ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards

Informe en el que el Comité pide que se le mantenga informado de la evolución de la situación - Informe núm. 95, 1967

Caso núm. 448 (Uganda) - Fecha de presentación de la queja:: 19-JUL-65 - Cerrado

Visualizar en: Inglés - Español

  1. 112. La plainte du Congrès des syndicats de l'Ouganda est contenue dans une communication datée du 19 juillet 1965. Dans sa première réponse, en date du 5 avril 1966, le gouvernement n'avait pas formulé d'observations sur le fond des allégations présentées, mais il avait relevé que la loi de 1965 sur les syndicats, qui est critiquée dans la plainte, ne violait pas la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par l'Ouganda; il affirmait en outre que, puisque l'Ouganda n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, l'Ouganda ne pouvait pas faire l'objet de réclamations ou de plaintes en raison de l'inobservation de cette convention.
  2. 113. Le Comité a examiné cette déclaration à sa séance du 23 mai 1966, à laquelle il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration, aux paragraphes 168 à 175 de son quatre-vingt-douzième rapport. Dans ce rapport, le Comité, tout en reconnaissant que la convention no 87 n'avait pas été ratifiée par l'Ouganda, attirait l'attention sur le fait que la procédure à suivre pour l'examen de plaintes portant sur des violations présumées des droits syndicaux est tout à fait distincte de la procédure servant à l'examen de réclamations concernant l'inobservation d'une convention ratifiée au sens de l'article 24 de la Constitution de l'O.I.T. Le Comité rappelait ses décisions relatives à des cas antérieurs dans lesquels, vu les dispositions de la Déclaration de Philadelphie, il avait émis l'opinion que la non-ratification de l'une des conventions relatives à la liberté syndicale n'était pas une raison suffisante pour qu'il s'abstienne d'examiner le contenu d'allégations fondées, en tout ou en partie, sur les dispositions d'un instrument ou de principes qui s'en dégagent, en vue de vérifier les faits et de faire rapport à leur sujet au Conseil d'administration.
  3. 114. Dans ces conditions, le Comité recommandait au Conseil d'administration, au paragraphe 175 de son quatre-vingt-douzième rapport, d'attirer l'attention du gouvernement de l'Ouganda sur les termes de la résolution concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical adoptée par la première Conférence régionale africaine de l'Organisation internationale du Travail (Lagos, décembre 1960), et de prier le gouvernement de bien vouloir coopérer avec le Comité, dans l'esprit de cette résolution, en présentant ses observations sur les différentes questions spécifiques soulevées dans les allégations formulées.
  4. 115. La recommandation ci-dessus a été approuvée par le Conseil d'administration à sa 166ème session (juin 1966) et portée à la connaissance du gouvernement par une lettre datée du 4 juillet 1966. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication datée du 14 octobre 1966.
    • Question de la recevabilité de la plainte
  5. 116. Dans sa plainte en date du 19 juillet 1965, signée par M. H. Luande, membre du Parlement, président, le Congrès des syndicats de l'Ouganda alléguait que, depuis la promulgation de la loi de 1965 sur les syndicats, le ministre avait menacé les syndicats existants qui n'approuvaient pas ouvertement cette loi en déclarant que leurs chances d'existence étaient minces, ce qui avait provoqué des craintes chez les dirigeants syndicaux, qui auraient souhaité continuer à pratiquer librement un syndicalisme démocratique et pouvoir exercer leurs droits en Ouganda.
  6. 117. Dans sa communication en date du 5 avril 1966, le gouvernement mentionnait la plainte en la qualifiant de « réclamation formulée... par M. H. Luande, membre du Parlement, président du Congrès des syndicats de l'Ouganda ». Tout en estimant que cette réclamation n'était pas valable parce que l'Ouganda n'avait pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (voir paragr. 112 et 113 ci-dessus), le gouvernement ne laissait pas entendre à ce moment que le Congrès des syndicats de l'Ouganda n'était pas une organisation syndicale dûment constituée. Dans sa lettre du 14 octobre 1966, par contre, le gouvernement déclare que le Congrès des syndicats de l'Ouganda, de même que la Confédération des syndicats de l'Ouganda ont été dissous le 23 août 1966, « à la suite d'une décision prise en commun par les syndicats affiliés; une nouvelle organisation fut alors fondée sous le nom de Congrès des travailleurs de l'Ouganda ». Le gouvernement affirme que l'organisation plaignante n'existe plus et que, par conséquent, sa plainte est irrecevable.
