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  • PLAINTE DEPOSEE, EN VERTU DE L'ARTICLE 26 DE LA CONSTITUTION DE L'OIT, PAR PLUSIEURS DELEGUES A LA 60e SESSION (1975) DE LA CONFERENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL AU SUJET DE L'EXECUTION DE LA CONVENTION (no 87) SUR LA LIBERTE SYNDICALE ET LA PROTECTION DU DROIT SYNDICAL, 1948, PAR LA BOLIVIE
    1. 5 Le comité, après avoir examiné à plusieurs reprises le cas no 685, a traité conjointement les cas nos 685, 781, 806 et 814 dans ses 154e, 162e, 166e, 169e et 173e rapports consacrés aux allégations relatives à la Bolivie. Le Conseil d'administration a approuvé ces rapports à ses sessions de novembre 1975 (198e session), de novembre 1976 (201e), de mars 1977 (202e), de mai-juin 1977 (203e) et de novembre 1977 (204e). L'affaire concerne la situation syndicale générale dans le pays et le comité a décidé de regrouper l'ensemble des allégations sous le cas no 814.
    2. 6 Plusieurs délégués travailleurs à la 60e session de la Conférence internationale du Travail (1975) ont, d'autre part, présenté, sur la base de l'article 26 de la Constitution de l'OIT, une plainte relative à l'observation par la Bolivie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. La plainte portait sur diverses questions soulevées dans les allégations examinées par le comité ainsi que sur certains aspects de la législation syndicale. A sa session de mai-juin 1977, le Conseil d'administration, sur recommandation du comité, avait décidé de suspendre sa décision sur l'opportunité de créer une commission d'enquête à la suite de cette plainte.
    3. 7 La Bolivie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
    4. 8 Le gouvernement a, depuis le dernier examen du cas, fourni des informations par une lettre du 27 janvier 1978

A. Dernier examen du cas par le comité

A. Dernier examen du cas par le comité
  1. 9. Il convient de rappeler que des plaintes ont été déposées dans cette affaire depuis octobre 1971. Le comité a eu à connaître, s'agissant des premières années qui ont suivi le changement de régime intervenu le 21 août 1971, d'allégations portant sur la fermeture par ordre du gouvernement de la Centrale ouvrière bolivienne (COB), de la Fédération syndicale des mineurs de Bolivie (FSTMB) et de la Centrale ouvrière de La Paz, sur la mise sous contrôle de la Fédération nationale des enseignants urbains de Bolivie, sur l'arrestation ou le bannissement de syndicalistes. Au cours d'une période plus récente, les plaintes se sont en particulier référées aux décrets, adoptés en novembre 1974, qui ont imposé des restrictions importantes aux droits syndicaux dans toutes les branches de l'économie ainsi qu'à la situation syndicale dans le secteur minier. Deux missions de contacts directs ont été effectuées - du 25 mars au 8 avril 1976 et du 17 au 24 juillet 1976 - en Bolivie par un représentant du Directeur général.
  2. 10. D'une manière plus précise, les allégations relatives à la législation adoptée en 1974 visaient d'abord le décret-loi no 11947 (qui porte statut fondamental du gouvernement), le décret présidentiel no 11952 (relatif aux coordonnateurs du travail et au blocage des fonds syndicaux), ainsi que le décret-loi no 11948 (qui institue le service civil obligatoire), promulgués en novembre 1974. Le décret-loi no 11947 dispose notamment que, "durant la réorganisation des directions des entités patronales, syndicales, professionnelles, de métier, estudiantines et universitaires, conformément aux normes que le gouvernement national arrêtera en temps opportun, il est mis fin au mandat des dirigeants de toutes les organisations mentionnées précédemment et de leurs fédérations et confédérations respectives. Les grèves, arrêts de travail, lock-out et toute autre forme de suspension et de paralysie des activités du travail et de la production sont interdits". Le gouvernement a remplacé les directions syndicales par des coordonnateurs du travail, désignés par lui (en attendant la promulgation d'un Code du travail) dans chaque centre de production et dans chaque secteur professionnel. Ces personnes ont pour fonction principale de représenter les travailleurs dans les revendications individuelles et collectives; l'acceptation de cette charge est obligatoire (une personne qui refuserait pourrait être sanctionnée en vertu du décret-loi no 11948 sur le service civil obligatoire). Les salaires ont été bloqués en janvier 1975, mais le gouvernement a toléré, en pratique, les négociations collectives sur les salaires, à condition qu'elles soient menées sans publicité. En outre, les réunions et les finances syndicales ont été soumises à diverses restrictions.
