et leur utilisation pour des pratiques antisyndicales. Lors d'une réunion avec M. Oscar Arias, Président de la République, il avait été décidé de s'adresser à l'OIT afin qu'elle envoie des experts en législation du travail en vue d'assurer la compatibilité des modifications qui seraient apportées au Code du travail avec les conventions internationales du travail. Quatre ans s'étaient, hélas, écoulés depuis que l'on avait soulevé le problème du danger que les associations solidaristes représentaient pour le libre développement du mouvement syndical, et le problème subsistait, avec cette circonstance aggravante que la destruction des syndicats se poursuivait systématiquement.
- 246. La CISL rappelait aussi les conclusions et recommandations que le Comité de la liberté syndicale avait formulées lorsqu'il avait examiné, à propos du cas no 1304, le projet de loi relatif aux associations solidaristes au Costa Rica (qui depuis avait été adopté) et la suggestion qu'il avait faite au gouvernement d'envisager la possibilité d'accepter l'offre d'une assistance technique du BIT en rapport avec la réforme du Code du travail. La CISL envoyait également un rapport de l'Organisation régionale interaméricaine des travailleurs (ORIT) sur le problème solidariste et relatait en détail l'"offensive solidariste" menée depuis 1981 dans les zones productrices de bananes. Concrètement, la CISL signalait un ensemble de mesures prises par le secteur patronal dans la province de Limón, parmi lesquelles il conviendrait de relever en particulier le licenciement d'un grand nombre de travailleurs membres des organismes de base du syndicat, la formation immédiate d'associations solidaristes dans les plantations et l'obligation virtuelle faite à tout nouveau travailleur engagé d'y adhérer, la méconnaissance de la convention collective signée par le syndicat et son remplacement par le mécanisme de l'accord direct. Sur les 1.015 associations solidaristes actives dans le pays et qui comptaient en tout 160.000 membres, 100 exerçaient leurs activités dans les zones bananières. Leur capital social global se chiffrait à 200 millions de colones, et elles avaient négocié 50 accords directs.
- 247. Selon la CISL, il était évident que le gouvernement, les chambres patronales et les entreprises transnationales s'intéressaient de plus en plus aux associations solidaristes et y voyaient - dans la période actuelle de crise - une issue possible aux problèmes propres aux relations professionnelles. Dans ce contexte, le mouvement syndical était présenté comme un obstacle aux propositions tendant à résoudre la crise économique.
- 248. Enfin, la CISL s'était dit préoccupée de constater que le mouvement solidariste était en train de se répandre dans d'autres pays d'Amérique latine.
- 2. Réponse du gouvernement antérieur
- 249. Le gouvernement déclarait, dans sa communication du 27 mars 1989, que le droit d'association était consacré par la Constitution qui, dans son article 60, disposait que "les patrons comme les travailleurs pourront constituer librement des syndicats dans le but exclusif d'obtenir ou de conserver les avantages économiques, sociaux ou professionnels ...". En outre, en vertu de l'article 291 du Code du travail, il incombe au ministère du Travail et de la Sécurité sociale de promouvoir l'activité syndicale. Le Costa Rica se conformait à ces dispositions légales et, à cet égard, il s'en remettait au Comité de la liberté syndicale pour le cas où il serait nécessaire de procéder à une évaluation du respect accordé au mouvement syndical. En effet, dans la plupart des cas qui avaient été soumis au comité, le pays ne s'était pas vu adresser de recommandations qui auraient impliqué ou signifié qu'il existât une politique systématique de persécution contre les organisations syndicales. En ce qui concernait la plainte présentée par diverses confédérations syndicales qui alléguait l'inexécution de certaines conventions (cas no 1304), le gouvernement s'était engagé à mettre en pratique les recommandations qui avaient été formulées, en particulier celles qui concernaient l'assistance technique du Bureau international du Travail, en vue de la rédaction du texte portant réforme du Code du travail. C'est ainsi que, grâce aux recommandations techniques formulées par les experts du BIT, le projet initial avait été substantiellement amélioré, en particulier en ce qui concernait le droit collectif.
- 250. Au début du mois de janvier 1988, un fonctionnaire du BIT s'était rendu dans le pays. Au mois de mai de la même année, l'assistance technique demandée avait été fournie par l'intermédiaire de M. Geraldo von Potobsky, représentant du Directeur général, qui avait donné des conseils au Comité de rédaction. Conformément aux corrections suggérées par le BIT, les dispositions prévoyant la coexistence du syndicat et du Comité permanent des travailleurs comme représentants des salariés dans l'entreprise avaient été éliminées du projet, de sorte que ledit comité ne pouvait exister qu'en l'absence de syndicat, et des dispositions prévoyant la réintégration des travailleurs licenciés pour avoir participé à des activités syndicales avaient été introduites. Des corrections au projet modifiant dans le sens indiqué par le BIT de nombreuses dispositions des chapitres traitant du droit collectif du travail et, en particulier, de l'enregistrement des syndicats, de la réglementation des grèves, du quorum de l'assemblée syndicale, de la réélection des dirigeants, etc. avaient été apportées.
- 251. En ce qui concernait les allégations relatives au "solidarisme", le gouvernement déclarait que, si le mouvement syndical était en recul tandis que le solidarisme se développait, ainsi que l'indiquait la CISL, cela était dû dans bien des cas à des facteurs d'ordre essentiellement interne intéressant les directions syndicales, qui échappaient à sa compétence. Certes, le droit à l'activité syndicale était protégé, mais, ainsi que le prescrivait la loi, il n'y avait pas ingérence dans le fonctionnement interne des organisations en question. Il s'agissait en effet de personnes de droit privé, et le gouvernement n'intervenait pas dans leur organisation ni dans le cours de leurs activités. Cette position était conforme aux dispositions des conventions de l'Organisation internationale du Travail sur la liberté syndicale et les activités qui s'y rapportent. Les causes du plus ou moins grand développement des organisations syndicales étaient donc imputables à ces organisations elles-mêmes, qui savaient quelles étaient leurs propres activités et étaient responsables des divers phénomènes pouvant avoir une incidence sur celles-ci, ainsi que sur leur développement et leur organisation.
- 252. Le gouvernement ajoutait que le mouvement solidariste, créé par la loi no 6970 du 7 novembre 1984, était le corollaire du droit de s'associer librement qui appartenait à tous les habitants de la République, droit consacré par le chapitre 4 de la Constitution politique de la République. L'article 25 de la Constitution disposait à cet égard que: "Les habitants de la République ont le droit de s'associer à des fins licites. Nul ne pourra être obligé de faire partie d'une quelconque association." Cette disposition constitutionnelle devait s'interpréter comme posant en principe le droit d'association au sens large, qui s'appliquait aussi bien aux sociétés commerciales et ordres professionnels qu'à un grand nombre d'organisations à but non lucratif, telles que fondations, associations de développement communautaire, etc. Le gouvernement réfutait l'allégation des centrales syndicales selon laquelle les organisations solidaristes auraient été instituées juridiquement comme un mécanisme de manipulation de la part de secteurs sociaux étrangers à la classe ouvrière. La loi elle-même, dans son article 10, dispose que la direction et l'administration de ces associations incombent exclusivement aux travailleurs qui leur sont affiliés. En outre, puisque l'article 25 précité de la Constitution dispose que nul ne pourra être obligé de faire partie d'une quelconque association, l'allégation des centrales syndicales plaignantes était dénuée de fondement car il était inexact de dire que les travailleurs fussent légalement obligés d'appartenir à ces associations. Au cas où une telle situation viendrait à se présenter dans la réalité, les intéressés pourraient engager une action devant les autorités administratives ou judiciaires. Il était également inexact de dire qu'il existait une connivence entre le gouvernement et les associations solidaristes, ainsi que le prétendaient les confédérations syndicales. L'article 8 de la loi no 6970 sur les associations solidaristes était clair lorsqu'il interdisait à ces associations, à leurs organes de direction et d'administration et à leurs représentants légaux toute activité tendant à combattre ou à entraver la formation et le fonctionnement des organisations syndicales et coopératives. Le non-respect de cette disposition devait entraîner la dissolution de l'association en question. Elle impliquait qu'à tout moment l'attitude du gouvernement était de respecter la législation en vigueur en matière syndicale.
- 253. Le gouvernement déclarait également que le projet de loi portant création des associations solidaristes avait bénéficié en son temps d'une large publicité, tant au sein de la Commission des affaires juridiques qu'à l'occasion des séances plénières de l'assemblée législative, et que les représentants syndicaux avaient eu le temps et l'occasion de formuler leurs observations.
- 254. En conclusion, le gouvernement rejetait les accusations d'infraction aux dispositions des conventions nos 87 et 98 formulées contre lui par la CISL et demandait que la plainte soit déclarée sans fondement.
- 255. A sa session de mai 1989, le comité avait chargé le Bureau d'obtenir des parties des informations complémentaires en vue de procéder à l'examen de cette affaire en pleine connaissance de cause.
- 3. Informations complémentaires fournies par la CISL
- 256. La CISL avait envoyé des informations complémentaires dans une communication en date du 11 septembre 1989.
- 257. Selon la CISL, le gouvernement et les employeurs avaient favorisé les associations solidaristes au détriment des organisations syndicales avec la promulgation de la loi no 6970 d'octobre 1984, laquelle avait doté le mouvement solidariste d'un cadre juridique propre, ce qui désavantageait le syndicalisme puisque son cadre légal datait de 1943 et lui interdisait de mener des activités de caractère lucratif. La loi sur les associations solidaristes permettait au contraire au mouvement solidariste, d'une part, d'exercer toute une gamme d'activités qui étaient traditionnellement assumées par les organisations syndicales et, d'autre part, elle autorisait le solidarisme à contrôler et administrer les fonds destinés aux indemnités de licenciement, en les utilisant pour financer ses propres activités. Le Plan national de développement 1986-1990 de l'Administration gouvernementale 1986-1990 prévoyait d'augmenter la productivité du travail en renforçant les nouvelles formes d'organisation sociale, comme les coopératives et les associations solidaristes, ce qui était conforme aux dispositions de l'article 6 de la loi solidariste concernant l'appui que l'Etat prêtait au solidarisme. A propos de la démocratie économique, le plan visait, entre autres objectifs, à canaliser l'épargne vers les coopératives et les associations solidaristes. Dans cette logique, la participation du syndicalisme était omise.
- 258. En qui concernait l'appui économique prêté au solidarisme, le gouvernement, de 1982 à 1990, avait utilisé à cette fin les ressources institutionnelles suivantes:
- a) Don de la Coalition costa-ricienne pour les initiatives en faveur du développement (CINDE), institution créée en vue d'encourager les investissements étrangers dans le secteur privé et qui s'inscrit dans le cadre des incitations prévues par le Programme du bassin des Caraïbes, promu par le gouvernement des Etats-Unis et financé par l'Agence pour le développement international (AID). Elle avait fait un don de 5,5 millions de colones à l'Ecole sociale Jean XXIII, organisme supérieur du solidarisme rattaché à la hiérarchie de l'Eglise catholique, pour mettre sur pied des cours de formation solidariste.
- b) Don du ministère de la Planification et de la Politique économique à l'Ecole sociale Jean XXIII, d'un montant de 5 millions de colones, pour des programmes de formation solidariste.
- 259. En outre, la promulgation de la loi sur la modernisation du système financier de la République, en octobre 1988, avait eu pour objectif d'assimiler les fonctions de la banque privée à celles de la banque d'Etat. L'article 28 de cette loi autorisait la création de banques solidaristes. Cette nouvelle mesure faisait ressortir l'appui institutionnel que l'Etat accordait au solidarisme en favorisant, sur le plan politique et juridique, des conditions propices qui lui permettaient, en matière tant politique qu'économique, de concurrencer le coopératisme et le syndicalisme dans leurs programmes et leurs domaines d'action.
- 260. Toujours selon la CISL, la politique syndicale menée par les derniers gouvernements qui avaient été aux affaires de 1978 à 1989 se caractérisait par le souci de limiter l'exercice de la négociation collective des syndicats du secteur public. Cela avait été rendu possible par la promulgation de la loi générale sur l'administration publique de 1978, entrée en vigueur le 26 avril 1979. Cette loi prévoyait, en son article 112, que "... le droit administratif sera applicable aux relations de service entre l'Etat et les agents publics". Le bureau du Procureur général de la République avait interprété cette disposition comme signifiant qu'il n'était plus possible désormais de signer des conventions collectives de travail dans le secteur public car, en vertu de la nouvelle réglementation, les relations professionnelles étaient régies par le droit administratif, et non plus par le droit du travail.
- 261. Les mesures de réduction et de contrôle des dépenses publiques prévues dans le cadre de la négociation d'accords avec le Fonds monétaire international étaient à l'origine de l'adoption de la loi sur l'autorité budgétaire de 1982 et de la loi sur l'équilibre financier du secteur public de 1984. Dans les deux cas, la marge de liberté des institutions autonomes en ce qui concernait leur propre budget avait été réduite soit en leur ôtant des ressources, soit en créant de nouveaux contrôles, soit en leur imposant de suivre les directives de l'autorité budgétaire en matière salariale. Les arguments précités avaient amené à fixer des limites à la négociation des conventions collectives. Ce facteur, s'ajoutant au refus de l'entreprise privée nationale et transnationale de signer des conventions collectives, circonscrivait étroitement pour le syndicalisme les possibilités de participer à des négociations collectives.