  7. 118. Une plainte peut être présentée en vertu de la procédure en vigueur par une organisation nationale de travailleurs ayant un intérêt direct à la question. A l'époque où la plainte a été présentée, à savoir le 19 juillet 1965, l'organisation plaignante existait réellement et valablement et elle avait le droit de formuler une plainte; c'est pourquoi le Comité a reçu cette plainte comme étant valablement présentée. Le gouvernement affirme maintenant que, du fait que l'organisation plaignante s'est dissoute le 23 août 1966, soit plus d'un an plus tard, la plainte devrait être traitée comme irrecevable.
  8. 119. Dans son premier rapport, le Comité déclarait qu'il ne serait pas conforme au but dans lequel a été instituée la procédure pour l'examen des plaintes relatives aux atteintes prétendument commises à l'exercice des droits syndicaux d'admettre que la dissolution ou la prétendue dissolution d'une organisation mette fin au droit de cette organisation d'invoquer ladite procédure. Cette règle s'applique, lorsqu'il y a dissolution involontaire, que cette dissolution ait lieu avant ou après la présentation d'une plainte. Alors qu'une dissolution purement volontaire ferait qu'une organisation cesse d'être compétente pour présenter une plainte à l'avenir, le Comité estime que, lorsqu'une organisation existante a présenté une plainte en bonne et due forme, sa dissolution subséquente, même volontaire, ne peut avoir aucun effet rétroactif sur la recevabilité de la plainte. Elle peut avoir des conséquences sur la question de savoir s'il y a encore lieu de poursuivre l'examen, mais dans le cas présent les allégations concernent une législation qui reste en vigueur, et l'organisation plaignante, avant sa dissolution, n'a fait aucune démarche auprès du B.I.T pour retirer sa plainte.
  9. 120. Dans ces conditions, le Comité estime que, la plainte ayant été valablement présentée par une organisation ayant compétence pour le faire, il doit, malgré la dissolution ultérieure de cette organisation dans des circonstances qui ne sont pas complètement claires, procéder à l'examen du cas afin de déterminer s'il reste quelques points que le Conseil d'administration doive examiner plus avant.

A. Allégations relatives à l'enregistrement des syndicats

A. Allégations relatives à l'enregistrement des syndicats
  1. 121. Les plaignants allèguent que la liberté syndicale est violée par l'article 5 (1) d) de la loi de 1965 sur les syndicats, qui dispose que le préposé à l'enregistrement des syndicats (greffier) doit refuser l'enregistrement d'un syndicat s'il est d'avis qu'un autre syndicat ou une autre association de travailleurs, enregistré en vertu de la loi, est « suffisamment représentatif ou qu'il est probable qu'il devienne suffisamment représentatif des intérêts à l'égard desquels la demande d'enregistrement est présentée ».
  2. 122. Le gouvernement déclare que l'expérience a montré que certains syndicats enregistrés ou certaines associations enregistrées de façon adéquate, représentant les intérêts des travailleurs dans le domaine pertinent, étaient menacés d'être évincés par d'autres syndicats qui cherchaient à étendre le recrutement de leurs membres et que, dans certains cas, des groupes dissidents s'étaient constitués. Le gouvernement affirme qu'il a introduit cette disposition, conformément à l'article 2 (1) de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, parce qu'il a le droit de protéger les travailleurs contre les actes d'ingérence des uns à l'égard des autres.
  3. 123. Il faut souligner tout d'abord que, lorsque des organisations de travailleurs sont en cause, l'article 2 (1) de ladite convention est destiné à protéger des organisations contre les organisations d'employeurs ou contre les agents ou membres de celles-ci, et non pas contre d'autres organisations de travailleurs ou contre les agents ou membres de ces dernières. La rivalité entre syndicats n'entre pas dans le champ de la convention.