  3. 11. D'autre part, la plainte déposée au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT se référait notamment aux commentaires formulés par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en ce qui concerne l'application de la convention no 87. Il s'agissait en particulier des commentaires formulés en 1975 au sujet des dispositions en matière syndicale contenues dans la loi générale sur le travail.
  4. 12. Une commission nationale spéciale avait préparé un projet de Code (et de procédure) du travail destiné à remplacer notamment cette loi générale sur le travail. A la demande du gouvernement, le Bureau avait envoyé des commentaires sur le texte, notamment sur les dispositions relatives aux droits syndicaux. Selon le gouvernement, la Commission nationale de codification avait cherché à rendre les lignes de force de ce projet compatibles avec cet avis afin d'arriver à la plus grande concordance possible entre les deux documents. Le gouvernement avait, poursuivait celui-ci, pris une série de mesures en attendant l'adoption de la nouvelle législation. Il citait en particulier celles adoptées pour faciliter l'élection de comités de base de travailleurs et la tenue d'assemblées nationales dans les différents secteurs d'activité afin que ceux-ci puissent analyser les problèmes qui leur sont propres et désigner leurs coordonnateurs. En outre, ajoutait-il, une nouvelle loi sur la procédure en matière de travail devait permettre d'accélérer la reconnaissance des droits des travailleurs et faciliter leur action devant les juridictions du travail.
  5. 13. Dans une communication du 1er octobre 1977, le gouvernement se référait à un discours prononcé le 16 juillet précédent par le Président de la République devant la Cour suprême. Celui-ci déclarait que le gouvernement préparait le retour de la Bolivie à un régime constitutionnel. Ce retour devant être précédé d'une étape dite d'institutionnalisation: par consultation populaire, on devait introduire dans la Constitution nationale des modifications liées aux nouvelles réalités du pays et aux perspectives qui se faisaient jour à partir de là. Après l'approbation de ces réformes par le peuple, précisait le Chef de l'Etat, le régime constitutionnel serait rétabli. L'adoption et la mise en oeuvre d'une nouvelle législation syndicale faisaient partie, d'après le gouvernement, des mesures qui seraient adoptées dans le processus préalable au retour du pays à un régime constitutionnel.
  6. 14. En novembre 1977, le comité avait exprimé sa vive préoccupation devant les lenteurs du processus tendant au rétablissement d'une situation syndicale normale dans le pays: la législation annoncée n'avait toujours pas été adoptée et les restrictions imposées à l'exercice des activités syndicales étaient toujours en application. Le Conseil d'administration avait, sur recommandation du comité, regretté que, malgré le temps écoulé, les normes et les principes sur la liberté syndicale, librement souscrits par la Bolivie, continuent à ne pas être appliqués dans le pays et avait adressé un appel au gouvernement pour qu'il rétablisse d'urgence les conditions légales et pratiques indispensables au déroulement d'une vie syndicale normale dans le pays.
  7. 15. Quant à la situation syndicale dans les mines, le comité avait en particulier examiné les allégations portant sur les événements survenus dans l'ensemble de ce secteur en juin et juillet 1976. Il avait, en novembre 1976, abouti à des conclusions sur différents aspects de la question et, sur ses recommandations, le Conseil d'administration avait insisté auprès du gouvernement pour qu'il restaure sans tarder une situation normale dans le secteur minier, qu'il réexamine la liste des travailleurs licenciés et la réouverture des stations de radiodiffusion, et qu'il reconsidère spécialement la situation des travailleurs et des dirigeants de ce secteur encore emprisonnés ou en exil. Le comité et le Conseil ont examiné à plusieurs reprises les suites données à ces recommandations. En particulier, lors de sa session de novembre 1977, le Conseil d'administration, tout en notant la libération d'un certain nombre de travailleurs des mines, avait instamment prié le gouvernement de poursuivre le réexamen de la situation des autres travailleurs et dirigeants syndicaux des mines qui étaient détenus ou exilés. Le Conseil avait aussi demandé au gouvernement de faire en sorte que les émetteurs de radio des mines soient rapidement restitués aux travailleurs.
  8. 16. D'une manière plus large, le Conseil d'administration avait suggéré au gouvernement d'envisager la possibilité d'accorder une amnistie aux autres dirigeants syndicaux encore en exil.

