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- 555. Le comité a examiné ce cas à ses réunions de novembre 1983 et février 1984 et a présenté, en ces deux occasions, un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 230e rapport du comité, paragr. 619 à 659 et 233e rapport, paragr. 520 à 549, approuvés par le Conseil d'administration à ses 224e et 225e sessions, en novembre 1983 et février-mars 1984, respectivement.] Par la suite, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté de nouvelles allégations dans des communications en date du 29 février et du 15 mars 1984 (cette dernière était également signée par la Fédération internationale des travailleurs de l'industrie métallurgique - FITIM -). Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications du 9 mars et du 9 mai 1984.
- 556. Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 557. Lorsque le comité a examiné ce cas, à sa réunion de février 1984, il a formulé sur les allégations restées en suspens les recommandations suivantes: [Voir 233e rapport, paragr. 549.]
- "Le Comité prie le gouvernement d'indiquer si la perquisition par la police du local de la CNS (qui, selon le gouvernement, était conforme à la loi) a été effectuée en vertu d'un mandat judiciaire et de fournir des précisions sur la nature, les caractéristiques et les objectifs de la "protestation" du 12 juillet 1983, dont il était question dans les documents de propagande qui ont été saisis.
- Le comité insiste pour qu'il soit procédé à une enquête sur les allégations relatives aux tortures infligées à Maria Rozas, Sergio Troncoso (tous deux dirigeants syndicaux) et José Anselmo Navarrete (syndicaliste), en vue d'élucider pleinement les faits et de déterminer les responsabilités. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé du résultat de cette enquête.
- Le comité espère que le gouvernement entamera des négociations avec l'entreprise "CODELCO-Chile" en vue de la réintégration des dirigeants syndicaux du secteur du cuivre, qui ont été licenciés, et du désistement par l'entreprise des actions en destitution qu'elle a engagées à l'encontre des dirigeants syndicaux. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout résultat auquel il aboutira à cet égard, ainsi que des conclusions des commissions spéciales que l'entreprise "CODELCO-Chile" a consenti à former pour étudier la réintégration des travailleurs licenciés."
- B. Nouvelles allégations
- 558. Dans sa communication du 29 février 1984, la CISL allègue que M. José Ruiz Di Giorgio, président du Syndicat et de la Fédération du pétrole de Magallanes, a été arrêté à la suite d'une manifestation organisée par toutes les organisations démocratiques chiliennes. Selon la CISL, le dirigeant en question est blessé et reste détenu à la prison de Punta Arenas. Dans leur communication du 15 mars 1984, la CISL et la FITIM allèguent également que, par décision de la Direction du travail, M. Rodolfo Seguel a été destitué de ses fonctions de président de la Confédération des travailleurs du cuivre.
- C. Réponse du gouvernement
- 559. Au sujet de la demande qui lui a été faite par le comité pour procéder à une enquête sur les tortures qui auraient été infligées à Maria Rozas, Sergio Troncoso et José Anselmo Navarrete, le gouvernement déclare qu'il ne lui incombe pas de procéder à une enquête en vue d'établir la véracité des allégations relatives à des tortures. Le gouvernement estime que les victimes présumées doivent déposer plainte ou engager une procédure judiciaire devant les tribunaux ordinaires de justice. Le pouvoir judiciaire du Chili jouit d'une indépendance, d'une autonomie et de l'autorité suffisantes pour lui permettre de procéder à une enquête indépendante, sérieuse et efficace. Le gouvernement prend note de ce que le comité a demandé à être informé du résultat de l'enquête et il demande, à cet effet, au comité de lui indiquer le numéro du dossier et le nom du tribunal auprès duquel les victimes ont déposé plainte ou ont engagé une action judiciaire. Sans ce minimum de renseignements, il lui est pratiquement impossible de s'informer sur le résultat d'une procédure judiciaire.
- 560. Quant à la demande d'informations sur les jugements rendus au sujet des demandes en destitution de leurs fonctions des dirigeants syndicaux et d'annulation de la mesure de licenciement décidée par l'entreprise "CODELCO-Chile" dans les divisions de Chuquicamata, El Salvador et El Teniente, il ressort des déclarations du gouvernement qu'il n'a pas encore été statué sur la demande de destitution des dirigeants syndicaux des divisions en question, non plus que sur la demande d'annulation du licenciement des dirigeants syndicaux des divisions d'El Salvador et d'El Teniente. Quant au jugement relatif à la destitution de ses fonctions de dirigeant syndical de Rodolfo Seguel et d'autres dirigeants de la division d'El Teniente, le gouvernement déclare que cette demande a été déposée devant le quatrième Tribunal de Rancagua qui, le 4 avril, a rejeté la demande de l'entreprise, au motif que la mesure de destitution ne peut être décidée que par la Direction générale du travail et que l'entreprise devait donc soumettre les faits à cette direction, qui déciderait de cette mesure si elle l'estimait nécessaire. A la suite de ce jugement pris en première instance, un recours a été déposé devant la Cour d'appel de Rancagua où il est en instance.
- 561. Le gouvernement signale également qu'à la suite des travaux de la commission spéciale, créée pour étudier la réintégration des travailleurs licenciés par la "CODELCO-Chile" dans la zone d'Andina, les 59 derniers travailleurs licenciés ont été réintégrés. Pour ce qui est des autres travailleurs licenciés par l'entreprise, celle-ci ayant mis fin à leur contrat de travail a accepté de leur verser une indemnité en fonction de leurs années de service bien que, sur le plan strictement juridique, ils n'y avaient pas droit. Ces personnes n'ont plus aucun lien avec l'entreprise.
- 562. Pour ce qui est de la recommandation du comité par laquelle il demande au gouvernement d'indiquer si la perquisition par la police, en juillet 1983, du local occupé par une organisation de fait, qui s'est dénommée Conseil national de coordination syndicale, a été effectuée en vertu d'un mandat judiciaire, le gouvernement indique que, conformément à l'article 26 de la loi no 12927 sur la sécurité de l'Etat, les procès découlant des délits prévus dans ladite loi seront ouverts à la demande ou sur plainte du ministre de l'Intérieur ou des autorités compétentes. Aussitôt saisi de la plainte, le président de la Cour d'appel la transmet au magistrat concerné afin qu'il en prenne connaissance en première instance. L'article 30 de la loi no 12927 stipule que, dans tout procès intenté conformément à cette loi, le juge qui instruit l'affaire doit ordonner, comme première mesure, sans préjudice de celles qui sont prévues à l'article 7 du Code de procédure pénale, qu'il soit procédé à la saisie des imprimés, livres, brochures, disques, pellicules, bandes magnétiques et de tout autre objet qui semblent avoir servi pour commettre le délit, afin de les mettre à la disposition du tribunal. L'article 7 du Code de procédure pénale, quant à lui, dispose que les premières mesures à prendre sont les suivantes: protéger les personnes lésées, consigner les preuves du délit qui pourraient disparaître, saisir et mettre sous surveillance tout ce qui peut servir à prouver le délit et à en identifier les auteurs et arrêter les présumés coupables. A cet effet, le juge doit interroger les témoins et les inculpés et procéder aux confrontations et perquisitions nécessaires.
- 563. Pour ce qui est de la perquisition mentionnée par le comité, le gouvernement signale que le magistrat de la Cour d'appel de Santiago, chargé d'instruire l'affaire, a agi dans le cadre des pouvoirs que la loi lui confère. Quant à la nature des documents de propagande ayant trait à la prétendue "protestation du 12 juillet 1983", le gouvernement fait savoir qu'il s'agissait notamment de tracts donnant des instructions pour le 12 juillet et invitant la population à ne pas acheter, à ne pas envoyer les enfants à l'école et à "frapper sur des casseroles et des marmites" de 20 à 22 heures. D'autres tracts portaient l'inscription suivante: "dehors Pinochet - protestation nationale". D'autres encore se référaient à des "protestations" antérieures, qui avaient eu lieu en mai et juin 1983 et qui avaient eu des caractéristiques et des objectifs similaires.