  4. 124. Comme l'a relevé, dans un cas, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, une disposition donnant droit au « greffier » des syndicats de refuser l'enregistrement des syndicats, lorsqu'il est d'avis qu'un autre syndicat déjà enregistré est suffisamment représentatif du métier ou de la profession considéré, signifie que, dans certains cas, des salariés peuvent se voir refuser le droit de s'associer. La Commission d'experts a également déclaré, dans un autre cas, que, si les travailleurs peuvent avoir généralement avantage à éviter la multiplication du nombre des organisations syndicales, l'unité du mouvement syndical ne doit pas être imposée par une intervention de l'Etat par voie législative, une telle intervention allant à l'encontre de la règle selon laquelle les travailleurs ont le droit de constituer les organisations de leur choix et de s'y affilier (principe énoncé à l'article 2 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948) et doivent bénéficier du libre exercice du droit syndical (principe figurant à l'article 11 de ladite convention). Il semble que le pouvoir qui est donné au greffier de refuser l'enregistrement lorsqu'il est d'avis qu'une organisation déjà enregistrée est suffisamment représentative des intérêts en cause et, plus encore, son pouvoir de refuser l'enregistrement si, à son libre avis, il est simplement convaincu qu'une organisation existante deviendra probablement suffisamment représentative de ces intérêts pourrait être utilisé de façon à imposer l'unification du mouvement syndical par voie législative.
  5. 125. L'article 3 de la loi rend l'enregistrement obligatoire. La Commission d'experts a relevé que, quand, dans ces conditions, le refus d'enregistrement peut être motivé par l'existence d'une autre organisation dans la profession ou dans la région, cela peut revenir à l'exigence d'une autorisation préalable pour la constitution d'une organisation, contrairement au principe généralement accepté qui figure dans l'article 2 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Ces dispositions, déclare la Commission d'experts, comportent un risque d'ingérence des autorités chargées de procéder à l'enregistrement, ce qui ne semble pas compatible avec le principe contenu à l'article 8, paragraphe 2, de la convention, selon lequel la législation du pays ne devrait pas être de nature à compromettre, ni être appliquée de façon à compromettre, le respect du principe qui veut que les travailleurs aient le droit de constituer les organisations de leur choix sans autorisation préalable. Il est clair que les risques sont encore plus grands quand, comme c'est le cas en Ouganda, l'enregistrement peut être refusé non seulement parce qu'une organisation suffisamment représentative existe déjà, mais aussi parce que le greffier est d'avis « qu'il est probable qu'une organisation existante deviendra suffisamment représentative ».
  6. 126. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) d'attirer l'attention du gouvernement de l'Ouganda sur l'importance qu'il a toujours attachée aux principes généralement admis selon lesquels les travailleurs devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier sans autorisation préalable et sans intervention des autorités publiques, et selon lesquels la législation du pays ne devrait pas être de nature à porter atteinte, ni être appliquée de façon à porter atteinte, à l'exercice de ce droit;
    • b) d'exprimer l'opinion que les pouvoirs accordés au greffier des syndicats, aux termes de l'article 5 (1) d) de la loi de 1965 sur les syndicats, ne sont pas compatibles avec les principes généralement acceptés qui viennent d'être énoncés;
    • c) de suggérer au gouvernement d'envisager de modifier sa législation afin de donner plein effet aux principes énoncés à l'alinéa a) ci-dessus.
      • Allégations relatives à l'enregistrement des sections syndicales
    • 127. Les plaignants allèguent que la liberté syndicale est violée par l'article 10 (1) de la loi de 1965 concernant l'enregistrement des sections syndicales.
  7. 128. Le gouvernement déclare que des difficultés ont surgi autrefois lors de la détermination du nombre des sections syndicales et des membres de leurs organes directeurs et que, de ce fait, des sections syndicales de l'intérieur du pays ont paru agir indépendamment de tout contrôle de la centrale syndicale et ont commis des abus en percevant des cotisations sans tenir une comptabilité adéquate.