- 262. En ce qui concernait l'appui que les chefs d'entreprise prêtaient au mouvement solidariste, la CISL signalait que, dans un discours prononcé à l'occasion de la cinquième Journée solidariste, en mai 1989, M. Edmundo Gerli G., représentant des employeurs, avait déclaré:
- "Récemment, la Chambre des industries s'est à juste titre préoccupée d'une accumulation de symptômes, rumeurs, faits et révélations qui indiquent que le solidarisme est en danger. Nous tous qui sommes ici présents - et je suis très heureux d'avoir à le dire - devons féliciter vivement la Chambre d'avoir pris l'initiative d'organiser une rencontre entre sa direction et les représentants de l'union solidariste et de l'Ecole sociale Jean XXIII. Il en est résulté des révélations très préoccupantes, car nous sommes arrivés à la conclusion irréfutable que le solidarisme soutient un siège organisé, bien dirigé et financé, une guerre soigneusement étudiée et planifiée dans ses aspects stratégiques, aux incalculables effets d'affaiblissement. Et le pire est encore de réaliser que la plus grande vulnérabilité de notre relation employeur-travailleurs, jusqu'ici harmonieuse, est, chose incroyable, imputable à ceux qui en ont le plus bénéficié, à savoir nous-mêmes, les chefs d'entreprise."
- Après quoi, l'orateur avait appelé les chefs d'entreprise et la Chambre des industries à appuyer la création du Conseil supérieur du solidarisme. La CISL signalait ensuite que, le même jour, M. Samuel Hidalgo avait déclaré:
- "Nous avons souvent entendu à la radio ou lu dans les journaux - si même nous n'avons pas été directement visés - que des syndicalistes nous attaquaient devant l'OIT et lors de réunions de caractère international où nous n'avons pas la possibilité de nous défendre en nous accusant de servir d'écran de fumée aux chefs d'entreprise. Ces accusations n'émanent que de personnes étrangères au solidarisme qui méconnaissent nos idéaux nobles et élevés. Le problème du solidarisme est précisément que, dans bien des cas, les chefs d'entreprise constituent une association solidariste dans leur établissement puis l'abandonnent sans prêter aucune attention ni fournir aucun appui aux programmes quelle s'efforce de mettre en oeuvre. Cette attitude de nonchalance et de désintérêt de la part des chefs d'entreprise et de leurs représentants est le talon d'Achille du solidarisme."
- M. Rodrigo Jiménez, directeur exécutif de l'Union solidariste costa-ricienne, avait quant à lui déclaré, au cours de ladite journée solidariste:
- "Il incombe à tous les solidaristes - chefs d'entreprise, dirigeants et travailleurs - de faire en sorte que, à tous les niveaux du mouvement solidariste, on retourne en faveur de celui-ci les situations qui pourraient contribuer à miner la confiance que la population met en lui et à alimenter la campagne de discrédit, de persécution, d'infiltration et de désinformation qui est menée contre le solidarisme. Chacun d'entre nous doit se transformer en un gardien vigilant, un critique objectif et un militant enthousiaste pour la sauvegarde de notre mouvement."
- 263. La CISL soulignait aussi que des coupures de presse, qu'elle fournissait, mettaient en évidence les objectifs du secteur patronal en ce qui concernait le solidarisme et l'appui qu'il lui fournissait. (Un article paru dans La Prensa Libre du 5 août 1989 révélait que l'Union solidariste costa-ricienne s'intéressait aux possibilités de dispenser aux chefs d'entreprise une formation concernant les principes, les objectifs et les buts du solidarisme.) De même, M. Jack Loeb, président des entreprises transnationales BANDECO et PINDECO, s'était engagé, en janvier 1987, à consacrer chaque année 1,5 million de colones à la formation de dirigeants solidaristes, et, lors d'entrevues organisées en mai 1989, des travailleurs et des dirigeants syndicaux du secteur de la banane avaient expliqué la forme que revêtait l'appui de l'entreprise au solidarisme.
- 264. La CISL annexait à sa communication les extraits de témoignages suivants:
- Extraits du témoignage de Mario Mendoza Morava, responsable du SITAGAH:
- "Le solidarisme à Río Frío ... a acquis une certaine force, en se fondant ou s'appuyant directement sur l'ensemble de l'appareil administratif de l'entreprise qui, vous le savez, est très puissant. Dans chaque plantation, on compte au moins cinq personnes de l'administration qui se consacrent directement au travail de prosélytisme dans certains cas et, le plus souvent, font pression sur les travailleurs pour qu'ils abandonnent le syndicalisme et adhèrent au solidarisme, qui est ce qui convient à l'entreprise."
- Extraits du témoignage d'Eduardo Vargas, secrétaire général du Syndicat unifié des travailleurs agricoles des plantations (SUTAP):
- "Les comités de direction des associations solidaristes ... entretiennent de très bons rapports avec l'entreprise, ils se réunissent avec les représentants de celle-ci, et même ils en reçoivent des instructions. La preuve en est que les responsables de l'Ecole sociale Jean XXIII ont leurs locaux dans le Bureau des ressources humaines ... que l'entreprise leur a fournis dès qu'ils sont arrivés."
- L'intéressé poursuivait:
- "... l'apparition du mouvement solidariste est la conséquence d'une politique très élaborée du patronat qui vise à l'opposer aux syndicats en vue de remplacer une organisation de classe des travailleurs par une organisation qui, au début, promettait beaucoup".
- Puis il déclarait:
- "Dans une plantation, on vous dit, vous voulez une maison, adhérez au solidarisme, quittez le syndicat. Vous voulez travailler dans des conditions qui ne soient pas difficiles, quittez le syndicat, adhérez au solidarisme. Enfin, vous voulez garder votre travail, restez avec le solidarisme."
- 265. La CISL fournissait aussi des indications sur le nombre d'accords directs conclus ces dernières années. Selon elle, la prolifération des accords directs, instruments juridiques collectifs utilisés par les chefs d'entreprise, était un bon indice de ce que le développement du solidarisme était lié à sa fonction antisyndicale. On notait une tendance à un très net recul de la convention collective et à une progression accélérée de l'accord direct. En 1980, il y avait eu 41 conventions collectives, 92 conflits collectifs et 10 accords directs, tandis qu'en 1988 on avait recensé 18 conventions collectives, 54 conflits collectifs et 34 accords directs. Ces données concordaient avec l'essor du solidarisme puisque, en 1980, il existait 215 associations solidaristes et, en 1988, 1.400 environ (données provenant du recensement solidariste, selon l'Union solidariste costa-ricienne).
- 266. Les principaux secteurs productifs dans lesquels des accords directs avaient été conclus étaient l'agriculture, essentiellement les plantations de bananes de l'Atlantique, et l'industrie. Pour ce qui était de l'agriculture, en 1980, un seul accord direct avait été signé, alors qu'en 1987 et 1988 il y en avait eu, respectivement, 36 et 30. Cette progression rapide était due au fait que ce mécanisme de négociation avait remplacé la négociation collective. Les données montraient que, si l'on avait signé 36 accords directs dans l'agriculture en 1987 et 30 en 1988, trois conventions collectives seulement avaient été conclues chacune de ces années, alors qu'il y en avait eu environ 47 en 1980. Selon le Syndicat des travailleurs de l'agriculture et des plantations (SITRAP), c'était par le biais du solidarisme que les conventions collectives avaient ainsi été remplacées par des accords directs. Quant à l'industrie, second secteur important en ce qui concernait la signature d'accords directs, si l'on y relevait un moins grand nombre de ces accords que dans l'agriculture, c'était parce que le taux de syndicalisation y était très faible. Aussi le solidarisme ne poussait-il pas à la négociation d'accords directs pour y remplacer l'organisation syndicale, car à la différence du secteur de la banane cela n'était pas nécessaire. Les syndicats du secteur industriel représentaient 7,7 pour cent de l'ensemble des syndicats et leurs membres 5 pour cent des effectifs syndicaux totaux, tandis que les associations solidaristes représentaient 36 pour cent de l'ensemble de ces associations et leurs membres 42 pour cent des effectifs. Cela confirmait le fait que le secteur industriel était contrôlé par le solidarisme, comme l'indiquaient les données du ministère du Travail et de la Sécurité sociale de 1988 citées par la CISL.
- 267. La CISL examinait aussi la question des accords directs conclus dans des entreprises ou des branches d'activité où opéraient des syndicats. Selon elle, parmi les cas de syndicats qui avaient été évincés par le biais d'accords directs, on pouvait citer les suivants:
- STPPS Syndicat des travailleurs des plantations de Pococí et Guácimo, en 1979.
- SITRAP Syndicat des travailleurs de l'agriculture et des plantations, en 1985.
- UTRAL Union des travailleurs agricoles de Limón, en 1987.
- SITAGAH Syndicat de branche des travailleurs de l'agriculture et de l'élevage de Heredia, en 1987.
- Dans la vallée de La Estrella, zone atlantique du Costa Rica productrice de bananes, l'entreprise Standard Fruit Co. avait signé avec ses travailleurs divers accords directs qui avaient été approuvés par le solidarisme en juin 1987. Les années antérieures, les relations professionnelles dans la plantation de bananes de la vallée de La Estrella dépendaient de l'Union des travailleurs agricoles de Limón (UTRAL), qui avait signé avec l'entreprise le 25 juin 1984 sa dernière convention collective, qui était restée en vigueur jusqu'à 1986. De même, dans la zone de Río Frío, productrice de bananes, la Standard Fruit Co. avait signé divers accords directs avec ses travailleurs (plantation 6, plantation 3, plantation 9, plantation 8 et usine de Río Frío). Dans cette zone, les relations professionnelles dépendaient du Syndicat de branche des travailleurs de l'agriculture, de l'élevage et assimilés de Heredia (SITAGAH) qui, comme l'UTRAL, avait signé avec l'entreprise le 25 juin 1984 sa dernière convention collective, qui était restée en vigueur jusqu'à 1986. Bien que, légalement, les deux syndicats mentionnés existaient encore, leur effectif, conjointement, ne dépassait pas actuellement 50 membres, précisait la CISL.
- 268. Le développement des accords directs dans la zone de la banane s'était le plus souvent accompagné d'une forte campagne antisyndicale par divers moyens de communication, qui démontrait l'intention du solidarisme et de l'entreprise d'évincer les conventions collectives et les syndicats. Parmi les autres entreprises où il existait des conventions collectives et où aujourd'hui se négociaient des accords directs, on pouvait citer les suivantes:
- 1. Compañía Bananera El Carmen SA: Siquirres 2. Compañía Bananera Monte Líbano SA: Bataán 3. Compañía Bananera La Perla SA: Bataán 4. Compañía Internacional del Banano SA: Siquirres 5. Compañía Bananita SA: Matina 6. Compañía Bananera La Peña: Estrada 7. Compañía Bananera Margarita: Bataán 8. Finca Prado: Guápiles 9. Finca La Perdiz: La Rita, Pococí 10. Finca Guajira: Guápiles 11. Compañía Productora Tropical SA: Guápiles 12. Compañía Bananera Rosana Farns.: Guápiles 13. Finca Bananos Oro: Cariari 14. Finca Río Jiménez: Guácimo 15. Finca Coopecariari: Cariari 16. Finca El Jardín: Cariari 17. Finca Frehold: Siquirres 18. Finca Freeman: 28 millas 19. Finca San Rafael: Guápiles 20. Finca Santa Clara: Guápiles 21. Finca Tortuguero: Guápiles 22. Finca Caribe: Cariari 23. Finca Parismina: Guácimo 24. Finca San Peter, San José et San Pedro: Cariari 25. Manufacturera Aurind SA: Alajuela 26. Atlantis Costarricense SA: San José 27. Calzado ECCO SA: Cartago
- La CISL rappelait qu'en 1989 trois conventions collectives seulement étaient en vigueur dans le secteur de la banane, alors qu'en 1980 on en comptait en moyenne 47.
- 269. La CISL signalait aussi que divers dirigeants syndicaux ou syndicalistes des entreprises où opéraient des associations solidaristes avaient été licenciés. Selon elle, non seulement des dirigeants syndicaux et syndicalistes s'étaient trouvés dans cette situation, mais aussi des personnes qui, tout en étant solidaristes, entretenaient des rapports avec des syndicalistes et qui, à cause de cela, avaient été congédiées. Elle citait à l'appui de ses dires quelques témoignages de travailleurs:
- a) "... on m'a congédié parce que j'étais un de ceux qui s'occupaient le plus des travailleurs, et aussi parce qu'on approchait de la conclusion d'un accord direct (signé le 15 août de cette année) et que le patron ne voulait pas que je participe à cette négociation. Il est évident que c'est le chef d'entreprise Fabio Campos qui détient les fonds des membres de l'association, lui seul signe les chèques, s'il ne le fait pas, on ne peut disposer d'argent." (Casimiro Cortéz, travailleur de Bananera Modelo.)
- b) "Il y a six mois, j'ai été congédié parce que j'étais membre du syndicat et que je ne voulais pas adhérer au solidarisme, j'ai fait l'objet de mesures d'intimidation et de persécution." (Plantation de la Standard.)