B. Nouveaux développements

B. Nouveaux développements
  1. 17. Dans une lettre reçue à la veille de la session du comité de novembre 1977, la COB alléguait que le gouvernement empêchait les travailleurs libérés ou revenus d'exil de reprendre leur travail dans les mines. Leurs noms figuraient en effet sur des listes noires qui circulaient discrètement parmi les hauts responsables des institutions officielles, des entreprises d'Etat et privées afin qu'aucune tâche ne leur soit confiée. La COB citait également les noms de plusieurs syndicalistes et dirigeants syndicaux qui avaient été arrêtés: Armandó Morales, dirigeant de la Fédération des mineurs, Flavio Villar, dirigeant syndical dans l'industrie manufacturière, Mario Carrasco, Arnés, Quispe, Tola et Alarcon, syndicalistes.
  2. 18. Le représentant du gouvernement bolivien avait fait certaines déclarations au sujet de l'évolution de la situation syndicale à la session de novembre 1977 du Conseil d'administration. Dans une communication du 27 janvier 1978, le gouvernement précise et complète ces déclarations par les informations suivantes:
    • - les élections générales auront lieu en juillet 1978;
    • - une amnistie générale a été décrétée le 17 janvier 1978; toutes les personnes détenues pour des raisons politiques ont été libérées immédiatement et les exilés ont pu rentrer au pays;
    • - le projet de Code du travail a fait l'objet de consultations avec les organisations d'employeurs et de travailleurs, procédure préalable à son adoption;
    • - le décret no 15.267 du 24 janvier 1978 restitue le droit d'association syndicale à partir du 27 janvier 1978;
    • - des démarches efficaces ont été entamées afin de réintégrer dans leur travail les mineurs licenciés.
  3. 19. Le décret no 15.267 précité prescrit le renouvellement des comités directeurs des organisations syndicales conformément aux dispositions légales en vigueur et à leurs statuts dans les délais suivants: 30 jours pour les syndicats, 60 jours pour les fédérations départementales et 90 jours pour les fédérations et confédérations nationales. Les questions d'interprétation ou de procédure qui se poseraient à cet égard dans cette période transitoire seront résolues dans chaque cas par un accord entre les autorités compétentes et les représentants des fédérations syndicales actuelles en conformité avec les dispositions légales en vigueur. Les dispositions contraires au décret sont abrogées.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 20. Le comité note avec satisfaction les informations communiquées par le gouvernement. Il exprime l'espoir que l'amnistie générale ainsi que la tenue d'élections syndicales en particulier permettront un rétablissement rapide de la vie syndicale dans le pays. Il espère également que ces mesures permettront à tous les syndicalistes et dirigeants syndicaux exilés de rentrer dans le pays et à ceux qui avaient perdu leur emploi, notamment dans le secteur minier, de le retrouver. Le comité veut croire enfin que les émetteurs de radio des mines seront rapidement restitués aux travailleurs et à leurs organisations.
  2. 21. Le comité a par ailleurs pris connaissance du texte officiel de la nouvelle version de l'avant-projet de Code du travail, notamment de ses chapitres relatifs aux doits syndicaux. Il a constaté avec intérêt qu'il avait été tenu compte, dans certaines dispositions, des commentaires formulés précédemment par le Bureau. D'autres dispositions toutefois ne sont pas en pleine harmonie avec les principes de la liberté syndicale. Le comité demande à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations d'examiner cette question.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 22. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de noter avec satisfaction qu'une amnistie générale a été décrétée, que des élections syndicales doivent avoir lieu très prochainement et que des démarches ont été entamées pour réintégrer les mineurs licenciés;
    • b) d'exprimer l'espoir que ces mesures permettront un rétablissement rapide de la vie syndicale normale dans le pays, y compris le retour en Bolivie de tous les syndicalistes exilés et la réintégration de ceux qui avaient perdu leur emploi;
    • c) d'espérer également que les émetteurs de radio des mines seront promptement restitués aux travailleurs et à leurs organisations;
    • d) d'attirer l'attention du gouvernement sur les différences qui subsistent entre les conventions sur la liberté syndicale (ratifiées par la Bolivie) et les dispositions tant de la loi générale sur le travail que de l'avant-projet de Code du travail;
    • e) de demander à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de suivre l'évolution de la question mentionnée à l'alinéa précédent;
    • f) de prier le gouvernement de fournir, pour le 1er mai 1978 au plus tard, des informations sur l'évolution de la situation syndicale dans le pays, notamment dans le secteur minier;
    • g) de noter ce rapport intérimaire.
      • Genève, 23 février 1978 (Signé) Roberto AGO, Président.
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