  8. 129. L'article 10 (1) de la loi dispose que le secrétaire d'un syndicat enregistré doit demander l'enregistrement de toute section nouvellement constituée, dans les vingt-huit jours. Cette nécessité d'enregistrer les sections, exigence établie par la législation de plusieurs pays, ne semble pas impliquer en soi une violation des droits syndicaux. Les plaignants n'ont donné aucune raison à l'appui de cette allégation.
  9. 130. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider que ces allégations n'appellent pas un examen plus approfondi.
    • Allégations relatives au contrôle de l'activité des syndicats
  10. 131. Les plaignants allèguent que l'article 23 (1) de la loi exige que les livres contenant les procès-verbaux des assemblées générales et ceux des séances du Comité exécutif puissent être examinés par le greffier ou par toute personne autorisée par lui pendant une heure au moins chaque jour, et ceci sans frais pour les intéressés. Le plaignant se plaint également des pouvoirs conférés au ministre en vertu de la partie IX de la loi qui l'autorise à enquêter sur les affaires des syndicats. Le plaignant fournit à ce propos le texte du mémoire publié en même temps que le projet de loi sur les syndicats, et il attire l'attention du Comité sur les déclarations relatives à la partie IX, qui sont les suivantes:
    • La partie IX contient des dispositions entièrement nouvelles. On admet généralement dans tous les pays que le seul moyen efficace pour empêcher les irrégularités dans la gestion des personnes morales de la nature des syndicats consiste à en confier la surveillance à un service gouvernemental. L'idée qu'on peut se fier aux membres du syndicat pour contrôler la gestion et prendre des mesures efficaces pour assurer leur protection est un anachronisme.
    • et
    • Le but de la partie IX du projet de loi est donc de donner au ministre compétence pour s'enquérir, par l'intermédiaire d'un enquêteur, des affaires d'un syndicat et pour prendre les mesures appropriées pour s'assurer que la gestion du syndicat s'effectue au mieux des intérêts des membres.
  11. 132. Le gouvernement déclare, au sujet de l'article 23 (1) de la loi, qu'il n'y avait précédemment pour les syndicats aucune obligation légale de conserver les procès-verbaux de leurs délibérations, et les membres, comme le greffier, n'avaient pas le droit d'en prendre connaissance pour s'assurer, si et quand ils jugeaient nécessaire, que les nominations et les démissions de permanents ainsi que les décisions prises sur des questions touchant non seulement aux intérêts des membres, mais aussi à l'économie du pays, étaient conformes à la constitution. La nouvelle loi fait obligation aux syndicats de conserver les procès-verbaux des délibérations des assemblées et donne aux membres, ainsi qu'au greffier, le droit de consulter ces procès-verbaux, afin que soient éliminés les difficultés que l'on rencontraient autrefois quand les procès-verbaux n'étaient pas conservés. De l'avis du gouvernement, l'article 23 (1) ne viole ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
  12. 133. En ce qui concerne les articles 53 à 59 (partie IX) de la loi, le gouvernement déclare qu'aux termes de la législation précédemment en vigueur il n'y avait aucune disposition permettant de contrôler les activités d'un syndicat. L'article 17 de l'ordonnance de 1952, abrogée, sur les syndicats n'autorisait le greffier à annuler l'enregistrement d'un syndicat qu'à la demande de celui-ci, lors de sa dissolution, ou que si le greffier était convaincu que le syndicat avait cessé d'exister; mais l'expérience a montré que l'article 17 ne suffisait pas à lui seul à empêcher les abus de pouvoirs des personnes ayant la direction des affaires syndicales. La disposition de la nouvelle loi donne pouvoir au ministre chargé des questions de travail de prendre des mesures efficaces, par voie d'inspection ou d'enquête, pour s'assurer que la gestion d'un syndicat se fait au mieux des intérêts des membres de celui-ci. Ces dispositions, affirme le gouvernement, sont en harmonie avec les articles 3 et 4 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
  13. 134. Avant d'examiner la nouvelle législation, il est indispensable de relever que l'ancien article 17, paragraphe 2, autorisait le greffier à annuler ou à suspendre l'enregistrement pour des motifs très divers: quand l'enregistrement avait été obtenu par fraude, fausse déclaration ou erreur; quand un objectif principal du syndicat ou de la constitution de celui-ci ou de son comité exécutif était illicite ou qu'un syndicat poursuivait des buts illicites; quand le syndicat avait volontairement, et après mise en garde du greffer, violé une disposition de l'ordonnance; quand les fonds du syndicat avaient été ou étaient utilisés de façon illicite ou dans un but illicite, ou encore pour un objectif non autorisé par l'ordonnance; quand la comptabilité du syndicat n'était pas tenue en conformité des dispositions de l'ordonnance, etc. De plus, l'article 48 de l'ordonnance permettait au greffier ou à toute personne autorisée par lui à prendre connaissance des livres comptables et de la liste des membres du syndicat à n'importe quel moment raisonnable, tandis que l'article 50 permettait au greffier, en dehors de toute autre disposition exigeant l'établissement de rapports financiers aux termes de la législation, de demander à un syndicat de soumettre des comptes détaillés pour n'importe quelle période et de fournir toute information que le greffier pourrait demander. L'article 6 de la nouvelle loi reprend en substance les dispositions de l'ancien article 17, mais actuellement, pour chacun des motifs énumérés, le greffier « doit » annuler l'enregistrement.