- c) "J'ai été renvoyé avec 15 camarades au cours du processus de rattachement à la plantation." (José Francisco Silva Silva, ancien travailleur de la Standard.)
- d) "La répression syndicale qui a eu lieu dans les plantations Carmen 1, 2 et 3 a donné lieu à des licenciements massifs et sélectifs qui ont visé les travailleurs syndiqués et les travailleurs âgés et fichés." (Roger Hernández Cortés.)
- e) "Ils m'ont licencié parce que je ne voulais pas adhérer au solidarisme." (Pánfilo Gutiérrez, travailleur de la plantation 6, vallée de La Estrella.)
- f) "... une travailleuse a été licenciée parce qu'ils l'ont vue parler à Eduardo Vargas, le dirigeant syndical, si bien qu'ils l'ont soupçonnée de s'être affiliée au syndicat". (Eduardo Vargas, SUTAP.)
- La CISL expliquait que les témoignages qu'elle citait à propos de cette affaire avaient été recueillis dans le cadre de l'enquête menée par ASEPROLA à partir de 1985 dans le secteur de la banane du Costa Rica. Elle faisait observer qu'il était difficile de trouver des témoins, car les travailleurs avaient peur de parler.
- 270. En second lieu, la CISL fournissait une liste des dirigeants des syndicats du secteur de la banane du Costa Rica qui avaient été congédiés par leur entreprise parce qu'ils exerçaient des fonctions syndicales et refusaient d'adhérer au solidarisme.
- Nom du dirigeant Syndicat
- 1. Fernando Mayorga Caravaca SITRAP* 2. Wenceslao Porras Casanova SITRAP 3. Porfirio López Ruiz SITRAP 4. Rafael Chávez Calderón SITRAP 5. Genaro Villegas Vindas SITRAP 6. Luis Madrigal Alvarez SITRAP 7. Rodolfo Mendoza Bustos SITRAP 8. Otilio Méndez Ramírez SITRAP 9. Olman Mora Bogantes SITRAP 10. Godofredo Araya Vargas SITRAP 11. Minor Cordero León SITRAP 12. Oscar Torres Hernández SITRAP 13. Hernán Zúñiga Martínez SITRAP 14. Erneliton Montes Alvarez SITRAP 15. Víctor Manuel Mata Mata SITRAP 16. Santos Torres Baltodano SITRAP 17. Danilo Angulo Solís SITRAP 18. Ramón Gómez Alvarado SITRAP 19. Rigoberto Torres Hernández SITRAP 20. William Espinoza González SITRAP 21. Gerardo Vega Varela SITRAP 22. Anastasio Carrillo Carrillo SITRAP 23. José Santos Flores Duarte SITRAP 24. Carlos Salazar Villegas SITRAP 25. Emiliano Obando Arias SITRAP 26. José Matarrita Matarrita SITRAP 27. Leopoldo Torres Torres SITRAP 28. José Raúl González Espinoza SITRAP 29. Luis Obando Montes UTRAL** 30. Juan Rafael Obando Arrieta UTRAL 31. Manuel Ramírez Rojas UTRAL 32. Manuel Varela Blanco UTRAL 33. Francisco Fallas Rojas UTRAL 34. Gilbert Monge Pérez UTRAL 35. Gerónimo Hernández Sánchez UTRAL 36. José Miguel Jiménez Jiménez UTRAL 37. Pedro Pablo Pérez Castillo UTRAL 38. Alfonso Hernández Hernández UTRAL 39. Víctor Manuel Rosales Rosales UTRAL 40. Juan Manuel Rodríguez Dinarte UTRAL 41. José de la Cruz López Obando UTRAL 42. Abel Rojas Villalobos UTRAL 43. José Leandro Fajardo Fajardo UTRAL 44. Bernardo Bonilla González UTRAL 45. José Francisco Silva Silva UTRAL 46. Javier Sánchez Rodríguez UTRAL 47. William Rodríguez Morales UTRAL 48. Juan Luis Chávez Vega UTRAL 49. Manuel Araya Rodríguez UTRAL 50. Carlos Petoy Alvarez UTRAL 51. Roberto Gutiérrez UTRAL 52. Marcedonio León Arias UTRAL 53. Evaristo Pérez Moreno UTRASIMA*** 54. Eliécer Matarrita Mejía UTRASIMA 55. José Espinoza Ortega UTRASIMA 56. José Manuel Calderón Rojas UTRASIMA 57. Bernardo Chavarría Chavarría UTRASIMA 58. Víctor Rodríguez R. UTRASIMA 59. Elías Villaseti Sancho UTRASIMA 60. Jorge Luis Hernández Coronado UTRASIMA 61. Félix Figueroa Rosales UTRASIMA 62. Rafael Chávez UTRASIMA 63. Macedonio Chávez Díaz UTRASIMA 64. Miguel Alemán Dinarte UTRASIMA 65. Vicente Castellón Ramos UTRASIMA 66. Gerardo Porras Obando UTRASIMA 67. Benito Salazar Gómez UTRASIMA 68. Jorge Badilla Hernández SITAGAH**** 69. Gerardo Jiménez Patiño SITAGAH 70. Jorge Alfaro Quirós SITAGAH 71. Juan Luis Rodríguez Gómez SITAGAH 72. Rolando Gaitán Gamboa SITAGAH 73. Edwin Pérez Aguirre SITAGAH 74. Jorge Ugalde Varela SITAGAH
- * Syndicat des travailleurs des plantations agricoles.
- ** Union des travailleurs agricoles de Limón.
- *** Union des travailleurs agricoles de Siquirres et Matina.
- **** Syndicat de branche des travailleurs de l'agriculture, de l'élevage et assimilés de Heredia.
- 271. La CISL avait aussi examiné la question des cas concrets où un travailleur avait été contraint d'adhérer à une association solidariste ou de démissionner d'une organisation syndicale et le point de savoir si des décisions judiciaires avaient été rendues à ce sujet. Elle avait indiqué que la sécurité de l'emploi dans les entreprises solidaristes dépendait de l'adhésion (forcée) du travailleur à ce mouvement, et que l'intéressé lui-même comprenait fort bien que, s'il ne se faisait pas solidariste, il perdait son emploi. Du fait de la peur du chômage et de la répression psychologique, le syndicalisme costa-ricien était dans l'impossibilité de trouver des travailleurs, dans les usines et les plantations de bananes, disposés à témoigner de la contrainte exercée sur eux par le solidarisme et de la persécution syndicale. Cela expliquait, selon la CISL, le fait que les tribunaux du travail n'était actuellement saisis d'aucune plainte émanant de travailleurs mécontents et que les syndicats n'avaient pu jusqu'ici présenter aucune demande de dissolution d'une association solidariste auprès du ministère du Travail, conformément aux dispositions de l'article 8 de la loi solidariste. Néanmoins, les centrales syndicales affiliées à la CISL-ORIT au Costa Rica et d'autres centrales syndicales costa-riciennes avaient pu réunir dans leurs dossiers des cas concrets de témoignages de travailleurs qui dénonçaient cette situation. La CISL disposait d'un dossier de 13 témoignages de travailleurs de l'industrie et de 20 témoignages de travailleurs du secteur de la banane, qui avaient fait une première déposition écrite, mais qu'il fallait convaincre d'accepter que leur déclaration fusse enregistrée devant notaire dans les formes voulues, de façon à pouvoir être versée au dossier du débat final du comité de l'OIT.
- 272. La CISL avait joint à sa communication des extraits du texte original de quelques-unes des déclarations de ces travailleurs de l'industrie et du secteur de la banane:
- a) "Deux années avant de me licencier, on m'a puni en me confiant les tâches les plus ingrates, dans les endroits les plus pénibles. On se moquait de moi et, comme j'avais une parcelle, on me l'a retirée ... Tout cela, ils le faisaient pour voir si je me retirerais (du syndicat). Par ailleurs, ils essayaient de m'intimider en faisant du tort à mes enfants. Par exemple, comme je n'ai pas voulu adhérer à l'association, pendant deux mois et demi ils n'ont pas donné de travail à mes fils; les chefs essayaient de manquer de respect aux filles et aux femmes des travailleurs et, ainsi, ils ont envoyé Marchena (le contremaître) porter des messages à ma fille ..." (Pánfilo Gutiérrez Gutiérrez, travailleur, plantation 6, vallée de La Estrella, Limón.)
- b) "... on m'a persécuté et harcelé parce que j'étais affilié au syndicat et, deux mois avant que je sois congédié, César Pajuelo, administrateur de l'entreprise, a commencé à me dire que je devais adhérer au solidarisme, que je devrais quitter le syndicat, que je devrais devenir membre de l'association parce que j'en tirerais des avantages". (Roger Hernández Cortés, travailleur de la plantation Carmen 2, Siquirres, Limón.)
- c) "On m'a persécuté parce que j'étais affilié au syndicat et harcelé pour me faire adhérer au solidarisme. Marcos m'a demandé pourquoi je n'adhérais pas; si je ne le faisais pas, je risquais d'être mis à la porte." (Herminio Castro Picado, travailleur, plantation Imperio, Siquirres, Limón.)
- d) "Avant d'être congédié, j'ai été harcelé par des solidaristes, qui me disaient de quitter le syndicat, que je n'étais pas si bête, que j'étais un homme intelligent, que si je le faisais (quitter le syndicat) ils me donneraient de l'avancement (un poste de contremaître), si je le voulais ils se chargeraient d'écrire ma lettre de démission du syndicat." (José Francisco Silva Silva, ancien travailleur de la plantation Concepción, vallée de La Estrella.)
- e) On recourt à toute une série de mécanismes d'intimidation et de répression à l'encontre de toutes formes d'organisation différentes du solidarisme, par exemple:
- - on organise des affaires malhonnêtes pour compromettre les travailleurs dont on ne veut pas;
- - un autre moyen consiste à réduire les heures supplémentaires, de sorte que le travailleur gagne moins.
- f) "Lorsque la décision a été prise de constituer un syndicat en raison même des mauvais procédés de l'association, la répression a été très dure; ils ont d'abord parlé de procéder à des licenciements, puis ils ont dû y recourir; ils ont licencié de nombreuses personnes sans indemnités en alléguant qu'il y avait eu une baisse de la production, mais en réalité nous savions tous que c'était à cause de la création du syndicat." (Juana Herrera Muñoz, travailleuse de Interfashion Industries.)
- 273. La CISL avait indiqué d'autre part que le Syndicat des travailleurs des plantations agricoles (SITRAP) et le Syndicat unitaire des travailleurs de l'agriculture et des plantations (SUTAP), tous deux affiliés à la Fédération bananière (FESITRAP), elle-même affiliée à la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), avaient déposé plainte devant le ministère du Travail et de la Sécurité sociale du Costa Rica, le 31 août 1987, plainte dans laquelle ils relevaient une série d'irrégularités concernant la sécurité de l'emploi du travailleur du secteur de la banane dans de nombreuses entreprises et signalaient les moyens de pression que celles-ci utilisaient contre les travailleurs. Les syndicats en question exigaient une enquête immédiate sur les faits et des mesures correctives dans l'intérêt de la sécurité de l'emploi, affaire dont le ministère compétent ne s'était pas occupé de manière concrète et efficace. Cette plaintétait importante parce que, tout en apportant des éléments sur les conditions actuelles de travail dans les entreprises bananières transnationales en période d'essor et de développement massif des associations solidaristes dans ces entreprises, elle expliquait le problème de fond: l'impossibilité dans laquelle les travailleurs du secteur de la banane se trouvaient de s'organiser en syndicats, ce qui les privait de toute possibilité de lutter pour leur dignité. Par ailleurs, l'organisation solidariste ne tenait aucun compte de cette réalité, ou n'intervenait que pour favoriser ses affiliés et faire pression sur ceux qui ne l'étaient pas, ce qui était à l'origine d'une inégalité entre les travailleurs "privilégiés" en tant que militants solidaristes (aristocratie ouvrière) et les travailleurs "marginalisés" parce qu'ils n'étaient pas des militants solidaristes.
