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- 312. Des plaintes en violation de la liberté syndicale en Grèce ont été présentées par plusieurs organisations syndicales, à savoir: une partie de l'administration de la Confédération générale du travail de Grèce (CGTG) et la Fédération panhellénique des comptables, dans un premier temps, le 8 novembre 1985, puis, dans un second temps, par l'Union panhellénique des mécaniciens de la marine marchande (PEMEN), l'Union panhellénique des matelots de la marine marchande (PENEN) et l'Union panhellénique des mécaniciens de troisième degré certifié et des pompiers stefenson dans une communication du 25 novembre 1985. Enfin, plusieurs autres organisations syndicales grecques ont adressé une lettre type ayant trait aux mêmes questions dans des communications des 6, 7, 15 et 16 décembre 1985. Cette lettre type était signée de la Fédération panhellénique des unions du personnel municipal, de la Bourse du travail des ouvriers et employés de Ioannina, de la Fédération panhellénique des fonctionnaires d'Etat non titulaires, de la Bourse du travail de Karditsa, de la Fédération panhellénique des employés et ouvriers de vêtements, de la Fédération des retraités des organismes d'assurances sociales, de la Fédération panhellénique du spectacle et de la musique, de la Fédération des ouvriers des mines de Grèce, de la Bourse du travail d'Agrinion, de la Fédération des ouvriers des filatures de Grèce, de la Fédération des ouvriers du cuir, de la Fédération des organismes des hôpitaux, de la Fédération panhellénique des ouvriers des boulangeries, de la Fédération des syndicats des pompes funèbres, de la Bourse du travail de Preveza, de la Bourse du travail d'Arcadie, de la Fédération panhellénique des traitements spéciaux, de la Fédération de la construction et assimilés de Grèce, de la Fédération des enseignants des écoles privées, de la Fédération panhellénique des comptables, du Centre des ouvriers et employés de la Canea (île de Crète) ainsi que du Centre ouvrier de Kavala et de Larissa. La PEMEN, la PENEN et l'Union des mécaniciens ont envoyé une autre communication en date du 23 décembre 1985.
- 313. Le gouvernement, pour sa part, a envoyé ses observations dans des communications des 3 et 18 décembre 1985 et 18 février 1986.
- 314. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 315. La communication de la Confédération générale du travail de Grèce (CGTG), sous la signature de M. Papamichael, en sa qualité, indique-t-il, de président de la CGTG, porte, en premier lieu, sur les mesures économiques récentes adoptées par le gouvernement grec. Le plaignant dénonce, à cet égard, la suppression de l'indexation automatique des salaires sur les prix et l'élimination des augmentations des quatre derniers mois de 1985, qui résulteraient du décret présidentiel abrogeant la liberté de négociation collective jusqu'à la fin de 1987.
- 316. En second lieu, le plaignant explique que le président de la CGTG, M. Raftopoulos, a, arbitrairement et sans avoir obtenu l'approbation préalable des organes de la CGTG, accepté le gel de la négociation collective imposé pour deux ans et demi et refusé, de manière persistante et contraire aux statuts, de convoquer le conseil d'administration de la CGTG afin de prendre les décisions nécessaires. Le conseil d'administration de la CGTG, indique M. Papamichael, après que plusieurs demandes aient été adressées en vain au président, a donc été convoqué par le comité exécutif de la CGTG le 29 octobre 1985, conformément aux statuts et à la loi et il a décidé de déposer le président Raftopoulos.
- 317. Le plaignant poursuit en expliquant que, le 31 octobre 1985, le conseil d'administration l'a élu en qualité de président de la CGTG lui qui, auparavant, était vice-président de cette organisation. Il ajoute que, lors de la réunion du 29 octobre 1985, il a été décidé de discuter d'un dialogue avec le gouvernement à propos de la révision des mesures économiques en relation avec les perspectives de développement et de croissance économique ainsi que du retrait du décret présidentiel portant sur le gel des accords collectifs conclus. En outre, le conseil d'administration, lors de cette même réunion, a annoncé le déclenchement d'une grève générale de soutien de vingt-quatre heures pour le 14 novembre 1985.
- 318. Toujours selon le plaignant, l'ex-président de la CGTG, M. Raftopoulos, avec le soutien du gouvernement, a organisé un recours devant la justice grecque par le truchement du Centre de travail de Patras qu'il contrôle, afin d'obtenir l'annulation des décisions du conseil d'administration et d'écarter la réaction de la CGTG. D'après le plaignant, il est évident que, par ce coup d'Etat judiciaire, les dirigeants du conseil d'administration, légalement élus par le 22e Congrès de la CGTG en décembre 1983, vont être écartés et qu'un conseil d'administration temporaire et choisi à l'avance va être désigné afin d'assurer la majorité nécessaire pour appuyer les choix gouvernementaux en matière économique.
- 319. Le plaignant indique également que le comité exécutif de la CGTG a décidé, conformément aux statuts, d'organiser un congrès panhellénique extraordinaire en janvier 1986 pour élire une nouvelle direction de la CGTG et que cette décision a été approuvée par la grande majorité des organisations membres. Cependant, poursuit-il, l'ex-président, M. Raftopoulos, a contraint 16 membres du PASOK, également membres du conseil d'administration de la CGTG, à démissionner, alors que lui-même et le trésorier, M. Breyannis, ne l'ont pas fait et qu'ils ont refusé de céder leur place à leurs suppléants jusqu'à ce que la décision de justice ait été adoptée. C'est alors, explique le plaignant, que la demande de désignation d'un conseil d'administration par le tribunal a été introduite par le Centre de travail de Patras.