  14. 135. L'article 23 (1) de la loi de 1965 contient la disposition ci-après:
    • Les livres contenant les procès-verbaux des assemblées générales d'un syndicat enregistré et les procès-verbaux des séances de son comité exécutif devront être conservés au siège du syndicat et ils pourront être consultés par les membres ainsi que par le greffier et par toute personne autorisée à cette fin par le greffier pendant une heure au moins chaque jour, et cela sans aucun frais pour les intéressés; si le syndicat n'appose pas, à son siège, un avis précisant les heures où ses livres pourront être consultés, toute personne ayant le droit de prendre connaissance de ces documents aux termes dudit article pourra le faire immédiatement à sa demande.
  15. 136. Les dispositions contenues dans la partie IX de la loi de 1965 peuvent être résumées comme suit: l'article 53 donne compétence au ministre, « chaque fois qu'il l'estime nécessaire dans l'intérêt général », de requérir un syndicat de mettre à disposition n'importe lequel de ses livres ou documents pour examen; il peut imposer cette même obligation au syndicat ou l'inviter à fournir par écrit, à lui-même ou à son représentant autorisé, des informations ou explications précises, s'il estime:
    • a) que les affaires du syndicat sont conduites ou que les compétences de ses dirigeants sont exercées d'une façon préjudiciable pour un ou plusieurs membres du syndicat ou au détriment de ses intérêts ou de leurs intérêts en tant que membres du syndicat;
    • b) qu'un livre ou un document que le syndicat est tenu de lui envoyer, à lui-même ou à toute personne autorisée par lui aux termes de cet article, n'indique pas l'état exact des questions qu'il est censé traiter; ou
    • c) que les affaires du syndicat sont conduites d'une façon préjudiciable aux intérêts des membres.
      • L'article 53 fixe également les sanctions applicables pour toute inobservation des prescriptions ci-dessus.
      • L'article 54 donne pouvoir au ministre, sur la base du rapport établi par une personne autorisée par lui, de procéder aux enquêtes dont il est question à l'article 53, ou à la demande du greffier ou de six membres au moins du syndicat, de désigner un avocat pratiquant depuis un minimum de cinq ans pour enquêter sur les affaires du syndicat et lui faire rapport à ce sujet. L'article 55 donne pouvoir au ministre, aux fins de telles enquêtes, d'ordonner une enquête sur les affaires d'un autre syndicat ou d'une autre personne qui est ou a été, à un moment quelconque, en relation, sous n'importe quelle forme, avec le syndicat directement intéressé. L'article 56 dispose que les dirigeants et agents du syndicat ont le devoir de produire ces livres et documents et de fournir des informations à l'enquêteur, et il fixe les sanctions applicables en cas d'inobservation de ces prescriptions. L'article 57 dispose que l'enquêteur doit faire rapport au ministre.