- 274. Selon la CISL, aucune protection légale n'existait contre de tels agissements, comme avait pu le vérifier la commission de haut niveau de la CISL qui s'était rendue au Costa Rica en 1988, conduite par son secrétaire général adjoint, M. Enzo Frizo. En ce qui concernait la "contrainte" exercée sur les travailleurs pour les forcer à adhérer au solidarisme, la CISL indiquait que, conformément à l'article 7 de la loi no 6970 sur les associations solidaristes, l'adhésion au solidarisme relevait totalement de la décision du travailleur, dans le respect formel du principe de la libre affiliation, puisque cet article dispose que: "les associations régies par la présente loi devront garantir la liberté d'adhésion et de démission de leurs membres". Mais il était manifeste, en premier lieu, que les faits mentionnés dans les témoignages de travailleurs précités démontraient la violation tangible de la loi solidariste dans la vie quotidienne pratique des associations et entreprises solidaristes. En second lieu, il fallait relever que l'article en question posait un principe légal qui ne trouvait à s'appuyer sur aucune autre disposition de la loi puisque celle-ci ne prévoyait pas de sanctions en cas de violation du principe (fussent-elles le fait des dirigeants de l'association ou des dirigeants de l'entreprise). Troisièmement, le chapitre V de la loi (en particulier l'article 56), qui indiquait les causes de dissolution et de liquidation d'une association, ne précisait pas que la violation de l'article 7 (la contrainte exercée sur un travailleur pour qu'il s'affilie) fût une cause de dissolution. Il était clair que la loi et ses règlements d'application n'établissaient pas de mécanisme préventif de protection légale des travailleurs contre de tels agissements, ni contre tous autres actes qui pourraient les viser. En dehors de la législation propre au solidarisme, le travailleur ne disposait que d'une voie légale de recours: le dépôt d'une demande d'habeas corpus, en alléguant la privation illégitime de sa liberté devant un tribunal civil et non un tribunal du travail. Mais cette procédure judiciaire était trop coûteuse, lente et complexe, les travailleurs n'y recouraient guère et, en outre, aux termes de la jurisprudence, les demandeurs étaient déboutés dans la majorité des cas. La CISL reconnaissait que la protection légale face à la "persécution" ou à l'"intimidation" du travailleur en raison de son appartenance à un syndicat existait dans le Code du travail du Costa Rica en vigueur, en particulier en vertu de l'article 70, qui disposait: "Il est absolument interdit à l'employeur ... d'obliger les travailleurs, par quelque moyen que ce soit, à se retirer des syndicats ou groupes légalement constitués auxquels ils appartiennent." Mais la vie quotidienne dans les entreprises costa-riciennes témoignait, eu égard à la violation tacite de la liberté syndicale, de l'inobservation de cette interdiction de la part des employeurs. Selon la CISL, la raison en était non seulement que la législation du travail ne faisait pas l'objet d'un contrôle institutionnel suffisant de la part de l'Etat costa-ricien, mais aussi que, conformément au Code du travail, l'employeur accusé d'avoir enfreint cette disposition était passible d'une amende d'un montant infime: de 300 à 1.000 colones, c'est-à-dire de 3,60 à 12,12 dollars E.-U. au taux de change de 1989. Aussi l'employeur ne se gênait-il pas pour enfreindre cet article qui représentait la protection légale la plus explicite prévue dans le Code du travail en la matière. Si l'accusation était prouvée, il n'avait qu'à payer une amende symbolique. A ce sujet, la CISL joignait à sa communication un mémorandum soumis par le Syndicat national des travailleurs de l'habillement, de la confection, du textile et du cuir au président de la Chambre des industries et au ministre du Travail du Costa Rica, qui alléguait des violations de la liberté syndicale dans 39 entreprises du secteur industriel de San José.
- 275. Pour conclure, la CISL indiquait que le développement des associations solidaristes avait pour cause l'existence, au sein de la société costa-ricienne, d'une large alliance en faveur du solidarisme, composée de partenaires puissants: un secteur conservateur de l'Eglise catholique, l'ensemble des moyens de communication de masse, des secteurs de partis politiques majoritaires, les chambres patronales et le gouvernement. Selon la CISL, le gouvernement, par l'intermédiaire des autorités publiques chargées des relations professionnelles (le ministère et les tribunaux du Travail), avait apporté un soutien important au solidarisme en de nombreux endroits en entérinant les plébiscites en faveur de l'association solidariste dans les entreprises, en acceptant les accords directs malgré les plaintes des syndicats et en ne réagissant pas face au refus des entreprises de l'industrie et du secteur de la banane de signer des conventions collectives ou des contrats collectifs de travail. La présence de l'Eglise, par l'intermédiaire de l'Ecole sociale Jean XXIII, organisme officiel catholique, impliquait que cette institution joue un rôle de promotion, de conseil et d'éducation des solidaristes dans les plantations de bananes et en de nombreux endroits du pays. De fait, on s'était servi du magistère moral et religieux de l'Eglise catholique pour mener une campagne patronale de persécution du syndicalisme et d'expansion du solidarisme. Les moyens de communication (presse écrite et radio) avaient intensifié la manipulation de l'opinion publique tendant à donner à la population une image négative du syndicalisme et à parer le solidarisme de tous les mérites. L'existence d'un cadre juridique spécial au service du mouvement solidariste (loi no 6970 sur les associations solidaristes) avait permis aux chefs d'entreprise de tourner la législation du travail (Code du travail, droit à la protection syndicale, paiement d'indemnités de licenciement, etc.) et aux associations solidaristes de mener leurs programmes économiques et sociaux et de s'organiser en bénéficiant de nets avantages, au détriment du syndicalisme. L'existence, aux niveaux national et international, d'un climat favorable aux postulats anticrises du secteur patronal néo-libéral avait permis au solidarisme de s'implanter progressivement dans le secteur social qui appuyait et développait les thèses inspirées par le Fonds monétaire international sur la privatisation et la réactivation de l'économie entre les mains du secteur privé, avec l'appui d'organismes financiers internationaux. Cela étant, la reconnaissance des banques solidaristes, en tant qu'organismes privés poursuivant un but d'utilité sociale, par la promulgation de la loi de 1988 sur la modernisation du système financier de la République, dont l'article 28 autorisait la création de banques solidaristes, avait permis au solidarisme d'accéder à la banque privée pour capter l'épargne intérieure des solidaristes ainsi que les crédits du système financier international accordés à des conditions avantageuses. Avec l'appui de ces banques, le solidarisme jouait un rôle en faveur de la privatisation du pays, ce qui impliquait une aggravation de l'inégalité économique entre le mouvement solidariste et le mouvement syndical dans le secteur privé.
- 276. La CISL rappelait que les facteurs de développement du solidarisme au niveau interne étaient la création d'une base économique à partir de l'administration des fonds destinés aux indemnités de licenciement que le patron versait à l'association et dont celle-ci faisait un emploi lucratif, autorisé par la loi sur les associations solidaristes (il s'agissait de fonds "sociaux" que l'employeur présentait comme un "apport patronal", ce qui constituait une tromperie), l'appui logistique que l'entreprise fournissait à l'association solidariste (frais administratifs, temps libre accordé aux responsables et aux dirigeants, rémunération des responsables, cours de formation, subventions économiques), une organisation très fonctionnelle abondamment dotée en hommes et en matériels, personnel, véhicules, locaux, moyens financiers, dons en nature et en espèces, etc.
- 277. En second lieu, la CISL signalait que les principales causes de la discrimination et de l'affaiblissement dont les organisations syndicales étaient victimes au niveau national étaient la répression antisyndicale et la violation du principe de la liberté syndicale, qui revêtaient des formes telles que licenciements de dirigeants, intimidation, chantage et corruption des travailleurs par l'administration de l'entreprise; le recours à des méthodes de contrôle des dirigeants, le recrutement à titre occasionnel, les listes noires, la suspicion et la crainte de l'insécurité de l'emploi constituant pour les employeurs des instruments de pouvoir et de persuasion qui pénalisaient le syndicat et favorisaient l'expansion du solidarisme. La CISL ajoutait que les conditions (juridiques et organisationnelles) du fonctionnement du syndicalisme dans le secteur public et privé empêchent les syndicats de s'acquitter de leurs fonctions et d'atteindre leurs objectifs. Elle rappelait la constante répression dont les dirigeants syndicaux étaient victimes de la part des patrons et la menace de licenciement qui pesait sur les travailleurs qui songeaient à s'affilier à un syndicat.
- 278. Selon la CISL, le problème "légal" au niveau national avait pour résultat l'absence de protection des syndicats ou de privilège syndical, ainsi que des entraves à la constitution, à l'organisation et au fonctionnement des syndicats en raison d'un Code du travail dépassé; l'adoption récente de lois et de règlements intéressant le secteur public qui avaient un caractère restrictif pour les syndicalistes (autorité budgétaire et loi sur l'équilibre financier) plaçait carrément le syndicalisme dans une situation de faiblesse et de désavantage par rapport au solidarisme. Ces lois spéciales récentes empêchaient la signature de conventions collectives dans le secteur public au Costa Rica. A cela venait s'ajouter, toujours selon la CISL, l'inobservation par le gouvernement tant de la législation du travail en vigueur que des conventions de l'OIT. La partialité ou la négligence dans le contrôle laissaient le syndicalisme sans défense et avec moins de protections de caractère juridique, ternissaient son image et réduisaient son efficacité et sa capacité d'action à l'échelle nationale. En outre, la crise économique provoquait un durcissement de la position patronale et, par conséquent, une réduction de la capacité de revendication et de mobilisation des travailleurs. La tâche du syndicat était entravée par des obstacles et des difficultés car les travailleurs, à cause du spectre du chômage et de la répression, craignaient de s'organiser et de participer.
- 279. Au sujet de l'affaiblissement du syndicalisme prétendument dû à des facteurs internes, la CISL avait estimé que le recul des conventions et des contrats collectifs de travail s'était aussi soldé pour les syndicats par la perte de leur qualité d'interlocuteur pour la défense des droits des travailleurs. De nombreux syndicats avaient disparu parce que, les conventions n'ayant pas été signées, les syndicats n'avaient pas été reconnus comme interlocuteur, il s'était donc produit un phénomène de désaffiliation qui avait sensiblement réduit leurs moyens financiers et les avait affaiblis. Il était évident que cet état de choses était la conséquence de la création de l'association solidariste et du fait que les employeurs avaient imposé l'accord direct, sous le contrôle des solidaristes. La situation économique des syndicats s'était également dégradée dès lors qu'ils n'avaient pas accès à l'administration des fonds destinés aux indemnités de licenciement. Alors que les solidaristes, en vertu de la loi qui les régissait (article 18), pouvaient administrer ces fonds, les syndicats restent soumis à l'article 29 du Code du travail - en vertu duquel le licenciement ouvrait la "perspective d'un droit" et non un droit réel -, ce qui avait une incidence sur leurs moyens financiers et leur capacité d'offrir des services économiques et sociaux dans l'intérêt des travailleurs, comme le faisait le solidarisme.
- 280. L'affaiblissement du syndicalisme costa-ricien s'expliquait aussi par une série d'autres facteurs inhérents à son profil. Ainsi, le manque d'unité du mouvement syndical et l'extension de ses divisions internes au cours des années de crise avaient une incidence sur ses forces actuelles; les faibles moyens financiers du syndicalisme, auxquels venait s'ajouter l'agression solidariste, signifiaient que les syndicats, avec les minces cotisations qu'ils encaissaient, ne pouvaient relever les défis de mobilisation et de lutte auxquels ils étaient confrontés en période de crise et d'agression patronale; l'accent mis sur la revendication avait fait passer au second plan et négliger les domaines d'action et programmes sociaux, culturels et économiques, qui satisfaisaient pourtant des besoins réels des travailleurs. (Le solidarisme avait tiré parti de ce vide ou de cette faiblesse syndicale et s'était servi de ces programmes pour "racoler" la classe ouvrière.) La faible capacité de convocation, de mobilisation et de planification des centrales syndicales existantes - qui résultait comme on l'a vu de multiples facteurs - réduisait l'impact du syndicalisme dans la société et donnait l'idée qu'il était trop faible pour relever les défis sociaux, car il avait beaucoup perdu de sa puissance et du respect dont il jouissait dans le pays; enfin, la faiblesse et le manque de continuité et d'intégration des programmes de formation syndicale s'étaient traduits par une diminution de la conscience syndicale des travailleurs, déjà insuffisante, face aux qualités du concurrent solidariste, ce qui avait encore affaibli le syndicalisme et avait fait ressortir son peu de capacité de réaction.
- 4. Réponse complémentaire du gouvernement antérieur
- 281. Le gouvernement avait envoyé sa réponse au sujet de ces allégations dans une communication du 30 janvier 1990. Selon lui, le recul du mouvement syndical par rapport au mouvement solidariste tenait à des facteurs d'ordre éminemment interne intéressant la direction des organisations syndicales et qui échappaient à sa compétence. Il ne lui incombait donc pas de se prononcer au nom des employeurs ou à leur place, car son rôle se limitait fondamentalement à veiller au respect de la loi no 6970 du 7 novembre 1984 (loi sur les associations solidaristes) en ce qui concernait l'enregistrement de toutes les organisations de cette nature créées dans le pays. Observer les dispositions de cette loi ne peut s'interpréter comme favoriser un type d'organisation au détriment d'un autre. En bref, le gouvernement réaffirmait qu'il n'avait pas favorisé les organisations solidaristes aux dépens des organisations syndicales.
- 282. S'agissant de l'article 6 de la loi précitée qui disposait que l'Etat veille au renforcement et au développement des associations solidaristes, le gouvernement avait déclaré qu'il n'avait pas été possible d'en assurer l'application effective, pour diverses raisons, de sorte que, là non plus, il n'y avait pas discrimination syndicale ou traitement de faveur du solidarisme, comme l'indiquaient les allégations. Au contraire, l'article 361 du Code du travail disposait, en ce qui concerne le syndicalisme, que: "Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale sera chargé d'encourager le développement du mouvement syndical, sous une forme harmonieuse et ordonnée, par tous les moyens légaux qu'il jugera convenables. A cet effet, il prendra, par voie de décret exécutif, toutes les dispositions qui sont nécessaires dans chaque cas pour garantir l'exercice du droit syndical." L'Etat costa-ricien avait l'obligation légale d'encourager le syndicalisme. Les dispositions de l'article 6 de la loi sur les associations solidaristes avaient leur pendant, pour les syndicats, dans le Code du travail, ce qui impliquait que légalement les deux types d'organisations (syndicats et associations solidaristes) étaient traités de façon égale.