- 564. Enfin, pour ce qui est de la détention de M. José Ruiz Di Giorgio, le gouvernement déclare que son arrestation a été effectuée sur décision d'un magistrat de la Cour d'appel de Punta Arenas parce qu'il avait participé à des actes destinés à perturber l'ordre public et non pas parce qu'il avait exercé des activités syndicales. Son procès est instruit par les tribunaux ordinaires de justice qui enquêtent sur sa participation à un délit sanctionné par la loi sur la sécurité intérieure de l'Etat, promulguée en 1958. Selon le gouvernement, M. Di Giorgio jouit de tous les droits en ce qui concerne sa défense par des avocats et ces derniers ont présenté un recours en sa faveur auprès du tribunal supérieur. Le jugement rendu sera communiqué en temps opportun. Le gouvernement signale que la plainte selon laquelle l'intéressé serait blessé n'est absolument pas fondée, la preuve en étant qu'il a été présenté au magistrat chargé de l'instruction de l'affaire, lequel a enregistré sa déclaration.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 565. Au sujet des tortures dont auraient été victimes Maria Rozas, Sergio Troncoso (tous deux dirigeants syndicaux) et José Anselmo Navarrete (syndicaliste), le comité prend note de ce que le gouvernement déclare qu'il ne lui appartient pas de procéder à des enquêtes pour vérifier l'authenticité des allégations et qu'il incombe aux victimes présumées de porter plainte ou d'entamer une procédure judiciaire devant les tribunaux. Le comité tient à signaler que, si le recours à la procédure judiciaire interne, quel qu'en soit le résultat, constitue un élément qui doit, certes, être pris en considération, le comité a toujours estimé, étant donné la nature de ses responsabilités, que sa compétence pour examiner les allégations n'est pas subordonnée à l'épuisement des procédures nationales de recours. Par conséquent, le comité demande instamment au gouvernement de procéder à une enquête sur les allégations de tortures susmentionnées et de l'informer des résultats de cette enquête.
- 566. Le comité prend note, par ailleurs, des informations communiquées par le gouvernement au sujet des jugements relatifs aux demandes en destitution de leurs fonctions de dirigeants syndicaux et d'annulation de la mesure de licenciement prise à l'encontre de dirigeants syndicaux et de l'évolution de la situation en ce qui concerne le licenciement de travailleurs de l'entreprise "CODELCO-Chile". Le comité prend note, en particulier, de ce que les jugements sur l'affaire n'ont toujours pas été rendus. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la procédure.
- 567. Pour ce qui est de l'allégation relative à la perquisition du local du Conseil national de coordination syndicale, le comité observe que, selon le gouvernement, cette perquisition a été effectuée sous mandat judiciaire et conformément à la loi sur la sécurité de l'Etat et de ce que les documents de propagande saisis, ayant trait à la "protestation du 12 juillet 1983", comportaient des tracts donnant des instructions pour ce jour-là, invitant la population à "ne rien acheter", à "ne pas envoyer les enfants à l'école", et à "frapper sur des marmites et des casseroles", ainsi que des tracts portant des inscriptions telles que "dehors Pinochet - protestation nationale", etc.
- 568. A cet égard, la perquisition ayant été effectuée sous mandat judiciaire et compte tenu de ce que, selon les informations dont dispose le comité, les organismes à l'origine de la "protestation du 12 juillet 1983" avaient un caractère politique et de ce que les documents de propagande saisis, dont le gouvernement a communiqué la teneur, n'ont pas trait à des revendications professionnelles, le comité estime qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de cette allégation.
- 569. Pour ce qui est de l'arrestation de José Ruiz Di Giorgio, le comité prend note de ce que le gouvernement déclare que cette arrestation a été effectuée sur décision d'un magistrat de la Cour d'appel de Punta Arenas, parce que l'intéressé avait participé à des actions destinées à perturber l'ordre public et non pas pour avoir exercé des activités syndicales. Le comité prie le gouvernement d'indiquer les faits précis qui sont reprochés à M. Di Giorgio afin qu'il puisse examiner cette allégation en toute connaissance de cause et de lui faire connaître l'issue du procès dont fait actuellement l'objet ce dirigeant.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 570. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire, et en particulier les conclusions suivantes:
- a) Le comité demande instamment au gouvernement de procéder à une enquête sur les tortures dont auraient fait l'objet Maria Rozas, Sergio Troncoso (tous deux dirigeants syndicaux) et José Anselmo Navarrette (syndicaliste) et de le tenir informé des résultats de cette enquête.
- b) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de cette procédure concernant la demande en destitution de leurs fonctions de dirigeants syndicaux et des' jugements rendus au sujet de la demande d'annulation de la mesure de licenciements prise à l'encontre de dirigeants syndicaux de l'entreprise "CODELCO-Chile".
- c) Compte tenu de ce que le gouvernement s'est limité à déclarer, de manière générale, que l'arrestation du dirigeant syndical José Ruiz Di Giorgio a été effectuée parce que l'intéressé avait participé à des actions destinées à perturber l'ordre public et non pas pour avoir exercé des activités syndicales, le comité demande au gouvernement de préciser quels sont les faits concrets qui sont reprochés à M. Di Giorgio.