    • 137. Aux termes de l'article 58 (1), le ministre peut, en raison d'informations obtenues aux termes de l'article 53 ou du rapport présenté par l'enquêteur:
    • a) déférer la question au procureur général; ou
    • b) ordonner au greffier d'annuler l'enregistrement d'un syndicat; ou
    • c) s'il estime que l'intérêt général l'exige, ordonner au greffier d'intenter une action contre un dirigeant ou un ancien dirigeant d'un syndicat ou contre toute autre personne afin de recouvrer des biens ou d'obtenir des dommages et intérêts auxquels une personne ou un syndicat enregistré aurait droit.
  16. 138. Indépendamment de ce qui précède, l'article 59, paragraphe 1, donne pouvoir au ministre, s'il lui semble qu'il y a des raisons valables pour le faire, de procéder à une enquête sur les membres d'un syndicat, soit par lui-même, soit en nommant un enquêteur à cette fin. Au cas où une personne ne fournirait pas des renseignements exacts comme l'exigent les paragraphes 2, 3 et 4 de cet article, le ministre peut, en vertu du paragraphe 5, ordonner au greffier d'annuler l'enregistrement du syndicat.
  17. 139. L'article 7 de la loi prévoit la possibilité de recourir devant la Cour suprême, si l'enregistrement d'un syndicat est annulé par le greffier pour une des raisons indiquées à l'article 6. Par contre, l'article 6 ne fait aucune référence à l'annulation d'un enregistrement qui aurait été ordonnée par le ministre conformément à l'article 58, paragraphe 1 b), ou à l'article 59, paragraphe 5. La loi ne contient pas non plus de dispositions prévoyant un recours devant la Cour suprême contre l'annulation d'un enregistrement ordonnée par le ministre. L'article 9, paragraphe 1, fait interdiction aux syndicats non enregistrés d'exercer une activité.
  18. 140. Les dispositions analysées dans les paragraphes précédents soulèvent bien des questions en rapport avec le degré de contrôle exercé sur les syndicats et avec la possibilité de voir l'annulation de l'enregistrement par décision administrative équivaloir à une dissolution.
  19. 141. La Commission d'experts de l'O.I.T pour l'application des conventions et recommandations a fait remarquer que, pour autant que des mesures destinées à assurer le contrôle extérieur des syndicats ne sont utilisées qu'en vue de prévenir des abus et de protéger les syndiqués eux-mêmes contre une mauvaise gestion de leurs fonds, on peut concevoir leur utilité, notamment dans les pays où le mouvement syndical commence à peine à s'organiser. Toutefois il apparaît, de l'avis de la Commission, que des dispositions de cette sorte risquent, dans certains cas, de permettre une intervention des autorités publiques dans la gestion des syndicats et que cette intervention peut être de nature à limiter leur droit de s'administrer librement, contrairement à l'article 3, paragraphe 2, de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. On peut considérer néanmoins, toujours d'après la Commission, qu'il existe certaines garanties contre de telles interventions, lorsque le fonctionnaire choisi pour effectuer ces contrôles jouit d'une certaine indépendance à l'égard des autorités administratives et s'il est lui-même soumis au contrôle des autorités judiciaires; en revanche, il semble que ces garanties n'existent pas toujours lorsque ce contrôle est exercé par le ministre du Travail ou par ses services, ou encore lorsqu'il n'existe pas de contrôle judiciaire.
  20. 142. Le Comité de la liberté syndicale a relevé que s'il existe effectivement, dans maints pays, des dispositions législatives prévoyant la présentation aux autorités compétentes de rapports financiers établis dans la forme prescrite par la législation et la communication de renseignements complémentaires sur les points que ces rapports n'éclairent pas, de telles dispositions ne devraient en aucun cas violer celles qui figurent à l'article 3 de la convention (no 87), où il est précisé que les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'organiser leur gestion et leur activité comme bon leur semble, de sorte que les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal.