- 283. Au sujet des allégations relatives à l'évolution des accords directs ces dernières années, le gouvernement avait fourni les renseignements suivants:
- Année 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989
- Nombre d'accords 16 34 18 24 32 35 34 52
- La conclusion de ces accords directs et leur soumission au Département des organisations sociales en vue de leur enregistrement avaient été effectuées conformément à la législation en vigueur. Ces instruments avaient reçu un large appui des travailleurs intéressés. Les travailleurs avaient donc préféré cette formule de négociation à la convention collective; certains accords directs avaient d'ailleurs été le premier mécanisme de négociation dont ils avaient pu disposer. L'augmentation du nombre d'accords directs conclus était due, entre autres, au fait que de grandes entreprises du secteur de la banane, comme Bandeco et Standard Fruit Co., qui, précédemment, étaient régies par une seule convention collective pour tous les travailleurs, avaient remplacé cet instrument par des accords directs pour chacune de leurs plantations. Le gouvernement avait précisé qu'il fallait tenir compte du fait que les accords directs avaient une durée de validité de un à trois ans, et dans la majorité des cas de deux ans. Quand ils expiraient, ils devaient être renégociés, et le nombre total d'accords directs conclus comprenait tant les nouveaux accords que les accords renouvelés. Selon le gouvernement, le nombre d'accords directs avait beaucoup augmenté en 1989 parce que 15 de ces instruments avaient été "renégociés" à la Standard Fruit Co.; en outre, d'autres entreprises de plus petite taille avaient été lancées dans la zone atlantique dans le cadre des programmes de développement et de promotion du secteur de la banane.
- 284. Le gouvernement avait ajouté que les accords directs avaient été très nombreux surtout dans le secteur agricole et dans le secteur des services. Ainsi, en 1989, 42 accords (nouveaux ou renégociés) avaient été conclus dans l'agriculture, deux dans l'industrie et huit dans le secteur des services. Les causes de cette progression des accords directs dans les activités agricoles étaient très complexes, mais on pouvait relever a) la préférence des travailleurs pour l'organisation solidariste par rapport au syndicat, étant donné les objectifs immédiats - de consommation, si l'on veut - qui étaient ceux des salariés et que le mouvement solidariste leur permettait de satisfaire; b) l'incapacité du mouvement syndical de se doter de politiques qui concordent avec le sentiment majoritaire de ses affiliés et des travailleurs non syndiqués: la politisation excessive de ses dirigeants, le manque de démocratie interne, la recherche d'avantages individuels, au détriment de l'intérêt général, de la part de certains dirigeants syndicaux; c) la meilleure acceptation du mouvement solidariste par les employeurs, qui favorisaient et encourageaient le mouvement.
- 285. Le gouvernement avait admis qu'il y avait eu des cas où des accords directs avaient été conclus dans des entreprises ou des branches d'activité où opéraient précédemment des syndicats, pour les raisons indiquées dans le paragraphe précédent, mais il avait souligné que la majorité de ces syndicats n'avaient pas d'existence réelle, faute de représentativité; ils existaient de façon purement formelle, par l'enregistrement. En pareil cas, on avait pu prouver par voie de plébiscite que les travailleurs préféraient l'accord direct à la négociation d'une convention collective.
- 286. Le secteur privé restait régi par les procédures et formalités de négociation collective prévues par la législation du travail du Costa Rica (articles 54 et suivants et 497 et suivants du Code du travail). Le projet de réforme du Code du travail visait à adapter la négociation collective aux exigences sociales et économiques de l'époque, dans l'intérêt des deux secteurs de la production: travailleurs et employeurs. Dans tous les cas, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale avait mis à la disposition des parties des fonctionnaires spécialisés qui s'efforçaient de proposer des formules de négociation satisfaisantes pour les travailleurs comme pour les patrons; au besoin, il leur offrait aussi ses locaux pour y tenir les négociations collectives. En outre, en cas de plainte alléguant que les patrons persécutaient les travailleurs ou leurs représentants syndicaux, la Direction nationale et l'Inspection générale du travail intervenaient pour sauvegarder les droits des salariés.
- 287. Pour ce qui était du secteur public, le gouvernement avait affirmé qu'il avait déjà réglementé de façon appropriée les possibilités de négociation avec les institutions de l'Etat (session du Conseil de gouvernement no 25, article 6, accord 4, du 22 octobre 1986).
- 288. Le gouvernement avait admis que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale avait reçu des plaintes concernant des licenciements prétendument injustifiés et constituant une persécution syndicale. Toutefois, il avait précisé que, après examen, il n'avait pas été possible de constater que la loi eût été violée. Le gouvernement avait déclaré ignorer si des actions avaient été engagées devant les tribunaux du travail dans des cas de ce genre ni quel en avait été le résultat. En effet, en vertu de la séparation constitutionnelle des pouvoirs, il incombait au pouvoir judiciaire de se prononcer au sujet des licenciements qui pouvaient avoir lieu dans n'importe quel centre de travail. Il était vrai cependant que certains dirigeants syndicaux s'étaient plaints devant le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, parfois par les moyens de communication de masse, d'une prétendue contrainte exercée sur les travailleurs pour les amener à adhérer aux associations solidaristes. Néanmoins, les enquêtes menées par les fonctionnaires de ce ministère n'avaient pas permis de constater qu'une telle contrainte eût été exercée, au moins contre les travailleurs encore employés dans l'entreprise. En fait, quand un travailleur était licencié pour d'autres motifs, il se plaignait d'avoir fait l'objet d'une prétendue persécution syndicale pendant qu'il était encore au service de l'entreprise.
- 289. Le gouvernement avait déclaré qu'il existait deux formes de protection pour les travailleurs victimes d'une forme de contrainte quelconque tendant à les amener à adhérer aux associations solidaristes: a) la Direction nationale et l'Inspection générale du travail pouvaient saisir la justice pour faire condamner les auteurs des infractions aux amendes prévues par la loi; b) le travailleur ou les travailleurs intéressés pouvaient demander le versement d'indemnités de licenciement. Les conventions collectives prévoyaient souvent une troisième garantie pour les travailleurs: la réintégration, avec paiement des arriérés de salaire, du travailleur injustement licencié. Cette troisième voie n'était pas encore inscrite dans la législation; mais le projet de réforme du Code du travail prévoyait une procédure particulière en vue de remédier à cette situation.
- 290. En conclusion, le gouvernement avait déclaré n'avoir procédé à aucune discrimination syndicale et avoir agi dans le strict respect du droit de la liberté et de la souveraineté de décision des travailleurs. Si ceux-ci décidaient d'opter pour un type déterminé d'organisation sociale (syndicat ou association solidariste), les autorités publiques se bornaient à donner pleinement effet à cette décision. Le gouvernement avait conclu, s'agissant des causes de l'affaiblissement des organisations syndicales et du développement des associations solidaristes, qu'aucune d'entre elles ne lui était imputable, ni par action ni par omission.
- 5. Conclusions et recommandations du comité à sa réunion de mai 1990
- 291. En premier lieu, le comité avait pris note avec intérêt des informations complémentaires concrètes que tant l'organisation plaignante que le gouvernement avaient soumises dans ce cas. L'organisation plaignante avait soulevé les questions que l'existence et le développement des associations dites "solidaristes" et leur réglementation légale posent du point de vue de la conformité de ces associations avec les conventions nos 87 et 98. L'organisation plaignante avait allégué que les associations solidaristes étaient contrôlées par les employeurs, qu'elles avaient pour objectif la destruction du mouvement syndical, qu'elles avaient donné lieu à de nombreuses pratiques antisyndicales, que le mouvement syndical s'était nettement affaibli ces dernières années et que de nombreuses organisations syndicales avaient disparu. Elle avait soumis une volumineuse documentation à ce sujet. Le gouvernement avait rétorqué que le mouvement solidariste était une manifestation du droit constitutionnel d'association et que, si le mouvement syndical était en recul tandis que le solidarisme se développait, cela était dû dans bien des cas à des facteurs d'ordre essentiellement interne intéressant la direction syndicale, qui échappaient à sa compétence. Il avait nié que les associations solidaristes eussent été instituées juridiquement comme un mécanisme de manipulation de la part de secteurs étrangers à la classe ouvrière et que ces derniers fussent légalement obligés d'y adhérer. Enfin, il avait insisté sur le fait que l'article 8 de la loi sur les associations solidaristes interdisait à ces associations, à leurs organes de direction et d'administration et à leurs représentants légaux toute activité tendant à combattre ou à entraver, de quelque façon que ce fut, la formation et le fonctionnement des organisations syndicales et coopératives, le non-respect de cette disposition entraînant la dissolution de l'association en question.
- 292. Le comité avait observé que, aux termes de la loi de 1984 sur les associations solidaristes, ces associations pouvaient être constituées avec 12 travailleurs ou plus, et que l'article 4 de la loi les définissait comme suit:
- "Les associations solidaristes sont des entités de durée indéterminée dotées de la personnalité juridique qui, pour la poursuite de leurs objectifs (instaurer la justice et la paix sociale, faire régner l'harmonie entre travailleurs et employeurs et assurer le plein développement de leurs membres), pourront acquérir toutes catégories de biens, passer des contrats de toute nature et réaliser toutes espèces d'opérations licites visant à améliorer la situation socio-économique de leurs membres en vue de leur assurer une existence plus digne et un niveau de vie plus élevé. Elles pourront, à cette fin, effectuer des opérations d'épargne, de crédit et de placement ainsi que toutes autres opérations rentables. Elles pourront aussi mettre en oeuvre des programmes en matière de logement ou dans les domaines scientifique, sportif, artistique, éducatif et récréatif, culturel, spirituel, social et économique, ainsi que tout autre programme encourageant de façon licite les liens et la coopération entre les travailleurs et entre ceux-ci et leurs employeurs."
- L'article 18 de la loi énumérait comme suit les ressources des associations solidaristes:
- "a) L'épargne mensuelle minimale des associés, dont le taux sera fixé par l'assemblée générale. En aucun cas, ce taux ne pourra être inférieur à 3 pour cent ni supérieur à 5 pour cent du salaire ... Les associés pourront épargner volontairement une somme ou un pourcentage supérieur ... L'associé autorisera le patron à déduire de son salaire le montant correspondant, qui sera remis à l'association ...".
- "b) L'apport mensuel du patron en faveur de ses travailleurs, qui sera fixé en commun accord par les deux parties, conformément aux principes solidaristes ...".
- 293. Le comité avait exprimé la grave préoccupation que lui causaient l'affaiblissement du mouvement syndical costa-ricien et la forte diminution du nombre des organisations syndicales ces dernières années. Il semblait, d'après les éléments dont il disposait, que ces phénomènes étaient en rapport avec le développement des associations solidaristes. Le comité avait souligné à cet égard l'importance fondamentale du principe du tripartisme prôné par l'OIT, qui supposait l'existence d'organisations indépendantes (les unes des autres, et des autorités publiques) de travailleurs, d'une part, et d'employeurs, d'autre part. Compte tenu de l'importance de ce principe, le comité avait exprimé l'espoir que le gouvernement prendrait des mesures en concertation avec les centrales syndicales en vue de créer les conditions nécessaires au renforcement du mouvement syndical indépendant et au développement de ses activités en matière d'oeuvres sociales.
- 294. Afin d'examiner de façon plus approfondie les questions importantes soulevées dans le présent cas, le comité avait demandé au gouvernement de fournir des informations précises sur les points pour lesquels il n'avait pas encore fourni de réponses exhaustives, à savoir: les cas concrets de discrimination antisyndicale et de pressions pour l'affiliation des travailleurs aux associations solidaristes mentionnées par la CISL; la portée de la protection juridique dont pouvaient bénéficier les travailleurs et les dirigeants syndicaux qui seraient victimes de tels agissements; l'existence d'un soutien financier des employeurs aux associations solidaristes et la forme d'un tel soutien; le montant de l'appui financier du gouvernement aux associations solidaristes, d'une part, et le cas échéant aux organisations syndicales, d'autre part; les cas de plébiscites organisés au sein des entreprises et les motifs de l'organisation de ces plébiscites; la nature juridique et le contenu des accords directs et les circonstances dans lesquelles ils pouvaient être conclus; les cas où des accords directs avaient été conclus alors qu'il existait un syndicat et une convention collective; la participation des syndicats à des activités économiques en comparaison avec le rôle joué dans ce domaine par les associations solidaristes; les fonctions qui pouvaient être ou qui, en fait, étaient exercées par les associations solidaristes dans le domaine des relations du travail, et les fonctions qui pouvaient être exercées ou qui, en fait, étaient exercées par les syndicats dans le domaine de la gestion des oeuvres sociales.
- B. Développements ultérieurs
- 1. Nouvelles allégations
- 295. La CISL allègue dans sa communication du 1er août 1990 que, pendant la réunion de clôture du sixième Congrès solidariste, le Président du Costa Rica a annoncé l'intention de son gouvernement de modifier la loi sur les associations solidaristes afin qu'elles puissent être représentées dans les institutions d'Etat telles que le Fonds de prévoyance sociale du Costa Rica, l'Institut national d'apprentissage et "autres institutions dans lesquelles le secteur du travail est représenté". Le Président a donné aussi l'assurance que la loi serait appliquée strictement, en particulier les dispositions relatives au droit d'association des solidaristes et à la responsabilité de l'Etat concernant le développement et le renforcement des associations solidaristes. A cet égard, les associations allaient être déclarées, par un décret exécutif, "institutions d'intérêt public". Le Président s'est engagé à persuader les membres du Parlement de tous les partis de l'"urgente nécessité" de financer l'achat d'un terrain pour la construction d'un centre pour les études solidaristes démocratiques, en déclarant "de cette façon, nous contribuons non seulement au mouvement solidariste, mais aussi au renforcement et au perfectionnement de la démocratie participative".
- 296. La CISL estime que, si ses déclarations récentes se réalisent, elles ne pourront qu'affaiblir davantage le mouvement syndical au Costa Rica. La CISL considère que la déclaration selon laquelle les associations solidaristes sont des institutions d'intérêt public, l'intention déclarée d'intensifier les activités de l'Etat tendant à développer et renforcer les associations et l'appel lancé par le Président pour réunir des fonds afin de financer un centre d'études solidaristes contrastent de manière évidente avec la négligence dont fait preuve le gouvernement pour appliquer les recommandations du Comité de la liberté syndicale (dans son 272e rapport) l'invitant à prendre des mesures, en concertation avec les centrales syndicales, en vue de créer les conditions nécessaires au renforcement du mouvement syndical indépendant et au développement de ses activités en matière d'oeuvres sociales.
- 297. La CISL signale que le ministre du Travail et de la Prévoyance sociale du Guatemala, M. Maldonado Ruíz, dans son intervention devant la Conférence internationale du Travail (en juin 1990), a confirmé l'opinion de la CISL quant à la véritable nature du mouvement solidariste. M. Maldonado Ruíz a déclaré "... au Guatemala ... et dans d'autres pays d'Amérique centrale, on a lancé une campagne théorique et pratique ayant pour thème la "solidarité", dont l'objectif est la suppression des organisations syndicales et des droits inaliénables des travailleurs ... nous sommes pleinement convaincus que ces organisations (les organisations solidaristes) non seulement ne représentent pas les intérêts des travailleurs mais, par leur composition et leurs objectifs, elles vont à leur encontre. C'est précisément pour cela que le ministère dont je suis responsable n'octroie la personnalité juridique qu'aux organisations syndicales."
- 2. Réponse du gouvernement actuel
- 298. Le gouvernement ajoute dans une communication du 26 septembre 1990 que le Costa Rica est un Etat de droit et que quiconque estime qu'un acte du gouvernement porte atteinte à la liberté syndicale peut introduire un recours, conformément au droit national, contre l'acte ou la décision qui seraient contraires à la liberté syndicale. La loi de juridiction constitutionnelle est une preuve de ce que les intérêts des plaignants peuvent être protégés par les voies de recours internes. Qui plus est, sur la base de cette loi, la loi no 6970 du 7 novembre 1984 sur les associations solidaristes peut fait l'objet d'un recours en inconstitutionnalité articulé sur l'article 60 de la Constitution. La loi constitutionnelle, que le gouvernement annexe à sa réponse, offre selon lui toutes les garanties (y compris pour une omission de l'Etat) assurant aux requérants une large protection des droits qui, selon eux, auraient été violés par le gouvernement du Costa Rica. Ces voies de recours n'ont été exercées à aucun moment et encore moins épuisées.
- 299. Le gouvernement ajoute que la législation du travail du Costa Rica établit quatre procédures pour résoudre les conflits collectifs économiques et sociaux:
- - La convention collective: Elle est définie à l'article 54 du Code du travail comme étant une convention conclue entre un ou plusieurs syndicats de travailleurs, d'une part, et un ou plusieurs syndicats d'employeurs, d'autre part, en vue de réglementer les conditions dans lesquelles le travail doit être exécuté et de régler toutes autres questions relatives au travail. La convention collective a le caractère d'une loi professionnelle et tous les contrats individuels ou collectifs en vigueur devront être adaptés à ses stipulations. Sont comprises au moins toutes les normes relatives aux garanties syndicales établies dans les conventions de l'OIT ratifiées par le Costa Rica. Seuls peuvent participer à la procédure le ou les syndicats de travailleurs et les patrons ou syndicats de patrons.
- - Les conflits collectifs: Conformément aux articles 500 et suivants du Code du travail, s'il s'élève en un lieu de travail une question susceptible de provoquer un conflit économique ou social, les travailleurs peuvent nommer une commission de trois membres qui remettront au patron et au juge de la juridiction une liste de revendications. Dès que la liste des revendications a été remise, le différend est réputé ouvert afin que ni l'une ni l'autre partie ne soit empêchée d'exercer ses droits et qu'aucune mesure de représailles ne soit permise. Dans le régime juridique en vigueur, il n'est pas nécessaire pour qu'un différend soit réputé ouvert qu'un syndicat intervienne: il suffit qu'un groupe de travailleurs décide de formuler ses inquiétudes pour que le juge du travail compétent leur en donne acte.
- - L'arbitrage: La loi permet aux parties en conflit de régler leurs différends devant des tribunaux d'arbitrage, conformément aux dispositions des articles 519 et suivants du Code du travail, pour ce qui est des questions du travail. Cette procédure de règlement des conflits permet aux travailleurs de participer à la procédure, qu'ils soient ou non groupés en syndicats.
- - Le règlement direct: L'article 497 du Code du travail, en vigueur depuis 1943, définit ainsi le règlement direct: "Les employeurs et les travailleurs chercheront à résoudre leurs différends par voie de règlement direct, entre eux ou avec l'intervention d'amiables compositeurs. A cet effet, les travailleurs pourront constituer à chaque lieu de travail un conseil ou comité permanent, comprenant au maximum trois membres, qui seront chargés de présenter, verbalement ou par écrit, à l'employeur ou à son représentant, leurs plaintes et requêtes. Ledit conseil ou comité devra toujours entreprendre ses démarches sous une forme courtoise, et quand il procédera ainsi, l'employeur ou son représentant ne pourra refuser de le recevoir aussitôt qu'il lui sera possible." Lorsque les négociations entre employeurs et travailleurs au sujet de différends de caractère économique et social conduisent à un règlement direct, il est dressé acte de l'accord dont une copie certifiée conforme est envoyée au Département des relations du travail du ministère du Travail et de la Sécurité sociale dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la signature. L'inspecteur général du travail veillera à ce que ces accords ne soient pas contraires à l'ordre juridique et à ce qu'ils soient respectés par les parties. Tout manquement aux dispositions de l'accord est puni d'une amende; conformément aux articles 498 et 499 du Code du travail, le Département des relations du travail du ministère doit être informé de la constitution des comités permanents de travailleurs dans les cinq jours suivant leur désignation.
- 300. Actuellement, les procédures de règlement des conflits collectifs susmentionnées sont largement utilisées aussi bien par les travailleurs organisés en comités permanents que par les syndicats. Il est évident que l'utilisation de l'une ou l'autre des procédures, à savoir celles auxquelles un syndicat ne participe pas nécessairement (conflit collectif, arbitrage, règlement direct) ou celle à laquelle participe obligatoirement le syndicat (convention collective) dépend en partie de la forme d'association choisie par les travailleurs, conformément à la liberté d'association prévue par l'article 25 de la Constitution politique et par la convention no 87 de l'OIT. Il convient de rappeler que les dispositions légales autorisant des formes de négociation collective auxquelles une organisation syndicale ne participe pas nécessairement avaient leur origine dans la nécessité de prévoir des modalités de négociation à un moment de l'histoire du pays, en 1943, où le syndicalisme n'était pas développé.
- 301. En ce qui concerne la nature et les fonctions des associations solidaristes, elles sont ainsi définies à l'article 4 de la loi no 6970: "... des entités de durée indéterminée dotées de la personnalité juridique qui, pour la poursuite de leurs objectifs, pourront acquérir toutes catégories de biens, passer des contrats de toute nature et réaliser toutes espèces d'opérations licites visant à améliorer la situation socio-économique de leurs membres en vue de leur assurer une existence plus digne et un niveau de vie plus élevé. Elles pourront, à cette fin, effectuer des opérations d'épargne, de crédit et de placement ainsi que toutes autres opérations rentables. Elles pourront aussi mettre en oeuvre des programmes en matière de logement ou dans les domaines scientifique, sportif, artistique, éducatif et récréatif, culturel, spirituel, social et économique, ainsi que tout autre programme encourageant de façon licite les liens et la coopération entre les travailleurs et entre ceux-ci et leurs employeurs." Il convient de souligner que les associations solidaristes ne sont pas des organisations syndicales, qu'elles n'ont ni la nature ni les objectifs d'une entité syndicale: les travailleurs, en choisissant cette forme d'association mutualiste, n'ont pas pour objectif la défense de leurs intérêts de classe. Il convient de garder présent à l'esprit que l'exécution par les associations solidaristes de divers programmes de bien-être financés grâce aux contributions des travailleurs et à celles des entreprises donne à ces associations le caractère d'une entité mutualiste et non, comme on a voulu le faire croire à l'OIT, d'une association qui s'ingère par ses objectifs et ses fonctions dans les activités des syndicats, ce qui en tout état de cause est interdit par l'article 8, alinéa h), de la loi no 6970 précitée, dont les dispositions interdisent à l'association solidariste et à ses représentants légaux de mener toute activité tendant à combattre ou à entraver, de quelque façon que ce soit, la formation et le fonctionnement des organisations syndicales et coopératives. L'inobservation de ces dispositions peut entraîner la dissolution de l'association et la destitution du représentant légal, sans préjudice des sanctions prévues par la loi.
- 302. Sur la base du principe constitutionnel de la liberté d'association et eu égard aux interdictions susmentionnées contenues dans la loi sur les associations solidaristes, le pays connaît depuis 1984 une situation remarquable en ce sens que coexistent trois formes d'associations distinctes, à savoir les syndicats, les coopératives et les associations solidaristes, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, chacune exerçant ses fonctions conformément aux principes juridiques qui les régissent et sans qu'elles se fassent concurrence ou entravent leurs activités respectives. On peut donner de cette situation les exemples suivants:
- Secteur privé:
- a) Société costa-ricienne de développement SA: Union (syndicat) des employés de CODESA et Association solidariste des employés de CODESA;
- b) Atlantis costa-ricienne SA: Syndicat des ouvriers d'Atlantis costa-ricienne; Union (syndicat) des travailleurs d'Atlantis costa-ricienne SA; Association solidariste des employés d'Atlantis costa-ricienne SA.
- Secteur public:
- a) Caisse costa-ricienne de sécurité sociale: 25 syndicats, 11 associations professionnelles, 11 associations solidaristes;
- b) Ministère des Ressources naturelles, de l'Energie et des Mines: Union des techniciens agricoles du ministère de l'Agriculture et de l'Elevage et du ministère des Ressources naturelles, de l'Energie et des Mines, Association syndicale des fonctionnaires du ministère des Ressources naturelles, de l'Energie et des Mines, et Association solidariste des employés du ministère des Ressources naturelles, de l'Energie et des Mines.
- 303. Le gouvernement joint en annexe des documents du Département des organisations sociales certifiant la coexistence de ces organisations dans 38 institutions et entreprises, tant du secteur public que du secteur privé. Il joint également en annexe une liste de 47 coopératives dans lesquelles il existe des associations solidaristes. Il convient de souligner, ajoute le gouvernement, que les diverses formes d'associations existant parmi les travailleurs ne s'excluent pas.
- 304. En tout état de cause, pour garantir que dans cette coexistence aucun type d'organisation ne soit avantagé par rapport à un autre, et pour éviter qu'un type d'organisation empiète sur les attributions et fonctions propres à un autre (et en vue de protéger en particulier l'une des principales fonctions du syndicat qui est la négociation collective), le gouvernement a décidé de présenter à l'Assemblée législative un projet de loi (dont le texte est joint en annexe) dont l'article 8 dispose qu'il est interdit aux organes de direction et d'administration et aux représentants légaux des associations solidaristes de participer directement ou indirectement à des contrats collectifs de travail. Cette initiative législative répond aux inquiétudes exprimées par les travailleurs et par l'OIT quand bien même, selon les annexes envoyées par le gouvernement, les membres des organes directeurs de certaines associations solidaristes des bananeraies où existent des accords directs ne font pas partie du comité permanent de travailleurs qui a conclu l'instrument collectif, ce qui montre que dans les faits il n'y a pas de relation entre l'association solidariste et la signature d'un accord (qui est une procédure de négociation bilatérale antérieure à la création des associations solidaristes).
- 305. S'agissant des allégations particulières de discrimination antisyndicale et de pression sur des travailleurs pour qu'ils s'affilient à des associations solidaristes, le gouvernement déclare que les griefs allégués dans les plaintes dans la majorité des cas n'ont pas de fondement légal. Le gouvernement commente certaines situations concrètes au vu des documents pertinents et déclare que, s'il n'a pas joint la documentation et les commentaires détaillés dans la totalité des cas, c'est à cause du volume des dossiers et de la difficulté matérielle de les faire parvenir au comité. Concrètement, le gouvernement fournit les informations suivantes:
- - JORGE BADILLA HERNANDEZ: syndicat de branche des travailleurs de l'agriculture, de l'élevage et assimilés de Heredia; a été licencié pour juste motif, étant donné qu'il s'est absenté de son travail sans avoir justifié son absence dans les trois jours suivants. A l'issue d'une négociation menée par l'entreprise avec des représentants des syndicats et avec la participation d'un représentant du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, l'entreprise a accepté de payer 95 pour cent de l'indemnité de licenciement.