- 320. Pour conclure, le plaignant demande au BIT d'intervenir auprès du gouvernement grec à propos du décret présidentiel de suspension de la liberté de négociation collective jusqu'en 1987 et du risque d'intervention du gouvernement dans la désignation par les tribunaux grecs d'un conseil d'administration de la CGTG.
- 321. La Fédération panhellénique des comptables, dans sa communication du 8 novembre 1985, appuie la plainte de M. Papamichael et explique qu'après trois demandes présentées par 26 des membres du conseil d'administration sur un total de 45 et le refus continu du président Raftopoulos de convoquer une réunion, le comité exécutif et le conseil d'administration de la CGTG se sont réunis. Par 12 voix sur 15 au comité exécutif et 27 voix sur 45 au sein du conseil d'administration, ils ont décidé de déclencher une grève générale de vingt-quatre heures le 14 novembre, d'engager un dialogue avec le gouvernement avant la grève, de repousser de 18 jours la réunion d'approbation du rapport financier du conseil d'administration de la CGTG du 31 octobre au 17 novembre, de censurer le président Raftopoulos et le trésorier Breyannis et de leur demander de démissionner. Malgré ses décisions, explique la fédération plaignante, l'ex-président de la CGTG a refusé de céder la place au nouveau président Papamichael. Le gouvernement a alors utilisé les tribunaux pour intervenir, convoquant le chef du Tribunal d'Athènes au ministère de la Justice et l'obligeant à suspendre les décisions précitées du conseil d'administration de la CGTG par une ordonnance temporaire.
- 322. Toujours selon la fédération plaignante, cette intervention du gouvernement a provoqué des manifestations et la moitié des centres de travail (y compris les plus grands, dont ceux d'Athènes, de Salonique et du Piré) et 26 fédérations ont décidé d'appuyer la nouvelle composition du conseil d'administration de la CGTG et de participer à la grève du 14 novembre. En outre, le gouvernement se serait servi du centre de travail qu'il avait utilisé pour faire annuler les décisions de la CGTG en vue de faire écarter le conseil d'administration de la CGTG nouvellement élu sous divers prétextes. En même temps, il aurait organisé la démission de la minorité du conseil d'administration de la CGTG afin de susciter un vide administratif et de pouvoir demander l'intervention judiciaire.
- 323. La lettre type signée les 6, 7, 15 et 16 décembre 1985 par plusieurs organisations syndicales reprend le contenu des allégations susmentionnées. Elle ajoute que les mesures économiques adoptées par le gouvernement vont conduire à une réduction des revenus des travailleurs, des employés et des retraités de plus de 20 pour cent pour l'année 1986, que le décret présidentiel entré en vigueur le 18 octobre 1985 a une validité de six mois jusqu'à sa ratification par le Parlement et qu'il interdit d'accorder des augmentations de salaires en dehors du cadre de la politique des revenus gouvernementaux jusqu'à la fin de 1987. Ce décret s'applique à tous les travailleurs sans exception et à toutes les sortes d'augmentations, c'est-à-dire aux salaires journaliers et horaires, aux allocations, aux avantages financiers et à toutes sortes d'avantages. En outre, toutes dispositions de la loi, toutes clauses de contrats collectifs, décisions arbitrales, décrets ministériels ou autres décisions gouvernementales ou contrats individuels contraires sont abolis.
- 324. Toujours d'après cette lettre, les mesures anti-ouvrières en question ont provoqué les réactions de la classe ouvrière et du mouvement syndical. La lettre confirme que le conseil d'administration de la CGTG élu au 22e congrès en décembre 1983 et dont le mandat expire en décembre 1986 a voté, à une large majorité, pour condamner les mesures gouvernementales. Elle allègue que la grève générale du 14 novembre 1985 a été suivie par 90 pour cent des organisations affiliées à la CGTG.
- 325. La lettre poursuit, à propos du conseil d'administration de la CGTG, que, malgré le fait que le 22e congrès ait élu 84 membres suppléants en même temps que les 45 membres titulaires et que certains d'entre eux aient déjà été appelés par le conseil d'administration à combler les départs provoqués par les démissions et bien que le conseil d'administration de la CGTG, élu à la suite d'une demande de 50 syndicats et fédérations (nombre supérieur aux exigences des statuts), ait décidé de demander la convocation d'un congrès national syndical les 10 et 12 janvier 1986 afin de trouver des solutions aux problèmes créés par l'ex-président Raftopoulos et les manoeuvres du gouvernement, le Tribunal de première instance d'Athènes, sous l'influence du gouvernement, a annulé l'élection du conseil d'administration de la CGTG et a nommé une direction de 45 membres composée de syndicalistes obéissant au gouvernement.
- 326. En ce qui concerne la décision de justice, la lettre indique qu'elle aurait été influencée par le gouvernement et que le juge se contredirait lui-même. En effet, bien que le juge ait accepté que, pour qu'il soit nécessaire de désigner le conseil d'administration d'une organisation syndicale par décision de justice, une raison sérieuse dusse exister, c'est-à-dire l'impossibilité d'obtenir un quorum en conformité avec la loi et les statuts de l'organisation, il a admis que 28 membres titulaires et huit membres suppléants du conseil d'administration, soit 36 membres actifs, étaient présents. Or, selon cette lettre, les statuts de la CGTG n'exigent la présence que de 25 membres du conseil d'administration en matière de quorum. Le juge a cependant rejeté par la suite ses propres arguments, en déclarant qu'il n'y avait pas d'exécutif, et il a annulé l'élection du conseil d'administration et en a désigné une autre.