  21. 143. Dans le cas présent, le greffier dispose de pouvoirs de contrôle étendus en vertu de l'article 6 de la loi, ce qui lui permet, sous réserve d'un recours à la Cour suprême, d'annuler l'enregistrement d'un syndicat s'il acquiert la conviction, entre autres choses, que l'enregistrement a été obtenu par des moyens illicites, que l'un des buts du syndicat est illégal, que la constitution du syndicat ou de son comité directeur est illégale, que les fonds syndicaux sont ou ont été dépensés de façon illégale ou consacrés à un but non autorisé par la loi, ou encore qu'un syndicat a enfreint délibérément, après avoir reçu un avertissement, une disposition quelconque de la loi. Le greffier est également habilité à déterminer si c'est le cas, puisque les pouvoirs qu'il détient l'autorisent à contrôler tous les procès-verbaux en vertu de l'article 23 (1), à vérifier les rapports financiers que les syndicats sont tenus de lui fournir en vertu de l'article 39, à examiner en tout temps les comptes du syndicat en vertu de l'article 40 et à réclamer, en vertu de l'article 42, des comptes supplémentaires lorsqu'il désire élucider certains points. Ces dispositions représentent, en fait de contrôle des syndicats, le maximum de ce qui est exigé généralement par la législation de la plupart des pays. Or les pouvoirs conférés par les articles 53 à 59 vont bien au-delà. Ils sont exercés non point par une personne indépendante, mais par le ministre lui-même; non soumis à un contrôle judiciaire, ils ne se limitent même pas à la recherche d'activités délictueuses ou d'infractions à la loi; ils confèrent au ministre le droit d'enquêter à son entière discrétion sur les affaires du syndicat pour la simple raison qu'il considère que cela est dans l'intérêt général (art. 53 (1)) et il est seul juge, ce droit n'étant limité par aucune disposition juridique, de dire si les intérêts d'un ou de plusieurs membres sont lésés (art. 53 (2) a)). Enfin, dans l'exercice de tous ces pouvoirs, le ministre peut, également à son entière discrétion et sans aucun droit de recours aux tribunaux, ordonner l'annulation de l'enregistrement d'un syndicat, ce qui revient, en vertu de l'article 9 de la loi, à le dissoudre.
  22. 144. A de nombreuses occasions dans le passé, le Comité a insisté sur l'importance qu'il attache au principe généralement admis qui est énoncé à l'article 4 de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, à savoir que les organisations de travailleurs et d'employeurs ne doivent pas être sujettes à dissolution par voie administrative.
  23. 145. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il a toujours attachée aux principes, généralement admis, selon lesquels les organisations de travailleurs et d'employeurs devraient avoir le droit d'organiser leur gestion et leur activité sans aucune intervention des autorités publiques qui soit de nature à limiter ce droit ou à entraver l'exercice légal, étant entendu d'autre part que de telles organisations ne devraient pas être sujettes à dissolution par voie administrative;
    • b) d'exprimer l'avis que les dispositions des articles 53 à 59 de la loi ougandaise de 1965 sur les syndicats ne sont pas conformes aux principes précités;
    • c) d'appeler l'attention du gouvernement sur les considérations faisant l'objet des paragraphes 141 à 144 ci-dessus et de lui suggérer de réexaminer les articles 53 à 59 de la loi à la lumière de ces considérations, en vue de déterminer les amendements qui pourraient sembler souhaitables pour donner effet aux principes généralement admis qui sont énoncés à l'alinéa a) ci-dessus.
      • Allégations relatives au paiement d'amendes infligées à des responsables syndicaux
    • 146. Il est allégué que les droits syndicaux sont violés par l'article 36 (1) de la loi de 1965, lequel interdit l'utilisation des fonds syndicaux pour payer des amendes infligées par un tribunal compétent, à qui que ce soit, à l'exception de celles qui frappent le syndicat lui-même.
  24. 147. Le gouvernement déclare que l'article en question reproduit une disposition qui figurait à l'article 44 (1) de l'ordonnance de 1952, abrogée, et qui n'avait jamais donné lieu à aucune plainte.
  25. 148. Il s'agit là d'une disposition que l'on trouve dans la législation de nombreux pays. De l'avis du Comité, on ne saurait considérer comme anormale une disposition interdisant à un syndicat de payer une amende infligée à l'un de ses responsables qui aurait commis personnellement un acte illégal ou omis personnellement de remplir une obligation légale; or comme les plaignants n'ont nullement prouvé que cette disposition était appliquée en Ouganda d'une manière différente qu'ailleurs, le Comité estime qu'ils n'ont pas fourni de preuve suffisante à l'appui de leur allégation selon laquelle ladite disposition enfreint les droits syndicaux.