- - JORGE UGALDE VARELA: n'a pas été licencié.
- - JUAN R. OBANDO ARRIETA: le 23 avril 1978, a présenté sa démission et a demandé le paiement de ses droits acquis, ce qui lui a été octroyé par l'entreprise PATRONO.
- - GILBERTH MONGE PEREZ: même situation que la précédente.
- - JOSE MIGUEL JIMENEZ JIMENEZ: ayant dix années d'ancienneté dans l'entreprise et ayant été pendant trois années membre du comité syndical de base, a demandé le paiement de ses droits acquis et présenté sa démission pour les motifs suivants: "... 1) Je ne me sens pas en état de continuer de travailler pour l'entreprise. 2) Je dois aider mes parents à s'occuper d'une propriété qu'ils exploitent seuls, c'est pourquoi je vous demande votre aide et vous en serais très reconnaissant."
- - MANUEL ARAYA RODRIGUEZ: a cessé son travail en déclarant: "... mon état de santé n'est pas très bon et je ne peux pas faire une grande partie des travaux de l'entreprise".
- - ALFONSO HERNANDEZ HERNANDEZ: a cessé de travailler pour des raisons de santé à cause d'une lésion au cou attestée par les médecins de la Caisse costa-ricienne de sécurité sociale.
- - BERNARDO BONILLA GONZALEZ: le Syndicat UTRAL a demandé le paiement des indemnités prévues par la loi pour incapacité physique l'empêchant de continuer à travailler dans l'entreprise, et il a même joint des expertises médicales de l'Institut national d'assurance attestant la lésion. Il a été fait application des dispositions de la convention collective de travail, clause 2, alinéa m), à laquelle la Standard Fruit Company était partie.
- 306. S'agissant de la question des plébiscites, le gouvernement déclare que quelques plébiscites ont eu lieu par le passé (1984 et 1985) à la Standard Fruit Company et à BANDECO (société bananière) pour déterminer, dans le premier cas, l'agent négociateur d'une convention collective et, dans le second, pour vérifier le pouvoir de négocier du syndicat face à un comité permanent qui voulait négocier un accord direct. Quant à la politique du gouvernement concernant le choix entre accord direct et convention collective, le gouvernement qui a pris ses fonctions le 8 mai 1990 a adopté pour politique de refuser l'homologation et le dépôt d'accords directs lorsque la procédure de négociation d'une convention collective de travail a été entamée, conformément aux articles 54 et suivants du Code du travail, par une organisation syndicale compétente pour négocier. A titre d'exemple, la résolution du 10 août 1990 de la Direction nationale et de l'Inspection générale du travail a refusé l'homologation et le dépôt de l'accord direct dans l'entreprise Derivados de Maíz Alimenticio SA et Agropalmito SA pour les raisons évoquées ci-dessus. Le gouvernement joint en annexe à cet égard les statistiques de l'évolution des accords directs, conventions collectives et conflits collectifs.
- 307. En ce qui concerne les aspects économiques et financiers du solidarisme, le gouvernement rappelle que les adhérents d'une organisation syndicale versent au syndicat un pourcentage de leur rémunération ou des sommes fixes, ce dernier assurant la défense de leurs intérêts professionnels; en revanche, dans le cas des associations solidaristes, la contribution des travailleurs est considérée comme une épargne relativement fixe et volontaire étant donné que leur nature est proche des systèmes mutualistes. A cet égard, la loi sur les associations solidaristes établit à l'article 18 quatre formes distinctes de ressources économiques des associations, à savoir:
- a) l'épargne mensuelle minimale des associés, dont le taux est fixé par l'assemblée générale. En aucun cas, ce taux ne peut être inférieur à 3 pour cent ni supérieur à 5 pour cent du salaire. Rien n'empêche toutefois le travailleur d'épargner volontairement des sommes supérieures selon ses possibilités économiques;
- b) l'apport mensuel du patron;
- c) les revenus résultant de dons, d'héritage ou de legs, le cas échéant;
- d) tout autre revenu licite provenant de leurs activités.
- Les sommes épargnées par les travailleurs doivent être utilisées par l'association solidariste pour la réalisation de ses objectifs, mais elles doivent être rendues aux associés en cas de démission ou de retrait de l'association. C'est là une différence marquée entre la cotisation à un syndicat et l'épargne versée à une association solidariste. Cette différence fait qu'il n'est pas possible de comparer le syndicat avec l'association solidariste mais, devant les doutes émis par la confédération plaignante quant à l'indépendance à l'égard de l'apport financier de l'employeur, il convient de rappeler que: a) les objectifs de l'association solidariste sont des objectifs de développement économique, culturel et social des travailleurs; b) l'apport des travailleurs à l'association solidariste constitue une épargne à but lucratif qui doit accroître leur patrimoine personnel; c) les associations solidaristes peuvent distribuer à leurs associés des excédents en fin d'exercice, ce qui constitue une grande différence, et ce pas seulement avec le mouvement syndical.
- 308. Quant à la question de l'intervention de l'employeur dans l'association solidariste, le gouvernement signale que l'article 14 de la loi no 6970 dispose que tous les travailleurs de 16 ans et plus peuvent être membres des associations solidaristes mais que, pour occuper une charge élective dans l'association, ils doivent avoir atteint la majorité de dix-huit ans. Les organes directeurs ne comprennent que des travailleurs, y compris ceux qui possèdent des actions ou des participations à l'actif de l'entreprise. Cependant, ceux qui exercent des fonctions de représentants des employeurs - directeurs, gérants, comptables, administrateurs ou fondés de pouvoirs de l'entreprise - ne peuvent occuper de fonctions dans les organes directeurs. La loi dispose, dans le même article, que l'employeur peut désigner un représentant pour assister aux assemblées générales et aux réunions de l'organe directeur, avec droit de parole mais sans droit de vote, à moins que ces organismes s'y opposent à la majorité simple.
- 309. Par ailleurs, le gouvernement souligne qu'il est évident, selon la définition des associations solidaristes, que ces dernières ne constituent ni en fait ni en droit des homologues des syndicats et que leurs fonctions sont différentes même si elles peuvent paraître semblables en ce qui concerne les activités économiques que certains syndicats exercent dans certains pays du monde. Ces différences s'expliquent par l'aspect financier puisque l'association solidariste doit utiliser la totalité des ressources provenant de l'épargne de ses adhérents pour des projets productifs, et que la loi l'oblige à investir dans des activités lucratives afin d'accroître le patrimoine de ses adhérents. Si les investissements se font dans les activités de l'entreprise où fonctionne l'association solidariste, ils doivent non seulement être garantis de manière suffisante, mais rapporter aussi à des taux qui ne soient pas inférieurs à ceux du marché financier bancaire. Pour ce qui est des organisations syndicales, étant donné que leur fonction n'est pas d'accroître leur patrimoine mais de défendre les intérêts professionnels et sociaux de leurs adhérents, la législation du travail costa-ricienne (article 350) leur a interdit d'exercer des activités à but lucratif. Le gouvernement prend toutefois en considération l'évolution actuelle du développement économique du pays et les conséquences des événements mondiaux sur l'économie et le commerce extérieur qui entraînent une dépréciation de la monnaie déjà fragile, qu'il ne sera pas possible de corriger à court terme; c'est pourquoi, il estime nécessaire de trouver des formes de protection du patrimoine des organisations syndicales afin de prévenir, autant que possible, la détérioration de ce patrimoine en permettant à ces organisations de faire des investissements à but lucratif, à condition que les bénéfices obtenus par ces investissements servent aux objectifs prévus par la loi pour les syndicats.
- 310. S'agissant de l'apport de l'Etat au syndicalisme et aux associations solidaristes, le gouvernement déclare que le Parlement a effectivement versé à des syndicats et à des organisations solidaristes des subventions et il envoie la liste de neuf associations solidaristes et 56 organisations syndicales ainsi que deux écoles de formation syndicale qui ont bénéficié de ces subventions, en précisant les montants reçus par chacune d'elles. Les chiffres montrent que le mouvement syndical a reçu 16.182.500 colones de plus que le mouvement solidariste en ce qui concerne les subventions de l'Etat. Par ailleurs, des montants importants (dont le gouvernement fournit le détail) ont été transférés du budget du ministère du Travail et de la Sécurité sociale à des syndicats, alors qu'un seul transfert a été effectué en faveur d'une association solidariste. Par exemple, en 1990: 2 millions de colones ont été versés au syndicat des industries Barzunas, au Syndicat national des travailleurs du vêtement, de la confection et du cuir (paiement des travailleurs qui ont été touchés par la faillite des industries Barzunas); 500.000 colones à la Confédération authentique des travailleurs démocratiques (achat de véhicules); 500 millions au Syndicat unitaire des petits producteurs de Pocosí et Guácimo (construction du siège); 250.000 colones à l'association solidariste des travailleurs de la Coopérative R.L. (projet de logement); 2 millions de colones à la Confédération nationale des travailleurs (achat de bâtiments, programmes d'éducation et de vulgarisation, services consultatifs pour l'action syndicale). Par ailleurs, il importe de souligner que les syndicats ont accès aux crédits bancaires dans une proportion supérieure à celle des associations solidaristes à la Banque populaire et de développement communal, qui est alimentée par l'épargne obligatoire des employeurs et des travailleurs selon un pourcentage de la masse salariale fixé par la loi. Ainsi, selon un document des vérificateurs aux comptes de cette banque, au 30 juin 1990, sur le solde du portefeuille de développement, les syndicats avaient obtenu 8,11 pour cent, soit plus de 200 millions de colones, tandis que les associations solidaristes participaient seulement pour 1,76 pour cent à ce portefeuille.
- 311. S'agissant de la représentation du mouvement syndical dans les organes d'Etat, le gouvernement déclare que l'Etat costa-ricien a toujours eu une position claire sur l'importance prépondérante et particulière de la représentation des travailleurs exercée par le mouvement syndical. A cet égard, au cours des dernières années, le gouvernement a accordé dans différentes institutions où la participation des travailleurs est nécessaire, soit à cause des répercussions économiques soit à cause des répercussions sociales de leur fonctionnement, le droit aux confédérations syndicales d'être représentées sur un pied d'égalité avec les employeurs. Le gouvernement fournit la liste des institutions à direction collégiale:
- - le Conseil national des salaires: où siègent trois représentants titulaires et un suppléant pour les confédérations syndicales et un nombre égal de représentants employeurs et gouvernementaux. Il n'y a pas de représentation solidariste;
- - le Conseil national de production: où siègent un représentant des confédérations syndicales et un représentant des coopératives, un représentant pour les petits propriétaires et quatre représentants du gouvernement. Les employeurs ne sont pas représentés dans cet organe directeur;
- - le Conseil de santé du travail: où siègent deux représentants des confédérations syndicales, deux représentants des employeurs et quatre représentants de l'Etat;
- - l'Institut national d'apprentissage: où siègent trois représentants de l'Etat, trois représentants des travailleurs et trois représentants des employeurs;
- - la Banque populaire et de développement communal: cette institution a deux types de représentation. La première à l'assemblée générale et la seconde au conseil de direction. A l'assemblée générale, la représentation est la suivante:
- - 20 représentants de chaque confédération syndicale comptant au moins 10.000 adhérents et au moins deux années d'existence;
- - 40 représentants des associations de l'enseignement national ayant plus de 5.000 affiliés et au moins deux années d'existence;
- - 20 représentants du mouvement solidariste;
- - 10 représentants du mouvement coopératif;
- - 10 représentants des coopératives d'autogestion;
- - 40 représentants des associations de développement communal;
- - 20 représentants du syndicalisme non confédéré;
- - 10 représentants du secteur artisanal;
- - 10 représentants du secteur professionnel;
- - 10 représentants du secteur des travailleurs indépendants.
- Le conseil de direction compte trois représentants de l'Etat et quatre représentants désignés par l'assemblée des travailleurs. Il ne compte actuellement aucun membre représentant les associations solidaristes:
- - la Commission de négociation salariale dans le secteur public: où siègent cinq représentants du pouvoir exécutif, trois représentants des confédérations syndicales et deux représentants des éducateurs;
- - l'Autorité budgétaire: chargée de discuter des politiques et des directives en matière salariale, où siège une commission comprenant quatre représentants du gouvernement et un représentant des organisations syndicales;
- - la Caisse costa-ricienne de sécurité sociale: chargée de contrôler le régime de maladie et de maternité qui couvre 90 pour cent de la population costa-ricienne, ainsi que le régime d'invalidité, vieillesse et décès qui couvre 46 pour cent de la population active, où siègent trois représentants de l'Etat, un représentant des confédérations syndicales, un représentant du mouvement coopératif, un représentant du mouvement solidariste et trois représentants des employeurs.
- 312. Le gouvernement signale aussi qu'à la suite d'un courant d'opinion qui s'est dessiné ces dernières années et sur proposition d'un député du Parti de l'unité sociale chrétienne, actuellement au pouvoir, une proposition de loi sur la participation des travailleurs au capital des entreprises est à l'examen. Cette proposition vise à permettre aux travailleurs et à leurs organisations de devenir propriétaires du capital de leurs entreprises. Les entreprises qui feront usage de ces dispositions devront garantir l'organisation syndicale de leurs travailleurs sous le contrôle du ministère du Travail et de la Sécurité sociale.
- 313. Quant aux garanties en matière de liberté syndicale, l'Etat costa-ricien a toujours soutenu les principes de la Conférence internationale du Travail en matière de liberté, de protection et de promotion syndicales. A cet égard, le gouvernement énumère les textes législatifs qui régissent ces questions et qui offrent une large protection juridique aussi bien aux travailleurs qu'aux dirigeants syndicaux susceptibles de faire l'objet de discrimination et de pratiques antisyndicales:
- Code du travail
- - Article 332. Est déclarée d'intérêt public l'institution légale d'organisations sociales, soit syndicales, soit coopératives, comme un des moyens les plus efficaces de contribuer au maintien et au développement de la culture populaire et de la démocratie costa-ricienne.
- - Article 361. Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale sera chargé d'encourager le développement du mouvement syndical, sous une forme harmonieuse et ordonnée, par tous les moyens légaux qu'il jugera convenables. A cet effet, il adoptera, par voie de décret, toutes les dispositions nécessaires dans chaque cas pour garantir l'exercice du droit syndical.
- Loi organique du ministère du Travail et de la Sécurité sociale
- - Article 47. (L'Office des syndicats) sera chargé du développement et du contrôle des organisations syndicales. A cet effet, il devra mettre en oeuvre un programme de culture syndicale en informant les travailleurs et les employeurs de l'objet et de la nature de ces organisations.
- - Article 50. L'office collaborera avec les organisations syndicales pour tout ce qui concerne leur constitution et leurs fonctions, lorsque la demande lui en est faite, en s'efforçant de leur fournir les moyens nécessaires à leur fonctionnement y compris, si possible, un apport économique lorsqu'elles le demandent.
- Règlement de réorganisation et de rationalisation du ministère du Travail et de la Sécurité sociale
- Article 38:
- (Département des relations de travail):
- En matière de relations collectives de travail:
- Alinéa c), intervenir et trouver des solutions, par la voie de la conciliation administrative, à tous les conflits du travail suscités par les relations entre employeurs et travailleurs, en adaptant son intervention ou médiation aux dispositions légales en vigueur.
- Alinéa e), obtenir que les parties utilisent le contrat collectif ou la convention collective pour régir les conditions de travail.
- En matière de contrats ou de conventions collectives:
- Alinéa g), conseiller les employeurs et les travailleurs sur la nature, les effets et les avantages des contrats ou conventions collectives de travail.
- Département des organisations sociales:
- Article 41:
- En matière d'enregistrement des organisations sociales:
- Alinéa a), protéger en collaboration avec la Direction nationale et l'Inspection générale du travail l'exercice de la liberté syndicale et le droit d'association des travailleurs et des employeurs.
- Alinéa b), promouvoir la constitution d'associations professionnelles.
- Alinéa j), promouvoir des études sur le développement du syndicalisme au Costa Rica.
- En matière d'éducation ouvrière:
- Alinéa b), collaborer à la formation de comités dans les organisations syndicales chargés de l'éducation ouvrière.
- En matière de conseil et de défense gratuite des travailleurs:
- Alinéa b), représenter et conseiller gratuitement les travailleurs qui le demandent auprès des autorités compétentes pour les différents conflits qui peuvent surgir entre eux et leurs employeurs à propos du contrat de travail.
- 314. Par ailleurs, ajoute le gouvernement, étant donné que cette question doit évoluer en fonction des circonstances particulières du développement des relations professionnelles, le gouvernement actuel s'est imposé comme priorité de réformer et de mettre à jour la législation du travail. En particulier, la proposition qui tient compte des initiatives des gouvernements précédents et des conseils fournis par l'OIT comprend un chapitre traitant spécifiquement des pratiques déloyales où sont définies comme telles les agissements ou omissions qui tendent à éviter, limiter, restreindre ou empêcher l'exercice des droits des travailleurs ou des groupes de travailleurs. Parmi ces pratiques déloyales figure précisément celle qui consiste à faire pression sur les travailleurs, par quelque moyen que ce soit, pour qu'ils s'affilient ou qu'ils se retirent de syndicats ou d'organisations de travailleurs déterminés, ainsi que les licenciements injustifiés ou illégaux qui tendent à affaiblir l'appui aux mouvements collectifs de travailleurs aux syndicats.
- 315. Tout en demandant à nouveau formellement que la plainte de la CISL sur les prétendues violations de la liberté syndicale soit rejetée, le gouvernement exprime sa préoccupation devant la façon dont le cas du Costa Rica a été présenté en sortant des phrases de leur contexte pour appuyer les allégations de persécution syndicale. Rien n'est plus éloigné de la réalité, comme on l'a vu, que l'affirmation selon laquelle la société est opposée au mouvement syndical. C'est tout le contraire dans un pays de longue tradition démocratique et pluraliste, par sa capacité de dialogue, par la façon d'agir des interlocuteurs sociaux, par la capacité de négociation, mais surtout par la concertation nationale en vue du développement non seulement économique, mais aussi social. C'est pourquoi le gouvernement déplore que la confédération plaignante, dans ses nouvelles allégations du 1er août 1990, fasse état d'extraits discours prononcé par le Président de la République en omettant la partie centrale de ce discours qui reflète l'aspiration du peuple costa-ricien et qui se lit comme suit: "Nous avons confiance dans une société démocratique, participative et tolérante où coexistent pacifiquement le solidarisme et les autres organisations sociales."
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 316. A partir de tous les éléments d'information contenus dans les allégations et dans les réponses du gouvernement, le comité observe que les associations solidaristes sont des associations de travailleurs dont la constitution est subordonnée à l'apport de l'employeur et qui sont financées, conformément au principe mutualiste, par les travailleurs et les employeurs à des fins économico-sociales de bien-être matériel (épargne, crédit, investissement, programmes de logement, programmes éducatifs, etc.) et d'union et de coopération entre travailleurs et employeurs; les organes de ces associations doivent se composer de travailleurs, mais un représentant de l'employeur peut y participer avec droit de parole sans toutefois disposer d'un droit de vote. De l'avis du comité, si rien n'empêche du point de vue des principes des conventions nos 87 et 98 que les travailleurs et les employeurs recherchent des formes de coopération, y compris de nature mutualiste, pour atteindre des objectifs sociaux, il appartient au comité, dans la mesure où ces formes de coopération se cristallisent dans des structures et des organisations permanentes, de s'assurer que la législation et le fonctionnement dans la pratique des associations solidaristes n'interfèrent pas dans les activités et les fonctions propres des syndicats.
- 317. Le comité se félicite des décisions adoptées par le gouvernement et des intentions qu'il a manifestées au sujet de questions importantes posées dans le présent cas, en vue d'éclaircir le rôle des associations solidaristes et des syndicats et d'améliorer la législation. Concrètement, le comité prend acte avec satisfaction de ce que:
- - le gouvernement ait décidé d'appuyer la présentation d'une proposition de loi au Parlement disposant qu'il est interdit aux organes de direction et d'administration et aux représentants légaux des associations solidaristes de participer directement ou indirectement à des contrats collectifs de travail pour éviter que les associations solidaristes empiètent sur les attributions et les fonctions propres des syndicats, comme la négociation collective;
- - le gouvernement ait établi comme politique de refuser l'homologation et le dépôt d'accords directs conclus par un groupe quelconque de travailleurs et leur employeur, lorsqu'une procédure de négociation d'une convention collective, pour laquelle une organisation syndicale est compétente, est entamée;
- - le gouvernement se soit fixé comme priorité de réformer et mettre à jour la législation du travail et d'inclure en particulier un chapitre spécial sur la discrimination antisyndicale (agissements ou omissions tendant à éviter, limiter, restreindre ou empêcher l'exercice des droits des travailleurs ou de groupes de travailleurs, notamment les agissements tendant à faire pression sur les travailleurs pour qu'ils s'affilient à des syndicats déterminés ou à s'en retirer, ainsi que les licenciements injustifiés ou illégaux qui tendent à affaiblir l'appui des travailleurs aux syndicats);
- - le gouvernement ait estimé nécessaire et opportun de trouver des formes de protection du patrimoine des organisations syndicales en leur accordant la possibilité d'effectuer des investissements de caractère lucratif à condition que les bénéfices soient destinés aux objectifs des syndicats tels que définis par la loi.
- Le comité exprime le ferme espoir que le gouvernement fera tout le nécessaire possible pour que ces décisions et intentions soient mises à exécution le plus rapidement possible dans le domaine de la négociation collective, de la protection contre la discrimination antisyndicale et des activités économiques, qu'il consultera les partenaires sociaux à ce sujet et qu'il accélérera le processus d'adoption des projets de loi.
- 318. En ce qui concerne les allégations de discrimination et d'ingérence antisyndicales (licenciements de syndicalistes qui n'acceptent pas le modèle solidariste, pressions pour que les travailleurs adhèrent aux associations solidaristes ou se retirent du syndicat, etc.), le comité déplore que le gouvernement n'ait répondu de manière précise qu'à huit des nombreuses allégations de l'organisation plaignante présentées en septembre 1989. Le comité demande au gouvernement de répondre aux autres allégations.
- 319. Quant aux allégations relatives à la diminution du nombre de conventions collectives et à l'augmentation du nombre d'accords directs, le comité n'a pas reçu le tableau comparatif des conventions collectives et des accords directs mentionné par le gouvernement dans sa réponse.
- 320. Le comité observe que le gouvernement a présenté des statistiques selon lesquelles jusqu'à présent il existe un équilibre quantitatif entre les subventions publiques aux syndicats et aux associations solidaristes, mais il a envoyé aussi le texte d'un projet de loi établissant un impôt ("timbre solidariste") en faveur du mouvement solidariste. Le comité demande au gouvernement d'indiquer s'il entend maintenir à l'avenir cet équilibre quantitatif. Par ailleurs, le comité souhaite connaître l'opinion du gouvernement en ce qui concerne la possibilité que la législation autorise les organisations syndicales à disposer de fonds destinés aux indemnités de licenciement afin d'exercer des activités en matière d'oeuvres sociales.
- 321. Enfin, le comité observe que les points de vue de l'organisation plaignante et du gouvernement sont divergents sur plusieurs questions importantes, comme par exemple l'allégation concernant l'inégalité de traitement, par la législation et les autorités, entre syndicats et associations solidaristes, celle relative à l'intrusion de ces dernières dans les attributions et fonctions propres des syndicats et la situation en pratique concernant les actes de discrimination antisyndicale. En vue d'examiner ces allégations avec des éléments complets d'appréciation, le comité recommande au Conseil d'administration de demander au gouvernement d'accepter l'envoi d'une mission de contacts directs au Costa Rica.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 322. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Comme il l'a fait à sa session précédente, le comité exprime sa grave préoccupation devant l'affaiblissement du mouvement syndical costa-ricien et la forte diminution du nombre des organisations syndicales ces dernières années. Il semble, d'après les éléments dont dispose le comité, que ces phénomènes sont en rapport avec le développement des associations solidaristes.
- b) Le comité souligne à nouveau l'importance fondamentale du principe du tripartisme prôné par l'OIT, qui suppose l'existence d'organisations indépendantes (les unes des autres, et des autorités publiques) de travailleurs, d'une part, et d'employeurs, d'autre part.
- c) Le comité prend acte avec satisfaction des décisions adoptées par le gouvernement (voir paragr. 317 des conclusions ci-dessus) et des intentions qu'il a manifestées au sujet de questions importantes posées dans le présent cas, en vue d'éclaircir le rôle des associations solidaristes et des syndicats et d'améliorer la législation.
- d) Le comité exprime le ferme espoir que le gouvernement fera tout le nécessaire possible pour que ces décisions et intentions soient mises à exécution le plus rapidement possible dans le domaine de la négociation collective, de la protection contre la discrimination antisyndicale et des activités économiques, qu'il consultera les partenaires sociaux à ce sujet et qu'il accélérera le processus d'adoption des projets de loi.
- e) Le comité souhaiterait connaître l'opinion du gouvernement quant à la possibilité pour la législation de permettre aux organisations syndicales de pouvoir disposer des fonds de chômage afin qu'elles puissent exercer des activités en matière d'oeuvres sociales.
- f) Le comité exprime l'espoir que le gouvernement créera en concertation avec les centrales syndicales les conditions nécessaires au renforcement et au développement du mouvement syndical indépendant et au développement de ses activités en matière d'oeuvres sociales.
- g) Le comité demande au gouvernement de lui fournir des informations sur la suite donnée à ses demandes et porte ce cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.
- h) Enfin, le comité observe que les points de vue de l'organisation plaignante et du gouvernement sont divergents sur plusieurs questions importantes, comme par exemple l'allégation concernant l'inégalité de traitement, par la législation et les autorités, entre syndicats et associations solidaristes, celle relative à l'intrusion de ces dernières dans les attributions et fonctions propres des syndicats et la situation, en pratique, concernant les actes de discrimination antisyndicale. En vue d'examiner ces allégations avec des éléments complets d'appréciation, le comité recommande au Conseil d'administration de demander au gouvernement d'accepter l'envoi d'une mission de contacts directs au Costa Rica.