- 327. Ultérieurement, ces organisations ont ajouté, dans une seconde communication, que le gouvernement a achevé de porter atteinte aux droits syndicaux en déposant devant le Parlement un projet de loi dont le contenu est identique à celui de l'acte législatif du Président de la République du 18 octobre 1985. Selon elles, vu l'importante majorité dont dispose le gouvernement au Parlement, ce projet sera certainement adopté.
- 328. Cette seconde communication contient le texte du projet de loi en question daté du 25 novembre 1985 que ces organisations contestent. L'article 1er du projet porte ratification de l'acte législatif du 18 octobre 1985 sur "les mesures de protection de l'économie nationale" et reprend le texte même de l'acte législatif dont l'article unique interdit d'accorder des augmentations de revenus en dehors des limites de la politique gouvernementale des revenus jusqu'à la fin de 1987 et exempte de cette interdiction les augmentations de revenus liées au statut familial ou au développement de la carrière professionnelle du travailleur qui ont été préalablement prévues en vertu de la loi, des conventions collectives, des décisions ministérielles, des décisions arbitrales, des règlements du travail d'une organisation ou d'une entreprise ou de toutes sortes d'autres actes réglementaires. L'article 2 du projet décrit la politique des revenus mentionnée à l'article 1er et prévoit qu'elle consiste seulement dans le paiement du réajustement automatique à l'inflation (ATA). A partir du 1er janvier 1986, le réajustement automatique à l'inflation sera payé aux salariés au commencement de chaque période de quatre mois, en conformité avec le pourcentage estimé d'évaluation de l'indice des prix à la consommation (DTK) et après qu'ait été soustraite l'inflation importée. L'inflation importée sera calculée sur l'évolution des prix à la consommation des produits importés contenue dans l'indice des prix de vente de l'ensemble des ventes calculée sur la période des quatre derniers mois. Le taux du réajustement automatique à l'inflation sera déterminé par une décision du ministère de l'Economie nationale. Si à la fin de l'année fiscale 1986-87 il existe une différence entre l'inflation estimée et l'inflation réelle, cette différence sera payée au commencement de l'année suivante. Le réajustement automatique à l'inflation pour les quatre premiers mois de 1986 sera payé au 1er janvier 1986 selon ce système d'estimation.
- 329. Les salariés dont les revenus dépassent 150.000 drachmes par mois ne recevront pas le réajustement automatique pendant les quatre premiers mois de 1986. Le calcul et le paiement du réajustement pour ces personnes s'effectueront en soustrayant un montant de 5.000 drachmes pour chaque enfant. Les salariés touchant moins de 150.000 drachmes, mais dont les revenus excéderont cette somme avec l'addition du réajustement des quatre premiers mois de 1986, recevront une partie du réajustement jusqu'à ce qu'ils aient atteint ce montant. Pour ceux qui occupent plusieurs emplois ou pour les retraités qui touchent plus de 40.000 drachmes par mois et qui exercent en plus un emploi, le réajustement sera payé sur une seule de leur source de revenus à leur choix. Une clause de sauvegarde des accords négociés avant le 18 octobre 1985, aux termes desquels les employeurs ont accepté de payer des salaires ou d'autres allocations au-dessus de ceux qui étaient légaux, est prévue, c'est-à-dire que les employeurs peuvent les payer, exceptionnellement. Le réajustement automatique sera payé de la manière suivante: jusqu'à 50.000 drachmes: en totalité; de 50.000 à 75.000 drachmes: pour moitié; de 75.000 à 100.000 drachmes: pour un quart; au-delà de 100.000 drachmes: il ne sera pas payé.
- 330. La PEMEN, la PENEN et l'Union panhellénique des mécaniciens de troisième degré certifié et des pompiers stefenson ont insisté sur le caractère inconstitutionnel de l'acte législatif visant à protéger l'économie nationale et ont estimé qu'il viole l'article 4 de la convention no 98. Selon elles, ces mesures restrictives sont hypocrites et ne visent qu'à permettre au capital, aux dirigeants, aux hommes d'affaires et à leurs serviteurs d'améliorer leur profit et à contraindre la classe ouvrière à payer unilatéralement le prix du redressement économique du pays dû à la crise. En effet, d'après elle, les accords collectifs et les négociations sont restreints, sinon abolis, et le droit de grève est aboli et, par là-même, de manière informelle, la Grèce dénonce les conventions nos 87 et 98 sans avoir le courage d'engager la procédure formelle de dénonciation et de faire face à ses responsabilités devant la communauté internationale.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 331. Dans une première communication du 3 décembre 1985, le gouvernement brosse un historique de la crise qui a éclaté au sein du conseil d'administration de la CGTG vers la fin du mois d'octobre 1985. Il explique que, malgré l'opposition du président de la CGTG, et sur la convocation illégale de son vice-président, M. Papamichael, 26 des 45 membres du conseil d'administration de la CGTG s'étaient réunis le 27 octobre 1985 pour destituer le président élu, M. Raftopoulos, et élire président le vice-président Papamichael, pour proclamer une grève générale de tous les travailleurs et pour protester contre la politique économique du gouvernement et contre l'acte législatif du 18 octobre 1985 sur la stabilisation de l'économie et le développement économique et social du pays.
- 332. Dans ces conditions, le Centre de travail de Patras, organisation membre de la CGTG, a alors intenté une action en justice devant le Tribunal de paix d'Athènes pour demander l'annulation des décisions illégales du groupe dit des "26" et a demandé parallèlement à ce même tribunal de rendre une ordonnance interlocutoire de suspension d'exécution desdites décisions jusqu'au prononcé du jugement définitif.
- 333. Le Tribunal de paix d'Athènes a rendu, le 25 novembre 1985, la décision no 2421 suspendant l'exécution des décisions des 27 et 29 octobre 1985, jusqu'au prononcé du jugement définitif. Cette suspension était motivée par le fait que lesdites décisions avaient été prises en violation de la loi et des dispositions des statuts de la CGTG et qu'en conséquence elles étaient illégales.
- 334. En outre, le Centre de travail de Patras, devant la démission de 16 des membres du conseil d'administration de la CGTG et donc devant l'impossibilité du fonctionnement légal dudit conseil d'administration, a introduit un autre recours, conformément à la loi, devant le Tribunal de première instance pour demander la désignation d'un conseil d'administration provisoire dont le mandat doit être de convoquer dans les quatre mois un congrès de la CGTG pour élire un nouveau conseil d'administration.
- 335. Le gouvernement explique à cet égard que l'article 69 du Code civil dispose que, en cas d'absence des personnes exigées aux fins de l'administration ou en cas de conflit d'intérêt, le tribunal procède à la désignation d'un conseil d'administration provisoire sur la demande de la partie qui a un intérêt légitime. Cette pratique de désignation des conseils d'administration provisoires des syndicats par les tribunaux est constante en Grèce et la Fédération panhellénique des comptables, qui était déjà plaignante en 1981, y avait elle-même recouru avec dix autres fédérations lors de l'annulation du 21e congrès de la CGTG par le Tribunal de première instance d'Athènes et de la désignation par voie judiciaire d'un conseil d'administration provisoire jusqu'à la tenue du congrès légal de la CGTG, indique le gouvernement.
- 336. Dans ces circonstances, poursuit-il, les plaintes déposées tant par le "groupe des 26", qui prétend devant le Bureau international du Travail représenter la direction de la CGTG, que par la Fédération panhellénique des comptables sont dépourvues de fondement. En outre, le gouvernement estime que la Fédération panhellénique des comptables a dépassé les limites de la bienséance et de la morale syndicale en diffamant le ministre de la Justice et le chef du Tribunal de paix et en commettant un "outrage au pouvoir" sanctionné par l'article 181 du Code pénal. Le gouvernement indique à cet égard qu'une copie de la communication de la Fédération panhellénique des comptables a été transmise au ministère de la Justice seul compétent pour engager des poursuites judiciaires au cas où les signataires de la plainte déposée au BIT ne présenteraient pas leurs excuses. En effet, les allégations de l'organisation plaignante relatives à un prétendu coup d'Etat judiciaire et à de prétendues interventions gouvernementales dans les affaires de la justice ont un caractère diffamatoire étant donné que la justice en Grèce fonctionne en toute indépendance, conformément à la Constitution, que les magistrats sont nommés à vie et qu'ils ne sont pas subordonnés au pouvoir exécutif; par ailleurs, aucune intervention du pouvoir exécutif, au détriment de l'indépendance des juges, qui obéissent seulement à la Constitution, à la loi et à leur conscience, n'est autorisée. Pour le gouvernement, ces allégations constituent une malhonnêteté et démontrent une absence totale de morale syndicale. Par ailleurs, il n'existe en Grèce aucune intervention gouvernementale dans les affaires syndicales depuis l'adoption de la loi no 1264 de 1982 sur la démocratisation du mouvement syndical et la consolidation des libertés syndicales des travailleurs qui a permis l'assainissement du mouvement syndical dont les dirigeants naturels sont à la tête de la CGTG.
- 337. Au sujet de la grève du 14 novembre 1985, qui avait été proclamée par le "groupe des 26", usurpateur du titre d'administrateur de la CGTG, le gouvernement indique qu'elle n'aurait été suivie que par 9,5 pour cent des 1.750.000 travailleurs et qu'elle a donc constitué un échec.
- 338. Quant à la crise qui a éclaté au sein de la CGTG, elle a conduit une minorité de syndicalistes se trouvant à la base et une majorité occasionnelle de dirigeants se trouvant au sommet de la CGTG à organiser un mouvement motivé par des raisons politiques à s'opposer aux mesures de stabilisation économique nécessaires, estime le gouvernement. Il explique à ce propos que l'acte législatif redéfinissant le système d'indexation automatique des salaires sur les prix (ATA) n'abolit pas le droit de négociation collective mais qu'il fixe temporairement et pour une durée limitée et prédéterminée de deux ans une limite aux négociations salariales. Les négociations collectives, d'après le gouvernement, restent libres pour les autres questions faisant l'objet des conventions collectives. Les limitations des augmentations salariales reposent sur l'article 106 de la Constitution qui dispose que "dans le but de consolider la paix sociale et de protéger l'intérêt général collectif, l'Etat planifie et coordonne les activités économiques du pays en s'efforçant d'assurer le développement économique de tous les secteurs de l'économie nationale". Le gouvernement rappelle, d'autre part, qu'il avait déjà en 1983 introduit une limitation à l'indexation automatique des salaires sur les prix par l'article 27 de la loi no 1320 de 1983. (Voir cas no 1193 examiné par le Comité de la liberté syndicale dans son 230e rapport, paragr. 294 à 323.)
- 339. Dans une seconde communication du 18 décembre 1985, le gouvernement répond aux allégations de la PEMEN, de la PENEN et de l'Union panhellénique des mécaniciens de troisième degré certifié et des pompiers stefenson.
- 340. Au sujet de la constitutionnalité de l'acte législatif, le gouvernement indique qu'en vertu des articles 5, 12, 22 et 23 de la Constitution les conventions collectives de travail conclues par des négociations libres entre les parties intéressées ont un caractère constitutionnel, mais qu'en cas de nécessité impérative de l'économie nationale des mesures restrictives des augmentations salariales peuvent être prises par le législateur à la condition que ces limitations demeurent en vigueur pour une période prédéterminée, limitée dans le temps et qu'au cours de ladite période les mêmes conditions de nécessité économique persistent. En conséquence, d'après le gouvernement, l'acte législatif ne viole pas les conventions nos 87 et 98 étant donné qu'il n'abolit pas les droits d'organisation et de négociation collective.
- 341. Le gouvernement ajoute d'ailleurs qu'il a, parallèlement à ces mesures économiques, déployé des efforts pour assainir l'économie en présentant un programme de stabilisation et d'amélioration de la compétitivité de l'économie grecque qui vise à limiter les déficits de la balance des paiements et du secteur public, à réduire l'inflation et à stabiliser certaines branches de l'économie. Pour ce faire, les principales mesures de ce programme ont comporté une dévaluation de la drachme de 15 pour cent, la modification du système d'indexation automatique des salaires (ATA), l'imposition d'une cotisation spéciale sur les bénéfices nets des entreprises et des personnes exerçant une profession libérale, une augmentation limitée des prix des produits agricoles inférieure à l'inflation, le dépôt en banque, sous forme de paiement anticipé, de 40 à 80 pour cent de la valeur de certains produits et matières premières importés de l'étranger et une diminution des dépenses du secteur public de 25 pour cent environ.
- 342. De la lecture de ce programme économique, pour les années 1986-87, il résulte, d'après le gouvernement, que l'acte législatif critiqué par les plaignants ne constitue pas une intervention gouvernementale en matière de négociation collective visant à porter atteinte à l'autonomie des partenaires sociaux, mais qu'au contraire il constitue une partie intégrante de sa politique de planification économique générale visant à envisager les risques, à tenir compte de l'intérêt de l'ensemble social et à permettre un développement autonome de l'économie du pays, conformément au principe constitutionnel consacré par l'article 106 de la Constitution. En outre, le gouvernement indique que les mesures économiques en question ont été adoptées dans le cadre de la politique de la Communauté économique européenne (CEE) afin de protéger les entreprises grecques dont le fonctionnement constitue une condition nécessaire au maintien de l'emploi et pour contenir le chômage au niveau actuel, niveau qui se situe parmi les plus bas des Etats membres de la CEE, mais qui pose des problèmes économiques et moraux à l'égard des chômeurs qui, en Grèce, sont pour la plupart des jeunes gens et des femmes.
- 343. Enfin, le gouvernement rappelle que la récession économique frappe bon nombre de pays et qu'elle influe de manière négative sur la Grèce. Il ajoute que, malgré ces problèmes, l'indexation automatique des salaires sur les prix a été maintenue jusqu'à aujourd'hui, tandis que, dans tous les pays de l'Europe de l'Ouest et dans certains pays de l'Europe de l'Est où elle était en vigueur, elle a été abrogée, ces pays, dont plusieurs ont un rythme de développement supérieur à la Grèce, n'ayant pas été en mesure de faire face aux besoins du système. Le gouvernement évoque l'exemple de l'Italie où la question de l'indexation automatique des salaires sur les prix a fait l'objet d'un référendum et où les travailleurs ont volontairement accepté, par une majorité de 56 pour cent, la réduction de leurs revenus.
- 344. Il décrit en outre l'élargissement des domaines de négociation collective auquel il a procédé au cours des quatre dernières années et explique que des éléments nouveaux ont fait l'objet de négociations notamment dans le domaine de la durée du travail (établissement de la semaine de cinq jours et de quarante heures), de l'amélioration des droits des travailleurs ayant des responsabilités familiales, de la protection des cadres syndicaux, des facilités accordées pour exercer des fonctions syndicales, du droit d'intervention des organisations syndicales sur le lieu de travail, de l'amélioration des allocations familiales, de l'établissement des congés éducatifs et culturels, de l'octroi de prêts au logement des travailleurs et plus généralement de l'ensemble des conditions de travail.
- 345. Le gouvernement reconnaît qu'une limitation des augmentations salariales, même pour une période limitée, est susceptible d'être cause de gêne pour les travailleurs, mais il observe que les travailleurs grecs envisagent ces difficultés dans l'optique des nécessités économiques, comme en témoignent le climat général de compréhension face au besoin de protéger l'économie nationale et la faible participation des travailleurs à la grève du 14 novembre 1985 proclamée par le groupe dissident des 26 ex-conseillers de la CGTG. Selon le gouvernement, les travailleurs grecs ont le sens des responsabilités devant les problèmes généraux et urgents qui touchent l'économie de leur pays et cela tient au fait que, depuis quatre ans, de grands progrès ont été accomplis en leur faveur. Le gouvernement cite, entre autres, l'augmentation de 35 à 45 pour cent des salaires des travailleurs les plus défavorisés, pour lesquels les hausses de salaires ont dépassé l'inflation, et le renforcement des prestations sociales en matière de prévoyance, santé et éducation, qui ont contribué à l'élévation du niveau de vie. De plus, les travailleurs bénéficient de la gratuité des transports pour se rendre à leur travail, les pensions de retraite ont plus que doublé, les impôts des travailleurs aux revenus les plus modestes ont été réduits, les allocations familiales ont augmenté de 20 à 80 pour cent, les allocations de chômage ont été élargies et augmentées, la formation professionnelle a été améliorée, des programmes spéciaux d'incitation à la création d'emplois ou au maintien des postes de travail ont été établis particulièrement en faveur des jeunes et des travailleurs handicapés physiques, les congés annuels payés ont été doublés, la protection contre les licenciements collectifs des travailleurs a été renforcée par la mise en place de procédures de participation et de consultation des travailleurs dans la prise de décisions. Enfin, la Grèce a récemment ratifié les conventions nos 103, 111, 122 et 156, renforçant par là la protection des travailleurs dans plusieurs domaines.
- 346. Dans une troisième communication du 18 février 1986, le gouvernement indique que la lettre circulaire envoyée par plusieurs organisations syndicales émane d'administrations syndicales qui adhèrent au Mouvement syndical unique combattant-collaborateur (ESAK-S), mouvement rattaché au parti communiste de Grèce, qui s'oppose violemment, par tous les moyens, à la politique gouvernementale. Il ajoute que les organisations syndicales, dont les comités directeurs sont composés de militants des partis politiques, projettent les conflits politiques parlementaires dans leurs affaires internes en luttant contre le gouvernement socialiste du PASOK. Il en est ainsi du parti communiste, du parti communiste de l'intérieur et de la Nouvelle Démocratie. Or, selon le gouvernement, ces associations ne constituent qu'une minorité par rapport à l'ensemble des 77 fédérations et des 84 centres ouvriers qui fonctionnent sur le territoire. Toujours selon le gouvernement, la majorité des associations syndicales est en accord avec la politique gouvernementale et veut aider à ce que la crise économique soit surmontée dans les deux années à venir, comme le démontre la faible participation à la grève du 14 novembre 1985.
- 347. Le gouvernement réitère ses observations et informations antérieures à propos de la crise qui a éclaté au sein du conseil d'administration de la CGTG. Il confirme que la décision du Tribunal de paix d'Athènes no 2421 du 25 novembre 1985 (dont il communique la copie) a suspendu l'exécution des décisions du "Groupe des 26", que le Centre ouvrier de Patras a introduit un recours ordinaire auprès du Tribunal de paix d'Athènes (recours qui devait être tranché le 9 janvier 1986 et qui ne le sera qu'au début de février) pour demander l'annulation définitive des décisions du "Groupe des 26" qui se présentait illicitement comme administration de la CGTG et qu'entre-temps la démission des 16 membres du conseil d'administration de la CGTG a conduit le Centre ouvrier de Patras à demander au Tribunal de première instance d'Ahtènes de nommer une administration provisoire à la tête de la CGTG chargée de convoquer un congrès dans les quatre mois. Le gouvernement indique aussi que ce dernier tribunal, par une décision du 4 décembre 1985, no 4370, dont il communique le texte, a annulé, à titre interlocutoire, les décisions du "Groupe des 26" et a désigné une administration provisoire, et il réitère par ailleurs ses observations à propos du caractère diffamatoire des allégations relatives à de prétendues ingérences du gouvernement dans les décisions judiciaires.
- 348. Pour ce qui est de la promulgation de l'acte législatif sur les mesures de protection de l'économie nationale, le gouvernement explique à nouveau qu'il est conforme à l'article 106 de la Constitution. Il précise que la Cour d'appel de Salonique vient de rendre un arrêt dans ce sens en indiquant que l'acte est conforme à la Constitution puisqu'il vise à renforcer la compétitivité des produits helléniques, à freiner l'inflation, à limiter à moyen terme le chômage et le décifit de la balance des paiements et à poursuivre la stabilisation et le développement équilibré de tous les secteurs de l'économie. Cet arrêt estime que l'acte en question ne met pas en cause les principes contenus dans les conventions nos 87 et 98 et qu'il n'abolit pas, dans son ensemble, la liberté de négociation collective. Il constate d'ailleurs qu'il n'est valable que pour une durée de deux ans, et il souligne que la grève visant des demandes d'augmentations de salaires supérieures à celles autorisées par les mesures de protection de l'économie nationale est illégale.
- 349. Le gouvernement confirme aussi qu'en vertu de l'article 44 de la Constitution, dans des circonstances exceptionnelles de nécessité extrêmement urgente, le Président de la République a le pouvoir d'édicter des actes législatifs qui doivent être soumis à la ratification de la Chambre des députés dans les quarante jours qui suivent leur édiction sous peine de devenir caducs. Il a donc, déclare-t-il, soumis dans le délai prévu le texte de l'acte législatif sur les mesures de protection de l'économie nationale au Parlement. Il explique également que, si cet acte n'a pas pu faire l'objet de négociations publiques préalables avec les associations de travailleurs et d'employeurs, cela tient à ce qu'il a été adopté en même temps que la mesure de dévaluation de la monnaie nationale, laquelle ne pouvait faire l'objet d'un dialogue sous peine d'échouer.
- 350. Enfin, le gouvernement insiste sur les mesures de sauvegarde qu'il a adoptées pour assurer le maintien du niveau de vie des travailleurs et il précise que l'indexation automatique des salaires sur les prix (ATA) n'est pas suspendue. Il explique qu'elle continue à être appliquée selon un mode d'évaluation différent et il ajoute que ce mode d'évaluation fait l'objet du projet de la loi de ratification de l'acte législatif déposé au Parlement et que le texte en sera communiqué dès qu'il sera adopté.
- 351. Le gouvernement explique que la clause d'indexation automatique des salaires sur les prix par voie de conventions collectives du travail a été établie pour la première fois en 1982, en vertu de la loi no 1346 de 1982 portant amendement à la législation du travail, que, conformément au système précédemment appliqué d'indexation, les augmentations de salaires étaient versées au début de chaque période de quatre mois et étaient proportionnelles à la hausse de l'indice des prix des quatre derniers mois et que, pour protéger les revenus les plus bas, la hausse de l'indice des prix était échelonnée par rapport aux salaires. Ainsi, pour les salaires allant jusqu'à 50.000 drachmes, la totalité du taux de la hausse de l'indice des prix était prise en considération, pour les rémunérations allant de 50.000 à 75.000 la moitié, et pour les rémunérations allant de 75.000 à 100.000 le quart. Le système de revalorisation automatique applicable en 1986-87 prévoit que l'évaluation du taux de hausse de l'indice des prix est calculée sur une base prévisionnelle et non plus selon des résultats à postériori. A partir du 1er janvier 1986, l'ATA sera versée aux travailleurs au début de chaque période de quatre mois et sera égale au taux de hausse des prix prévu pour les quatre mois suivants, après déduction de l'inflation liée aux importations. Si, à la fin de la période 1986-87, le taux de hausse de l'indice des prix est supérieur aux prévisions, la différence sera versée aux travailleurs au début de l'année suivante, affirme le gouvernement, et il ajoute que le système s'accompagne de clauses de sauvegarde concernant le statut familial et les promotions professionnelles. Il rappelle qu'au cours de la période 1979-1981 le taux d'inflation était de 92 pour cent et que les salaires étaient en déficit de 11,4 pour cent, tandis qu'au cours de la période 1982-1984, pendant laquelle l'inflation était de 68 pour cent, les augmentations de salaires l'ont emporté sur la hausse de l'indice des prix pour les salaires les plus défavorisés, avec un taux moyen d'augmentation réelle des salaires de 46 pour cent.
- 352. Le gouvernement conclut en fournissant des statistiques faisant état de la politique de réduction des écarts entre les travailleurs à salaires élevés et ceux à salaires bas, qu'il a conduite. Et il indique que, malgré les conditions économiques défavorables, il continuera à déployer tous ses efforts en vue d'une amélioration générale de la situation des travailleurs, qu'il s'agisse de tourisme social, de protection des handicapés, de l'élimination des inégalités entre les hommes et les femmes, etc.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 353. Le comité observe que cette affaire porte sur deux questions, la première concerne un conflit à l'intérieur du conseil d'administration de la Confédération générale du travail de Grèce, la seconde des mesures d'ingérence dans la négociation collective adoptées par le gouvernement dans le but de freiner l'inflation.
- 354. A propos du conflit à l'intérieur du conseil d'administration de la CGTG, le comité a toujours estimé qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur des conflits internes à une organisation syndicale sauf si le gouvernement est intervenu d'une manière qui pourrait affecter l'exercice des droits syndicaux et le fonctionnement normal d'une organisation. (Voir, notamment, 165e rapport, cas no 843 (Inde), paragr. 44; 172e rapport, cas no 865 (Equateur), paragr. 74, et 217e rapport, cas no 1086 (Grèce), paragr. 93.)
- 355. Le comité observe que la décision de justice du 25 novembre 1985 no 2421 suspend les décisions du "Groupe des 26" qui avait notamment destitué le président élu et l'avait remplacé par le vice-président. En outre, la décision de justice du 4 décembre 1985 no 4370/85 annule, à titre interlocutoire, les décisions de ce groupe et procède à la désignation d'un conseil d'administration provisoire de la CGTG chargé d'organiser un congrès panhellénique de cette confédération dans les quatre mois à partir de la date de l'acceptation de la désignation des 45 conseillers du conseil d'administration de la CGTG.
- 356. Le comité observe par ailleurs que le gouvernement réfute avec force l'allégation selon laquelle le ministère de la Justice aurait convoqué le chef du Tribunal de paix d'Athènes. Il affirme également que la justice en Grèce est indépendante du pouvoir exécutif.
- 357. Le comité note que le conseil d'administration provisoire désigné par la justice a été chargé d'organiser ce congrès dans un délai de quatre mois. Le comité exprime le ferme espoir que le congrès en question se tiendra dans les plus brefs délais possible et qu'il permettra de clarifier la situation syndicale en Grèce. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats du congrès.
- 358. Pour ce qui concerne les mesures d'ingérence dans la liberté de négociation collective adoptées par le gouvernement pour la période 1986-87, qui portent essentiellement sur des modalités restrictives du calcul du réajustement automatique des salaires sur les prix, alors que ce même réajustement automatique avait été accordé par le présent gouvernement en 1982, le comité a pris note des indications détaillées fournies tant par les plaignants que par le gouvernement.
- 359. D'une manière générale, le comité rappelle que, lorsqu'il a examiné des affaires de cette nature dans le passé, il a indiqué que si la demande d'un réajustement des salaires au coût de la vie a un aspect principalement économique et est sans rapport avec la liberté syndicale, il en est autrement de la question du mode de fixation des salaires par voie de conventions collectives. Le développement des procédures de négociations volontaires de conventions collectives constitue en effet un aspect important de la liberté syndicale. Toutefois, une règle absolue serait difficile à établir en cette matière car, dans certaines conditions, les gouvernements pourraient estimer que la situation économique de leur pays appelle à certains moments des mesures de stabilisation dans le cadre desquelles il ne serait pas possible que le taux des salaires soit librement fixé par voie de négociations collectives. (Voir, notamment, 6e rapport, cas no 55 (Grèce), paragr. 923; 106e rapport, cas no 541 (Argentine), paragr. 16; 110e rapport, cas no 561 (Uruguay), paragr. 225, et 116e rapport, cas no 551 (Cuba), paragr. 107.)
- 360. Néanmoins, le comité a indiqué à maintes occasions que si, au nom d'une politique de stabilisation économique, un gouvernement considère que le taux des salaires ne peut être fixé librement par voie de négociations collectives, une telle restriction devrait être appliquée comme une mesure d'exception, limitée à l'indispensable, elle ne devrait pas excéder une période raisonnable et elle devrait être accompagnée de garanties appropriées en vue de protéger le niveau de vie des travailleurs. (Voir 230e rapport, cas no 1180 (Australie), paragr. 55, cas no 1171 (Canada/Québec), paragr. 162 et cas no 1173 (Canada/Colombie britannique), paragr. 573; 233e rapport, cas nos 1183 et 1205 (Chili), paragr. 482, et 236e rapport, cas no 1206 (Pérou), paragr. 507.)
- 361. Dans le présent cas, le comité a examiné le projet de loi, communiqué par les plaignants, présenté au Parlement pour ratification contenant l'acte législatif du Président de la République qui impose pour une durée de deux ans, jusqu'à la fin de 1987, l'interdiction d'accorder des augmentations de revenus en dehors des limites fixées par la politique économique du gouvernement ainsi que les indications sur les modalités de fixation de l'indexation des revenus sur les prix. Il ressort de l'analyse de ce texte qu'entre le 1er janvier 1986 et le 31 décembre 1987 un nombre important de travailleurs vont subir une diminution de leurs revenus par rapport à l'évolution des prix. Le comité observe en effet que les mesures critiquées disposent que le réajustement automatique des salaires sur les prix sera opéré selon des modalités restrictives. En revanche, il convient de reconnaître que ces mesures s'accompagnent de clauses de sauvegarde touchant le statut familial et les promotions ainsi que d'une politique sociale orientée en faveur des salariés.
- 362. Le comité observe en outre qu'une restriction semblable avait déjà été opérée au cours de l'année 1983. Il rappelle que, s'il avait alors accepté cette restriction, c'était essentiellement compte tenu de sa limitation dans le temps pour une durée d'une année, mais qu'il avait néanmoins indiqué que, si la situation à certains égards contraignante en matière de liberté de négociation collective devait se maintenir, il pourrait l'estimer critiquable. (Voir 230e rapport, cas no 1193 (Grèce), paragr. 321.)
- 363. Le comité considère en effet que si, en période de crise économique, les gouvernements se doivent d'agir et de trouver des solutions, pour y parvenir ils devraient plutôt s'efforcer de convaincre les parties à la négociation collective de tenir compte de leur propre gré dans leurs négociations des raisons majeures de politique économique et sociale et d'intérêt général qu'ils invoquent. Ces raisons devraient donc être largement discutées au plan national par toutes les parties au sein d'un organisme tripartite consultatif en matière de politique salariale ou de toute autre manière. Toutefois, et c'est là l'essentiel, la décision finale en matière de convention collective devrait toujours appartenir aux parties aux conventions.
- 364. Le comité considère qu'il convient d'attirer l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas, dans le cadre de l'application de la convention no 98 ratifiée par la Grèce.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 365. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:
- a) Pour ce qui concerne le conflit qui s'est développé au sein du conseil d'administration de la CGTG, le comité estime qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur des conflits internes à une organisation syndicale, sauf si le gouvernement est intervenu d'une manière qui pourrait affecter les droits syndicaux.
- b) Le comité prend note qu'un congrès de la CGTG sera organisé dans un délai de quatre mois. Le comité exprime le ferme espoir que le congrès en question se tiendra dans les plus brefs délais possible et qu'il permettra de clarifier la situation syndicale en Grèce. Il demande au gouvernement de le tenir informé des résultats du congrès.
- c) Pour ce qui concerne les mesures d'ingérence dans la fixation des salaires adoptées par le gouvernement pour la période 1986-87, le comité exprime l'espoir que le gouvernement mettra le plus rapidement possible son action en accord avec les principes de libre négociation collective et qu'il prendra des mesures, si nécessaire, pour assurer que toutes les questions concernant la fixation des salaires soient résolues par la négociation entre les parties.
- d) Le comité demande au gouvernement d'examiner avec les organisations professionnelles concernées la possibilité de négocier les conditions de salaires d'une manière qui soit exempte d'ingérence de la part des pouvoirs publics.
- e) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans le cadre de l'application de la convention no 98 ratifiée par la Grèce sur cet aspect du cas.