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- 56. La plainte de la Fédération des instituteurs de Grèce figure dans une lettre du 20 avril 1980. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par une communication du 20 juin 1980.
- 57. La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1945.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants- 58. La Fédération des instituteurs de Grèce, qui représente, déclare-t-elle, 38.000 membres, allègue, dans sa plainte, que la loi no 643/77 concernant les libertés syndicales des fonctionnaires et agents des services publics se trouve en contradiction avec les articles fondamentaux de la Constitution grecque et avec les dispositions de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
- 59. D'une manière plus précise, l'organisation plaignante allègue que:
- a) la loi a été votée en 1977 alors que l'opposition parlementaire et toutes les organisations de fonctionnaires, à l'exception de l'Association des fonctionnaires (ADEDY), s'y opposaient;
- b) elle restreint les libertés syndicales et supprime en fait le droit de grève, instaurant un système de procédure extrêmement longue et compliquée, qui anéantit de facto la possibilité d'un mouvement de grève au moment propice, c'est-à-dire lorsque l'influence des fonctionnaires des services publics et la force qu'ils représentent dans la vie politique du pays seraient susceptibles de favoriser des prises de décisions conformes à leurs intérêts.
- L'organisation plaignante ajoute que, selon elle, l'écrasante majorité des organisations de fonctionnaires luttent pour la suppression de cette loi.
- B. Réponse du gouvernement
- 60. Le gouvernement réplique, dans une communication du 20 juin 1980, que toutes les fois que les tribunaux nationaux ont été saisis - jusqu'à présent - de l'examen de cas relatifs à l'application de la loi no 643 de 1977, ils n'ont pas constaté que ses dispositions étaient contraires à la constitution. Ils ont au contraire reconnu, ajoute le gouvernement, que la réglementation du droit de grève des fonctionnaires publics et la procédure légale d'exercice de ce droit se trouvent dans le cadre des prescriptions constitutionnelles.
- 61. Il affirme, pour sa part, que la loi no 643 de 1977, lue conjointement avec l'article 23, paragraphe 2, de la constitution, accorde le droit de grève aux fonctionnaires publics et ajoute que les restrictions relatives aux objectifs poursuivis par les syndicats professionnels ne sont ni inconstitutionnelles ni contraires à la convention no 87.
- 62. Le gouvernement admet que la loi no 643 de 1977 interdit toute grève de solidarité envers une organisation syndicale extérieure et que la procédure prescrite par la loi pour déclencher une grève de revendication professionnelle de fonctionnaires publics implique la soumission de la demande aux ministres compétents et devant le conseil de conciliation. Cette procédure spéciale de conciliation ne dépasse, explique-t-il, en aucun cas, trente jours et vise en premier lieu à rechercher un accord entre les délégués gouvernementaux et les représentants des associations syndicales; en second lieu, en cas de désaccord, elle vise à informer le public des revendications des grévistes et des raisons pour lesquelles celles-ci n'ont pas été acceptées par le gouvernement.
- 63. En outre, selon le gouvernement, l'interdiction des grèves dépourvues de caractère professionnel ou ayant pour but d'exercer une pression sur le gouvernement, sans avoir pour objectif un conflit du travail, ne constitue pas une atteinte à la liberté syndicale. Il cite à l'appui de sa thèse plusieurs décisions antérieures du comité.
- 64. Le gouvernement conclut lue le droit de grève n'est pas annulé, comme le prétend l'organisation plaignante, du fait de la procédure spéciale de conciliation, mais qu'il s'exerce librement. En conséquence, il n'y a pas lieu d'envisager l'abolition de la loi no 643 de 1977 qui est, selon lui, conforme à la constitution et aux conventions internationales du travail ratifiées.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 65. La loi no 643 de 1977 sur la garantie de la liberté syndicale des fonctionnaires et agents des services publics et sur le droit de grève de ceux-ci accorde, en son article 5, ce droit aux fonctionnaires et agents des services publics quand la grève est décidée par leur organisation légalement constituée dans le but de promouvoir leurs intérêts économiques et professionnels. La grève de solidarité à l'égard d'une autre organisation en grève est, elle, interdite. En outre, cette législation n'interdit la grève qu'aux magistrats et agents des corps de sûreté de la police portuaire, de la police rurale et du service central d'information.
- 66. La procédure spéciale qui doit être suivie avant de pouvoir déclencher la grève comporte aux termes des articles 6 à 11 une phase de conciliation qui peut durer trente jours (article 10, alinéa 4), sauf si les parties décident d'un commun accord la poursuite des négociations (article 8, alinéa 8). Aux termes de l'article 12, les magistrats de la Cour d'appel peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, différer de vingt jours encore le début d'une grève. Par ailleurs, l'article 13 de la loi exige que les organisations syndicales instituent un service minimum composé du personnel nécessaire pendant que se déroule la grève afin de préserver la sécurité des installations et de prévenir les risques de catastrophes ou d'accidents. En outre, les organisations syndicales doivent maintenir pendant la grève le personnel nécessaire aux services les plus essentiels et les plus appropriés, sous peine de trois mois de prison (article 18, alinéa 4).
- 67. D'une manière générale, le comité a, d'une part, admis que le droit de grève peut faire l'objet de restrictions, voire d'interdictions, dans la fonction publique ou les services essentiels parce que la grève pourrait y provoquer de graves préjudices pour la collectivité nationale&. D'autre part, il a signalé qu'il ne paraîtrait pas approprié que toutes les entreprises d'Etat soient placées sur le même pied, en ce qui concerne les restrictions apportées au droit de grève, sans que la législation distingue entre celles qui sont vraiment essentielles, c'est-à-dire celles dont l'interruption risquerait de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de tout ou partie de la population et celles qui ne le sont pas d'après ce critère.
- 68. Dans le cas d'espèce, la loi de 1977 accorde le droit de grève à la plupart des fonctionnaires et agents de l'Etat, à l'exception de corps qui ne peuvent prétendre à bénéficier de ce droit, à savoir la magistrature et la police. Elle prévoit une procédure de conciliation qui ne semble pas entraver l'exercice de ce droit et institue le principe d'un service minimum que les grévistes doivent effectuer pour maintenir les services les plus essentiels et les plus appropriés et afin de préserver la sécurité des installations et de prévenir les accidents ou les catastrophes, toutes dispositions qui semblent conformes aux principes de la liberté syndicale.
- 69. Pour ce qui a trait aux peines d'emprisonnement prévues par l'article 18 de la loi en cas de grèves illégales, le comité croit important de rappeler que le développement des relations professionnelles peut être compromis par une attitude inflexible dans l'application de sanctions trop sévères pour faits de grève et de signaler que toute sanction devrait être proportionnée au délit commis.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 70. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que le cas n'appelle pas un examen plus approfondi sous réserve des considérations exprimées au paragraphe précédent.