  26. 149. En conséquence, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de ces allégations.
    • Allégations relatives aux piquets de grève
  27. 150. Les plaignants s'en prennent à l'article 44 (1) b) de la loi de 1965, qui interdit aux grévistes de poster des piquets en un nombre tel ou d'une façon telle qu'ils puissent intimider une personne quelconque dans le bâtiment ou sur le lieu de travail visé, empêcher d'y accéder ou d'en sortir ou encore porter atteinte à l'ordre public.
  28. 151. Le gouvernement conteste que cette disposition viole les droits syndicaux et il déclare qu'elle reproduit purement et simplement la teneur de l'article 52 b) de l'ordonnance de 1952, abrogée, sur les syndicats.
  29. 152. Dans certains cas précédents, le Comité a insisté sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel les piquets de grève agissant conformément à la loi ne devraient faire l'objet d'aucune intervention de la part des autorités publiques.
  30. 153. L'article 44 (1) a) de la loi de 1965 autorise la pose de piquets de grève pacifiques, en prévision ou à la suite d'un différend du travail, dans les mêmes termes que ceux qui ont été adoptés dans les territoires non métropolitains du Royaume-Uni. Les limites fixées à ce sujet par l'article 44 (1) b) de la loi ougandaise de 1965 sont donc les mêmes que dans les territoires en question. De l'avis du Comité, les plaignants n'ont nullement prouvé que la situation à cet égard est différente en Ouganda de ce qu'elle est généralement ailleurs, ni que la disposition critiquée entrave l'exercice des droits syndicaux.
  31. 154. En conséquence, le Comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 155. Pour ce qui est de l'ensemble du cas, le Comité recommande au Conseil d'administration:
    • a) de décider qu'il n'y a pas lieu, pour les raisons exposées aux paragraphes 129, 148 et 153 ci-dessus, de poursuivre l'examen des allégations relatives à l'enregistrement de sections syndicales, au paiement d'amendes infligées à des responsables syndicaux, ni à la pose de piquets de grève;
    • b) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives à l'enregistrement des syndicats:
    • i) d'appeler l'attention du gouvernement de l'Ouganda sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée aux principes, généralement admis, selon lesquels les travailleurs devraient avoir le droit de former des organisations de leur choix et de s'y affilier, sans autorisation préalable et sans intervention de la part des autorités publiques, étant entendu que la législation nationale ne doit pas être conçue ou appliquée de façon à entraver l'exercice de ce droit;
    • ii) d'exprimer l'avis que les pouvoirs conférés au greffier préposé à l'enregistrement des syndicats par l'article 5 (1) d) de la loi de 1965 en la matière ne sont pas compatibles avec les principes généralement admis dont il est question ci-dessus;
    • iii) de suggérer au gouvernement d'envisager la possibilité de modifier la législation nationale afin de donner plein effet aux principes énoncés au sous-alinéa i) ci-dessus;
    • c) de décider, en ce qui concerne les allégations relatives au contrôle des activités des syndicats:
    • i) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance qu'il a toujours attachée aux principes, généralement admis, selon lesquels les organisations d'employeurs et de travailleurs devraient avoir le droit d'organiser leur administration et leur activité sans intervention des autorités publiques qui soit de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal, étant entendu d'autre part que de telles organisations ne devraient pas être sujettes à dissolution par voie administrative;
    • ii) d'exprimer l'avis que les dispositions des articles 53 à 59 de la loi ougandaise de 1965 sur les syndicats ne sont pas conformes aux principes susmentionnés;
    • iii) d'appeler l'attention du gouvernement sur les considérations faisant l'objet des paragraphes 141 à 144 ci-dessus et de lui suggérer de réexaminer les articles 53 à 59 de la loi à la lumière de ces considérations, en vue de déterminer les amendements qui seraient souhaitables pour donner effet aux principes généralement admis qui sont énoncés au sous-alinéa i) ci-dessus;
    • d) de prier le gouvernement de bien vouloir tenir le Conseil d'administration informé de toute évolution de la situation.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer